Intervention de Alain Milon

Commission des affaires sociales — Réunion du 19 juillet 2017 à 9h40
Projet de loi d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Alain MilonAlain Milon, rapporteur :

Je suis d'accord avec Nicole Bricq pour dire que les débats, à l'Assemblée nationale, ont été décevants, alors que l'an passé, elle n'avait pas pu discuter de la loi « El Khomri ».

Georges Labazée a parlé des prud'hommes. La réforme de la désignation des conseillers n'a pas d'impact sur leur fonctionnement. En revanche, on constate que les jugements, sur des cas identiques, sont totalement différents d'un conseil des prud'hommes à un autre. Les conseillers manquent de formation et de moyens. En tant que président de la commission des affaires sociales - et non rapporteur - je propose de rencontrer le président de la commission des lois, notre collègue Philippe Bas, pour que nous engagions en commun un travail sur les prud'hommes et puissions émettre des propositions de transformation et d'amélioration.

Pour répondre à Catherine Génisson, je présenterai un amendement de formation globale des salariés membres de l'instance unique. Le projet de loi prévoit la possibilité de créer des commissions d'hygiène et de santé au travail à l'intérieur de l'instance unique. Les CHSCT avaient une mission spécifique qui doit être conservée.

Dominique Watrin a dénoncé de la précipitation et regretté que nous votions une loi d'habilitation sur des ordonnances que l'on ne connaît pas. Nous avons toutefois la possibilité de bien cadrer la loi d'habilitation. C'est important. Nous pourrons suivre l'élaboration des ordonnances et aurons la possibilité de les ratifier ou non. Le projet de loi de ratification devrait être discuté en 2018.

Il a aussi évoqué le risque de dumping social. Je ne le crois pas. Ce prétendu dumping sera évité grâce aux accords de branche qui auront le monopole sur plusieurs sujets, dont la gestion de la qualité de l'emploi.

Enfin, il a parlé de la barémisation. Il ne s'agit pas de supprimer la liberté du juge de prononcer une indemnisation individuelle, mais de fixer un plafond selon l'ancienneté. Le Conseil constitutionnel a accepté le principe du barème en 2015.

Le volet numérique du projet de loi ne porte que sur le télétravail et le prêt de personnel entre grands groupes et start up. La numérisation est un sujet important. Si vous êtes intéressés, nous pourrions y consacrer une mission d'information et formuler des propositions.

Cher Jean-Louis Tourenne, on a le droit d'avoir des petits plaisirs : 80 % du projet de loi d'habilitation reprend la rédaction de la loi « El Khomri » adoptée par le Sénat mais non reprise par l'Assemblée nationale. C'est une reconnaissance importante de notre travail.

Lors de la ratification des ordonnances, il faudra être extrêmement vigilant sur le travail de nuit. Les négociations entre le ministère et les partenaires sociaux sont toujours en cours.

Yves Daudigny a parlé des ordonnances de 1982 : le Sénat les avait rejetées ; l'article L. 1 du code du travail n'existait pas ; les concertations n'étaient pas obligatoires. Dans le cas présent, la démocratie sociale a été respectée, mais la démocratie parlementaire ne l'a pas été complètement. Tel est le sens de ma critique.

Jean-Pierre Godefroy et d'autres ont parlé du compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P). En effet, la lettre du Premier ministre débloque une situation ancienne. Il était impossible d'avancer sur la manutention, les postures pénibles, les vibrations et les agents chimiques dangereux. Le rattachement à la branche AT-MP rend possible l'indemnisation d'une inaptitude évaluée à 10 %. En revanche, cela ne permet pas la prévention. Il est évident que nous devrons en discuter en séance publique et émettre des propositions par la suite.

Personne n'a trouvé le moyen de mettre en place le compte de pénibilité. Sinon tout le monde serait d'accord pour l'appliquer !

Il est vrai, comme l'a souligné Nicole Bricq, que les parlementaires peuvent définir un cadre dans la loi d'habilitation et ne sont pas bridés par un accord national interprofessionnel. Pour une fois, nous sommes d'accord.

En réponse à Isabelle Debré, effectivement, il faut de la stabilité et de la sérénité. Je présenterai des amendements pour lutter contre l'inflation législative. Je n'ai reçu aucune nouvelle information portant sur les seuils. Je rappelle en tout cas que lorsque Jean-Pierre Raffarin a augmenté le seuil de 10 à 11 salariés, des milliers d'emplois ont été créés sur le territoire.

Je présenterai un amendement relatif au mandatement.

Je ne suis pas d'accord avec Annie David. Le projet de loi ne dit pas que le petit patron pourra s'opposer au ministre du travail ! Aucune entreprise ne pourra s'affranchir d'un accord étendu. En revanche, depuis 2014, lorsqu'un accord de branche est conclu, les organisations patronales majoritaires de la branche peuvent s'opposer à son extension. Dans ce cas, celui-ci reste applicable seulement aux entreprises adhérentes des organisations signataires.

On pourrait réfléchir au rôle de la médecine du travail dans la prévention. Mais on sait que le vrai problème, actuellement, est la pénurie de médecins du travail.

Je rappelle à Gérard Roche que la rédaction de la loi « El Khomri », telle qu'adoptée par le Sénat, est reprise en grande partie dans ce projet de loi : nous pouvons le voter.

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