En attendant l’interdiction, il faut au moins un étiquetage informatif, comme nous aurions pu et dû le faire depuis un an pour les tampons et serviettes hygiéniques.
Les plus jeunes sont parmi les plus exposés : crèches et écoles devraient être des zones exemptes de tout perturbateur et de tout pesticide, tant dans les meubles, l’alimentation et les produits d’hygiène que dans les jouets.
Le rapport de l’ANSES sur l’exposition professionnelle aux pesticides en agriculture de juillet 2016 et celui de l’INSERM sur les effets des pesticides sur la santé de juin 2013 ont établi les risques importants que fait peser l’usage des pesticides sur la qualité des eaux et de l’air, donc sur la santé publique.
Or le bilan dressé en novembre 2015 par le Conseil général de l’environnement et du développement durable sur la qualité des eaux de notre pays fait état d’une contamination généralisée par les pesticides : dans 92 % des points de surveillance, la présence d’au moins un pesticide a été détectée et, en moyenne, 15 pesticides différents ont été recensés sur chaque point de mesure.
Cela justifie l’instauration par la loi d’une zone non traitée d’au moins cinq mètres autour des points d’eau, sans qu’une dérogation soit possible, mais aussi autour des fossés, qui jouent un rôle déterminant dans le transfert des pesticides vers les cours d’eau. Par la proposition de résolution, il est demandé cette même prévention aux abords des zones d’habitation et des écoles.
Une classe d’insecticides couramment utilisée pourrait affecter les performances cognitives d’enfants qui en ont absorbé. On a évalué à 14 millions le nombre de points de QI perdus à la suite d’une exposition à ces produits. Nos enfants ont droit à un meilleur héritage !
Pour ne rien faire, l’argument du dommage économique pour l’industrie et les distributeurs est souvent brandi. Mais pense-t-on, au-delà des douleurs des personnes atteintes, aux dommages financiers ? Selon les économistes Julia Ferguson et Alistair Hunt, le coût des cinq catégories de troubles ou de maladies liés à des déséquilibres hormonaux est en France de 82 milliards d’euros annuels, sans compter les coûts induits comme l’absentéisme.
Sauf à compter sur davantage de malades, donc davantage de dépenses de santé pour relancer la croissance, il faut mettre un terme à cette absurdité.
Dès lors, comment agir vis-à-vis de Bruxelles ? Sans critères de définition des perturbateurs endocriniens, l’Europe ne possède pas l’outil conceptuel nécessaire pour organiser la révision de sa réglementation et agir pour la santé et la biodiversité. Elle en est réduite à des mesures de sauvegarde, qui sont certes nécessaires dans l’immédiat, mais tout à fait insuffisantes pour prendre le problème à bras-le-corps.
Parce qu’elle a repoussé l’élaboration de ces critères de façon dilatoire, la Commission européenne a été condamnée le 16 décembre dernier. Sous l’influence de l’EFSA, l’Autorité européenne de sécurité des aliments, hélas secouée par des conflits d’intérêts, et contre l’avis de l’OMS, la Commission travaille aujourd’hui à une orientation minimale : un champ réduit – phytosanitaires et biocides sont au programme, mais pas les autres secteurs, comme les cosmétiques – et une approche fondée sur le danger, ce qui nécessite un niveau de preuve très élevé et laisse passer le risque de contaminants repérés comme probablement dangereux. Cela revient à ne pas prendre en compte le principe de précaution européen.
Or, si elle ne change pas d’orientation, l’Union européenne menace la légitimité des interdictions françaises.
Comme les rapporteurs de la proposition de résolution européenne, nous disons la nécessité, face aux lobbies, d’un groupe international de scientifiques indépendants et de haut niveau pour une bonne instruction, par la recherche publique, du dossier européen.
Il faut que les perturbateurs soient un thème de recherche prioritaire dans le cadre du programme-cadre pour la recherche et le développement. En effet, si l’on doit saluer le travail associatif et ses salutaires alertes, il est paradoxal que ce dernier, qui agit à titre bénévole, informe plus vite que les instances officielles de recherche et d’évaluation.
Mes chers collègues, parce que les perturbateurs restent omniprésents et dangereux, parce que la France doit rester ferme, parce que ce sujet nous rassemble, je vous invite à voter cette proposition de résolution.