Quelle que soit leur nature ou leur capacité, les réserves d’eau peuvent servir à de nombreux usages : irrigation, maintien du débit d’étiage, prévention des inondations, réponse aux besoins des ménages et de l’industrie, ainsi qu’à ceux de la production d’énergie d’origine hydraulique ou nucléaire pour les grosses réserves.
La création de réserves d’eau pour l’agriculture constitue une sécurité primordiale en vue d’assurer la pérennité et la contractualisation des récoltes. Les besoins de l’irrigation sont ceux de l’alimentation : sans eau, pas de nourriture ! Les consommateurs doivent prendre conscience que la production d’aliments représente des quantités d’eau importantes. On peut parler d’« eau virtuelle » pour évoquer le volume d’eau nécessaire à la production des biens de consommation, dont le consommateur final ignore souvent l’ampleur.
Notre indépendance alimentaire dépend beaucoup de la disponibilité de l’eau pour l’agriculture. Rien ne sert de se priver de nos ressources si nous devons importer d’autres pays bien plus fragiles que le nôtre nos produits alimentaires, et ainsi y provoquer des dégâts écologiques.
Enfin, je soutiens l’idée, avancée par les auteurs du texte, d’encourager « la recharge des nappes phréatiques en dehors des périodes d’étiage », autre forme de stockage pertinente.
Il faudra du temps pour que les mesures d’économie et de constitution de réserves produisent leurs effets, en vue d’une part de faire évoluer les mentalités et les comportements, d’autre part d’aboutir à la réalisation d’investissements coûteux. Il sera donc essentiel de prendre en compte ces réflexions lors de l’élaboration d’une prochaine loi structurante dans le domaine de l’eau.
Je souhaite maintenant aborder la question de la gouvernance, car il est aussi urgent de travailler sur la façon d’appréhender le partage commun de la ressource.
L’organisation autour des agences de bassin est pertinente. Elle permet d’avoir une vue d’ensemble de toute la problématique de l’eau sur la totalité du bassin. C’est un échelon cohérent tant au niveau technique que sur le plan environnemental. Si les résultats se sont fait attendre, cela tient à la gestion bien trop centralisée des bassins, qui est à remettre en cause.
Les comités de bassin, qui ont pour mission d’arrêter les grandes orientations pour l’eau dans leur secteur, ne peuvent malheureusement pas être assimilés à un parlement de l’eau : leur rôle reste purement consultatif. Il est grand temps de leur donner un réel pouvoir, pour organiser une gestion décentralisée par bassin et sous-bassin territorial, en lien avec une mobilisation de tous les acteurs autour de projets territoriaux partagés, et non imposés. Une maîtrise d’ouvrage décentralisée doit aller de concert avec une gouvernance réellement décentralisée, et non déconcentrée, recevant directement de Paris des instructions déconnectées des réalités du bassin.
Enfin, la création de la compétence GEMAPI me semble être une bonne piste puisque, sur le terrain, il faudra croiser les politiques agricoles, d’urbanisme, de gestion des milieux aquatiques pour adapter la ressource aux besoins, et mobiliser tous les acteurs autour des projets locaux.
La proposition de résolution évoque cependant le département comme échelon à favoriser pour l’exercice de la compétence GEMAPI ; je ne partage pas ce point de vue et préfère la solution actuelle, beaucoup plus souple.