Intervention de François Commeinhes

Réunion du 21 février 2017 à 14h30
Économie circulaire : un gisement de matières premières et d'emploi — Débat organisé à la demande du groupe écologiste

Photo de François CommeinhesFrançois Commeinhes :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, dans un monde confronté à la raréfaction des ressources, à l’augmentation de la population et à une crise économique prolongée, l’économie circulaire s’impose comme un nouveau modèle de développement et de croissance, par la création de produits, de services et de politiques publiques innovants.

Au cœur de l’économie circulaire se trouvent de nouvelles réponses aux problématiques économiques actuelles : en particulier, comment rendre possibles de nouveaux gains de productivité pour nos entreprises et relocaliser certains emplois ?

Nous ne parlons plus de destruction, mais nous nous recentrons sur la création de valeur à chaque étape, en repensant nos modes de consommation, la conception et la durée de vie des produits, en privilégiant l’usage sur la possession de biens, ainsi que la réutilisation et le recyclage des composants. C’est se préoccuper à la fois des matériaux et des modèles commerciaux.

Les territoires sont des terrains d’expérimentation privilégiés pour l’économie circulaire ; c’est sur cet aspect du sujet que je souhaite insister.

C’est dans la ville portuaire danoise de Kalundborg, au terme d’échanges informels entre industriels locaux, que serait apparu dans les années soixante ce que l’on peut qualifier de modèle de symbiose industrialo-environnementale, fondé sur une véritable chaîne de recyclage de déchets industriels et popularisé plus tard sous le nom de Kalundborg symbiosis.

Plus près de nous, je prendrai l’exemple de l’incinérateur de Sète, ville dont j’ai le bonheur d’être maire depuis 2001. Ce site s’est mué en unité de valorisation énergétique, ou UVE, avec la construction d’un premier réseau de distribution de vapeur surchauffée à un industriel voisin, producteur de soufre liquide pour la vulcanisation des pneus. Au prix de lourds travaux, un nouveau réseau de chaleur permet, depuis 2014, de valoriser la totalité de la chaleur produite par la combustion des ordures ménagères de l’agglomération, les recettes tirées de la vente de vapeur devant rentabiliser l’investissement en moins de cinq ans.

Nous mettons actuellement en place une synergie entre cette UVE et la future station d’épuration, alliant séchage des boues grâce à la chaleur, compostage et recyclage de l’eau traitée pour un usage industriel. De telles solutions innovantes sont source d’économies, dans le respect de l’environnement.

Dans le même esprit, la chambre de commerce et d’industrie de Midi-Pyrénées met en place le dispositif « Actif », suivant une démarche d’écologie industrielle et territoriale. En 2014, 100 entreprises régionales ont également été accompagnées par les chambres de commerce et d’industrie de Languedoc-Roussillon, dans le cadre d’une opération unique en France, pour réaliser un diagnostic énergétique personnalisé, en liaison avec l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie.

À Sète, c’est le recyclage de l’eau de mer qui permettra de chauffer le futur écoquartier d’entrée de ville et le centre balnéaire appelé à s’agrandir dans les années à venir. Ce système, appelé thalassothermie, permet une formidable mise en relation de l’urbanisme avec la configuration naturelle de la cité.

Je ne puis finir sans évoquer le recyclage des coquilles d’huîtres et de moules, emblématiques de mon territoire. Alors que les quelque 10 000 tonnes de coquilles issues de l’activité conchylicole du bassin de Thau finissaient, auparavant, dans l’étang, une collecte organisée et une unité de traitement ont vu le jour en 2000. Cette unité se charge d’« inerter » la matière organique, puis de broyer les coquilles pour en faire un matériau de granulométrie variable selon sa destination. Un des principaux débouchés est l’amendement calcique des terres agricoles, mais le broyat peut aussi servir de complément dans l’alimentation des volailles, entrer dans la fabrication de peintures de signalisation ou être employé pour le remblaiement de certains chemins.

On le voit, nos entreprises et nos territoires ne sont donc pas restés inertes, mais ces efforts ne sont pas encore à la hauteur des enjeux, ni à celle des atouts dont dispose la France, à commencer par ses matières premières cultivables et marines, lin et algues par exemple.

Si des alternatives à l’économie gaspilleuse ou linéaire ne sont pas très vite mises en œuvre, on risque d’aller au bout du bout de la ressource, qu’il s’agisse du sable coquillier ou de minéraux. Certaines impulsions politiques ont permis d’optimiser et de réduire notre impact sur l’environnement et ont déjà donné lieu à l’adoption par le Parlement de réglementations, dans le cadre de l’élaboration de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

Dans mon département, le Livre blanc de la chambre de commerce et d’industrie de Montpellier sur les économies productives aborde la question de l’économie circulaire, en ciblant particulièrement l’écologie industrielle et territoriale.

Par ces quelques exemples d’initiatives locales, publiques ou privés, j’ai entendu montrer que l’économie circulaire est une réalité dont se saisissent de plus en plus d’acteurs, en faisant primer le bon sens sur l’idéologie, loin des grand-messes théoriques ou des études coûteuses. Cela témoigne de la vitalité des territoires et de l’inventivité de leurs habitants. À nous d’être précurseurs en matière d’économie circulaire, pour tirer nos territoires vers un nouvel avenir !

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