Intervention de Philippe Bonnecarrere

Commission des affaires européennes — Réunion du 27 novembre 2014 à 10h05
Politique commerciale — Proposition de résolution européenne relative au traité de libre-échange transatlantique ttip - examen du rapport de m. michel billout

Photo de Philippe BonnecarrerePhilippe Bonnecarrere :

Je remercie le rapporteur pour son analyse technique qui permet d'objectiver le sujet. Je ne partage pas quelques points fondamentaux de son raisonnement, même si je me range aux mêmes conclusions. Je souligne à mon tour que Paris est historiquement la première place mondiale de l'arbitrage et que mener un assaut contre l'arbitrage serait contreproductif pour la place de Paris. Par ailleurs, cela ne me choque pas qu'un État puisse être exposé à l'arbitrage contre une entreprise. Je rappelle à ce sujet que le Conseil d'État avait il y a quelques années consacré son rapport annuel à l'arbitrage en encourageant les autorités publiques à y recourir. J'entends le problème de principe que cela peut constituer au regard de la souveraineté mais il importe que l'État soit loyal avec les acteurs économiques et puisse de ce fait être attaqué sur ses décisions. L'image de l'État français est déjà assez négative pour que nous refusions de soumettre ses décisions à arbitrage.

Se posent à mes yeux deux questions fondamentales. D'une part, je m'inquiète de l'équilibre économique entre les deux partenaires du TTIP : est-ce que les entreprises européennes oseront attaquer la première puissance économique mondiale ? Souvenons-nous qu'Airbus avait remporté l'appel d'offres lancé par les États-Unis et que Boeing ayant attaqué cette décision a fini par l'emporter. Airbus a fait le choix politique de ne pas contester cette décision émanant de la première puissance mondiale.

D'autre part, je suspecte une forme de déséquilibre juridique entre l'Union européenne et les États-Unis. Les sanctions infligées par les États-Unis à la BNP m'ont marqué : même si la BNP a sans doute commis des fautes, elle a été clouée au pilori et l'amende faramineuse payée par tous les Français. L'Union européenne pourrait-elle sanctionner financièrement une banque américaine dans les mêmes proportions ? Monsieur le Président, la commission a-t-elle déjà travaillé sur cette question de l'égalité des armes et des sanctions entre les deux rives de l'Atlantique ? Je me souviens d'une sanction importante de Microsoft au titre d'infractions aux règles de la concurrence en Europe mais je me demande si d'autres types d'infractions, comme par exemple la fraude fiscale, pourraient être sanctionnés et à quelle hauteur. Au bout du raisonnement, je pense donc moi aussi que l'Union européenne ne pourrait valablement accepter l'ISDS dans l'accord transatlantique que si un équilibre économique et juridique était établi entre les partenaires de la négociation.

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