J’aurais souhaité prendre la parole au début de l’examen de l’article 2 puisque cet article ouvre le titre II sur les dispositions relatives à la « prévention des conflits d’intérêts ». Je tenais à partager quelques réflexions.
Nous allons débattre toute la semaine de « démocratie », de « confiance », de « lutte contre les conflits d’intérêts », de transparence de l’activité des représentants d’intérêts – notre collègue Alain Fouché vient de les évoquer –, et je ne peux que m’en réjouir.
En toute logique, j’avais déposé un amendement qui prévoyait de modifier le code des relations entre le public et l’administration, afin de retirer de la liste des documents non communicables aux citoyens les décisions de l’exécutif et de permettre, en particulier, la publicité des délibérations ministérielles et des réunions interministérielles.
Cet amendement conservait le principe de non-communicabilité des documents préparatoires, et préservait les garanties protégeant le secret défense, la politique extérieure de la France et la sûreté de l’État. Quoi qu’on en pense au fond, il méritait d’être débattu en séance ce jour, car il portait sur le cœur de la question de la transparence – celle des décisions de l’exécutif –, sans laquelle il ne peut y avoir de confiance.
Or cet amendement a été déclaré irrecevable en commission des lois ce matin, au motif qu’il serait un cavalier législatif au sens de l’article 45 de la Constitution, et donc hors sujet.
Je rappelle qu’aux termes de l’alinéa 3 de l’article 48 du règlement du Sénat, « les amendements sont recevables s’ils s’appliquent effectivement au texte qu’ils visent ou, en première lecture, s’ils présentent un lien, même indirect, avec le texte en discussion ».
Dès lors, nous ne pouvons pas débattre de l’opacité des décisions de l’exécutif en raison de l’opacité des décisions d’irrecevabilité de nos amendements contre lesquelles les parlementaires n’ont aucun recours.
Déclarer irrecevable un amendement d’initiative parlementaire, c’est empêcher le parlementaire de mener à bien sa mission. C’est inacceptable en général, et plus encore aujourd'hui, compte tenu du sujet qui nous réunit. Arrêtons l’hypocrisie ! Si l’on évoque un débat sur la confiance dans la vie publique, il est indispensable de dénoncer ce qui s’apparente à une autocensure de l’initiative parlementaire. Je demande donc qu’à l’avenir l’article 48 de notre règlement sur le droit d’amendement soit respecté à la lettre et qu’il n’en soit plus donné une interprétation restrictive.
J’ai bien entendu la réponse du président de la commission des lois à Mme la présidente Assassi. Mais si le Gouvernement oublie dans un projet de loi une disposition essentielle pour rendre cohérent le dispositif qu’il propose, nous ne pouvons pas nous taire. Sinon, ce sont nos concitoyens qui déclareront irrecevable la confiance !