Intervention de André Gattolin

Commission des affaires européennes — Réunion du 15 octobre 2015 à 8h30
Institutions européennes — Mieux légiférer - examen du rapport d'information et proposition de résolution européenne de mm. jean bizet et simon sutour

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

Je félicite nos deux rapporteurs pour cette initiative. Dans le point 12, vous proposez que le Sénat « juge positivement le projet de la Commission européenne de rendre plus transparente la procédure entourant l'adoption d'actes au titre de ses compétences d'exécution ». Je m'interroge sur l'étendue de cette transparence. Selon le Conseil d'État, les multiples conventions ratifiées à la sauvette en commission et en séance ont une forte incidence jurisprudentielle sur le droit national. On peut alors s'interroger sur l'impact de l'accord commercial entre le Canada et l'Union européenne (CETA) et du traité transatlantique (TTIP), et demain sur les négociations avec la Chine - notamment si elle acquiert le statut d'économie marchande à l'Organisation mondiale du commerce. La Commission européenne peut-elle négocier dans une telle opacité ? On ne sait jamais si ces accords sont simples ou mixtes. Les négociations de grands traités doivent être plus transparentes, afin que la Commission n'outrepasse pas son mandat et qu'il n'y ait aucun accord mixte sans accord des États-membres. Les mandats et les marges de négociation doivent être plus limités afin d'éviter des rapports de forces discutables.

La Commission souhaite réaliser des études d'impact sur les transpositions nationales, mais il faudrait déjà qu'elle réalise des études d'impact nationales ! Je l'ai demandé pour le TTIP à Mme Malmström. Le TTIP ne donne que des évolutions globales de croissance et d'emploi. Comment rendre des comptes si en amont nous n'avons aucune visibilité sur son impact préalable dans chaque pays ? C'est un peu pervers.

La Commission souhaite améliorer les processus de consultation. On marche sur la tête : il n'y a aucune méthodologie des consultations en ligne, qui sont tantôt ciblées, tantôt non. Je dois être un des rares parlementaires à y participer, or ma réponse est noyée dans le flot. La représentativité doit être proche de zéro. Ainsi, sur le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (ISDS), un million de participants ont répondu ; et la Commission écrit un rapport de 170 pages pour dire que l'échantillon n'était pas représentatif ! Pour la consultation de la feuille de route sur l'Arctique, il y a eu 72 réponses dont 12 extra-européennes, et la Commission en tire des enseignements en éditant des graphiques ! Qui plus est, la consultation n'est souvent pas fondée sur des recommandations du Parlement ou du Conseil. Le plus souvent, c'est une Direction qui donne sa propre orientation, sélectionne les questions et les réponses qu'elle souhaite. Dans le cas de l'Arctique, elle n'a pas tenu compte des neuf textes qui avaient été avalisés par le Parlement européen et la Commission ! Je constate également que l'Eurobaromètre est utilisé de plus en plus rarement et de façon assez délétère. Il faudrait davantage de surveillance.

M. Alain Delcamp, ancien secrétaire général de la Présidence du Sénat, avait dénoncé dans un rapport cette architecture baroque et plaidé pour que le trilogue devienne un quadrilogue intégrant les parlements nationaux. C'est une piste à suivre. Nous devons mieux nous coordonner avec le Parlement européen, notamment en ce qui concerne le carton vert.

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