Intervention de Michelle Demessine

Réunion du 25 octobre 2006 à 15h00
Secteur de l'énergie — Article 11

Photo de Michelle DemessineMichelle Demessine :

Cet amendement vise à faire en sorte que la société gestionnaire du réseau de transport de gaz soit détenue en totalité par des personnes morales de droit public, qu'il s'agisse d'entreprises publiques, de l'État ou d'autres entreprises ou organismes appartenant au secteur public.

Nous sommes parfaitement conscients que cette proposition est tout à fait contraire aux objectifs du présent projet de loi.

En effet, dès la mise en oeuvre des dispositions de l'article 10, et compte tenu du poids relativement réduit des capitaux publics dans le capital de Gaz de France, la filiale GRTgaz sera directement placée, par effet domino, dans l'oeil du cyclone d'une privatisation, ce qui est aussi dommageable que toute autre privatisation annoncée par ailleurs.

Dans ce contexte, qu'adviendra-t-il de la fameuse neutralité du transporteur ? Des intérêts privés étrangers pourront se trouver en position de mettre la main sur notre réseau de transport !

Qu'est-ce qui pourrait s'opposer à ce que, pour trouver quelques liquidités nouvelles, le groupe issu de la fusion entre Suez et Gaz de France soit amené à céder une part des actifs constitués à n'importe quel opérateur gazier d'origine étrangère, qui pourrait dès lors prendre d'autant plus facilement pied sur le territoire national qu'il ne s'agirait là que des conséquences mêmes de l'adoption du présent projet de loi ?

Mes chers collègues, je ne pensais pas que l'on s'autoriserait ainsi à créer les conditions juridiques permettant, par exemple, à Gazprom, géant gazier russe, de se porter acquéreur des tuyaux, c'est-à-dire du réseau de transport, avant même de faire main basse sur tout ou partie de la distribution.

Jusqu'à présent, nul n'a imaginé de meilleur garant de la neutralité que l'État républicain, qui est soucieux de l'intérêt public.

Une telle neutralité est nécessaire pour un gestionnaire de réseaux de transport qui souhaite mettre ses services à la disposition de différents partenaires en toute impartialité.

Or la privatisation de Gaz de France limitera au cénacle du futur conseil d'administration le pouvoir de décider des activités de la filiale chargée du transport, et ce au détriment de l'intérêt national, qui s'effacera derrière les exigences des actionnaires.

La privatisation « en domino » du transporteur aura pour effet la disparition du principe de neutralité, que le législateur avait pourtant prétendu vouloir défendre. Est-ce véritablement là ce que vous souhaitez ?

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