Intervention de Michel Sergent

Réunion du 6 décembre 2008 à 14h00
Loi de finances pour 2009 — Article 78

Photo de Michel SergentMichel Sergent, rapporteur spécial :

Cet amendement, adopté à l’unanimité par la commission des finances, ne va pas dans le même sens que celui qu’a présenté à l’instant Pierre Martin, au nom de la commission des affaires culturelles. Il vise à proposer une nouvelle rédaction de l’article 78, d’une part, afin de limiter le DIC à la fraction de la rémunération des sportifs professionnels qui n’excède pas quinze fois le montant du plafond de la sécurité sociale, c’est-à-dire, à ce jour, 41 595 euros bruts par mois, soit le salaire moyen des footballeurs de ligue 1 durant la saison 2007-2008 et, d’autre part, afin de borner ce dispositif dans le temps pour qu’il prenne fin au 30 juin 2012.

Enfin, cet amendement reprend les dispositions de l’actuel article 78 relatives aux obligations d’information de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, qui doit, en effet, justifier auprès du ministère les remboursements qu’elle lui réclame pour cotisations non perçues.

Je dois dire que, moi-même, j’ai rencontré des difficultés lors de mon contrôle budgétaire sur le DIC, au début de l’année 2008, du fait de l’opacité qui prévaut à ce jour. Cet amendement reprend donc les conclusions du rapport d’information du mois d’avril dernier, adopté par la commission des finances ; je vous les rappelle brièvement.

Le DIC est inflationniste et coûte de plus en plus cher – il connaît une hausse de 15 % à 20 % chaque année – à un budget modeste, qui est appelé à se réduire encore au moins jusqu’en 2011.

Par nature, pour bénéficier à plein à quatre ou à cinq clubs de football, il s’oppose au simple maintien de tous les autres soutiens de l’État au sport, à la jeunesse et à la vie associative. Mesurez bien cela, mes chers collègues ! Les dernières lois de règlement des comptes l’ont déjà amplement montré. Celles à venir l’établiront de façon encore plus criante !

Ensuite, le DIC est un dispositif pro-cyclique, qui aide les clubs dans les temps faciles – lorsque les droits de télévision sont importants, les salaires augmentent, les exonérations augmentent, le budget du sport s’en trouvant réduit d’autant – et les pénalise dans les temps difficiles. Ce sont précisément les mécanismes de ce type qui sont dénoncés dans le cadre de la crise financière que nous traversons, car ils tendent à accentuer les tendances, dans un sens comme dans l’autre.

Enfin, si le DIC a pu aider des disciplines plus modestes à se structurer, notamment autour des conventions collectives, ce que remet d’ailleurs en cause l’actuelle rédaction de l’article 78, son efficacité mérite d’être sérieusement relativisée pour ce qui concerne la compétitivité des grands clubs de football.

On aime souvent nous citer des chiffres partiels, concernant des écarts de taux de charges entre la France et l’étranger qui, soit dit en passant, ne se limitent pas à l’univers du sport et correspondent aussi à des différences de prestations sociales.

Cependant, en raisonnant à la seule échelle qui vaille, celle des grandes masses, on s’aperçoit que le DIC ne pèse qu’environ 3 % du budget des clubs. Est-ce avec cela que nous les hisserons au niveau des clubs anglais ? Certainement pas !

D’ailleurs, comme je l’indique dans mon rapport, l’écart de recettes entre le Real Madrid et l’Olympique lyonnais est de l’ordre de 200 millions d’euros, soit le montant des crédits du programme « Sport » ! Tel est l’aboutissement de la logique du DIC, qui illustre la vanité de sa quête : il faudrait verser l’ensemble des crédits du programme « Sport » au bénéfice d’une seule équipe de football pour lui permettre d’arriver au niveau du club européen le plus riche !

Mes chers collègues, je connais le talent de persuasion des défenseurs du statu quo. Mais je vous ferai remarquer que ce qu’ils préconisent avec ardeur pour l’argent public, c’est-à-dire « plus pour les plus riches », ils ne le font pas avec leur propre argent, tiré des droits télévisuels. Ces sommes représentent pourtant plus du triple des crédits du programme et sont la seule masse monétaire à l’échelle des défis de nos clubs, en attendant qu’ils disposent de vrais stades du xxie siècle. Là encore, comme souvent, les conseilleurs ne sont pas les payeurs, et ils ne brillent pas toujours par leur cohérence.

Cher collègue Pierre Martin, vous avez écrit dans votre rapport que, s’agissant du DIC, au vu de ce que nous ne saurions pas encore, il est « urgent d’attendre ». Permettez-moi de vous dire que, au vu de ce que nous savons déjà et que j’ai essayé de rappeler, il est au contraire urgent d’agir !

Mes chers collègues, en nous apportant votre soutien, vous conforterez également le ministre qui, lors de son audition au Sénat, à laquelle vous assistiez, le 2 juillet dernier, a déclaré publiquement que le DIC n’était pas à la hauteur des écarts de compétitivité entre les clubs français et étrangers et que, dès lors, ce dispositif pourrait être plafonné, voire, à terme, supprimé.

C’est exactement ce que je propose au travers de cet amendement, en fixant un plafond plus que raisonnable à 41 595 euros par mois.

Mes chers collègues, dans la conjoncture actuelle, l’adoption de cet amendement serait une excellente chose.

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