Intervention de Jean-Yves Le Drian

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 1er février 2017 à 16h30
Audition de M. Jean-Yves Le drian ministre de la défense

Jean-Yves Le Drian, ministre :

Sur les opérations « homo », qui suscitent des articles mal informés ou mal inspirés, je souhaite être très clair. Sur des terrains de guerre, le droit international des conflits s'impose. Même s'ils sont Français, les ennemis sont donc avant tout des ennemis. Les frappes ciblées, sur de tels théâtres, n'ont rien d'exceptionnel. Et quand on est chef, il faut s'attendre à être frappé davantage. Opérations homo ? J'appelle cela des opérations de combat. Elles n'ont rien de contraire au droit international, et ne nous exposent nullement à être déférés devant la Cour pénale internationale.

Il y a cinq ans, les cyberattaques n'avaient pas l'importance que nous leur connaissons. Sur ce sujet devenu central, j'ai fixé des moyens et une doctrine. Deux milliards d'euros y seront affectés, et un commandement cyber sera nommé prochainement. Rattaché au Cema, il commandera les unités cyber de nos armées, et me conseillera sur ces opérations. La doctrine est de développer le renseignement et la défense, tout en préparant des actions offensives. Une attaque cyber est un acte de guerre, dont la réponse n'est pas forcément cyber... Le nombre de nos combattants cyber va atteindre 2 600. S'y ajoutent les 600 experts de la DGA, et la réserve citoyenne, très spécialisée sur ce point. La France est au niveau, et doit le rester.

Pour la Tunisie, nous avons prévu 20 millions d'euros d'aide sur deux ans : matériels, équipements, appui au renseignement, formation des forces spéciales, aide à la lutte contre les IED... Le dispositif est en place et fonctionne.. Les Américains et les Britanniques apportent aussi leur soutien. Beaucoup de combattant étrangers risquent de revenir par le Sud de la Tunisie.

Oui, le déploiement opérationnel a généré de la fatigue et des difficultés. En 2016, en plein été, j'ai rappelé des militaires de permission. Actuellement, les effectifs formés de l'armée de terre augmentent, on passe dans chaque unité de quatre à cinq compagnies, ce qui améliore la situation. Mais les équipements sont mis à rude épreuve. La France est assez largement autonome, et c'est sa force : dissuasion, capacité de projection, réseau de renseignement, bon niveau cyber... Nous devons le rester. Pour cela, nous devons atteindre les 2 %. Nous sommes au creux du cycle nucléaire, mais les dépenses en ce domaine vont bientôt passer de 3,6 milliards d'euros à plus de 6 milliards d'euros. Si nous voulons garder nos capacités, il faut passer à 2 %.

Il y a un problème à Istres. Des complicités internes sont très probables. Cela m'ennuie, car c'est une base nucléaire - bien protégée, heureusement. Et même, cela me met en colère.

Je ne crois pas à une remise en cause de l'alliance atlantique par les États-Unis. D'ailleurs, M. Trump a tenu à M. Hollande les mêmes propos que son ministre avec moi. C'est l'Allemagne qui aurait le plus à en pâtir - ainsi que la Pologne et les pays baltes. Pour autant, l'Europe doit avoir une autonomie stratégique, pour être complémentaire de l'Otan. L'initiative franco-allemande l'été dernier comporte une feuille de route validée par le Conseil européen de décembre. Nous devons la mettre en oeuvre dans l'année. La volonté est là en Allemagne et en France. Les Britanniques ont également voté l'ensemble du projet, qui comporte aussi une aide financière aux pays dans lesquels l'Union européenne intervient.

Sur les drones, je suis à l'aise : quand je suis arrivé, il n'y en avait pas. J'ai décidé d'acheter des drones américains : heureusement, car ils nous ont bien servi au Mali. Puis j'ai engagé avec les Allemands et les Espagnols la construction du drone d'observation futur. Ce successeur du Reaper pourra être armé, ce qui a failli coûter son poste à M. de Maizière, car l'armement des drones a suscité un débat considérable en Allemagne il y a trois ans. Je n'y suis pas opposé pour ma part, sous réserve qu'un débat soit organisé au Parlement. J'ai enfin décidé de préparer avec les Britanniques le drone de combat futur, le FCAS.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion