Intervention de Audrey Azoulay

Réunion du 21 février 2017 à 9h30
Questions orales — Émission la rue des allocs

Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication :

Monsieur le sénateur, la diffusion de La rue des allocs sur M6 depuis l’été dernier a effectivement suscité l’émotion et l’émission a été critiquée comme étant porteuse de stigmatisation, de clichés et de préjugés à l’égard de personnes en situation de précarité.

Ce programme a entraîné de vives réactions non seulement de la part des téléspectateurs, mais aussi de celle d’associations, dont certaines ont saisi le Conseil supérieur de l’audiovisuel. Au nombre des plaignants, on trouvait en effet notamment la FNARS, qui avait demandé au CSA d’intervenir auprès de la direction de la chaîne pour « suspendre la diffusion de ce programme stigmatisant et honteux face à la détresse sociale que vivent près de huit millions de personnes pauvres en France ».

L’autorité indépendante a examiné cette émission. Vous l’avez rappelé, elle en a déploré le titre, à connotation péjorative et ne reflétant d’ailleurs pas la diversité des situations et des comportements des résidents du quartier de Saint-Leu à Amiens. Elle a cependant estimé que M6 n’avait méconnu aucune des obligations que doit respecter une chaîne de télévision lorsqu’elle décide de mettre un programme à l’antenne

En procédant ainsi, le CSA a exercé une mission que le législateur lui a confiée et qui est inscrite à l’article 3-1 de la loi relative à la liberté de communication : garantir l’exercice de la liberté de communication audiovisuelle dans les conditions prévues par cette loi. Ce rôle dévolu au CSA appartient à lui seul. Vous comprendrez que ce n’est pas au ministre chargé de la communication de se substituer à une autorité indépendante qui exerce ses fonctions.

On peut, bien sûr, sur un plan personnel, ne pas se retrouver dans la représentation donnée par cette émission. La réalité de la vie dans un quartier populaire est toujours bien plus complexe que la vision, forcément partielle, que peut en donner une caméra. Les médias assument naturellement une responsabilité éditoriale.

Il appartient aussi au CSA, selon la loi, de contribuer « aux actions en faveur de la cohésion sociale et à la lutte contre les discriminations dans le domaine de la communication audiovisuelle ».

Mon souci constant, depuis un an, a été de renforcer l’action de l’instance de régulation sur ce sujet, et elle est désormais mieux armée. La loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté a précisément renforcé sa mission sur ce point, en modifiant l’article 3-1. Désormais, la loi prévoit explicitement que le CSA « veille à ce que la diversité de la société française soit représentée dans les programmes des services de communication audiovisuelle et que cette représentation soit exempte de préjugés ».

Plus que jamais dans la période que nous traversons, il nous faut lutter contre les préjugés. Il est de notre responsabilité que le débat public y concoure en tout premier lieu. C’est ce que permet la récente modification législative.

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