C'est à juste titre que le président Emorine a soulevé cette question de l'assurance. Je suis réservé néanmoins sur la notion d'assurance obligatoire, qui, outre qu'elle est difficile à faire passer chez les agriculteurs, nous priverait du bénéfice des avantages indemnitaires européens. La crise de la sécheresse me confirme dans l'idée qu'il doit exister un dispositif assurantiel dans chaque secteur. Il existe dans le secteur céréalier, mais demande à être développé. Pour le secteur du fourrage, j'espère que nous trouverons un accord avec Bercy. Le Fonds national de garantie doit être abondé à chaque crise, ce qui prouve qu'il serait préférable d'accepter la réassurance. On doit pouvoir trouver un équilibre sur un système d'assurance, indispensable à nos agriculteurs. Il est bien évident que les pouvoirs publics resteraient engagés, et que nous ne laisserons pas le privé prendre tous les risques.
M. César appelle de ses voeux un filet de sécurité européen sur les prix. C'est ce que je m'emploie à construire pour chaque filière, avec les groupes de haut niveau. Cela est fait pour le lait. Un groupe, créé à la demande de la France, existe pour la filière bovine. Mais le niveau de référence des prix, arrêté à 2003, reste trop bas pour que Bruxelles, quelle que soit sa bonne volonté, puisse déclencher des mesures d'aide : il nous faut un dispositif plus souple, afin que l'intervention puisse avoir lieu dès que les prix flanchent, avant que la crise ne soit trop avancée.
M. Bizet souhaite voir créer un organe de contrôle et de gestion des crises alimentaires. Lors de la réunion des ministres de l'agriculture, j'ai demandé que soient tirées toutes les conséquences de la crise. Face à vingt-deux morts, on ne peut pas rester fataliste. Nous n'avons pas été capables de prendre les bonnes décisions au bon moment. Je ne conteste pas qu'il faille de la transparence, mais je refuse de laisser accuser les agriculteurs. Lorsque l'on dénonce un danger, il faut le faire sur le fondement de données scientifiques fondées. Cela est possible en croisant les données humaines avec les données de traçabilité des aliments.
Il est évident, Monsieur Pointereau, qu'il faut produire plus, et je le dis clairement aux nouveaux tenants de la décroissance. C'est d'un égoïsme naïf que de croire que l'on peut produire moins en France pour protéger l'environnement. Produire moins, cela signifierait importer davantage, depuis des pays qui n'ont pas toujours le plus haut respect des normes environnementales (M. Pointereau approuve). C'est ensemble qu'il nous faut travailler, en convainquant nos partenaires de suivre la même voie.
J'en viens à la question de l'eau, soulevée par plusieurs d'entre vous. L'eau est une ressource rare, et le sera de plus en plus si le changement climatique se poursuit. C'est donc autour de trois axes, dans le dialogue avec Mme Kosciusko-Morizet, que j'ai proposé au Premier ministre de travailler : promouvoir des cultures économes en eau, là où existe un déficit ; aller vers un système d'irrigation plus moderne, comme ont su le faire les Israéliens et les Espagnols, mieux définir, enfin, et cela va dans votre sens, la législation sur les retenues collinaires. En cette dernière matière, qui n'est pas encore arbitrée, la question n'est pas seulement celle du financement, mais des dispositions législatives. Les règles doivent pouvoir être simplifiées. Le juge administratif ne fait qu'appliquer la loi. Mais les délais de recours sont trop longs : il n'est pas normal de laisser mourir une exploitation qui souffre d'un déficit en eau quand il existe, à proximité, des ressources inutilisées. Le dialogue est ouvert avec la ministre de l'écologie. Si nous ne pouvons tomber d'accord, le Premier ministre et le Président de la République trancheront, mais nous sommes en phase sur la vision globale.
Oui, Monsieur Courteau, nous devons faire évoluer le rapport de forces européen, et c'est pourquoi j'ai pris des initiatives avec l'Allemagne, l'Espagne et l'Italie. Sur l'indemnisation des producteurs de fruits et légumes, nous partions de zéro. Après mes démarches de ce week-end, l'enveloppe de 150 millions à laquelle nous étions parvenus vient d'être portée à 210 millions. C'est un geste positif, mais il faudra aller plus loin pour parvenir à une indemnisation à l'euro près.
Pour la viande, Monsieur Bailly, la seule solution est de faire appliquer l'accord du 3 mai. C'est à quoi j'ai appelé les producteurs et les industriels. A l'échelle européenne, je l'ai dit, il n'est pas possible, pour l'instant, le seuil de 2003 restant trop bas, de faire appliquer des mesures d'intervention.
Le FNGCA est à 90 ou 100 millions aujourd'hui. Il y aura tout l'argent nécessaire. Nous y travaillons depuis avril. Le comité se réunira le 15 juin, les arrêtés seront pris le 12 juillet et le processus pourra s'enclencher à partir du 15 septembre - je rappelle que le seuil est fixé à 30 % de pertes au regard d'une moyenne établie sur les dernières années. Il faudra abonder le fonds, le Premier ministre le sait.
Tout en récusant l'idée d'une assurance publique de revenu, Monsieur Botrel, je pense que nous avons besoin d'une régulation intelligente : moins d'aides directes, mais un financement plus massif, en contrepartie, du fonds de mutualisation, avec des incitations de l'Union européenne, l'objectif étant que les producteurs vivent davantage de leurs prix et trouvent plus de garanties en cas de crise. La nouvelle PAC doit renverser la donne. Oui, Monsieur Marc, nous souhaitons un rééquilibrage en faveur des productions animales, mal servies. Le plafonnement des aides ? L'Allemagne y est opposée. Nous n'avons pas pris, quant à nous, de position définitive mais sommes en tout état de cause ouverts à l'idée d'aides plus importantes au bénéfice de la filière élevage.
L'objectif, pour l'après-2013, Madame Bourzai, Monsieur Soulage, est triple. Conserver le même budget, tout d'abord, car l'agriculture est un domaine stratégique ; faire en sorte que les producteurs vivent de leurs prix, avec davantage de garanties en cas de crise - il faut mettre fin à un système kafkaïen, fait de distorsions troublantes dans les dispositifs de régulation, d'indemnisation, de mutualisation ; s'engager vers le verdissement, auquel je crois, car la PAC ne sera comprise de nos concitoyens que s'ils y voient une meilleure protection de l'environnement : pourquoi diable accepteraient-ils de payer pour l'agriculture si nos normes environnementales n'étaient pas plus strictes que celles de l'Argentine ou du Brésil ? Nous devons donc militer pour des aides qui tiennent compte du développement durable et du respect de l'environnement, tout en s'interdisant d'entrer dans des labyrinthes administratifs, en renversant la logique punitive qui prévaut trop souvent aujourd'hui et excède les agriculteurs. A leur côté, comme je le suis, on comprend et l'on finit par partager leur exaspération. Je veux une logique administrative qui valorise les agriculteurs : on arrive à mieux par l'incitation.
Délier la DPA de l'assurance, Monsieur Soulage ? Je suis prêt à travailler sur l'idée ; il faut trouver une réponse pour les céréaliers qui ne sont pas assurés.
La méthode du cas par cas retenue pour le broyage de la paille, Madame Panis, me semble en effet la bonne.
Le G20, Monsieur Bernard-Reymond, doit répondre à d'importantes questions. Les points de vue étaient si divergents sur certains sujets, parmi lesquels la question de l'OMC, qu'il a semblé préférable au gouvernement de les retirer du paquet relatif à la gouvernance agricole mondiale, afin de ne pas laisser de prétexte de blocage à ceux qui ne veulent pas avancer.
Que les loups aient mangé deux ânes - n'y en a-t-il pas toujours un peu trop ? - ne change pas mes positions, qui ne datent pas d'hier, et que vous connaissez. Le Président de la République s'est déclaré favorable, lors de son déplacement dans les Alpes de Haute-Provence, pour un dispositif plus efficace.
Je travaille, Monsieur Huré, et l'accord du 3 mai en témoigne, à une baisse des prix à la consommation. Je vous suis sur la mise aux normes, n'allons pas ajouter contrainte sur contrainte d'année en année. M. Ambroise Dupont m'aura entendu.
Sur l'équilibre de la PAC, il n'est à mon sens pas prudent d'entrer, Monsieur Jacques Blanc, dans une logique du donnant-donnant. Nous défendons le budget de la PAC, c'est une chose. Autre chose est la question de la réforme des fonds de cohésion, à laquelle je suis ouvert, mais il nous faut nous assurer, comme nous le faisons avec Bercy, que la France n'y perdrait pas en termes de taux de retour.