Il y a une contradiction entre les missions attribuées au président de la République dans nos institutions et sa capacité à apporter des réponses. La demande croît, la réponse décroît ! La psychologie des personnes joue, certes, mais il s'agit avant tout d'un problème institutionnel, et le même problème se posera pour le prochain chef de l'État. Nous sommes typiquement dans un cas d'impasse bonapartiste : la réponse spontanée serait de renforcer les prérogatives de l'exécutif, alors qu'il faut au contraire le désencombrer ! Il faut aussi souligner l'épuisement du discours politique, qui oscille de façon spectaculaire entre des programmes démesurés, catégoriels, qui peuvent aller jusqu'à mille pages - à cet égard, nous avons franchi un seuil avec la primaire de la droite ! - et la réduction de la vision politique à des valeurs, dont la définition est par nature élastique.
La légitimité du pouvoir démocratique repose sur la capacité des citoyens à se reconnaître dans l'action menée. La délégation ne suffit pas. L'essentiel est l'effet de miroir entre l'action des représentants et les problèmes que le citoyen identifie, peu importe qu'il soit d'accord ou non. La lisibilité de l'action menée est primordiale. La « pulvérisation » de mesures dans des programmes pas toujours cohérents et l'évocation de valeurs vagues et partagées - nous sommes dans ce que j'appelle l'ère du « monothéisme des valeurs » -, donne une impression de confusion, d'enlisement dans des microdécisions dont la cohérence globale n'apparaît pas, et finalement d'impuissance à définir un projet structuré.