Intervention de Philippe Bonnecarrere

Commission des affaires européennes — Réunion du 22 octobre 2015 à 8h35
Politique commerciale — Négociations du traité transatlantique ttip : communication de mm. philippe bonnecarrère et daniel raoul

Photo de Philippe BonnecarrerePhilippe Bonnecarrere :

Mais si les deux premières zones économiques du monde réduisent les obstacles tarifaires et non tarifaires à leurs échanges, si elles simplifient leurs procédures et se rejoignent sur des normes exigeantes, il ne peut qu'en résulter, de part et d'autre, des bénéfices en termes d'emplois et de croissance. À condition bien sûr que nous aboutissions à un accord équilibré qui préserve les valeurs qui sont au coeur de nos choix collectifs.

En second lieu, un bon accord relèvera le niveau des règles qui régissent aujourd'hui le commerce mondial.

Les États-Unis et l'Union européenne ne sont plus seuls au monde. L'Inde, la Chine et d'autres grands émergents sont des acteurs majeurs du commerce mondial. Mais les règles et les normes qu'ils y définiront n'auront pas le niveau d'exigence que nous voulons. Le TTIP peut être l'occasion de construire ce socle normatif de référence avant que d'autres, avec d'autres normes et d'autres valeurs, n'assument ce rôle.

Dernier aspect, plus stratégique, l'accès de l'Union européenne aux ressources énergétiques des État--Unis, gaz naturel liquéfié et pétrole. Actuellement, des législations internes américaines interdisent ou restreignent leur exportation. Les négociations en cours pourraient inciter à supprimer ces barrières. Dans le contexte des incertitudes géostratégiques qui pèsent sur la fourniture d'énergie à l'Union européenne par certains de ses fournisseurs traditionnels, cette donnée est loin d'être négligeable.

Trois observations pour conclure :

- D'abord, ne pas condamner par avance un accord qui pourrait être une opportunité pour l'Union européenne et ses États membres et qui représente pour elle le projet commercial le plus ambitieux en termes de volume de biens et services échangés ; mais ne pas non plus se laisser entraîner vers la conclusion d'un texte à n'importe quel prix.

Nous avons fixé nos lignes rouges, qu'il s'agisse des enjeux - culture, santé publique, normes sociales et environnementales, protection des données, intérêt stratégique de l'Europe - ou de règlement des litiges entre États et multinationales - qui ne devrait pas relever de tribunaux d'arbitrage privés. Nous devons continuer à défendre cette position en exerçant notre devoir de vigilance et notre pouvoir d'influence tout au long des négociations.

- Ne pas se focaliser sur une date limite de négociations qui serait irréaliste : laissons le temps nécessaire au compromis et à la pédagogie qui doit accompagner ces discussions, au bénéfice de la société civile et de l'opinion en général pour obtenir, encore une fois, un texte acceptable et respectueux de nos valeurs.

- Je suis parfaitement en phase avec les récentes mises au point du secrétaire d'État au commerce, M. Fekl. Il s'agit d'inciter les États-Unis à passer enfin à une phase de propositions semblable à celle de l'Union européenne - ce qui me rappelle le cycle de Doha - afin de rééquilibrer les conditions de transparence. Deux mots essentiels donc à mes yeux : réciprocité et transparence. Il convient désormais d'entrer dans le coeur du sujet et des véritables enjeux. À défaut, il serait raisonnable d'envisager côté européen une suspension des négociations, le temps d'une mise au point politique.

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