Intervention de Patrick Jeantet

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 19 avril 2017 à 14h50
Contrat de performance état-sncf réseau — Audition de M. Patrick Jeantet président-directeur général de sncf réseau

Patrick Jeantet, président-directeur général de SNCF Réseau :

Je vais tâcher de répondre aux questions dans l'ordre.

Premièrement, la dette augmente de 17 milliards d'euros, passant de 43 milliards d'euros à la fin de l'année 2016 à 60 milliards d'euros en 2026. Le taux d'intérêt qui a été retenu s'établit à 3 %. En effet, il ne faut pas oublier que notre dette a une histoire et, il y a sept ou huit ans, les taux d'intérêt étaient plus élevés qu'aujourd'hui. Aujourd'hui, on emprunte à 1 % environ, mais, voilà quelques années, les taux étaient encore de 5 ou 6 %. Le taux moyen est donc de l'ordre de 3 %. On continue sur cette base. On ne prend pas de risque sur les taux : on garde, à 80 %, des taux fixes.

Avec 3 milliards d'euros de dette supplémentaire et 2 milliards d'euros de dette renégociée chaque année, le taux moyen baisse d'année en année. Il continue à baisser, y compris avec la légère remontée des taux que l'on a observée récemment - on dispose donc d'une petite marge sur ce plan.

D'ailleurs, à ce titre, nous avons lancé deux émissions obligataires de green bonds, qui sont des obligations de développement durable. SNCF Réseau est le premier gestionnaire d'infrastructures européen à émettre des green bonds. C'est un atout pour SNCF Réseau, qui démontre évidemment l'attention portée au développement durable du ferroviaire français. C'est important, car on oublie trop souvent, dans l'équation financière, que le système ferroviaire français permet d'économiser quelque 10 millions de tonnes de CO2 par an.

Deuxièmement, ce n'est pas SNCF Réseau qui décide de la fermeture de lignes, en particulier de petites lignes. C'est l'État qui en décide. Les régions jouent évidemment un rôle important sur les lignes dites « régionales ». Cependant, nous éclairons le débat. Voilà un an, nous avons commencé à établir un diagnostic prospectif de l'état du réseau régional à cinq ou dix ans, région par région, ligne par ligne, en évaluant les investissements nécessaires, de telle manière que les financeurs - la région, l'État et nous-mêmes - puissent disposer d'une visibilité. Cela n'existait pas auparavant. Mais ce n'est pas à nous qu'échoit, in fine, la décision de fermer les lignes.

En revanche, nous baissons temporairement la vitesse des trains sur certaines lignes qui nécessitent d'être renouvelées. Cela a évidemment un impact sur la qualité de service. Aujourd'hui, pas loin de 4 000 à 5 000 kilomètres de lignes sont concernés par des limitations temporaires de vitesse, soit parce qu'elles ne peuvent pas être renouvelées immédiatement, soit du fait de travaux, pour des questions de sécurité.

Pour ce qui concerne le niveau de péage dans le cadre de l'ouverture à la concurrence, il faut savoir que, pour les TER, le prix payé par les voyageurs correspond aujourd'hui, en moyenne, à 30 % du prix, 70 % étant subventionné par la région. Une diminution des péages n'impacte donc pas le voyageur final ou la capacité du système à absorber plus de voyageurs ; elle impacte plutôt les finances de la région. Dans le cadre de l'ouverture à la concurrence, essentiellement des TGV, le niveau de péage sera le même pour tous les opérateurs. Cela n'aura donc pas d'impact direct sur la concurrence ! Le sujet majeur pour un nouvel entrant dans le système des grandes lignes sera plutôt l'investissement dans le matériel roulant et l'endroit où il maintiendra ce matériel. Il faudra bien évidemment payer up front cet important investissement. Tel sera donc le critère ! Cela me fait dire, à titre personnel, que la concurrence sera sans doute plus forte dans le domaine des TER, qui est contractualisé avec appel d'offres, que dans celui des TGV, même si certains saisiront certainement l'opportunité d'ouvrir de grandes lignes.

Je reviens sur les 46 milliards d'euros d'investissements, que je vais tâcher de présenter de manière aussi détaillée que possible.

Tout d'abord, 28 milliards d'euros seront investis dans le renouvellement du réseau structurant et des noeuds ferroviaires les plus importants, soit quelque 3 milliards d'euros par an avant productivité. Évidemment, ce montant baisse après productivité, pour s'établir entre 2,9 et 2,7 milliards d'euros. Mais on retrouve bien dans le contrat les fameux 3 milliards d'euros avant productivité que le Premier ministre Manuel Valls avait annoncés en mai 2016, soit 27 milliards d'euros au total après productivité.

La mise en conformité bénéficiera de 4,5 milliards d'euros d'investissements, avec l'hypothèse que, peu à peu, c'est l'État qui, sur ses finances propres, subventionnera cet effort, avec ou sans les collectivités suivant les endroits. Je rappelle qu'une grosse part de la mise en conformité tient à l'application de la loi d'accessibilité.

Les investissements industriels et les systèmes d'informatique se verront allouer une somme de 1,8 milliard d'euros sur dix ans, au lieu d'à peu près 300 millions d'euros annuels actuellement. En effet, les dépenses baisseront quand le rattrapage aura été réalisé en la matière.

Les contrats de plan État-région totalisent quant à eux 12 milliards d'euros. Pour définir cette somme, nous avons prolongé au-delà de 2020 les CPER tels qu'ils ont été renégociés récemment. Nous avons donc considéré que le niveau d'investissement resterait le même au-delà de 2020 - bien évidemment, la situation dépendra des CPER. Je rappelle que le contrat prévoit une clause de revoyure au bout de trois ans. Quelqu'un a fait remarquer qu'un contrat de dix ans était irréaliste. De fait, il est absolument certain que la dixième année est beaucoup plus volatile que la première ! Elle est même très volatile ! La clause de revoyure permettra de revoir tous les fondamentaux, en fonction de ce qui s'est passé sur les trois premières années et de la stratégie pour le futur.

Pour ce qui concerne la productivité des personnels, il est très clair que le cadre social est contraignant et nous limite sur un certain nombre de sujets. Nous allons devoir nous attaquer à la polyvalence. C'est, pour nous, un sujet majeur. Il faut savoir que, pour faire face à la concurrence, SNCF Fret a beaucoup avancé sur la polyvalence. Il se trouve que le directeur des ressources humaines de SNCF Fret va devenir celui de SNCF Réseau à compter du 1er juin prochain. La polyvalence, qui me paraît, effectivement, une source de productivité intéressante, est un thème que je compte évidemment aborder avec lui. Je sais que SNCF Fret a aussi travaillé sur la question de la mobilité.

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