Intervention de Marie-Christine Blandin

Réunion du 22 février 2017 à 14h30
Lutte contre l'exposition aux perturbateurs endocriniens — Adoption d'une proposition de résolution

Photo de Marie-Christine BlandinMarie-Christine Blandin, auteur de la proposition de résolution :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, si la France a quelque avance sur l’Union européenne dans la lutte contre l’exposition aux perturbateurs endocriniens, nous le devons aux chercheurs, qui ont fait valoir la notion d’« exposome », à la mobilisation, dès 2002, du Comité de la prévention et de la précaution, à six ministres de la santé et dix ministres de l’écologie, mais aussi à nos collègues : je pense à la proposition de loi tendant à interdire le bisphénol A dans les biberons, déposée par Yvon Collin en 2009.

Nous devons aussi cette avance au rapport rédigé par Gilbert Barbier en 2011, dans le cadre de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, au rapport d’information sur les pesticides de Mme Bonnefoy en 2013, et à la proposition de résolution européenne présentée tout récemment par Mme Patricia Schillinger et M. Alain Vasselle sur les critères d’identification des perturbateurs endocriniens. Au même moment, le député Jean-Louis Roumégas se livrait au même exercice à l’Assemblée nationale, en prenant en compte, outre les perturbateurs « avérés » et « présumés », les perturbateurs « suspectés ».

La proposition de résolution déposée par notre groupe sur l’initiative d’Aline Archimbaud est une invitation à poursuivre ces efforts, car la Commission européenne est aujourd’hui un frein, et les lobbies tentent de faire passer leurs intérêts avant la santé publique et l’environnement. Ici, une plainte de la filière des plastiques ou d’une organisation agricole provoque l’annulation par le Conseil d’État de l’arrêté encadrant l’utilisation des pesticides. À Bruxelles, les fabricants usent de tout leur poids pour empêcher une définition large indispensable aux nouvelles règles. Nous ne pouvons en rester là !

Ces substances restent trop présentes, la question des liens entre santé et environnement est encore trop marginale dans les politiques publiques, au point que le ministère de la santé se cantonne à la gestion et aux soins, tandis que la santé environnementale a trouvé refuge au ministère de l’écologie.

La crise sanitaire est silencieuse, mais elle blesse et tue. Ainsi, dans le monde, deux décès sur trois sont le fait de maladies chroniques. En France, ces dernières progressent quatre à cinq fois plus vite que le changement démographique. Le cancer touche un homme sur deux et deux femmes sur cinq.

Il aura fallu du temps pour bien identifier les mécanismes des perturbateurs endocriniens, ces petites molécules contenues dans de nombreux produits d’usage ou de consommation courante migrent et pénètrent nos organismes, modifiant les messages normaux de nos hormones, qu’il s’agisse des hormones de croissance, de déterminisme sexuel, de l’adolescence, de la satiété et de régulations diverses de notre métabolisme.

On mesure tous les dangers liés à l’exposition de bébés en formation, si leur mère respire des solvants ou des pesticides.

Il serait inimaginable de laisser sévir un mécanicien qui remplacerait les freins d’une voiture par un accélérateur ou de permettre à un hacker de communiquer des messages erronés, à la place de la tour de contrôle. Toutefois, on accepte que des substances chimiques viennent brouiller la formation de l’appareil urogénital du fœtus, imprégner les organismes, programmer des cancers du sein de la petite fille à naître, fausser la communication interne de nos organes, au risque de dysfonctionnements profonds et de maladies graves.

L’UFC-Que choisir ? vient de publier une liste de 400 cosmétiques avec perturbateurs. Messieurs, votre gel douche aux parabènes et alkyphénols ne mérite pas de compromettre votre fertilité et de saboter votre descendance. Mesdames, les phtalates de votre vernis ou le benzophénone de votre teinture ne valent pas la puberté de votre fille. Bricoleurs, la rénovation de votre intérieur à grands coups de solvants ne mérite pas que vous risquiez un cancer, comme c’est le cas pour de trop nombreux paysans, premières victimes des produits phytosanitaires.

Après le phénoxyéthanol dans les lingettes, révélé par l’Institut national de la consommation, voici la dioxine, le glyphosate, des pesticides, des hydrocarbures aromatiques polycycliques et des cancérogènes probables dans douze types de couches pour bébé ! Ils sont « Probables », seulement… Néanmoins, je ne pense pas que vous accepteriez de monter dans un avion classé « crash probable » !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion