Intervention de Simon Sutour

Commission des affaires européennes — Réunion du 9 février 2011 : 1ère réunion
Échange de vues sur les résultats de la conférence de cancún communication de m. simon sutour et mme fabienne keller

Photo de Simon SutourSimon Sutour :

Fabienne Keller et moi-même avons participé pendant deux jours à la conférence de Cancún du 8 au 10 décembre 2010, sur l'invitation de Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement. Il nous a semblé intéressant de vous faire un bref compte-rendu de ces négociations et de cette expérience inédite d'immersion.

Je commencerai par vous présenter le contexte et les enjeux de la conférence de Cancún. Fabienne Keller vous fera le récit de ces deux jours et vous exposera les défis à venir.

Le contexte tout d'abord. Un retour en arrière s'impose.

Le cadre général est le suivant. La convention cadre des Nations unies pour le changement climatique, adoptée à Rio en 1992, fixe des objectifs généraux sur le climat. Aucune indication chiffrée n'y figure, mais deux catégories de pays y sont décrites : les pays développés et les pays non développés. Ces deux catégories n'ont pas les mêmes obligations. C'est sur cette base que le premier protocole à la convention cadre fut adopté à Kyoto en 1997. Ce protocole fixe des obligations aux seuls pays développés. Il prévoit une réduction des émissions pour la période 2008-2012 avec des références d'émissions de 1990. Les États-Unis ont signé le protocole de Kyoto, mais ne l'ont pas ratifié.

Il y a un an se déroulait la conférence de Copenhague, dite COP 15. L'enjeu était de passer à la vitesse supérieure dans un monde profondément transformé et d'adopter un nouveau protocole, le protocole de Kyoto arrivant à son terme en 2012.

Après des négociations difficiles, l'Union européenne était parvenue in extremis à définir une position de négociation avant l'ouverture de la conférence. L'Union s'était fixée pour objectif de parvenir à un accord mondial complet et juridiquement contraignant pour endiguer le réchauffement climatique.

Quels furent les résultats de Copenhague ?

L'approche globale et ambitieuse fut un échec. A deux doigts du fiasco, Copenhague a finalement débouché sur un accord de trois pages élaboré par 28 chefs d'État et de gouvernement, auquel se sont ralliés par la suite de nombreux pays membres de la Convention des Nations unies pour le changement climatique.

Cet accord entérinait l'objectif de limiter la hausse moyenne des températures à 2°c, sans préciser les objectifs de réduction des émissions, ni les moyens d'y parvenir. Il engageait aussi les pays développés à contribuer à un financement à mise en oeuvre rapide ( dit « fast start ») pour la période 2010-2012 à hauteur de 30 milliards de dollars, ainsi qu'à un financement à long terme (100 milliards par an d'ici 2020). Ces financements doivent aider les pays en développement à faire face aux effets du changement climatique.

Enfin, en matière de lutte contre la déforestation, il actait le principe d'un mécanisme récompensant les pays qui étendent ou protègent leurs superficies forestières.

Ce document a minima souffrait néanmoins d'un défaut majeur. Il n'avait pas été adopté par l'assemblée générale des États parties à la Convention des Nations unies. En conséquence, sa portée juridique était nulle.

Faible sur le fond, faible juridiquement, l'accord de Copenhague était une base fragile pour poursuivre le processus multilatéral de négociation. Tout l'enjeu des discussions en 2010 a donc consisté à ne pas rompre le fil des négociations, avec en ligne de mire la conférence de Cancún en décembre.

Rapidement, l'objectif d'un accord global et juridiquement contraignant à Cancún a donc été abandonné et reporté à plus tard. Les négociateurs ont adopté une approche réaliste et pragmatique pour avancer sur quelques dossiers concrets et sectoriels. Le but était de restaurer la confiance dans le processus multilatéral de négociation et de démontrer la capacité du système des Nations unies à aboutir à des résultats tangibles.

J'en viens donc aux enjeux de la conférence de Cancún.

L'enjeu principal était de consolider, dans le cadre des Nations unies, les éléments essentiels de l'accord de Copenhague. Je distinguerai plusieurs points importants.

Le premier était de décider de la suite à donner au protocole de Kyoto. Hormis l'Union européenne, peu de pays développés souhaitent prolonger Kyoto. Or, les pays dits en développement ont fait de Kyoto la clef de voute des négociations. Sans prolongement, ils refusent de s'engager sur un accord contraignant.

Le deuxième point concerne l'aide aux pays en développement pour faire face au réchauffement climatique. Comme je l'ai dit au début de mon intervention, les pays développés se sont engagés sur un financement à court et long terme. Reste à définir le contour, les modalités de gestion et le mode de financement de ce « fonds vert ».

Le troisième point est la lutte contre la déforestation. Là encore, il s'agit d'entrer dans le détail du fonctionnement du mécanisme dit REDD+ pour inciter les pays en développement à préserver leur forêt. Faut-il favoriser la replantation ou la préservation des forêts naturelles tropicales ? Quel mode de financement ? Comment vérifier les résultats sur le terrain ?

Le quatrième point est celui de la création d'un système de mesure et de vérification du respect par les pays de leurs engagements de réduction des émissions. Le jargon parle de mécanisme MRV. Les pays développés en font une condition du financement à long terme des pays en développement. Mais les pays en développement y voient une atteinte à leur souveraineté nationale.

Voilà quelques unes des questions à régler.

Je passe maintenant la parole à Fabienne Keller.

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