Intervention de Yannick Vaugrenard

Mission d'information Revenu de base — Réunion du 14 septembre 2016 à 14h30
Audition de représentants d'organisations représentatives de salariés

Photo de Yannick VaugrenardYannick Vaugrenard :

Nietzsche disait : « C'est la certitude qui rend fou ». Je n'ai donc pas de certitude. Cette mission est une mission d'information. Nous sommes là pour nous informer et nous forger une opinion. Pour moi, il n'existe pas de solution toute faite, qu'elle soit économique ou sociale, mais des discours qui font plaisir à ceux qui les écoutent.

Je veux faire preuve de beaucoup d'humilité. Je suis l'auteur d'un rapport sur la pauvreté, et j'interviens demain matin devant le Conseil national de lutte contre les exclusions, le CNLE, sur le vingt et unième critère de discrimination, une proposition de loi que j'ai déposée au Sénat, où elle a été adoptée à l'unanimité, moins quelques abstentions, ainsi qu'à l'Assemblée nationale.

Si j'ai voulu participer à cette mission d'information, c'est parce que je trouvais cruel le phénomène du non-recours. Le président du CNLE, M. Étienne Pinte, le rappelait : le non-recours représente dix milliards d'euros, ce qui est énorme !

Le RSA activité, selon M. Martin Hirsch lui-même, est un échec absolu, parce qu'il est compliqué, et délicat sur le plan administratif. Les hommes et les femmes - et, de plus en plus, les enfants - qui sont en situation de grande précarité en ont assez de raconter leur histoire une fois, deux fois, trois fois.

J'ai rédigé un certain nombre de préconisations. Je trouve terrible que nous soyons l'un des pays où la protection sociale est la plus forte pour ceux qui ont un travail, mais non pour les autres. Aujourd'hui, on compte deux millions de chômeurs. C'est un chiffre extrêmement important. Entre 9 % et 10 % de la population se situe en dessous du seuil de pauvreté, soit 987 euros par mois. Un enfant sur cinq est pauvre - un sur deux dans les zones urbaines sensibles.

Il s'agit d'une question d'urgence absolue. C'est pourquoi je participe à cette mission. Des propositions de loi pourraient être déposées. On pourrait prendre en considération ce qui a été dit par les uns et les autres. J'ai écouté chacun avec beaucoup d'attention. Je crois qu'il est indispensable de mener une expérimentation - avec les risques que cela peut bien entendu comporter - afin de sonder le terrain, puisqu'il n'existe nulle part de solution toute faite, pas plus en Finlande qu'ailleurs.

Il faut essayer de comprendre la réalité, mais en partant du fait qui, selon moi, s'impose à tous : cette pauvreté qui sévit dans notre pays - le pays des droits de l'homme - doit être impérativement combattue. Comment faire ? Le phénomène de non-recours est extrêmement important. Les choses ne se régleront pas d'un coup de baguette magique : nous devons être les porte-paroles de ceux qui n'ont plus la force de s'exprimer !

Je m'interroge, mais je n'ai pas de réponse. La réunion d'aujourd'hui ne m'en apporte pas. Tout juste fournit-elle quelques éclairages et dégage-t-elle quelques éléments que vous avez fournis les uns et les autres. Certains remèdes peuvent être pires que le mal. Soyons prudents. De grâce ! Faisons preuve d'une certaine forme de modestie et d'humilité. C'est compliqué, c'est difficile, mais l'objectif doit être partage par tous : il s'agit de lutter contre la pauvreté, et le plus rapidement possible !

Le revenu de base peut constituer un élément de cette lutte, à condition qu'on ne mette pas de côté les allocations chômage ou notre système de protection sociale. Ce ne peut être qu'un plus par rapport aux droits sociaux que nous sommes parvenus à conquérir collectivement, syndicalement et politiquement. On ne peut fermer la porte. Elle est ouverte. On a mis le pied en travers : essayons de voir comment cela peut fonctionner. Avançons en évitant les écueils, afin de déterminer si cela peut permettre d'éviter la grande pauvreté et l'exclusion.

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