Député-maire de Bar-le-Duc, je me suis spécialisé depuis une quinzaine d'années sur la participation citoyenne. Je préside en effet le think tank « Décider ensemble » dont l'objectif est de développer la culture de la « décision partagée » en France. Son conseil scientifique rassemble des sociologues et des personnalités qualifiées, tandis que les fédérations des élus locaux, les organisations patronales et les associations environnementales sont présentes à son conseil d'administration.
En quinze ans, les mentalités ont beaucoup évolué : les élus qui refusaient par principe la concertation, au nom de la légitimité exclusive que leur conférait l'élection au suffrage universel, sont désormais très minoritaires.
Les collectivités territoriales de taille importante ont su se structurer pour répondre aux attentes des citoyens, en créant des services et des procédures spécifiques, tandis que les élus dans les petites communes sont, par définition, proches de leurs administrés. En revanche, les collectivités de taille moyenne ont plus de difficultés pour développer la participation des citoyens. J'ai pu notamment le constater il y a un mois à Bordeaux à l'occasion des « Rencontres de la participation », manifestation organisée par notre association et qui a rassemblé plus de cinq cents personnes, essentiellement des collaborateurs dans les collectivités territoriales. Les participants souhaitent que ce genre de rencontres se multiplient afin d'échanger sur leurs pratiques.
Au niveau national, la concertation est satisfaisante, notamment en raison de la convention d'Aarhus du 25 juin 1998 qui s'applique au volet environnemental des projets. L'ordonnance « Richard » du 3 août 2016 vient compléter la législation en renforçant les procédures destinées à assurer l'information et la participation du public à l'élaboration de certaines décisions susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement. Cette ordonnance prévoit des concertations plus en amont et vise également les petits projets. Ne modifions pas dans l'immédiat ces nouvelles règles, qui pourront ensuite être évaluées et ajustées si nécessaire.
Je voudrais toutefois apporter deux bémols à la législation actuelle. Tout d'abord, la période qui s'écoule entre la validation d'un projet et sa réalisation atteint parfois dix à quinze ans, voire davantage. Comme on le voit pour l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes et la liaison ferroviaire Lyon-Turin, un projet peut être amené à évoluer pendant cette période en raison de l'existence de nouvelles infrastructures ou d'autres projets. Il faut donc raccourcir les délais pour éviter les controverses. Ensuite, si la concertation est très bonne sur le volet environnemental des projets, tel n'est pas le cas pour les autres volets, notamment en matière d'urbanisme. C'est pourquoi je plaide pour une convergence des mécanismes de concertation en cette matière.
Je souhaiterais également une meilleure diffusion et coordination des pratiques et des méthodes de concertation. Les exemples étrangers peuvent être riches d'enseignement : ainsi, l'Office de concertation publique de Montréal favorise les débats publics en confiant leur animation à des personnes indépendantes. Enfin, en raison du développement de l'open data, nous devons réfléchir à la portée de la notion de transparence et des informations qui sont mises en ligne, en prenant en compte les contraintes des collectivités territoriales de petite taille.
Je me félicite de la création de votre mission dont la réflexion est bienvenue.