Intervention de Mgr Philippe Bordeyne

Mission d'information organisation, place et financement de l'Islam en France — Réunion du 17 février 2016 à 15h00
Audition de mgr philippe bordeyne recteur de l'institut catholique de paris

Mgr Philippe Bordeyne, recteur de l'Institut catholique de Paris :

On ne peut sans doute pas dire que le Coran ne tolère aucune interprétation. Certaines traditions musulmanes l'admettent.

Autant nous sommes devenus légitimes pour une grande partie des musulmans et des orthodoxes avec notre diplôme, autant nous ne le serions pas si nous voulions assurer leur formation théologique !

Il existe des formations comparables à celles que nous dispensons à Strasbourg et à Lyon. A Paris, deux autres ont vu le jour cette année. Cette pluralité est une bonne chose car elle permet aux étudiants de choisir.

Une partie de nos étudiants suivent notre formation parce qu'elle débouche sur le statut d'aumônier des hôpitaux, des prisons et de l'armée. Améliorer la situation financière des aumôniers de prison ferait sans doute naître de nouvelles vocations, d'autant plus que cette fonction est devenue extrêmement difficile pour un musulman. Un ancien étudiant devenu aumônier dans une prison de Seine-Saint-Denis m'a dit la violence qu'il subit au quotidien. Les anciens étudiants ont besoin de soutien et sont d'ailleurs en train de créer une association. L'aide de l'État serait bienvenue.

Pour moi, la question n'est pas forcément celle du texte dans le contexte. Si le rapport au texte est au coeur de nos enseignements, il faut présenter la diversité du rapport au texte, y compris dans les traditions religieuses. Au sein du catholicisme, le statut accordé à la Bible varie beaucoup selon les sensibilités spirituelles. L'interprétation spirituelle des textes fondateurs d'une religion est une question transverse, même si elle risque plus de heurter les musulmans. Parfois, nos étudiants étrangers s'interrogent et le doute s'installe, souvent pour des raisons culturelles. La question fondamentale n'est pas selon moi celle du rapport du texte au contexte, mais celle du rapport des croyances au contexte. Il y a le texte, mais aussi les façons de vivre, le rapport au culte, à la nourriture, à la tradition familiale qu'il ne faut surtout pas sous-estimer.

Oui, des Français d'origine musulmane suivent cette formation. Je pense à un Français musulman né en 1981, dirigeant d'une petite entreprise, président d'une association qui tisse du lien social. Un autre, né en 1983, est informaticien et il oeuvre dans une commune de l'Île-de-France contre la radicalisation. Lors de la dernière remise des diplômes, le conseiller pour les cultes de Bernard Cazeneuve a dit toute l'estime de la nation française pour leur engagement. Ce diplôme doit être le levain dans la pâte. Par l'aisance que leur a donné cette formation, ces personnes sont les ferments du vivre ensemble. La dimension religieuse de la citoyenneté est une des nouvelles dimensions de notre société.

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