Comme vous l'avez constaté, je n'ai pas pu, faute de temps, aborder certaines questions, notamment les questions du Brexit et de la diplomatie économique. J'aurai l'occasion d'y revenir la prochaine fois.
Pour répondre à M. Lorgeoux et à Mme Conway-Mouret, j'ai examiné de près la situation budgétaire du ministère des affaires étrangères et je vous confirme que celle-ci n'est pas très bonne. Le budget de ce ministère a diminué de manière inversement proportionnelle à l'élargissement de ses attributions. Le constat que je dresse après six semaines en fonction, c'est que la situation n'est pas viable sur la durée.
Vous l'avez dit, c'est un ministère qui ne proteste sans doute pas suffisamment et dont on peut écorner le budget sans trop de réactions du ministre. Ce ne sera pas mon attitude, chacun le sait. Tout ne peut pas se faire en un jour, mais il faut prendre conscience que notre attractivité, notre influence et notre présence dans le monde exigent un minimum de moyens. Or je le dis très clairement, les moyens du ministère sont insuffisants aujourd'hui, et je l'ai d'ores et déjà fait savoir au Président de la République et au Premier ministre.
S'agissant de mes attributions, madame Jourda, j'ai la responsabilité totale et entière du commerce extérieur bilatéral, conformément au périmètre défini par Laurent Fabius il y a quelques années. Ce périmètre est large, cohérent et j'ai bien l'intention de me montrer extrêmement actif sur le volet de la diplomatie économique : il faut tout d'abord simplifier les procédures pour faciliter l'action des entreprises, en particulier celle des PME, à l'exportation. Il faut ensuite créer une véritable équipe de France qui s'investisse sur les grands projets structurants et gagne les grands contrats. Enfin, et c'est une nouveauté, j'agirai pour mettre en oeuvre un partenariat beaucoup plus offensif et efficace avec les régions.
J'en profite pour répondre à la question qui m'a été posée sur le partage des responsabilités au sein du Gouvernement : le Premier ministre a souhaité que les secrétaires d'État qui se trouvent auprès des ministres n'aient pas d'attributions strictement définies, afin que leur fonction corresponde au mieux aux besoins et aux nécessités de l'action de leur ministre. Jean-Baptiste Lemoyne, nommé secrétaire d'État à mes côtés, et moi-même avons convenu qu'il s'occuperait plus spécifiquement du tourisme et du commerce extérieur.
Quant à la question du développement, soulevée par Mme Perol-Dumont et M. de Raincourt, son importance ne m'échappe pas. En m'exprimant sur la situation au Sahel tout à l'heure, j'ai bien dit que le sommet qui se tient dimanche serait l'occasion non seulement de débattre de l'orientation militaire à définir, mais aussi d'évoquer les questions de développement, car les deux vont de pair.
En tant que ministre de la défense, il m'est arrivé de ressentir une certaine frustration à ne pouvoir mener qu'une action militaire, alors que je savais que cette action aurait dû s'accompagner de mesures en matière de développement et de coopération. Au Sahel, en particulier, si le recrutement de djihadistes continue de progresser, c'est parce que certains de ces combattants vivent grâce à cet engagement et à l'argent de la drogue qui le finance.
Pour revenir sur vos propos, madame Jourda, je n'ai jamais dit que Bachar el-Assad était la solution. Il me semble même avoir dit le contraire en parlant de double pragmatisme. Le réalisme ne consiste pas à attendre que Bachar parte : sinon, combien de morts faudra-t-il encore attendre ? Son départ ne peut donc pas être un préalable. Cela étant, Bachar ne peut pas non plus être la solution. Vous imaginez la réaction des 5 millions de réfugiés qui ont dû quitter la Syrie à cause de lui si on leur annonçait que celui-ci restera au pouvoir ? C'est impossible. Je ne nie pas l'inflexion de la position française, mais cette inflexion est avant tout liée au contexte actuel.
Dans mon exposé, j'ai insisté sur quatre grandes zones de crise - la Syrie et l'Irak ; la Libye ; le Sahel ; le Golfe -, car je souhaite qu'elles soient au centre des préoccupations d'un maximum d'acteurs, en particulier des pays membres du Conseil de sécurité de l'ONU et des États voisins de ces zones. Cela permettra, je le crois, d'engager une dynamique qui mettra peut-être fin à toutes ces souffrances et tous ces drames.
Madame Garriaud-Gaylam, vous avez évoqué la route de la soie. J'aurai l'occasion de m'entretenir de ce sujet avec les responsables chinois ainsi qu'avec Jean-Pierre Raffarin, grand spécialiste de ce pays. Nous avons en effet un réel intérêt à suivre ce dossier de près.
Monsieur Pozzo di Borgo, j'aimerais vous rappeler que je suis ministre « de l'Europe » et des affaires étrangères.