Intervention de Nicolas Hulot

Commission des affaires économiques — Réunion du 18 juillet 2017 à 17h35
Audition de M. Nicolas Hulot ministre d'état ministre de la transition écologique et solidaire

Nicolas Hulot, ministre d'État :

Sur la filière d'excellence, ma réponse est positive. Quoiqu'il advienne, nous aurons à fermer ou à démanteler les centrales dans le futur. Je rejoins également votre préoccupation sociale : il ne s'agit pas d'ajouter de l'injustice aux inégalités déjà existantes. Certains de nos concitoyens sont en effet touchés par une triple peine à laquelle nous entendons répondre : après avoir été incités par des dispositifs fiscaux à acheter des véhicules diesel, ils ont été éloignés des centres-villes par la hausse des prix de l'immobilier, habitent dans des zones où ils sont privés d'accès aux transports doux et on leur interdit désormais l'accès aux villes. Nous allons poursuivre et améliorer les dispositifs existants qui sont autant de conditions de réussite de cette transition énergétique. Ma réponse est positive là aussi. Bon nombre de dispositifs, comme le chèque-énergie, les certificats d'économie d'énergie ou les incitations au changement de véhicules élargies prochainement aux véhicules d'occasion, vont être maintenus. D'autres dispositifs devraient également voir le jour, notamment dans les prochains plans d'investissements où ce sujet sera prioritaire.

Concernant l'Allemagne, certaines idées, que je ne qualifierai pas de reçues, laissent à penser que la sortie du nucléaire aurait entraîné une hausse de l'utilisation du charbon. Or, depuis la catastrophe de Fukushima, celle-ci a été réduite de 6 % outre-Rhin, où les objectifs en matière d'énergies renouvelables fixés à l'horizon 2020 sont par ailleurs en train d'être dépassés. De même, la Chine est parvenue à dépasser, bien en avance, les objectifs de développement des énergies renouvelables qu'elle s'était fixés. En France, il nous manque parfois ce sentiment de confiance dans les énergies renouvelables. Ce n'est pas là une forme d'incantation, mais prenons garde à ne pas nous réveiller trop tard ! Nous n'allons certes pas remplacer les centrales thermiques et nucléaires par des moulins à vent, mais ne sous-estimons pas les ruptures technologiques qui sont en cours. Observons tout de même la chute spectaculaire du coût des énergies renouvelables qui peut aller jusqu'à croiser celui des énergies dites conventionnelles. Ne restons pas à l'écart de ce phénomène, car je crains qu'on ne vienne à le regretter. Puisque le débat se cristallise sur le nucléaire en France, il faut aboutir à un mix énergétique qui serait une sorte de point de rencontre permettant d'avancer à notre rythme. Quelle que soit l'opinion que l'on a sur le nucléaire - chacun connaît la mienne, mais peu importe, car elle ne saurait préempter un examen rationnel de la situation - définissons une transition énergétique sécurisée sur le plan de l'approvisionnement. Les Français ne comprendraient pas de supporter tous les maux concomitamment : la construction d'éoliennes, tant sur terre qu'en mer, le maintien en l'état du parc nucléaire et l'imposition de mesures d'économies d'énergie. Il faut que nos compatriotes comprennent que la réduction mécanique de la part du nucléaire répondra à des critères rationnels et non dogmatiques. Une transition intelligente est possible. L'évidence s'imposera car sur le stockage des énergies intermittentes, des progrès seront enregistrés, j'en suis absolument convaincu. Même dans les pays du Golfe, la transition énergétique est en marche et la recherche sur le stockage des énergies intermittentes avance, comme en témoignent les activités des centres de recherche de Masdar, tout comme, d'ailleurs, à Boulder, dans le Colorado, où se trouve le centre de recherche fédéral sur les énergies renouvelables. Je serais très triste que la France, en proie au doute, arrive trop tard et que ce modèle économique, qui finira par s'imposer, profite à d'autres pays et ce, d'autant plus que nos acteurs économiques ont un réel potentiel de créativité. J'observe également que si nos dispositifs, comme les investissements d'avenir ou les aides de la Banque publique d'investissement, favorisent son émergence, cette créativité va trop souvent s'épanouir ailleurs, faute des conditions idoines de développement.

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