Intervention de Michel Mayol

Commission d'enquête Compensation des atteintes à la biodiversité — Réunion du 7 février 2017 à 14h00
Audition de Mm. Philippe Frin et michel mayol membres du collectif « naturalistes en lutte »

Michel Mayol, membre du collectif « Naturalistes en lutte » :

La réserve n°2 souligne l'excessive complexité de la définition de la méthode compensatoire qui a limité la capacité du public à participer à l'élaboration de la décision publique. La réserve n°3 porte sur le caractère injustifié de la valeur des coefficients d'équivalence. La réserve n°7 mentionne la non-prise en compte de l'importance des crues. Les crues, comme celles de 2013 à Blain et de l'Isac, n'ont manifestement pas été prises en compte. La réserve n°10 indique également une incertitude quant aux mesures de compensation. Où trouver les surfaces sur les terres agricoles, sachant qu'une mesure de compensation est mise en oeuvre dans l'espace rural ? Les experts demandaient deux ans d'étude supplémentaires pour comprendre le fonctionnement des zones humides. Il n'en a rien été et leur avis n'aura été considéré que parmi les autres avis, dont ceux des différents commissaires enquêteurs, émis à cette occasion. De tels avis ne faisaient ainsi que s'ajouter aux autres avis négatifs exprimés. Comme l'a montré le jugement du tribunal administratif, le raisonnement économique prévaut sur tous les autres motifs. D'évidence, les porteurs de projets et l'autorité administrative sont loin d'avoir levé l'ensemble des réserves du collège des experts. Entre avril et novembre 2013, l'État et l'AGO ont fait travailler plusieurs bureaux d'études pour compléter leurs connaissances sur les insuffisances soulevées par les experts. Ces nouvelles prescriptions et études ne fournissent qu'une réponse marginale par rapport à l'ampleur des griefs des experts.

J'en viens à la sixième question : quel regard portez-vous sur le rôle joué par l'État en tant qu'autorité environnementale sur ce projet ? Cette question est en effet complexe. Le préfet et la DREAL sont juges et parties, et les procédures sont sous la pression des politiques. Il a en effet été impossible aux associations de solliciter les pouvoirs publics pour faire constater que les porteurs de projet n'avaient pas inventorié l'ensemble des espèces protégées présentes sur le site. Les demandes des associations présentes sur le site sont restées lettre morte et aucun agent assermenté ne s'est rendu sur les lieux.

Comme je l'ai précédemment évoqué, l'excessive complexité de la méthode compensatoire a réduit la capacité du public à participer à l'élaboration de la décision. Dans la procédure, deux commissions sont associées : la commission locale de l'eau (CLE) et le conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (CODERST). Ces avis doivent éclairer la décision de la préfecture. La complexité a été prise en compte lors de deux séances du bureau et de deux réunions plénières de la CLE, qui s'est prononcée favorablement avec un certain nombre de réserves. Lors de la séance du 10 juillet décisive pour l'avis, les trois collèges composant la CLE rassemblaient respectivement 26 des 50 représentants des collectivités territoriales, 14 des 25 usagers et des associations, et 16 des 19 représentants de l'État et de ses établissements publics. Cependant, lors de ses autres séances plénières, la participation de l'État était beaucoup plus faible. Concernant le passage en CODERST, un pré-CODERST, en date du 12 novembre 2013, a pris en compte la complexité du projet. Les documents papier ont été distribués par courrier à ses différents membres et les annexes mentionnées dans le rapport de présentation et les références citées ne correspondaient pas à celles de l'arrêté territorial. L'un des membres du CODERST a souligné qu'il fallait beaucoup trop de temps pour obtenir les informations requises en téléchargeant les documents via le site territorial.fr. Pour preuve, un agent de la préfecture a mis quarante minutes pour le faire ! Le compte-rendu mentionne ce point qui illustre la complexité de la démarche.

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