Intervention de Rémy Pointereau

Commission d'enquête Compensation des atteintes à la biodiversité — Réunion du 5 avril 2017 à 14h35
Examen du projet de rapport

Photo de Rémy PointereauRémy Pointereau :

Notre commission d'enquête a mené de nombreuses auditions et plusieurs déplacements.

M. Trillard le relève avec raison, rien ne justifie qu'un tel dossier soit traité de la même façon que les questions relevant du secret défense.

Il me semble qu'à l'origine, nous souhaitions éviter que des chapitres du rapport soient consacrés aux projets, par souci d'objectivité et afin de ne pas gêner les acteurs de tel ou tel dossier. C'est toutefois la structure qui a été retenue. Ainsi, à la page 161, il est question des étapes successives du projet de Notre-Dame-des-Landes ; pourquoi n'y est-il pas fait mention du référendum local ?

Cette précision étant apportée, je me suis efforcé de répertorier les points positifs des neuf thèmes abordés.

Au chapitre 2, l'autorisation environnementale unique est une bonne mesure de simplification.

Au chapitre 3, relatif à la méthodologie pour une mise en oeuvre souple et efficace de la compensation, une approche plus fine des fonctionnements des écosystèmes me semble également pragmatique.

Pour ce qui concerne le chapitre 4, il est souhaitable de s'appuyer sur les collectivités territoriales pour la planification de la compensation. C'est le moyen de dresser un inventaire au plus près du terrain. Mais il faut veiller à ce que des financements supplémentaires ne soient pas encore demandés aux collectivités !

Au chapitre 5, il serait intéressant de composer un guide pratique pour la séquence ERC, en tenant compte des retours d'expérience.

On ne peut qu'approuver la meilleure intégration du monde agricole à la concertation proposée au chapitre 6. C'est un choix de bon sens.

À propos du chapitre 8, je souligne que l'on ignore encore totalement les surcoûts induits par la compensation.

En parallèle, je tiens à formuler quelques questions et à relever divers points négatifs.

Au chapitre 1er, on évoque une meilleure connaissance de la biodiversité et une plus grande précision de la fragmentation des milieux ; la formulation me laisse un peu perplexe. J'ai peur qu'elle ne soit sujette à interprétation de la part de l'administration.

Au chapitre 2, pourquoi vouloir encore modifier le code de l'environnement par voie d'amendement ? Pourquoi vouloir ajouter de nouveaux critères, en particulier pour les problématiques du foncier ?

Au chapitre 3, consacré à l'amélioration d'une mise en oeuvre souple et efficace de la compensation, j'observe comme une forme de schizophrénie. On veut simplifier, mais on accroît les contrôles confiés à l'administration pour limiter les atteintes à la biodiversité ordinaire, alors que le sujet est traité de manière sereine et tout à fait satisfaisante avec les fédérations de chasseurs. Dans une telle logique, il faudrait déployer des agents et des services supplémentaires sur le terrain.

Au chapitre 4, il est bel et bien intéressant de s'appuyer sur les collectivités territoriales. Mais, tout en invoquant la souplesse, on propose de durcir le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires, le SRADDET, ce qui va accroître les difficultés de mise en oeuvre de la compensation.

Au chapitre 5, il est proposé d'engager un processus de certification des bureaux d'études dès lors que les mesures de compensation seront stabilisées : les bureaux d'études devront donc commencer leur travail sans savoir si ce dernier pourra ou non être certifié ? Qui paiera ces études qui, j'insiste, seront réalisées quoi qu'il arrive ? De même, où est la souplesse quand on parle de renforcer les exigences réglementaires pesant sur la qualité des inventaires initiaux ?

Au chapitre 6, quand on propose d'harmoniser les barèmes de rémunération des agriculteurs, propose-t-on un système national ou régional ? Quoi qu'il en soit, une telle ambition ne me paraît pas tout à fait logique. Il faut tenir compte des différences de qualité de sol et de cultures : un hectare de vigne n'a pas la même valeur en Bourgogne, dans le Bordelais ou dans la Creuse. J'ajoute que l'on ne parle jamais de l'indemnité en faveur des agriculteurs pour les pertes financières de l'exploitation, le préjudice moral, l'allongement de parcours, le morcellement, les différences de qualité de sol. On risque d'aboutir à une double peine. Or il s'agit d'un des problèmes majeurs qui se posent lors de l'aménagement des grandes infrastructures.

Au chapitre 7, le dispositif destiné à garantir un consensus autour de l'expertise scientifique m'apparaît, lui aussi, comme un risque de complexification. Il aboutit à ajouter une concertation facultative en amont de l'étude d'impact. En conséquence, on allonge encore les délais.

Enfin, pour ce qui concerne l'amélioration du suivi des mesures de compensation dans le temps, il faut garder à l'esprit que l'échec d'une procédure n'a pas forcément un responsable spécifique : une mesure peut être inopérante pour telle ou telle raison indépendante de la volonté du conseil scientifique. De plus, qui assumera les surcoûts, notamment pour donner des moyens matériels aux comités de suivi ? Les associations environnementales seront-elles chargées de cette mission ? Quel rôle ces comités joueront-ils précisément ?

Quant à la localisation dans les nouveaux plans locaux d'urbanisme (PLU) des différentes zones de compensation, elle me paraît contestable, d'autant que le Sénat vient de voter un texte de simplification destiné à faciliter la construction.

En définitive, j'observe beaucoup de points négatifs.

La compensation en éloignement du projet n'est pas clairement proposée.

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