Absolument ! La crise des institutions politiques en Allemagne porte avant tout sur le système électoral, un point qui peut paraître secondaire à première vue. En France, faut-il introduire un peu plus de représentativité par un mode de scrutin proportionnel, afin que les citoyens aient le sentiment d'être mieux représentés au sein du Parlement ? Ce sujet me paraît essentiel, même s'il ne concerne pas directement votre mission d'information.
Compte tenu du niveau de participation très faible aux élections législatives, la question se pose de l'insatisfaction liée au mode de scrutin majoritaire à deux tours. Ce sentiment gagne également l'Allemagne, avec leur mode de scrutin qui donne l'impression que certains partis politiques sont protégés et presque immuables.
Cette crise affecte aussi les citoyens. Selon la grille de lecture très simple que nous donne le sociologue suisse Hanspeter Kriesi depuis une quinzaine d'années, l'observation des perdants et des gagnants de la mondialisation suffirait à expliquer largement les tensions populistes émergeant dans des pays qui en avaient été prémunis grâce au système démocratique. Or, de façon paradoxale, la France est l'un des pays européens qui ont le plus bénéficié de la mondialisation, mais où les citoyens y sont les plus hostiles.
Les institutions politiques auraient-elles manqué de pédagogie ? À mes yeux, ce terme n'est pas approprié, car il suppose que l'on ne dispose d'aucune autre explication. Or, il s'agit avant tout d'un problème lié à l'imaginaire des citoyens français concernant le rôle que doivent assumer leurs représentants. Il faudrait déconstruire cette vue selon laquelle le politique peut résoudre tous les problèmes.
Chacun s'accorde à reconnaître que l'électeur n'est pas rationnel. Or il en est de même du décideur politique. En France, il est faux de dire que le Parlement est totalement rationalisé. Pourtant, les citoyens attendent effectivement d'une décision publique qu'elle soit totalement rationnelle. Les enjeux de l'action publique sont bien plus nombreux aujourd'hui qu'ils ne l'étaient dans les années cinquante ou soixante, notamment depuis l'avènement du numérique et de l'accès à l'information, et pas seulement sur le terrain de la compétence ou de la responsabilité. Un décalage s'est créé, car les attentes de nos concitoyens sont plus fortes, alors que les institutions, elles, n'ont pas changé.