Intervention de Mais tout d'abord un mot sur les pistes du Parlement européen qui oscillent entre réalisme et idéologie

Commission des affaires européennes — Réunion du 25 juillet 2012 : 1ère réunion
Economie finances et fiscalité — Taxe sur les transactions financières - communication de mme fabienne keller

Mais tout d'abord un mot sur les pistes du Parlement européen qui oscillent entre réalisme et idéologie :

Car, naturellement, le Parlement européen s'est prononcé sur le projet de directive de la Commission. Nous avons d'ailleurs rencontré l'auteur du rapport, Mme Annie Podimata, très optimiste sur l'issue de la coopération renforcée et considérant la TTF comme « un instrument de sortie de crise ». Les taux ont été jugés adaptés, mais il a été suggéré, avec beaucoup de réalisme, de dispenser de la taxe les fonds de pension.

Cependant, en contrepartie de cette option réaliste, le Parlement étend le champ d'application de la TTF en ajoutant un « principe de lieu d'émission » et en le combinant avec le principe de résidence. Ainsi les institutions financières situées en dehors de l'Union seraient également obligées de payer la TTF quand elles négocient des titres émis à l'origine dans l'Union européenne.

Le Parlement envisage de lourdes sanctions en cas de fraudes et souhaite que, tant que la taxe n'est pas payée, la mutation soit considérée comme nulle.

Le Parlement n'exige pas que le produit de la TTF soit transféré au budget de l'Union, laissant pour l'instant cette importante question pendante.

Pour ma part, je regrette de devoir signaler que le débat sur le partage du produit d'une éventuelle TTF s'est arrêté.

Quoi qu'il en soit, nous nous engageons dans une coopération renforcée et plusieurs étapes nous attendent. Au terme d'un débat d'orientation des ministres des finances des 27 Etats membres, le 22 juin, à Luxembourg, la présidence danoise de l'Union européenne a constaté qu'aucun accord ne pouvait être trouvé à l'unanimité sur la directive instaurant la TTF, mais qu'un nombre significatif de pays étaient prêts à former une avant-garde (ils seraient entre 9 et 12), à savoir l'Autriche, l'Allemagne, la France, la Belgique, le Portugal, la Slovénie, la Grèce, l'Espagne et sans doute l'Italie, la Pologne, la Slovaquie et l'Estonie. Ces Etats doivent maintenant amorcer la deuxième étape : l'envoi à la Commission d'une lettre détaillant leur projet, ce qui est nettement plus difficile, car ils se divisent déjà en deux écoles (ceux qui veulent créer la TTF en amendant le texte du projet de directive et en avançant par petits pas, et ceux qui veulent une taxation du secteur financier adaptée et efficace tout de suite et pas forcément une TTF).

La troisième étape consistera pour la Commission à vérifier que toutes les conditions de la coopération renforcée fixées par le traité sont respectées et, entre autres, l'absence de risque de créer des distorsions au sein du marché intérieur. Si les conditions sont respectées, la Commission proposera au Conseil d'autoriser formellement la coopération renforcée. Le Conseil devra se prononcer à la majorité qualifiée quand le projet aura aussi reçu le consentement du Parlement, ce qui constitue la quatrième étape.

Enfin, la Commission fera une nouvelle proposition législative en bonne et due forme qui devra être adoptée selon la procédure de codécision.

Au cours de ces étapes, les pays opposés à la TTF auront tout le loisir de vérifier que le projet de coopération renforcée ne lèse pas leurs intérêts. C'est là que sont les difficultés.

Quant aux contours de la coopération renforcée, ils ne sont pas encore très précis d'autant plus que la France et l'Espagne ont demandé que l'on adopte une approche graduelle qui exclurait, dans un premier temps, les produits dérivés et les fonds de pension et peut-être même les fonds d'investissement.

Ailleurs, on étudie déjà des variantes à la TTF afin d'élargir, sinon d'affermir, le consensus. Une piste existerait du côté de la TVA selon l'Autriche. Une autre consisterait à généraliser le droit de timbre.

Le commissaire européen, M. Algirdas Semeta, s'est engagé à réaliser une nouvelle étude approfondie sur l'impact économique de la TTF.

De source officieuse, on s'orienterait peut-être vers une première étape minimaliste (champ d'application étroit) ; puis on procèderait par étapes. Toutefois, il faudrait d'abord convaincre du bien-fondé de la TTF ceux qui entrent dans la coopération renforcée avec l'idée que la TTF est dépassée et qu'il faut envisager un autre type de taxation du secteur financier.

Quoi qu'il en soit, un débat d'orientation sur le sujet aura lieu lors de l'ECOFIN du 9 octobre prochain.

Ce qui est curieux avec la TTF, c'est qu'il existe presque partout un consensus enthousiaste sur le principe et sa justesse et que très vite on se heurte aux difficultés dès qu'on aborde sa mise en oeuvre.

En conclusion, je dirai qu'une fois de plus, l'Europe avance lentement mais elle avance...

Si l'on regarde les choses avec objectivité et pragmatisme, rien n'est encore gagné pour la TTF, mais ce qui est acté et gagné à l'heure où je vous parle, c'est l'idée qu'il faut mettre sur pied une taxation européenne du secteur financier, en gardant à l'esprit qu'il faut le faire sans perdre de parts de marché dans ce secteur où l'Europe n'est déjà plus en position dominante.

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