Les parents scolarisent leurs enfants dans des établissements musulmans pour des raisons de proximité ou pour conserver la possibilité d'y porter le voile. La réussite scolaire est également une motivation importante, car les parents sont très conscients de l'enjeu que cela représente pour l'avenir de leurs enfants, ce qui n'était pas le cas il y a quelques années. La communauté musulmane accorde beaucoup d'importance à l'éducation. La réussite scolaire est un défi à relever. Le lycée Averroès a été classé premier lycée de France en 2013, il était quinzième l'an dernier. Les parents font la queue pour y inscrire leurs enfants, parfois au prix de lourds sacrifices, car on recense 60 % de boursiers parmi nos élèves.
Je suis d'accord avec vous : l'Islam en France doit céder la place à l'Islam de France. Je participerai, le 21 mars prochain, à l'instance de dialogue avec le culte musulman qui se réunit une fois par an. On n'y règlera certainement pas tous les problèmes. Les États étrangers interviennent sans cesse dans l'Islam de France, parce qu'on leur en donne l'occasion. Le Conseil français du culte musulman (CFCM) est dans l'incapacité d'organiser le financement de nos établissements, il faut bien que les fonds viennent d'ailleurs. Le jour où nous réussirons à être indépendants financièrement, ce sera l'avènement de l'Islam de France. Comment trouver la solution ? On accumule du retard tant pour les lieux de culte que pour les établissements d'enseignement privé. Les instances étrangères perçoivent nos faiblesses et en profitent. Je rêve, inch' Allah, d'une indépendance totale. Les musulmans sont parfaitement capables d'assumer leurs responsabilités. Il faudrait ouvrir un vrai dialogue avec les pouvoirs publics pour trouver des solutions.
Imaginez que les frères Kouachi soient passés par un établissement privé musulman : cela aurait été catastrophique pour notre image. Heureusement, à l'époque, ce type d'établissement n'existait pas encore. Le plus ancien date de 1947, à la Réunion et de 2001 en métropole, avec la Réussite à Aubervilliers ou la Plume à Grenoble. Pour éviter ce genre de dérive, il faut prendre l'initiative dès le début et ne pas laisser le désordre s'installer. La société est éclatée. Les établissements privés musulmans scolarisent 5 000 élèves, qui sont aussi de futurs citoyens et des enfants de la République. Ils ont droit à un enseignement de qualité. La République a le devoir de les prendre en charge, que ce soit hors contrat ou sous contrat.