Notre ordre du jour appelle l'examen du rapport de notre collègue Michel Billout sur la proposition de résolution européenne qu'il a lui-même présentée avec plusieurs collègues sur le règlement des différends entre investisseurs et États dans les projets d'accords commerciaux entre l'Union européenne, le Canada et les États-Unis.
Nous sommes tous conscients de l'importance de ces accords commerciaux qui auront un impact majeur sur les conditions des échanges économiques entre l'Europe et le continent américain. La question du mode de règlement des différends est en particulier un sujet sensible qui suscite beaucoup de réactions.
L'accord avec le Canada est bien avancé. Les négociations sur le traité transatlantique ont, elles, débuté plus récemment et devraient se poursuivre encore quelque temps. En toute hypothèse, il est indispensable qu'un contrôle démocratique s'exerce sur le déroulement des négociations. Le Sénat doit y prendre toute sa part. Le Bundestag, le Bundesrat et le Parlement européen sont mieux organisés que nous. Il faut corriger cette situation !
Je rappelle que nous avons décidé de créer un groupe de suivi en commun avec la commission des affaires économiques. Nous désignerons les membres de ce groupe de suivi en troisième point de notre ordre du jour.
La parole est à notre rapporteur.
Nous sommes aujourd'hui chargés d'examiner la proposition de résolution européenne n° 75 sur le règlement des différends entre investisseurs et États dans les projets d'accords commerciaux entre l'Union européenne, le Canada et les États-Unis, que j'ai déposée avec les membres de mon groupe le 30 octobre dernier.
Ce texte a un double objet : d'une part, il dénonce l'opacité dans laquelle se déroulent aussi bien les négociations menées par l'Union européenne avec le Canada pour un « Accord économique et commercial global » (CETA), que celles ouvertes en juin 2013 avec les États-Unis en vue de l'établissement d'un « Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement » (TTIP) ; d'autre part, le texte que nous examinons s'oppose radicalement à tout projet d'accord qui prévoirait un mécanisme de règlement des différends entre un investisseur et un État. Nous abordons ainsi les négociations transatlantiques sous un angle évidemment partiel, mais je crois que cet angle est emblématique de la menace fondamentale que ces négociations peuvent représenter pour nos choix de société et de notre ordre institutionnel.
L'enjeu de la transparence est prioritaire. Dans le contexte de crise que traverse l'Europe, crise économique mais aussi politique, avec la montée des populismes, nous devons considérer comme un impératif politique de rendre plus transparentes les négociations commerciales menées par la Commission européenne. Et particulièrement celles menées avec le Canada et les États-Unis, compte tenu de leurs enjeux.
Il n'est pas encore certain que ces accords soient de nature mixte, c'est-à-dire qu'ils touchent à des domaines de compétences de l'UE comme des États membres. Ceci a son importance, dans la mesure où un accord mixte doit non seulement obtenir l'aval du Conseil et du Parlement européen mais aussi être ratifié par chaque État membre. La Commission européenne a annoncé fin octobre qu'elle allait saisir la Cour de justice de l'Union européenne pour déterminer si l'accord conclu mi-octobre avec Singapour, qui comporte lui aussi un volet investissements, est ou non un accord mixte. La décision de la Cour sera bien sûr éclairante pour ce qui concerne les accords en cours de négociation avec le Canada et les États-Unis.
En tout état de cause, il est essentiel, du point de vue des opinions publiques européennes, que la Commission européenne ne donne pas l'impression de cultiver le secret sur les négociations qu'elle conduit pour le compte du Conseil. Cela ne fait que nourrir les inquiétudes. Il est vrai que rien dans les traités ne l'oblige à informer les parlements nationaux, mais ce serait prendre un grand risque politique que de les ignorer jusqu'au moment de la ratification.
Par ailleurs, le contrôle démocratique ne peut s'exercer ainsi : « voici l'accord négocié, c'est à prendre ou à laisser ». C'est pourtant le scénario en cours sur l'accord Canada : sa publication fin septembre nous a permis de découvrir un accord -en anglais, bien sûr- de 1 600 pages et la Commission européenne, qui a agi de bonne foi, sur le fondement du mandat du Conseil, présente la négociation comme close.
Quant au partenariat transatlantique, c'est sous la pression de l'opinion publique que le Conseil s'est résolu, le mois dernier, à publier le mandat de négociation qu'il avait confié quinze mois plus tôt à la Commission européenne. Mais cela ne suffira pas à rassurer les opinions : l'effort de transparence doit être poursuivi tout au long des négociations. Notre secrétaire d'État chargé du commerce extérieur semble en être convaincu. Et la nouvelle Commissaire au commerce y semble plus attentive.
Parmi les sujets d'inquiétude qu'alimentent ces négociations, le règlement des différends entre investisseurs et État s'est imposé dans l'opinion ces derniers mois.
De quoi s'agit-il ?
C'est un dispositif d'arbitrage privé auquel un investisseur peut recourir si l'État dans lequel il a investi ne respecte pas les règles de protection des investissements fixées par le traité ; il est inspiré de l'arbitrage commercial auquel recourent les entreprises en cas de contentieux contractuel et qu'elles apprécient pour sa rapidité, sa confidentialité et son autonomie par rapport à la justice nationale de chacune des parties au différend. Ce mécanisme, que désigne l'acronyme anglais ISDS (pour Investment State Dispute Settlement), accompagne déjà de nombreux accords de protection des investissements : ainsi, les États membres de l'UE sont aujourd'hui parties à 1 300 traités incluant ce mécanisme. Notre Parlement lui-même a ratifié près de 100 accords de protection des investissements comportant une telle clause, afin de donner à nos investisseurs les moyens de faire valoir leurs droits dans des pays où l'État de droit est encore fragile : il s'agit plutôt de pays du Sud, mais nous avons aussi de tels accords avec la Corée, la Chine, et même avec certains États d'Europe de l'Est. Ce n'est donc pas une nouveauté et cela peut répondre au besoin des investisseurs de se couvrir contre le risque de subir de la part de l'État où ils ont investi, soit un traitement discriminatoire, soit une expropriation. Dédommager un investisseur qui serait victime d'expropriation directe ne fait pas débat ; c'est plus délicat quand il s'agit d'expropriation indirecte, notion très floue qui donne lieu à diverses interprétations selon les arbitres.
Avec le développement des investissements à l'étranger, le recours au règlement des différends s'est banalisé. En plus de présenter des défauts en termes de transparence, l'arbitrage d'investissement a donné lieu à quelques abus retentissants : plusieurs entreprises ont pu ainsi obtenir des dédommagements de la part d'États qui avaient adopté des mesures qui leur portaient préjudice. Ainsi, Petroleum a pu gagner 1,7 milliard de dollars contre l'Équateur, soit près de 2 % du PIB... L'Australie s'est trouvée mise en cause par Philip Morris pour avoir choisi de rendre neutres les paquets de cigarettes, l'Allemagne est attaquée pour sa décision de renoncer à l'énergie nucléaire. Autre exemple, français celui-là, Veolia a engagé un recours contre l'Égypte en 2012. Encore en cours, la plainte de Veolia a été déposée au nom du traité d'investissement conclu entre la France et l'Égypte. La « nouvelle loi sur le travail » adoptée en Égypte contreviendrait aux engagements pris dans le cadre du partenariat public-privé signé avec la ville d'Alexandrie pour le traitement des déchets. Beaucoup d'exemples sont apparus depuis une quinzaine d'années. Même s'ils constituent une minorité des différends traités par un mécanisme d'arbitrage, leur proportion ne cesse d'augmenter.
Les États sont ainsi menacés de sanctions financières massives pour des décisions d'ordre sanitaire, social ou environnemental ; cette pression exercée sur eux risque de les dissuader de légiférer.
Pourquoi donc inclure un tel dispositif dans les accords CETA et TTIP ? Nos partenaires d'outre-Atlantique sont intéressés par une harmonisation des règles de protection des investissements dans toute l'UE et cherchent à assurer leur mise en oeuvre dans tous les États membres, quelle que soit la fiabilité du système judiciaire de chacun de ces États. D'ailleurs, les USA ont, comme nous, signé des accords d'investissements avec les nouveaux États membres, qui prévoient un règlement privé des différends investisseur/État. Les États-Unis espèrent aussi, en insérant un ISDS dans le partenariat transatlantique comme dans son équivalent transpacifique, imposer un tel mécanisme à la Chine.
Côté européen, il faut d'abord relever que la conclusion d'accords d'investissement constitue une compétence récente de l'UE, que lui a conféré le traité de Lisbonne. L'objectif d'un accord d'investissement comprenant un ISDS est bien sûr d'encourager les investissements croisés avec les États-Unis et le Canada pour renforcer l'attractivité de l'UE ; c'est aussi de faciliter la résolution des litiges pour les entreprises européennes car le système judiciaire outre-Atlantique est coûteux et complexe à appréhender du fait de la structure fédérale. Enfin, l'UE entend, à l'occasion de ces accords, moderniser la protection des investissements et l'arbitrage associé pour « infuser » ce modèle quelque peu amélioré à l'échelle mondiale. La Commission fait ainsi valoir que l'accord avec le Canada présente des avancées par apport aux ISDS qu'on trouve dans les accords bilatéraux existants:
- moins d'ambiguïté interprétative, à la fois grâce à un meilleur encadrement des notions de traitement juste et équitable et d'expropriation indirecte, et grâce à l'obligation faite aux arbitres de se conformer à l'interprétation des clauses du traité par ses signataires ;
- plus de transparence de la procédure d'arbitrage ;
- une plus grande impartialité des arbitres grâce à une meilleure prévention des conflits d'intérêts, au respect d'un code de conduite et à la constitution d'une liste d'arbitres agréés par les parties au traité ;
- un encadrement du coût des litiges, et la prise en charge des frais par le plaignant...
J'entends bien tout cela mais, au terme de la douzaine d'auditions que j'ai menées pour préparer ce rapport, je persiste à penser qu'il nous faut marquer une opposition de principe à un tel système d'arbitrage privé des différends État/investisseurs dans l'accord UE/USA.
Un tel système est inutile entre des États de droit bien établis: le niveau des investissements croisés UE/USA en est la preuve. Il est aussi discriminatoire puisque le recours à l'arbitrage est ouvert aux entreprises étrangères mais pas aux entreprises domestiques, et que les PME, qui ont rarement les moyens d'y consacrer 7 millions d'euros, n'en bénéficieront pas. Il est en plus particulièrement dangereux de prévoir un tel système avec les États-Unis, vu la puissance de leurs multinationales et le goût américain pour le contentieux.
Mais surtout il est contraire au principe de démocratie et au respect de l'État de droit. Voulons-nous avoir à indemniser des sociétés étrangères pour le prix de nos choix démocratiques ? Voulons-nous promouvoir la justice privée ? Nous ne devons pas marchander la démocratie, ce serait renoncer à notre ordre institutionnel, à notre modèle de société, et finalement à notre identité. D'ailleurs, le président Juncker ne s'y est pas trompé en mandatant Frans Timmermans, précisément au titre de ses compétences relatives à l'État de droit, pour se pencher sur ce sujet, lequel est aujourd'hui gelé dans les négociations TTIP dans l'attente des conclusions que la Commission européenne doit bientôt tirer de la consultation qu'elle a menée à ce propos.
Ces motifs d'opposition sont suffisamment graves à mes yeux pour prendre le risque de reconsidérer aujourd'hui la question de l'ISDS dans l'accord Canada comme dans le partenariat transatlantique, sous peine de rencontrer des difficultés au moment de la ratification de ces accords. Pour cela, la France doit construire des alliances au sein du Conseil, alors même que la moitié des États membres vient d'écrire à la Commission européenne pour soutenir le maintien du dispositif d'arbitrage dans les accords CETA et TTIP. Il ne sera donc pas simple de construire un front inverse, même si l'on peut compter déjà sur l'Autriche et le Luxembourg. La Chancelière allemande n'a pas publiquement pris position sur ce sujet mais son ministre de l'économie, Sigmar Gabriel, a été le premier à déclarer sa ferme opposition à la mise en place d'un tel mécanisme d'arbitrage privé. Et le Parlement européen devrait être un allié de poids : il a d'ailleurs déjà rejeté un accord négocié par l'UE en 2012, l'accord anti-contrefaçon (ACTA). Et de nombreuses voix s'élèvent sur tous les bancs du Parlement européen pour s'inquiéter de l'ISDS.
Si je vous propose de tenir cette position de principe, sa déclinaison concrète ne peut, selon, moi, être la même pour l'accord avec le Canada et celui envisagé avec les États-Unis, du fait de l'état d'avancement différent de ces deux négociations : la Commission européenne considère avoir achevé son travail de négociation avec le Canada. Restent à effectuer en 2015 le toilettage juridique du texte et sa traduction par les juristes-consultes, avant qu'il ne soit soumis au Conseil et au Parlement européen, voire aux États membres s'il s'agit d'un accord mixte. Sans doute ne nous sommes-nous pas mobilisés assez tôt sur l'accord avec le Canada, mais il n'est pas trop tard, d'autant qu'il a bien fallu attendre de connaître le projet d'accord final pour disposer d'éléments substantiels. En tout état de cause, je crois utile de purger la question de l'arbitrage privé État/investisseur aujourd'hui plutôt que de passer en force en déclarant le sujet clos, au risque qu'un seul parlement refuse de ratifier le traité et le voue à l'échec.
Je n'ignore pas les acquis de la négociation, qui sont importants pour l'UE, en matière de brevets pharmaceutiques, de protection des indications géographiques, d'accès des entreprises européennes aux marchés publics fédéraux et subfédéraux... Je propose donc d'utiliser les mois qui viennent pour faire évoluer le texte à la marge dans son volet Investissement pour assurer à la fois le droit des États à réglementer (aujourd'hui seulement reconnu en préambule du CETA) et la protection des investisseurs. Car les règles envisagées dans l'accord laissent encore place aux abus : le texte indique que « dans de rares cas », des mesures d'intérêt public peuvent constituer une expropriation indirecte ; il tient compte des « attentes légitimes » des investisseurs ; il menace notre politique industrielle en empêchant notamment de réserver aux Européens une part au capital des sociétés américaines ou canadiennes investisseurs sur notre sol; enfin, pour ce qui concerne la procédure d'arbitrage privé, il oblige les arbitres à déclarer leurs intérêts mais il n'interdit pas explicitement qu'ils aient un lien avec une partie au différend ; et le mécanisme d'appel est seulement envisagé pour plus tard mais pas créé...
Je vous propose donc de plaider pour remédier à ces défauts de l'ISDS. Des efforts restent à faire en matière de transparence des procédures, le secret des affaires restant opposable. Il faut aussi aller plus loin pour prévenir les conflits d'intérêt parmi les arbitres. Enfin, un mécanisme d'appel doit être effectivement mis en place. À défaut, l'UE pourrait explorer la solution d'un règlement des différends d'État à État, inspiré de l'Organe de règlement des différends de l'OMC, avec un système d'appel devant un tribunal permanent. Il est essentiel, si on maintient l'ISDS dans l'accord Canada, de l'améliorer autant que possible car de nombreuses multinationales américaines ont une filiale au Canada donc risquent de l'utiliser. On peut d'ailleurs raisonner pareillement pour l'accord UE/Singapour, tout juste paraphé.
Si nous n'y parvenons pas, le plus sage serait de renoncer au volet Investissements du CETA. Quel serait le prix à payer ? Peut-être un prix politique, en termes d'amitié avec le Canada, où le Président de la République s'est récemment rendu ; mais sans doute pas plus. En effet, l'équilibre de la négociation n'en serait pas affecté ; et le Canada n'a pas plus intérêt que nous à rouvrir la négociation d'un accord qu'il présente à ses concitoyens comme très favorable à leurs intérêts, en raison des concessions commerciales obtenues, par exemple en termes de contingents d'exportation bovine. Il se pourrait même que l'abandon du volet Investissements de l'accord retire aussi une épine du pied du Canada, confronté aux mêmes inquiétudes dans son opinion publique.
Concernant la négociation avec les États-Unis, le jeu est plus ouvert, d'autant que le congrès américain n'a pas encore voté la Trade Promotion Authority qui permettrait au président Obama de conclure l'accord. C'est pourquoi je vous propose d'écarter par principe l'idée de l'arbitrage privé, avant même d'ouvrir ce chapitre de la négociation avec les Américains. J'insiste aussi sur la nécessité que les règles de protection des investissements qui seraient adoptées dans le TTIP reconnaissent explicitement la possibilité pour l'Europe de développer ses politiques propres, y compris en matière industrielle, et de préserver ses acquis, notamment en matière sociale, environnementale, et sanitaire. Sans doute les États-Unis sauront-ils se ménager de nombreuses exceptions eux aussi, au nom de leur sécurité nationale, par exemple.
Plus largement, en ce qui concerne l'ensemble de la politique commerciale, je suggère de ne plus recourir systématiquement à un ISDS mais d'examiner pour chaque projet d'accord les meilleures conditions pour le règlement des différends. D'autant que d'autres États seront plus méfiants à l'avenir à l'égard de l'arbitrage privé au vu des exemples négatifs qui se sont multipliés et auxquels j'ai fait allusion dans mon exposé. Ainsi l'Australie, après sa mésaventure avec la société Philip Morris a déjà fait savoir qu'elle ne signerait plus de traité incluant un tel mécanisme.
Je propose enfin que le Gouvernement remette au Parlement un rapport annuel qui donne une vision d'ensemble des objectifs et des principes qui guident la politique commerciale et d'investissement de l'UE et de la France.
Je vous soumets donc une proposition de résolution européenne amendée en ce sens, mettant l'accent d'abord sur la transparence, et proposant ensuite ce positionnement ferme mais différencié sur le recours à l'arbitrage privé dans les accords CETA et TTIP. Merci pour votre attention.
Merci au rapporteur de s'être penché sur cette question et de nous ouvrir une réflexion qui va nous occuper quelque temps. Apparemment, les accords négociés avec le Canada et les États-Unis devraient plutôt être qualifiés d'accords mixtes, mais, en tout état de cause, leur implication sociétale appelle un nécessaire contrôle des parlements nationaux, même s'il n'y a pas d'obligation écrite en la matière.
Après avoir entendu l'exposé de ce rapport, il apparaît qu'un accord prévoyant le recours à l'arbitrage privé est largement irrationnel dans des États de droit. La seule certitude est que le travail des cabinets d'avocats américains va se développer. J'adhère à la proposition qui nous est faite de nous inspirer de l'Organe de règlement des différends de l'OMC qui fonctionne plutôt bien et offre la garantie d'un appel. En matière de transparence de l'arbitrage, je conviens également que le secret des affaires ne doit pas servir de paravent. Enfin, la demande qui est faite d'un rapport gouvernemental sur la politique en matière d'accords commerciaux et d'investissements me semble nécessaire. Il ne s'agit pas d'un rapport de plus. Je me souviens avoir plaidé auprès de Gérard Larcher, alors président de la commission des affaires économiques, pour un débat au Parlement sur les négociations commerciales multilatérales menées à l'OMC car nous autres sénateurs sommes interpellés sur le terrain à ce sujet.
Je remercie le rapporteur pour ce texte qui me paraît particulièrement important, dans la mesure où l'ISDS constitue pour moi un point dur dans la négociation transatlantique, surtout quand on connaît la culture anglo-saxonne en matière de contentieux. Je m'interroge toutefois sur notre marge de manoeuvre concernant l'accord CETA. Je me suis rendu au Canada en septembre, et j'ai été impressionné par le pouvoir et l'autonomie des provinces, entre lesquelles le libre-échange n'est même pas complètement assuré. Je me demande d'ailleurs comment s'organise la négociation côté canadien et si l'accord est qualifié de mixte là-bas. Je souhaiterais également avoir quelques éléments de calendrier sur la négociation du partenariat transatlantique.
Je suis totalement en phase avec le texte qui nous est proposé. Permettre le recours à l'arbitrage privé donne des garanties aux investisseurs envers des États qui sont pourtant des États de droit : dans la façon même où nous abordons la négociation transatlantique, nous sommes déjà en train de négocier l'État de droit, ce qui est pour moi inacceptable. Je suis particulièrement inquiet quant à la possibilité pour l'Union européenne de tenir les choix politiques qui sont les siens. Par exemple, la reprise économique que l'on constate aux États-Unis repose largement sur l'exploitation du gaz de schiste, exploitation dans laquelle l'Union européenne a choisi de ne pas s'engager aujourd'hui. Si nous étions exposés à un arbitrage privé sur un tel sujet, je crains un tsunami.
En même temps, il me semble qu'existe un lien pour les entreprises européennes entre la possibilité de recours à un mécanisme de règlement des différends investisseurs/États et l'universalité des lois américaines.
Je maîtrise moins le dossier que d'autres de mes collègues, mais je voudrais faire observer que, en matière d'arbitrage, Paris est une place importante. La finance représente la deuxième économie parisienne et Paris a déjà souffert du transfert d'Euronext vers le Royaume-Uni. Il ne faudrait pas que l'arbitrage nous échappe aussi. J'approuve complètement la rédaction de l'alinéa 17 de la résolution : il ne faut pas annihiler la compétence arbitrale mais bien l'entourer de garanties. Nous devons rester vigilants particulièrement du fait que la puissance de certaines entreprises américaines l'emporte sur certains États d'Europe. Enfin, je crois aussi qu'il serait profitable de pouvoir disposer d'un rapport annuel qui se fasse l'écho, notamment, des cas d'arbitrage.
La multiplication des accords commerciaux et des accords de protection des investissements doit nous interroger sur le modèle européen. Je suis personnellement partisan d'un fédéralisme européen, car le fédéralisme protège en fait les compétences des États en assurant une répartition claire de leurs compétences entre les différents niveaux. Or, actuellement, la Commission européenne se voit confier un mandat unique de négociations alors même que le mode de désignation des commissaires soulève des interrogations en termes de légitimité. Notre collègue Daniel Raoul a raison de souligner le pouvoir des provinces canadiennes mais j'insiste aussi sur le pouvoir des États et des grandes agglomérations au Canada. Depuis l'ouverture des négociations avec l'Union européenne il y a quelques années, le Canada a effectué une consultation préalable de tous ses différents niveaux d'administration. Un aller-retour avec les provinces a même été opéré juste avant la publication de l'accord consolidé. Un tel travail en amont n'a pas été effectué chez nous.
L'Union européenne n'évolue pas vers le fédéralisme mais vers le centralisme. Cela doit nous amener à réfléchir ! L'Union européenne intègre-t-elle la capacité d'intervention que doivent garder les États ? Ainsi, comment justifier que l'Union européenne refuse, sauf éventuellement en matière d'exception culturelle, la mise en place de crédits d'impôt sectoriels, c'est-à-dire verticaux et non pas horizontaux, alors même que la réindustrialisation américaine repose largement sur de tels crédits d'impôt ? L'Union européenne s'auto-condamne.
Nous devons aussi mesurer les conséquences d'un accord transatlantique sur les ressources propres : l'Union européenne n'en a déjà presque plus au sens étroit, à savoir droits de douane et taxes sur le sucre. La négociation du TTIP et du CETA va encore les réduire et accroître en conséquence le pouvoir des gros États contributeurs nets au budget européen. Certes, il y a la velléité de créer une taxe sur les transactions financières, mais son montant sera faible et elle ne couvrirait que les États parties à la coopération renforcée. Réfléchissons à ce qui est en train d'advenir dans l'Union européenne : on renationalise les budgets en même temps qu'on centralise les décisions industrielles et commerciales. C'est de la folie !
Je remercie le rapporteur pour son analyse technique qui permet d'objectiver le sujet. Je ne partage pas quelques points fondamentaux de son raisonnement, même si je me range aux mêmes conclusions. Je souligne à mon tour que Paris est historiquement la première place mondiale de l'arbitrage et que mener un assaut contre l'arbitrage serait contreproductif pour la place de Paris. Par ailleurs, cela ne me choque pas qu'un État puisse être exposé à l'arbitrage contre une entreprise. Je rappelle à ce sujet que le Conseil d'État avait il y a quelques années consacré son rapport annuel à l'arbitrage en encourageant les autorités publiques à y recourir. J'entends le problème de principe que cela peut constituer au regard de la souveraineté mais il importe que l'État soit loyal avec les acteurs économiques et puisse de ce fait être attaqué sur ses décisions. L'image de l'État français est déjà assez négative pour que nous refusions de soumettre ses décisions à arbitrage.
Se posent à mes yeux deux questions fondamentales. D'une part, je m'inquiète de l'équilibre économique entre les deux partenaires du TTIP : est-ce que les entreprises européennes oseront attaquer la première puissance économique mondiale ? Souvenons-nous qu'Airbus avait remporté l'appel d'offres lancé par les États-Unis et que Boeing ayant attaqué cette décision a fini par l'emporter. Airbus a fait le choix politique de ne pas contester cette décision émanant de la première puissance mondiale.
D'autre part, je suspecte une forme de déséquilibre juridique entre l'Union européenne et les États-Unis. Les sanctions infligées par les États-Unis à la BNP m'ont marqué : même si la BNP a sans doute commis des fautes, elle a été clouée au pilori et l'amende faramineuse payée par tous les Français. L'Union européenne pourrait-elle sanctionner financièrement une banque américaine dans les mêmes proportions ? Monsieur le Président, la commission a-t-elle déjà travaillé sur cette question de l'égalité des armes et des sanctions entre les deux rives de l'Atlantique ? Je me souviens d'une sanction importante de Microsoft au titre d'infractions aux règles de la concurrence en Europe mais je me demande si d'autres types d'infractions, comme par exemple la fraude fiscale, pourraient être sanctionnés et à quelle hauteur. Au bout du raisonnement, je pense donc moi aussi que l'Union européenne ne pourrait valablement accepter l'ISDS dans l'accord transatlantique que si un équilibre économique et juridique était établi entre les partenaires de la négociation.
Le recours à l'arbitrage privé dans le TTIP et le CETA soulève effectivement des questions de légitimité et de souveraineté. Le débat sur la transparence est très important. Il faut en finir avec l'impression d'une négociation en cercle fermé. Le Gouvernement français a pris fin octobre des décisions importantes en la matière. Je sais que des députés participent au comité de suivi stratégique mis en place par le ministre en charge du commerce extérieur ; j'ignore si ce comité compte également des sénateurs parmi ses membres. À l'échelon européen, la Commission a également fait des annonces décisives hier, promettant une meilleure information des parlementaires européens. Je relève tout de même que la publication de documents américains ne sera possible que sous réserve de l'accord des États-Unis, ce qui représente tout de même une difficulté. Sur l'arbitrage, il me semble que le rapporteur n'a pas remis en cause la notion même, mais le processus spécifique qui place États et entreprises sur un même pied et risque de dissuader toute législation. Pourrait-on par exemple envisager que les entreprises américaines attaquent l'interdiction de la fracturation hydraulique ? Je crois que nous devons laisser absolument la justice dans la sphère publique. Par ailleurs, est-il prévu d'informer la Représentation nationale des négociations de l'accord et de lui soumettre in fine cet accord ?
Je remercie le rapporteur de nous amener à réfléchir sur ce sujet important pour tous les domaines, y compris l'Internet, la culture... Je m'interroge toutefois sur l'impact que peut avoir une telle résolution sur un traité déjà conclu comme celui avec le Canada.
J'ai présidé jusqu'à récemment un organisme de prospection des investissements internationaux dans ma région, et j'ai pu constater la grande difficulté que rencontre notre pays à attirer des investisseurs. Tous les critères d'une implantation sont passés au crible par les investisseurs et la protection des investissements joue un rôle fondamental. Je remercie le rapporteur d'avoir posé le problème mais nous ne devons pas l'aborder à la hussarde car il est extrêmement important pour nos régions, notre pays et l'Union européenne qui ont besoin d'investissements internationaux. Les entreprises qui investissent à l'étranger prennent des risques ; il n'est donc pas choquant qu'elles soient dédommagées si elles sont confrontées à des décisions étatiques qui contrecarrent leurs objectifs initiaux. Ce mécanisme ne me choque pas s'il est prévu dès le départ, ce qui n'empêche pas effectivement de mieux encadrer le recours à l'arbitrage.
En réponse à toutes ces interventions intéressantes, j'insiste sur le fait qu'à mes yeux, introduire un tel mécanisme de justice privée entre des pays du Nord dotés d'institutions judiciaires solides représenterait un mauvais signal à l'égard du citoyen. J'ai bien conscience que la proposition de résolution européenne ne traite pas du fond de l'accord.
L'arbitrage d'investissements est né en 1965 mais il a longtemps été éclipsé par l'arbitrage commercial, dont Paris est effectivement une place majeure. Le secrétaire général de la Cour internationale d'arbitrage, que j'ai rencontré, m'a confirmé que Paris était plus spécialisée en arbitrage commercial qu'en arbitrage d'investissements. Tous les arbitres internationaux ne sont pas nécessairement armés pour traiter des différends entreprises/États. En tout cas, à l'intention de M. Pozzo di Borgo, je confirme que l'objectif du texte que je vous soumets n'est absolument pas d'annihiler la place d'arbitrage que constitue Paris.
Je ne suis pas nécessairement opposé à des accords de protection des investissements qui incluent des ISDS avec les États du Sud mais il me semble que la solution d'un mécanisme interétatique de résolution des conflits inspiré de l'Organe de règlement des différends de l'OMC est moins problématique et risque moins de dissuader les entreprises de légiférer. Nous devons prêter particulièrement attention à l'accord transatlantique dans la mesure où nous avons compris que, s'il était conclu, il deviendrait le maître étalon pour d'autres traités. C'est pourquoi il faut se préoccuper de près des questions de procédure, sans remettre en cause l'arbitrage. Peut-être les États-Unis devraient-ils également faire très attention à l'ISDS.
Je reviens sur la nécessité de la transparence et, comme MM. Gattolin et Bonnecarrère, j'insiste sur l'importance que nous soyons informés. Et je partage complètement la position exprimée par M. Leconte.
Concernant notre marge de manoeuvre à l'égard du projet de traité CETA, nous avons examiné les choses de près et il nous semble qu'il n'est pas impossible de faire évoluer le texte. La direction générale du commerce de la Commission européenne soutient que la négociation est close, ce qui ne peut manquer de nous interroger au regard de la légitimité démocratique des négociateurs. Le paraphe lui-même de l'accord engage le négociateur à faire son possible pour que soit ratifié l'accord mais ne constitue pas une obligation de bonne fin : c'est ce que nous a formellement indiqué M. Carl, ancien directeur général de la DG commerce. Quel rôle jouent les parlements Européen et nationaux dans ce cadre ? Je pense que ce sont des arguments dont certains pourraient s'emparer pour mettre l'Europe par terre. Nous devons donc tenter de revoir le traité à la marge, surtout que l'investissement ne m'apparaît pas comme la clef de voûte de l'accord CETA et pourrait d'ailleurs même faire l'objet d'un accord séparé. C'est pourquoi nous devons proposer des améliorations substantielles, même s'il est peu probable qu'un mécanisme d'appel soit mis en place. Notre résolution vise à ce que la France tire la sonnette d'alarme, même si la moitié des États au Conseil viennent d'adresser une lettre à la Commission pour maintenir l'ISDS dans l'accord transatlantique. Peut-être sont-ils motivés par le souci d'attirer des investissements, mais je ne suis pas sûr que ce soit un critère déterminant. M. Pierre Defraigne, chef de cabinet de l'ancien commissaire européen en charge du commerce Pascal Lamy, nous a même encouragés à nous opposer fermement à tout ISDS.
Concernant le pouvoir des provinces canadiennes et la nature mixte ou non de l'accord de ce côté-là de l'Atlantique, j'avoue ne pas pouvoir vous renseigner dans l'immédiat.
Aux interrogations qui ont été exprimées au sujet du calendrier de négociations du TTIP, je pourrais répondre en indiquant que, selon moi, la négociation va encore durer quelques années, même si la majorité républicaine au Congrès semble vouloir l'accélérer.
En écho aux propos de M. Gattolin, je conviens que tout ceci doit nous amener à nous interroger sur le comportement de l'Union européenne par rapport aux États membres. Nous ne pouvons attendre d'avoir la copie finale de ces accords commerciaux pour avoir le droit de nous en préoccuper. Les consultations de la Commission sont également un exercice très particulier qui soulève des questions : disposer de 90 minutes pour prendre connaissance du questionnaire et y répondre, est-ce suffisant ? La consultation sur l'ISDS a reçu 150 000 réponses malgré ces conditions de mise en oeuvre peu satisfaisantes.
Je reconnais avoir quelques désaccords avec M. Bonnecarrère, ce qui est tout à fait normal, mais j'insiste sur le fait que je remets moins en cause l'arbitrage entre sociétés qu'entre sociétés et États. Sur les deux questions soulevées par notre collègue, il m'apparaît que seule la transparence permettrait d'être fixé. Je dois avouer que j'ai également été choqué par les sanctions infligées à la BNP, même si je ne suis pas un fervent défenseur des banques.
Nous allons procéder maintenant à l'examen de la résolution européenne.
Je propose dans l'alinéa 13 de distinguer entre la transparence du processus de négociation et la transparence sur l'impact de l'accord.
Effectivement, cette distinction est importante et justifie l'alinéa 11.
La formulation de cet alinéa 11 ne me semble pas assez ferme puisque le Gouvernement français n'a jamais fourni l'étude réclamée sur l'impact sectoriel du TTIP pour la France.
Nous pourrions alors compléter l'alinéa 11 pour insister sur le fait que cette étude réclamée en 2013 n'a toujours pas été adressée au parlement.
Permettez-moi par ailleurs de vous soumettre deux petits aménagements au texte qui vous a été distribué, que les événements de ces dernières 48 heures m'amènent à proposer.
La Commission européenne a adopté avant-hier une communication définissant de nouvelles règles sur l'accès aux documents du TTIP, comme l'a évoqué M. Leconte : tous les textes de négociation que l'Union européenne partage déjà avec les États membres et le Parlement seront rendus publics, sous réserve de l'accord explicite des États-Unis pour ce qui concerne toute publication de documents « américains » ou « communs ». La Commission est également prête à partager avec tous les eurodéputés des documents qui sont aujourd'hui d'accès restreint, en vertu de certaines règles pour garantir la confidentialité de l'information fournie. Je pense qu'il serait utile que le Gouvernement nous assure à nous, parlementaires nationaux, le même degré de publicité, et vous suggère donc d'ajouter à cette fin un nouvel alinéa après l'alinéa 13.
Il me semble que nous irions trop loin en proposant de renoncer complètement au volet consacré à la protection des investissements dans l'accord CETA.
Je rappelle quand même que l'option de la renonciation n'est qu'une option par défaut, si nous n'arrivons pas à obtenir les améliorations importantes que nous avons identifiées et que nous demandons.
Sur les conditions d'impartialité des arbitres, la mention d'un critère spécifique n'est pas satisfaisante. Il y a bien d'autres considérations à prendre en compte pour assurer l'impartialité des arbitres.
En effet. Nous pouvons sans dommage nous en tenir à une formulation plus générale.
Je me demandais s'il ne serait pas plus léger de remplacer « tout mécanisme de règlement des différends en matière d'investissements avec le Canada » par « ce mécanisme ».
Je crains que cela nuise à la clarté de l'alinéa et que cela crée une confusion avec l'Organe de règlement des différends de l'OMC.
Je souhaite aussi ajouter un nouvel alinéa. J'ai appris dernièrement que les dispositions de l'accord UE-Singapour, dont le chapitre relatif à la protection des investissements a été paraphé mi-octobre mais dont on parle moins, sont très proches de celles contenues dans l'accord Canada. On me signale juste certaines différences, notamment dans les secteurs totalement ou partiellement exemptés, comme l'immobilier notamment, sujet très sensible pour la Cité-État de Singapour. Ces dispositions pourraient utilement être exploitées par des filiales de multinationales américaines à Singapour, et il y en a de nombreuses. Je propose donc d'y faire référence en ajoutant un alinéa qui invite notre Gouvernement à adopter la même attitude sur cet accord UE-Singapour.
Enfin, sur la suggestion du président Bizet, je voudrais soumettre deux autres modifications au texte qui vous a été distribué.
La première vise à insister sur la nécessité d'obtenir des États-Unis la reconnaissance de la politique européenne de valorisation des produits agricoles et alimentaires de qualité, et plus spécifiquement la reconnaissance de nos indications géographiques protégées.
J'insiste en effet sur ce sujet très important pour la valorisation des filières. Il concerne aussi bien le camembert de Normandie que le pruneau d'Agen...
La seconde modification tend à rétablir une forme de symétrie dans nos propositions concernant le dossier Canada et l'accord avec les États-Unis : il s'agit donc de proposer dans l'accord transatlantique le recours à un mécanisme de règlement interétatique des différends en matière d'investissements, inspiré de l'Organe de règlement des différends de l'OMC, ou, à défaut, de demander l'abandon de tout mécanisme de règlement des différends.
L'ORD fonctionne en fait sur le même principe d'arbitrage mais le plaignant comme le défenseur sont des États. L'État devient en quelque sorte avocat de l'entreprise plaignante.
En outre, l'ORD offre la possibilité de faire appel devant un tribunal permanent.
La commission adopte à l'unanimité le rapport de M. Michel Billout et la proposition de résolution européenne dans la rédaction suivante :
Le Sénat,
Vu l'article 88-4 de la Constitution,
Vu le rapport préliminaire de la Commission européenne du 18 juillet 2014 sur la consultation publique au sujet du règlement des différends entre investisseurs et États (ISDS) dans le cadre de l'accord de partenariat transatlantique (TTIP),
Vu la version consolidée du projet d'accord économique et commercial global négocié entre l'Union européenne et le Canada publiée par la Commission européenne le 26 septembre 2014,
Vu le mandat de négociation de l'accord de partenariat transatlantique du 17 juin 2013 publié le 9 octobre 2014,
Considérant que la Constitution, dans son préambule et à son article 3, consacre les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie ; qu'elle précise, à son article premier, que la France est une République « démocratique et sociale » ;
Considérant que les négociations menées en vue d'un accord économique et commercial global avec le Canada (CETA) et d'un partenariat transatlantique avec les États-Unis (TTIP) sont menées sans que soient pleinement mis en oeuvre les principes d'ouverture et de transparence posés à l'article 15 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et, par voie de conséquence, sans qu'ait pu être assuré un contrôle démocratique suffisant tant à l'échelon européen qu'à l'échelon national ;
Considérant qu'il est prévu d'inclure dans les accords tant avec le Canada qu'avec les États-Unis des règles de protection des investissements assorties d'un mécanisme de règlement des différends entre États et investisseurs par l'arbitrage (ISDS) ;
Considérant que l'introduction de telles dispositions risquerait de porter atteinte à la capacité de l'Union européenne et des États membres à légiférer, particulièrement dans les domaines sociaux, sanitaires et environnementaux, en les exposant à devoir verser des dédommagements substantiels aux investisseurs qui s'estimeraient lésés par de nouvelles mesures ;
Considérant qu'aux termes des articles 207 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et 21 du traité sur l'Union européenne, la politique commerciale commune doit être menée dans le respect des objectifs de l'action extérieure de l'Union européenne et donc promouvoir un ordre multilatéral respectueux de la démocratie et de l'État de droit ;
Rappelle que sa résolution n° 164 du 9 juin 2013 invitait le Gouvernement à fournir au Parlement français une étude d'impact qui ne lui a toujours pas été adressée et qui lui permettrait d'apprécier, par secteur d'activité, les effets pour la France de différents scénarios de négociation du partenariat transatlantique ;
Invite le Gouvernement :
à agir auprès des institutions européennes pour mettre fin au manque de transparence caractérisant les négociations des accords envisagés entre l'Union européenne et le Canada, d'une part, et entre l'Union européenne et les États-Unis, d'autre part, lesquelles, compte tenu de leurs enjeux, doivent impérativement donner lieu à l'information nécessaire au contrôle démocratique ;
à permettre aux parlements nationaux d'avoir un accès aux documents de négociation qui soit identique à celui offert au Parlement européen ;
à associer étroitement les deux chambres du Parlement aux travaux du Conseil sur ces négociations ;
Appelle à une révision des chapitres 10 (investissements) et 33 (règlement des différends) du projet d'accord négocié avec le Canada, pour :
garantir juridiquement que le droit des États à réglementer ne puisse être limité, même au nom des « attentes légitimes » des investisseurs, et qu'en aucun cas, une mesure protégeant un objectif légitime d'intérêt public ne puisse donner lieu à compensation au nom de son impact économique sur l'investisseur, sans quoi il serait préférable de renoncer au volet consacré à la protection des investissements dans l'accord global négocié avec le Canada ;
modifier la procédure arbitrale afin d'assurer la pleine transparence des débats et la publicité des actes, l'indépendance et l'impartialité des arbitres, ainsi que la mise en place effective d'un mécanisme d'appel de la décision arbitrale devant un tribunal indépendant ;
à défaut, envisager le recours à un mécanisme de règlement interétatique des différends en matière d'investissements, inspiré de l'Organe de règlement des différends de l'Organisation mondiale du commerce, voire renoncer à tout mécanisme de règlement des différends en matière d'investissements avec le Canada ;
Constate que le chapitre relatif à la protection des investissements de l'accord négocié entre l'Union européenne et Singapour comprend des dispositions largement analogues à celles prévues dans l'accord négocié avec le Canada et invite en conséquence le Gouvernement à tenir la même position au Conseil concernant ces deux accords ;
Juge nécessaire que l'accord en cours de négociation avec les États-Unis reconnaisse explicitement la possibilité pour l'Union européenne et les États membres de préserver leurs acquis, notamment en matière sociale, environnementale, et sanitaire et de développer leurs politiques propres, y compris en matière industrielle et pour la protection des indications géographiques et autres signes de qualité des produits agricoles et alimentaires ;
Plaide, s'agissant du projet d'accord en cours de négociation entre l'Union européenne et les États-Unis, pour envisager le recours à un mécanisme de règlement interétatique des différends en matière d'investissements, inspiré de l'Organe de règlement des différends de l'Organisation mondiale du commerce, ou, à défaut, pour retirer de ce projet d'accord tout mécanisme d'arbitrage privé pour régler les différends entre investisseurs et États ;
Invite le Gouvernement à garantir le principe de démocratie dans tout projet d'accord de protection des investissements et à refuser d'y insérer systématiquement un mécanisme de règlement des différends investisseur/État ;
Je vous rappelle que cette proposition de résolution européenne va être envoyée à la commission compétente au fond. Pour revenir sur notre débat, je dois reconnaître que l'Union européenne s'auto-condamne effectivement. J'entends d'ailleurs évoquer cette question lors de la rencontre que le président du Sénat et moi-même aurons avec le président Juncker, sous deux aspects : d'une part, nous nous interrogeons sur le fait que la concurrence soit une compétence exclusive qui est entièrement laissée aux mains de la Commission européenne ; d'autre part, la réciprocité doit absolument présider à notre politique commerciale et les accords bilatéraux, si nous devons y recourir, ne doivent pas être négociés en opposition avec l'esprit du multilatéralisme. L'extraterritorialité des lois américaines constitue un vrai sujet, sur lequel pourra se pencher le groupe de travail que nous allons constituer avec la commission des affaires économiques sur le traité transatlantique. Pourquoi ne pas envisager un parallélisme en instaurant une extraterritorialité des règles européennes ?
Je conviens en tout cas qu'il est difficile de se heurter à la première économie mondiale, ce qui plaide à mon sens pour la solution interétatique de type ORD. Enfin, s'agissant de la possibilité pour l'Europe d'intervenir à l'égard des banques américaines, nous aurons l'occasion d'aborder cette question avec la Banque centrale européenne quand nous nous y rendrons.
Nous allons maintenant entendre le rapport de notre collègue Robert Navarro sur la proposition de résolution européenne qu'il a lui-même déposée sur l'expression des parlements nationaux lors du renouvellement de la Commission européenne.
La procédure de désignation de la Commission européenne est aujourd'hui achevée. La Commission Juncker a été approuvée par le Parlement européen et investie par le Conseil européen.
Il est exact que cette procédure, bien que fort longue, n'associe pas les parlements nationaux. C'est l'objet de la proposition de résolution européenne, dont nous allons débattre, de le prévoir. Bien sûr, une association éventuelle des parlements nationaux ne pourrait être envisagée qu'à l'occasion du prochain renouvellement de la Commission, c'est-à-dire en 2019.
Je donne la parole à notre rapporteur.
Je rappelle tout d'abord que le mandat de la Commission sortante a pris fin le 31 octobre 2014. La nouvelle Commission a pris ses fonctions le 1er novembre 2014 pour un mandat de cinq ans.
Elle reste composée de 28 membres, y compris son président et le Haut Représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. En mai 2013, le Conseil européen a en effet rétabli la composition initiale d'un membre par État membre. Cette décision a répondu aux engagements du Conseil européen de décembre 2008 prenant acte du rejet du traité de Lisbonne par le référendum irlandais.
La procédure de renouvellement de la Commission européenne comprend plusieurs étapes.
Tout d'abord, le président de la Commission est« élu » par le Parlement européen sur proposition du Conseil européen. Celui-ci statue à la majorité qualifiée. Il doit proposer au Parlement européen un candidat à la fonction de président de la Commission « en tenant compte des élections au Parlement européen, et après avoir procédé aux consultations appropriées » (art. 17 du TUE). Le candidat est élu par le Parlement à la majorité des membres qui le composent.
Le choix du Conseil a été fait le 27 juin 2014. Il s'est en définitive porté sur le candidat, M. Jean-Claude Juncker, qui avait été désigné par le parti politique qui est arrivé en tête des élections européennes de mai 2014.
L'élection du président de la Commission européenne par le Parlement européen constitue l'une des innovations importantes du traité de Lisbonne. Le 15 juillet 2014, le Parlement a élu Jean-Claude Juncker président de la prochaine Commission européenne avec 422 voix pour. Au total, 422 députés ont voté en faveur de M. Juncker, 250 contre, et 47 se sont abstenus.
Ensuite, le Conseil devait adopter, d'un commun accord avec le président de la Commission élu, la liste des autres personnalités qu'il proposait de nommer membres de la Commission jusqu'au 31 octobre 2019.
Le 30 août 2014, le Conseil européen, en accord avec le nouveau président de la Commission européenne, a élu Mme Federica Mogherini Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité.
Sur la base des propositions des États membres, le Conseil de l'Union, toujours en accord avec le nouveau président, a adopté, le 5 septembre 2014, la liste des membres de la Commission.
Cette liste a ensuite été soumise au Parlement européen. Bien que, selon les traités, le Parlement européen donne (ou refuse) son approbation à la Commission « en tant que collège », en pratique, le Parlement européen auditionne individuellement les commissaires pressentis et peut obtenir des modifications de la liste.
Un cycle d'auditions s'est déroulé du 29 septembre au 7 octobre 2014. Il a été précédé de l'envoi de questionnaires aux commissaires pressentis. Au total, seule Mme Alenka Bratusek, la commissaire slovène, a été récusée. À la suite de son audition, le commissaire hongrois, M. Tibor Navracsics, a vu son portefeuille modifié avec le retrait du thème de la citoyenneté.
Après l'audition des commissaires par les commissions compétentes, le Parlement a approuvé la nouvelle Commission le 22 octobre. 423 députés ont voté pour l'approbation, 209 contre, et 67 se sont abstenus. Sur la base de cette approbation, la Commission a été investie formellement par le Conseil européen statuant à la majorité qualifiée lors de sa session des 23 et 24 octobre.
Les délais de mise en place de la nouvelle Commission sont assez longs : cinq mois depuis les élections européennes. Or, force est de constater que, durant ce délai, les parlements nationaux n'ont en aucune manière été associés à la procédure. En particulier, les deux assemblées n'ont pas été consultées avant que le candidat français ne soit proposé.
Cette situation ne me paraît pas satisfaisante pour au moins trois motifs.
L'importance pour le bon fonctionnement de l'Union du contrôle exercé par les parlements nationaux est reconnue par les traités européens.
Ils doivent en particulier veiller au respect du principe de subsidiarité susceptible d'être mis en cause par la législation européenne. Parallèlement, les parlements nationaux ont développé un dialogue politique direct avec la Commission européenne. Notre commission joue elle-même un rôle actif dans ce dialogue politique.
Sur ces bases, la coopération entre parlements nationaux s'est considérablement développée. Le protocole sur le rôle des parlements nationaux a en particulier officialisé le rôle de la Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires, la COSAC, créée en 1989, en matière d'échange d'informations et de bonnes pratiques entre les parlements.
En outre, la vie politique européenne et les vies politiques nationales sont désormais étroitement imbriquées.
De ce fait, l'action de la Commission européenne a des incidences importantes sur les vies politiques nationales. Son monopole de l'initiative législative confère une position de force à la Commission européenne pour inspirer les législations européennes, en particulier les directives qui doivent ensuite être transposées dans le droit national, bien souvent à travers une loi votée par le parlement.
Le traité de Lisbonne a par ailleurs reconnu à la Commission des compétences pour adopter des actes délégués et des actes d'exécution.
Parallèlement à son rôle dans la législation européenne, la Commission européenne joue un grand rôle dans la surveillance budgétaire et la coordination des politiques économiques.
Enfin, les dernières élections européennes ont été marquées par une forte poussée des partis eurosceptiques ou europhobes.
Avant même ces élections, ce climat de défiance avait été mesuré dans les enquêtes d'opinion. Selon l'enquête Eurobaromètre de l'automne 2013, deux tiers des Européens pensaient que leur voix ne comptait pas dans l'Union européenne (59 % en France). Dans plusieurs États membres, le pessimisme l'emportait sur le futur de l'Union européenne. En France, 56 % des personnes interrogées faisaient part de leur pessimisme.
Cette défiance de beaucoup de nos concitoyens à l'égard de la construction européenne rend plus que jamais nécessaire de renforcer les procédures pour asseoir la légitimité démocratique des institutions européennes. À l'évidence, les parlements nationaux peuvent jouer un rôle essentiel dans ce sens en contribuant à rapprocher les institutions européennes des citoyens. Le rapport établi au nom de notre commission par notre ancien collègue Pierre Bernard-Reymond sur l'avenir de la construction européenne l'avait parfaitement souligné.
Sans alourdir une procédure déjà compliquée, la proposition de résolution européenne qui vous est soumise préconise deux voies pour associer les parlements nationaux :
- d'une part, les parlements nationaux pourraient se voir reconnaître la faculté de s'exprimer collectivement lors du renouvellement de la Commission européenne ; cette expression collective pourrait s'appuyer en particulier sur la Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires (COSAC) et sur la Conférence interparlementaire prévue à l'article 13 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG). Les parlements nationaux pourraient ainsi avoir un échange et faire connaître ensuite leurs priorités tout à la fois sur le profil des futurs commissaires et sur les orientations que la nouvelle Commission sera appelée à mettre en oeuvre ;
- d'autre part et dans le même esprit, à l'échelon national, il conviendrait de prévoir une consultation des organes compétents des deux assemblées, à savoir les commissions des affaires européennes, avant de proposer le candidat français.
Je rappelle que depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, les commissions permanentes se prononcent sur certaines nominations et, le cas échéant, peuvent s'y opposer. En vertu de la loi du 23 juillet 2010, les commissions des lois sont par exemple appelées à se prononcer sur la nomination du Défenseur des droits, et de certains membres du Conseil supérieur de la magistrature et du Conseil constitutionnel. Les commissions en charge de la culture émettent un avis sur la nomination du président du Conseil supérieur de l'audiovisuel.
Compte tenu du rôle important que le commissaire français est appelé à jouer au sein du collège des commissaires, il paraît nécessaire que, dans le même esprit, une procédure de consultation des organes compétents des deux assemblées soit prévue avant sa nomination. Cette procédure permettrait au Parlement, notamment dans le cadre d'une audition du candidat, d'évaluer son parcours et son adéquation au poste de commissaire, et d'avoir un échange sur les priorités qu'il entend mettre en oeuvre dans ses nouvelles fonctions.
Voilà les motifs de cette proposition de résolution européenne que je vous propose d'adopter sans modification.
Je suis fédéraliste. La Commission européenne défend l'intérêt général européen. Les commissaires ne doivent pas représenter leur pays. Autant il me paraît important que l'Union européenne se démocratise, autant je considère que c'est au Parlement européen d'auditionner les commissaires pressentis.
Le processus de désignation de la Commission qui vient de s'achever a marqué un progrès considérable pour la démocratie. Le parti socialiste européen a fait admettre que le parti arrivé en tête des élections européennes devait désigner le candidat au poste de président de la Commission européenne. C'est une erreur de dire que le processus n'est pas démocratique. Ce discours a induit en erreur les électeurs qui n'ont pas compris que leur vote aurait une influence très grande sur le choix final.
Le maintien d'un commissaire par État membre me paraît par ailleurs constituer un manque de respect pour ce que doit être l'Union européenne.
Pour ces motifs, je ne peux pas être d'accord sur le fond avec cette proposition de résolution européenne.
Je suis aussi fédéraliste, mais je considère qu'il faut créer un Sénat européen composé de représentants des parlements nationaux. Il existe une déconnexion entre le travail important qui est réalisé par le Parlement européen et l'opinion publique. Cette proposition de résolution européenne me paraît constituer un bon moyen de mieux intégrer les parlements nationaux dans le fonctionnement de l'Union européenne.
Le processus qui vient de s'achever me paraît marquer un vrai progrès démocratique. Mais je suis choquée du refus par le Parlement européen de la Commissaire slovène pressentie Mme Alenka Bratusek. Cette situation aurait pu être évitée si le parlement slovène s'était exprimé au préalable. La Slovénie n'aurait pas alors choisi une candidate qui avait démissionné de son poste de Premier ministre et qui n'avait plus de légitimité au Parlement.
Ce texte me paraît aller dans le bon sens. Il est en effet nécessaire de mieux communiquer vis-à-vis de l'opinion publique. La création d'un Sénat européen serait une bonne chose.
Je suis un peu revenu du fédéralisme. Je ne peux souscrire à l'idée d'une consultation des organes compétents des deux assemblées sur le commissaire français pressenti. En outre, une expression collective des parlements nationaux sur la désignation de la Commission européenne allongerait considérablement les délais.
Tout cela me semble manquer de visibilité. Nous sommes dans une société où tout le monde se mêle de tout. Le pouvoir est partout mais la responsabilité nulle part !
Je suis embarrassé par cette proposition de résolution européenne. Dans le principe, je suis favorable à un renforcement des pouvoirs du Parlement européen. Le processus qui vient de s'achever va dans le bon sens. Mais je souhaite que le Parlement européen dispose de plus de pouvoirs en matière budgétaire. Cependant, je considère que les prérogatives de la Commission pour prendre des actes délégués et des actes d'exécution devraient être réduites. Je crains que le texte qui nous est proposé ne renforce le poids de la Commission européenne qui n'est pas composée d'élus. Dans ces conditions, je m'abstiendrai.
Une expression collective des Parlements nationaux sur la désignation de la Commission européenne constituerait une bonne préfiguration d'un futur Sénat européen. Il est nécessaire de faire évoluer le rôle de la COSAC dans ce sens.
Cette proposition de résolution européenne est une réponse à ce que nous entendons tous dans nos départements respectifs. L'Union européenne est le moyen d'apporter les réponses aux difficultés de l'heure. Elle peut apporter une plus-value pour chaque État membre mais nous devons veiller à améliorer son fonctionnement. La procédure suivie pour la désignation de la Commission Juncker est un premier pas mais il ne faut pas en rester là. Le parlement doit être consulté sur le choix de celui qui, qu'on le veuille ou non, représentera l'influence française au sein de l'institution européenne. À défaut, la désignation du commissaire français constitue le pur fait du prince.
Je suis pragmatique. Il faut rendre l'Union européenne plus performante et permettre qu'elle soit mieux perçue par les citoyens. Il ne faut pas laisser le terrain aux démagogues !
À l'issue de ce débat, la commission a adopté par dix voix pour, une voix contre et deux abstentions, le rapport et la proposition de résolution européenne, sans modification.
Le Sénat,
Vu l'article 88-4 de la Constitution,
Vu la lettre de consultation du Conseil de l'Union européenne au Parlement européen datée du 8 septembre 2014 (document PE 538.253/CPG),
Vu les articles 10 et 12 du traité sur l'Union européenne et le protocole n° 1 annexé à ce traité,
Vu l'article 13 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union européenne,
Considérant le rôle de la Commission européenne dans l'élaboration de la législation européenne et l'adoption de ses mesures d'exécution ;
Considérant également le rôle de la Commission européenne dans la surveillance budgétaire et la coordination des politiques économiques ;
Estimant qu'au vu de ce rôle, les parlements nationaux devraient disposer d'une possibilité d'expression lors des renouvellements de la Commission européenne ;
Invite le Gouvernement :
- à agir auprès des institutions européennes pour permettre, à l'avenir, une expression collective des parlements nationaux au moment de la formation d'une nouvelle Commission européenne ;
Notre ordre du jour appelle maintenant la désignation des membres de trois groupes de travail.
Le groupe sur la propriété intellectuelle pourrait être animé par M. Richard Yung ; il serait composé en outre de :
- M. Pascal Allizard ;
- M. Jean-Paul Emorine ;
- M. Claude Kern ;
- M. Daniel Raoul.
Le groupe de suivi des négociations sur le traité transatlantique de libre échange serait composé de :
co-président avec M. Jean-Claude Lenoir) ;
- M. Pascal Allizard ;
- M. Michel Billout ;
- M. Philippe Bonnecarrère
- M. Jean-Paul Emorine ;
- M. Didier Marie ;
- M. Daniel Raoul ;
- M. Alain Richard.
Le groupe de suivi de la mise en oeuvre de la PAC serait composé de :
co-président avec M. Jean-Claude Lenoir) ;
- M. Gérard César ;
- Mme Pascale Gruny ;
- M. Claude Haut ;
- M. Claude Kern ;
- M. Jean-Claude Requier ;
- Mme Patricia Schillinger.
Enfin, je vous propose de désigner Mme Fabienne Keller et M. Jean-Yves Leconte comme rapporteurs sur les questions de climat et d'énergie. Ils assureront en outre la liaison avec le groupe de suivi des négociations climatiques internationales qui a été constitué au sein de la commission du développement durable.
Je vous rappelle par ailleurs que notre collègue Jean-Marc Todeschini a été désigné secrétaire d'État aux Anciens Combattants. Il sera donc prochainement remplacé au sein de notre commission.
Je vous propose donc de désigner Simon Sutour pour lui succéder pour le suivi des relations de l'Union européenne avec la Russie. Comme nous l'avons décidé en réunion de Bureau, il sera notamment chargé, avec M. Yves Pozzo di Borgo, d'examiner la procédure d'adoption des sanctions, leur impact sur la Russie et réciproquement l'effet des mesures de rétorsion russes sur l'Union européenne. M. Pozzo di Borgo, vice-président, animera ce binôme.
Je souhaiterais que la commission examine la décision 2010/413/PESC concernant des mesures restrictives à l'encontre de l'Iran.
Nous prenons acte de votre demande.
La réunion est levée à 12 heures 30.