Intervention de Nicolas Hulot

Commission des affaires économiques — Réunion du 18 juillet 2017 à 17h35
Audition de M. Nicolas Hulot ministre d'état ministre de la transition écologique et solidaire

Nicolas Hulot, ministre d'État :

Le décret « plage » crée un sentiment probablement légitime de panique. Je me dis cependant que si je crée une exonération sur la façade littorale méditerranéenne, les autres façades auront beau jeu de demander la même chose. J'ai entendu les arguments des uns et des autres, notamment ceux qui évoquent le fait que rendre démontables les superstructures nécessiterait de faire venir des engins sur les plages et que cela n'est pas positif. Mais si je comprends votre demande, je ne suis pas spontanément enthousiaste au fait d'y répondre positivement.

En ce qui concerne les voitures électriques, la réalité montre que nous gagnons en autonomie. J'ai moi-même acheté une voiture électrique il y a quelques années et son modèle équivalent a vu aujourd'hui son autonomie multipliée par deux. Je comprends la nécessité de bornes en milieu rural car je vis dans un tel milieu et il ne m'est pas possible de faire un aller-retour entre Saint-Malo et Rennes avec mon véhicule.

Pour répondre à Joël Labbé, l'arrêté d'application sur les néonicotinoïdes sera pris au début du mois d'août. J'ai bien compris le goulot d'étranglement que représente l'Anses et nous allons étudier la situation de saturation de cette agence vers laquelle beaucoup de choses convergent.

En ce qui concerne la stigmatisation des agriculteurs, je tiens à répéter qu'il en va des agriculteurs comme de l'agriculture et qu'il en existe différents types. J'ai rencontré beaucoup d'agriculteurs heureux qui s'en sortent très bien, parfois au travers de méthodes alternatives. Je constate aussi que beaucoup d'agriculteurs sont en détresse. Les stigmatiser condamne d'emblée l'issue des États généraux de l'alimentation. Ce n'est donc pas du tout l'état d'esprit dans lequel je me trouve. Stéphane Travert et moi-même avons conscience qu'il nous faut sortir ensemble par le haut de ces difficultés. Nous possédons une ambition et une vision communes sur le sujet.

Je comprends bien la difficile équation des élus sur la consommation de terres agricoles et les injonctions contradictoires qui s'adressent à eux. Je peux également témoigner que le sacrifice de terre agricole n'est pas toujours justifié par une dimension sociale. Ils sont parfois utilisés pour attirer de grandes enseignes dont la venue fait parfois fermer d'autres enseignes déjà implantées, ce qui peut engendrer des friches industrielles de l'autre côté de la route. L'économie doit être le principe de mise lorsque l'utilisation des terres agricoles n'est pas justifiée, notamment d'un point de vue social.

Notre-Dame-Des-Landes fait actuellement l'objet d'une médiation voulue par le Président de la République afin de voir si toutes les alternatives ont été étudiées. Tout le monde connait mon point de vue sur la question mais je ne souhaite pas m'exprimer sur le sujet afin d'éviter toute interférence. J'observerai, comme vous, l'issue de cette médiation.

Le transfert de la compétence Gemapi est déjà prévu depuis plusieurs années.

S'agissant du canal Seine-Nord Europe, j'entends bien que le contexte budgétaire, attesté par le dernier rapport de la Cour des comptes, a quelque chose de sidérant. Il ne servirait à rien que l'État s'engage sur des promesses qu'il ne pourrait pas tenir. Il en va de même pour la réduction de moitié de la part du nucléaire dans la production d'énergie d'ici 2025. Notre première attitude a été de suspendre le projet pour voir si l'ensemble des sous-projets qui étaient déjà engagés ou en voie de l'être étaient raisonnablement réalisables en tenant nos promesses. Ce n'est pas la première fois que je suis alerté sur les aspects économiques du dossier. Je suis d'ailleurs plus sensible aux arguments relatifs à l'activité économique générée qu'à celui du seul report modal qui semble relativement limité, de l'ordre de 500 camions par jour. Il ne sera, en tout état de cause, pas possible de réaliser tous les projets, sous peine d'abandonner le réseau routier et le réseau ferré avec les conséquences que nous connaissons. Ce n'est pas une attitude facile à tenir pour nous. Lorsque le maire de Toulouse nous demande que le TGV rejoigne sa ville, il est difficile de ne pas comprendre son attente. Il en va de même lorsque l'on nous demande la réalisation de l'A45 entre Clermont-Ferrand et Lyon. Mais faire des promesses à tout le monde risquerait de ne conduire qu'à des désillusions. En ce qui concerne le canal, je rappelle que la suspension est une mesure conservatoire et qu'elle n'est pas synonyme du retrait de tous ces projets. Ils seront analysés sous l'angle de la vérité et du réalisme.

Notre administration peut être rationnelle. Il ne s'agit pas de lui faire des procès d'intention. Un effort de simplification a été demandé par le Président de la République auquel notre propre ministère a décidé de contribuer. Les fameux guichets uniques constituent un début. Le Président souhaite également un changement de mentalité afin que notre administration se place dans un état d'esprit d'accompagnement, plutôt que dans un état d'esprit de sanction systématique. Le droit à l'erreur procède de cette démarche. Il ne s'agit cependant pas d'une licence à l'erreur.

Ma porte vous est grande ouverte pour prolonger nos discussions. Je vous remercie de votre patience et de votre compréhension.

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