Intervention de Richard Thiéry

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 22 février 2017 à 9h30
Table ronde sur les pollinisateurs autour de m. richard thiéry directeur du laboratoire pour la santé des abeilles et mme agnès lefranc directrice de l'évaluation des produits réglementés agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation de l'environnement et du travail anses m. luc belzunces directeur de recherche et responsable du laboratoire de toxicologie environnementale et m. jean-luc brunet directeur d'unité adjoint institut national de la recherche agronomique inra m. gilles lanio président de l'union nationale de l'apiculture française unaf m. michel perret chef du bureau de la faune et de la flore sauvages et mme jeanne-marie roux-fouillet chef de projet du plan national d'actions « france terre de pollinisateurs » ministère de l'environnement de l'énergie et de la mer

Richard Thiéry, Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) :

directeur du laboratoire pour la santé des abeilles, Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses). - Merci de votre invitation sur un sujet aussi important. Directeur de recherche, je dirige le laboratoire de Sophia-Antipolis spécialisé sur la santé des abeilles. L'Anses est une agence indépendante ayant une approche globale et transversale sur l'ensemble des risques sanitaires - sur la santé humaine, la santé animale et végétale - et en appui aux politiques publiques. Nous avons trois métiers : d'abord l'évaluation des risques alimentaires, de l'environnement, du travail et, dans le cadre de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) de produits phytosanitaires, des biocides et des médicaments vétérinaires. Ensuite, nous effectuons des recherches et produisons des références analytiques dans ces différents domaines, avec l'appui d'un réseau de laboratoires parfaitement intégrés dans les territoires et spécialisés dans une filière. Celui de Sophia-Antipolis est spécialisé dans la filière apicole. Dernier métier, nous gérons des dispositifs de surveillance sanitaire, dans un souci de dialogue permanent avec toutes les parties prenantes, tout en protégeant notre indépendance.

Le laboratoire de Sophia-Antipolis sur la santé des abeilles a une approche pluridisciplinaire. Les dangers sanitaires sont liés aux agents pathogènes - agents infectieux ou parasitaires -, aux prédateurs des abeilles, aux phénomènes d'intoxication notamment par les produits phytopharmaceutiques ou les médicaments vétérinaires.

Nous avons plusieurs missions de référence liées à notre statut de laboratoire national de référence du ministère de l'agriculture et, depuis 2011, de laboratoire européen de référence sur la santé des abeilles, ainsi que de laboratoire de référence pour l'Organisation de la santé animale (OIE) dans ce domaine. Nos travaux de recherche viennent nourrir les travaux dits « de référence », et réciproquement. Cette recherche appliquée vise à comprendre les phénomènes d'intoxication et à mieux décrire les maladies, les agents pathogènes et leur variabilité éventuelle pour mettre au point des outils de diagnostic sans cesse plus performants.

Nous travaillons sur la loque américaine, la loque européenne, le petit coléoptère des ruches, parasite introduit en Italie il y a deux ans, le virus des ailes déformées, transmis par un parasite, et le virus de la paralysie chronique. Ces recherches très diverses sont menées en partenariat avec différents organismes comme l'Institut national de la recherche agronomique (Inra) ou l'Institut technique et scientifique de l'abeille et de la pollinisation (Itsap). Nous sommes engagés dans le vaste projet européen Smart Bees qui met au point des outils valorisant la résistance naturelle des populations d'abeilles au parasite varroa, pathogène majeur pour les abeilles.

L'étude Epilobee, une première en Europe, a été commanditée par la Commission européenne dans le cadre de notre mission de référence. Cette vaste enquête a été conduite sur deux saisons apicoles dans 17 États-membres, et a permis de surveiller plus de 155 000 colonies dans lesquelles nous avons obtenu des données de santé harmonisées, toujours en cours de traitement. L'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) va missionner le laboratoire de référence de l'Union européenne pour intégrer un projet d'évaluation des risques des pesticides sur les abeilles domestiques.

Notre laboratoire participe à l'expertise sur le rôle des co-expositions des abeilles à différents risques. Le rapport sur les co-expositions que nous avons publié en 2015 montre que les abeilles sont soumises à un grand nombre de stress susceptibles d'interagir les uns avec les autres. Dans ses recommandations, l'Anses souligne la nécessité d'intervenir sur l'ensemble des facteurs identifiés comme contribuant à l'affaiblissement des colonies d'abeilles et rappelle l'importance du maintien de la biodiversité, l'appropriation du respect de bonnes pratiques apicoles, la réduction de l'exposition globale des abeilles aux produits phytopharmaceutiques, et l'utilisation à bon escient de traitements chimiques avec des molécules testées au préalable dans leur dimension additive, synergique ou antagoniste. L'Anses préconise aussi la création d'un réseau de ruchers de référence pour disposer de données harmonisées afin d'étudier, en fonction des différentes régions, l'état de santé des colonies d'abeilles.

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