Intervention de Albéric de Montgolfier

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 29 mars 2017 à 9h10
Conclusions du groupe de travail sur le recouvrement de l'impôt à l'heure de l'économie numérique

Photo de Albéric de MontgolfierAlbéric de Montgolfier, rapporteur général :

La commission des finances du Sénat a été la première à ouvrir ce vaste dossier de la fiscalité des utilisateurs des plateformes en ligne, en particulier avec un rapport que Philippe Dallier et moi-même avions consacré aux douanes en 2013. Très étonnés de l'ampleur de la fraude à la TVA, nous avons alors entamé un long travail sur les différents aspects de la fiscalité des utilisateurs des plateformes en ligne, dont ce n'est pas aujourd'hui l'aboutissement. En effet, nous nous apercevons, au fil des auditions, que l'imagination est sans limite. Chaque jour se créent de nouvelles applications. Chaque jour, les technologies avancent et la fiscalité doit évidemment s'adapter. Dans cette situation, nous proposons non de changer en permanence les choses, mais de mettre au point un système simple et stable.

Je veux remercier tous les membres du groupe de travail. La synthèse que nous vous présentons ce matin devrait déboucher sur une proposition de loi qui sera, je l'espère, la plus consensuelle possible. Nous avons, me semble-t-il, tous travaillé dans le même esprit, éprouvant de l'admiration pour la créativité de l'économie collaborative, tout en ayant conscience des limites qu'il importe de poser. En effet, nous sommes membres de la commission des finances et sommes donc, à ce titre, particulièrement attentifs aux recettes fiscales et à l'égalité devant l'impôt.

L'économie collaborative n'est pas un simple phénomène de mode, elle est bien une tendance de fond. En Europe, elle a représenté 28 milliards d'euros de transactions en 2016, un montant qui a purement et simplement doublé en un an. Elle pourrait atteindre 572 milliards d'euros en 2025.

Cette économie intéresse avant tout les utilisateurs qui reçoivent les revenus - en effet, en moyenne, 85 % du montant des transactions reviennent à l'utilisateur. Elle crée de nouvelles opportunités d'échanges, ouvrant des possibilités de services inédites pour des millions de personnes. Elle rompt ainsi la frontière entre particuliers et professionnels, entre activité régulière et activité occasionnelle. N'importe quel particulier peut désormais devenir acteur de l'économie collaborative grâce à une application et un téléphone, et fournir des services ou échanger des biens. Cette facilité remet évidemment en cause les fondements mêmes de notre système fiscal et social.

Sans rappeler tous les chiffres qui figurent dans la synthèse, je relève que 350 000 logements sont à louer sur Airbnb en France : Paris est la première destination touristique de la plateforme. Par ailleurs, 18,5 millions de Français ont acheté sur Leboncoin en 2016. Enfin, 42 000 travailleurs indépendants, qui peuvent exercer différents métiers, proposent leurs compétences sur Hopwork. Les chiffres sont éloquents.

Cette nouvelle économie a longtemps donné l'impression, notamment en raison de tentatives de créer de nouveaux services un peu à la marge de la légalité, qu'elle se développait hors du droit, particulièrement en matière fiscale et sociale. Vous vous souvenez de l'épisode d'UberPop, vous n'avez pas oublié les problèmes d'Airbnb à Paris, vous avez vu la suspension de Heetch il y a quelques semaines. Au-delà des simples aspects fiscaux, d'autres problèmes se posent en termes de régulation et de réglementation. Il est donc nécessaire de clarifier les règles. Pour notre part, nous nous sommes concentrés sur les problèmes que pose cette économie sous l'angle fiscal et social.

Aujourd'hui, il est clair qu'une prise de conscience est en cours. Et je tiens à le dire, le Sénat est largement à l'origine de cette prise de conscience. Je me souviens d'un entretien avec le ministre de l'économie et des finances, Michel Sapin. L'impression que nous avons eue au tout début du processus, lors des contrôles que nous faisions, Philippe Dallier et moi-même, c'est que l'administration découvrait un peu le problème. Aujourd'hui, la prise de conscience a avancé. J'en veux pour preuve que le Gouvernement a publié il y a deux mois cinq fiches explicatives qui décrivent les obligations sociales et fiscales applicables aux revenus tirés des activités sur les plateformes collaboratives. Cela montre que l'administration tente de clarifier un peu les choses !

Toutefois, ces fiches sont singulièrement compliquées : à la lecture, il apparaît très qu'un raisonnement à droit constant, qui est le choix du Gouvernement, pose problème. Concrètement, on a tenté d'appliquer le droit fiscal existant à cette économie collaborative, au motif que les règles actuelles sont suffisantes pour appréhender l'ensemble des situations. Sans doute est-ce vrai en partie. Il n'en demeure pas moins que, en agissant de la sorte, le Gouvernement n'a pas vraiment rassuré. Il a même parfois effrayé nos concitoyens qui, après avoir essayé de comprendre les règles et après avoir pris connaissance des formulaires et procédures, se sont aperçus de cette extrême complexité.

En matière fiscale, on entend parfois parler de « zone grise », une zone dans laquelle il n'y aurait pas de taxation. C'est totalement inexact, car tous les revenus sont en théorie imposables au premier euro, quelle que soit leur nature, et même s'ils ne sont qu'occasionnels ou accessoires. Les revenus doivent être déclarés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, les BIC, ou non commerciaux, les BNC, et peuvent le plus souvent relever du régime micro-fiscal.

Au-delà des BIC et des BNC, il existe plusieurs autres régimes, très compliqués, mais il n'existe pas d'exonération en matière fiscale - à deux exceptions près : d'abord, les ventes de biens d'occasion, ceux que l'on trouve dans un vide-grenier, sur Leboncoin ou par petites annonces et qui sont normalement exonérées ; ensuite, le partage de frais, qui vise essentiellement le covoiturage, défini de manière très stricte par l'instruction fiscale du 30 août 2016, laquelle autorise un conducteur à se faire rembourser une quote-part de ses frais en les partageant avec d'autres utilisateurs de sa voiture dès lors qu'il ne réalise aucun bénéfice. En revanche, si vous prêtez votre voiture, votre perceuse ou votre ordinateur, ce qui peut, après tout, paraître relever du partage de frais ou d'une forme d'amortissement, vous êtes théoriquement taxable au premier euro, à quoi il faudrait ajouter les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine, soit 15,5 %. Vous le constatez, les règles ne sont pas si faciles à appliquer.

En matière de prélèvements sociaux, la situation est plus compliquée : en l'occurence, on peut considérer qu'il y a bien une zone grise. Il n'existe aujourd'hui aucun critère permettant de distinguer clairement entre particuliers et professionnels, notamment les travailleurs indépendants. Il n'existe aucun minimum en termes de revenus ou de temps passé. Lorsque nous sommes allés en Allemagne, nous avons vu une plateforme qui vendait des objets faits à la main, des travaux au crochet, de magnifiques créations, par exemple, un couvre-théière rose... Si vous pratiquez à titre occasionnel dans votre atelier une activité artisanale, faite à la main, si vous êtes un amateur et vendez vos propres tableaux ou quelques photos de votre cru, cette pratique est susceptible d'entraîner une affiliation obligatoire au régime social des travailleurs indépendants, et ceci au premier euro perçu. Cette obligation entraîne ipso facto l'assujettissement aux cotisations sociales, à la cotisation foncière des entreprises, aux taxes pour frais de chambre consulaire ; elle implique l'enregistrement au registre du commerce et des sociétés ou au registre des métiers, sans oublier une multitude d'obligations sectorielles : stages de qualification, certifications, normes d'hygiène et de sécurité...

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 a apporté une réponse partielle en fixant deux seuils d'affiliation obligatoire à la sécurité sociale, soit 7 846 euros par an pour la location de biens et 23 000 euros par an pour les locations meublées de courte durée. En revanche, il n'existe toujours aucune règle claire applicable aux ventes de biens et aux services. La réponse est donc imparfaite.

Et si elle est imparfaite, c'est parce que l'ensemble des règles aujourd'hui applicables ont été conçues au XXe siècle, à une autre époque, celle du monde physique, alors que nous passons de plus en plus à des échanges virtuels. Avant, les vendeurs et les acheteurs intervenaient sans passer par des plateformes numériques. Les règles n'étaient pas remises en cause parce que, dans la pratique, elles n'étaient quasiment pas appliquées. On le savait, beaucoup d'argent liquide circulait dans les vide-greniers ou pour du babysitting, mais aucune plateforme d'échanges n'industrialisait les transactions.

Il régnait une sorte de tolérance implicite parce que l'administration fiscale considérait, peut-être à juste titre, que c'était une source de revenus un peu marginale et qu'il n'y avait pas lieu d'importuner les gens pour autant. Aujourd'hui, il en va autrement, car les personnes affiliées à Airbnb ou celles qui travaillent sur des plateformes de VTC peuvent tirer de leurs activités une part significative, voire prépondérante de leurs revenus. Cela ne se limite plus à l'étudiante qui pratique quelques heures de babysitting par semaine.

Avec les plateformes numériques, les échanges entre particuliers ont pris un caractère massif, standardisé, industriel. Avec le numérique, les masses sont devenues énormes, mais en même temps toutes les transactions ou presque sont devenues traçables : en effet, à la différence du vide-grenier où tout se fait en espèces, sur la plateforme d'échanges, le paiement passe en général par cette dernière.

Aujourd'hui, la situation est doublement insatisfaisante. En effet, il y a, d'un côté, des particuliers qui sont de bonne foi, qui ne sont pas des fraudeurs fiscaux, mais qui ne comprennent pas les règles, car elles sont très complexes et souvent confuses. Ces personnes n'ont pas envie de s'affilier à des régimes compliqués. Et puis, il y a, de l'autre côté, l'administration qui, faute de pouvoir faire respecter ses règles - il serait ridicule de faire porter des contrôles sur tous les particuliers ! -, baisse un peu les bras. Du coup, un certain nombre de professionnels échappent aux obligations fiscales et sociales et gagnent des revenus substantiels. Il peut s'ensuivre des situations de concurrence déloyale.

Pour ma part, je ne suis pas toujours un ardent défenseur des services de taxi, mais je peux comprendre leur point de vue : d'un côté, il y a des chauffeurs de taxi qui paient l'impôt sur le revenu et des charges sociales et, d'un autre côté, il y a des chauffeurs de VTC qui peuvent échapper à ces obligations. Il s'ensuit donc une distorsion de concurrence. Il en va de même pour les hôteliers, qui paient toutes leurs charges et se trouvent face à des particuliers qui proposent en permanence leur appartement sur une plateforme sans subir les mêmes contraintes. Là aussi, il y a distorsion de concurrence. Il est donc indispensable de donner un cadre fiscal et social adapté à l'économie collaborative.

Vous le savez, des avancées sont intervenues. Dès 2018, les plateformes pourront commencer à déclarer les revenus de leurs utilisateurs à l'URSSAF. Dès 2019, elles devront faire une déclaration à l'administration fiscale. C'est donc un dispositif de déclaration automatique qui a été adopté l'année dernière.

Le Sénat a un peu poussé les choses. En effet, nous avions à deux reprises, à une très large majorité - contre l'avis du Gouvernement -, adopté ce système de transmission automatique. La troisième fois, nous avons finalement eu gain de cause : la déclaration automatique des revenus est maintenant entrée dans le droit positif. En outre, les plateformes doivent désormais informer les utilisateurs de leurs obligations fiscales et des revenus qu'ils ont perçus au cours de l'année, par l'envoi d'un récapitulatif des transactions.

Notre groupe de travail veut aller plus loin. Nous présentons de nouvelles propositions, élaborées sur un mode collégial et non partisan. Nous avons réalisé près de cinquante auditions en France et à l'étranger. Nous nous sommes déplacés à San Francisco et à Seattle, à Londres, à Bruxelles, à Berlin. Nous avons compilé tous les rapports et pris connaissance des expériences étrangères.

La conclusion est très simple : nous sommes convaincus que l'encadrement de l'économie collaborative doit passer par la mise en place d'un régime fiscal et social global, applicable à toutes les plateformes, à tous les utilisateurs. Pour ce faire, nous avons retenu trois principes simples : simplicité pour les utilisateurs, lesquels ne sont pas des professionnels du droit fiscal ; unité entre le domaine fiscal et le domaine social ; équité entre les contribuables - il ne doit pas exister de distorsion de concurrence, il n'y a aucune raison qu'un secteur soit taxé tandis que l'autre ne l'est pas.

Nous n'avons pas souhaité remettre en cause les grands équilibres existants, ni édicter des règles sectorielles. Surtout, nous n'avons pas souhaité créer de nouvel impôt. Si nous avons fait ce choix, c'est notamment pour tenir compte du problème de localisation des plateformes. Le risque de créer un impôt à la transaction ou au clic, c'est de voir demain toutes les plateformes quitter la France. Nous avons, certes, quelques champions, comme Blablacar, mais beaucoup de ces plateformes sont d'origine étrangère ou installées hors de nos frontières. Avec la taxation au clic, le principe de territorialité ferait fuir la plupart des plateformes hors de France.

Nous avons réfléchi à une solution permettant d'exonérer les petits compléments de revenus ou ce qui peut être considéré comme un remboursement de frais. C'est la raison pour laquelle nous avons proposé un seuil, que nous avons affiné. Concrètement, notre proposition permet de distinguer celui qui pratique vraiment une activité occasionnelle ou très accessoire de celui qui tire de son activité une source importante, voire principale de ses revenus. Le coeur de notre proposition consiste à faire naître un cercle vertueux en créant un avantage fiscal lié à la déclaration automatique des revenus.

La première proposition vise donc à créer un seuil unique et transversal - fiscal et social - de 3 000 euros. En matière fiscale, ce seuil prend la forme d'un abattement minimal, qui s'applique de manière alternative aux abattements proportionnels de droit commun et qui est valable pour l'ensemble des revenus tirés des plateformes en ligne.

L'utilité de cet abattement forfaitaire, c'est qu'il s'annule de lui-même dès lors que l'abattement proportionnel de 71 %, de 50 % ou de 34 %, qui dépend de la catégorie d'activité au sein du régime micro-BIC ou du régime micro-BNC, devient plus favorable. Il n'y a donc ni effet de seuil ni distorsion de concurrence. Si votre revenu perçu via des plateformes en ligne est compris entre zéro et 3 000 euros, vous êtes totalement exonéré d'impôt : ces petits compléments de revenu accessoires et occasionnels sont considérés comme relevant de l'économie de partage. Si votre revenu est supérieur à 3 000 euros, l'avantage fiscal joue encore tant qu'il est plus favorable que l'abattement proportionnel, avec un « seuil de sortie » variable selon les activités : 4 225 euros par an pour les ventes de biens et 6 000 euros pour les services, les locations d'appartements ou de voitures.

Au-delà, l'avantage de ces différents seuils est totalement neutre. Autrement dit, si votre activité vous procure un revenu significatif, vous êtes traité exactement comme n'importe quel professionnel.

Dans tous les cas, un revenu exonéré par nature demeure exonéré même au-delà de 3 000 euros : il est important de préciser que le dispositif ne taxe pas le covoiturage, le partage de frais ou encore la vente de biens d'occasion, même au-delà de 3 000 euros.

En matière sociale, nous proposons de transposer le seuil de 3 000 euros sous la forme d'une présomption du caractère non professionnel de l'activité. Si l'utilisateur ne gagne pas plus de 3 000 euros par an, il n'est pas obligé de s'affilier à la sécurité sociale en tant que travailleur indépendant, avec toutes les charges et contraintes que cela impose. Au-delà de 3 000 euros, l'affiliation au RSI s'apprécie au cas par cas : ce que change ce seuil, c'est qu'il permet de « protéger » les petits revenus occasionnels, en garantissant qu'ils ne justifient jamais une affiliation tant que les 3 000 euros ne sont pas dépassés. Il s'agit donc non pas d'un « seuil plafond », mais d'un « seuil plancher ». À cet égard, nous ne modifierons pas les deux « seuils plafonds » proposés par la loi de financement de la sécurité sociale : 7 846 euros pour la location de biens et 23 000 euros pour les logements.

Pourquoi avoir retenu 3 000 euros plutôt que 5 000 euros, comme nous l'avions fait dans nos précédentes propositions ? Ce niveau correspond à 250 euros bruts par mois ou à un peu moins de 60 euros par semaine. C'est environ un sixième du SMIC, ou encore la moitié du RSA. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) considère que c'est aussi la moitié du coût annuel moyen d'un véhicule pour un particulier.

Ce seuil est compatible avec ceux qui nous ont été transmis par les plateformes elles-mêmes, le revenu annuel perçu par les particuliers sur ces sites étant souvent modeste - 350 euros sur Stootie, 700 euros sur Drivy, 400 euros sur Leboncoin.

Ce qui est important, c'est le seuil unique, qui est beaucoup plus visible et compréhensible que de multiples seuils sociaux et fiscaux.

Nous nous sommes renseignés sur ce qui se pratique dans les autres pays. En Belgique, c'est un seuil de 5 000 euros avec un prélèvement libératoire de 10 % en-dessous. Pour le Royaume-Uni, c'est deux fois 1 000 livres sterling, avec une exonération en-dessous. Pour l'Italie, une proposition de loi fixe le seuil à 10 000 euros, avec un prélèvement libératoire en-dessous. Nous sommes donc dans la moyenne européenne.

Vous ne manquerez pas de me demander si les plateformes vont jouer le jeu. C'est évidemment la question. Aujourd'hui, on ne peut pas dire qu'il y ait une excellente coopération de la part de plateformes étrangères pour transmettre les revenus des utilisateurs. Installées aux Pays-Bas, au Luxembourg ou en Irlande, elles considèrent qu'elles ne sont pas soumises au droit de communication de l'administration fiscale française.

Notre idée, très simple, c'est qu'il faut une carotte : c'est une démarche volontaire associée à un avantage fiscal. Les utilisateurs donneront leur accord au moment de leur inscription, et les plateformes pourront choisir de s'inscrire dans cette démarche ou pas.

Cette démarche est incitative puisque seuls les revenus déclarés automatiquement bénéficieront de l'avantage de 3 000 euros. Il deviendra tout à fait intéressant pour la plateforme de transmettre les revenus, car la condition pour bénéficier de l'abattement de 3 000 euros, c'est d'avoir souscrit à la transmission automatique. Pour les utilisateurs, la plateforme deviendra compétitive lorsqu'elle sera agréée et qu'elle offrira l'abattement de 3 000 euros.

Le système est simple. Il suffit à l'utilisateur de donner son accord et de fournir son numéro d'identification.

Cette déclaration automatique existe ailleurs. Aux États-Unis, elle est pratiquée au niveau fédéral, c'est le formulaire 1099 K rempli pour le compte de l'utilisateur par les intermédiaires, comme nous l'avons constaté à San Francisco. En France, cela va même plus loin avec la collecte de la taxe de séjour par Airbnb. Initialement prévue pour Paris, elle est aujourd'hui étendue à 50 villes. Concrètement, cela veut dire que les plateformes peuvent collecter les taxes. L'Estonie a signé un accord avec Uber permettant la déclaration automatique des revenus des chauffeurs, et le système devrait être étendu à l'ensemble des plateformes dès l'année prochaine. Puisque cela existe à l'étranger, nous pourrions le faire en France dès lors qu'il y aura un peu de volonté. Le système du volontariat nous paraît le meilleur moyen d'amener les plateformes à se rallier au système de déclaration automatique.

Notre proposition de loi comporte un certain nombre d'autres mesures. Nous avons adapté un certain nombre de règles aujourd'hui obsolètes. Ainsi, il est interdit aux particuliers de participer à plus de deux « ventes au déballage par an », et de fournir à cet effet une attestation sur l'honneur. Dans la pratique, je ne pense pas que les gendarmes vérifient...

Nous proposons aussi de présumer l'accord du supérieur hiérarchique pour les agents publics qui participent à l'économie collaborative.

Nous proposons de créer un « rescrit économie des plateformes » pour leur permettre de faire valider en amont les règles internes qu'elles mettent en place pour distinguer les professionnels des particuliers.

Nous proposons également de faire de la certification des plateformes un véritable label, et de renforcer les outils du contrôle fiscal. Dans l'actuel système de contrôle fiscal, on lance des filets un peu partout, mais cela ne donne pas grand-chose. Mieux vaut concentrer les efforts de l'administration fiscale sur les plateformes qui ne seraient pas rentrées dans le système, c'est-à-dire celles qui n'accepteraient pas de transmettre les revenus, et seraient alors présumées non coopératives.

Nos propositions ont été assez bien reçues. Elles n'ont pas suscité d'hostilité chez les acteurs traditionnels - je pense notamment aux hôteliers et aux taxis qui souhaitent que l'économie collaborative soit soumise à un minimum de règles d'équité sur le plan fiscal et sur le plan des prélèvements sociaux. Certaines des plateformes sont d'ailleurs demandeuses d'une clarification des règles pour entrer dans une forme de droit commun où les choses seraient simples. Elles demandent seulement qu'on n'en rajoute pas dans la complexité. Un système comportant de multiples seuils, obligations, formulaires de toutes sortes, ne serait pas adapté. Il faut un système simple, automatique. Et nous proposons une formule compréhensible par tous et facilement accessible.

Avant l'élection présidentielle et les législatives, le moment nous paraît opportun pour faire bouger les choses. Sans doute y aura-t-il un collectif budgétaire cet été. La commission des finances du Sénat a permis de faire prendre conscience qu'il faut évoluer sur ce sujet. Le moment est venu pour faire avancer ces idées, largement partagées et qui reposent sur un travail extrêmement approfondi.

Je remercie tous les collègues de leur implication sur ce sujet absolument passionnant. Nous ne sommes qu'au début de la révolution !

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