Patrick Masclet nous a quittés le 4 juin dernier. Il s’est éteint à l’hôpital Percy de Clamart, où il luttait avec un courage exceptionnel contre la maladie. Et pourtant, nous avions avec lui tous repris un peu espoir.
C’est au nom du Sénat que je l’ai accompagné le 9 juin en l’église Saint-Nicolas d’Arleux, sa commune, où nous lui avons rendu hommage, autour de sa famille, de ses amis, en votre présence, monsieur le ministre, en présence de plusieurs d’entre nous, notamment le président Bruno Retailleau, Jean-René Lecerf, son ami, et un grand nombre de nos collègues des départements du Nord et du Pas-de-Calais.
Cette belle cérémonie, dans cette église qu’il avait contribué à restaurer, cet adieu au milieu des siens, dans cette commune d’Arleux à laquelle il était si profondément attaché, trouve aujourd’hui son écho dans cet hémicycle.
Sa maladie, sa lutte, Patrick Masclet en parlait avec beaucoup de lucidité, malgré une pudeur naturelle. Son combat ne l’a jamais empêché de continuer à suivre, jusqu’à ses derniers jours, la vie de son département et les travaux du Sénat.
Je souhaite exprimer une nouvelle fois à Mme Masclet, à leurs enfants Stéphanie et Pierre-Antoine, à leur famille et à tous leurs proches les pensées sincères de l’ensemble des sénatrices et des sénateurs.
Avec Patrick Masclet, c’est une figure majeure de l’Arleusis et l’un des élus les plus respectés du département du Nord qui s’en est allé.
Il était un maire, un président de l’association des maires du Nord, un parlementaire, un humaniste à la fois pondéré et chaleureux, un serviteur de la République constamment dévoué à l’intérêt général et un défenseur inlassable des communes rurales de son département.
Au fond, il aimait les gens, auxquels il était attentif, à l’écoute de chacun.
Calme, il était aussi volontaire et énergique dans l’action. Homme de terrain comme de dossiers, il ne laissait place ni à la résignation ni au scepticisme.
Serviteur de la République, il a toujours été porteur des valeurs qu’il avait faites siennes, celles du gaullisme. Lui qui aimait profondément l’Irlande, peut-être a-t-il arpenté les plages de la baie de Cashel, dans le Connemara, comme le général de Gaulle en 1969…
« C’est dans le combat que se révèlent les hommes que notre peuple jugera dignes et capables de diriger ses actions », écrivait Charles de Gaulle. Au fond, Patrick Masclet, dans sa simplicité, était de ces hommes-là.
Né dans le Nord, à Waziers, il aimait raconter qu’enfant il accompagnait son père à la pêche dans les marais d’Arleux – la pêche, une passion qui ne l’a jamais quitté –, une commune dont il deviendra le premier magistrat durant vingt-deux ans.
Patrick Masclet a aussi accompli une longue carrière d’enseignant. Après un diplôme universitaire de technologie de génie électrique, un diplôme d’études approfondies d’automatique, l’École normale de Lille et l’École normale nationale d’apprentissage en électronique, il avait obtenu l’agrégation de génie électrique.
Sa carrière de professeur agrégé le conduisit successivement à Valenciennes, à Cambrai et à Douai, avant d’être chargé de la formation des professeurs de génie électrique à l’Institut universitaire de formation des maîtres de Villeneuve-d’Ascq et d’être professeur en BTS au lycée Pasteur à Hénin-Beaumont.
Patrick Masclet s’investit très tôt dans le milieu associatif. Toujours soucieux de se mettre au service de ses concitoyens et animé par le désir de justice, son engagement associatif le conduisit bientôt à s’engager dans les responsabilités locales.
Il le fit d’abord à la commune d’Arleux, à la croisée du canal du Nord et du canal de la Sensée, dont il fut élu maire dès 1995, puis réélu sans cesse, une nouvelle fois en 2014 avec plus de 78 % des voix…
Il le fit ensuite comme conseiller régional durant plus de dix-sept ans et en président attentif de l’ensemble des maires du Nord.
Il le fit aussi comme membre du bureau puis vice-président de l’Association des maires de France, où il était chargé de la cohésion sociale, comme un homme du Nord qui y était naturellement attaché.
Patrick Masclet fut surtout, durant vingt-deux ans, le maire passionné de cette attachante commune d’Arleux. Il le disait en ces termes il y a quelques mois, je le cite :
« J’ai été un maire heureux et comblé, disait-il voilà quelques mois. Je n’ai été que locataire, mais j’ai essayé de garder la maison dans le meilleur état que je pouvais, j’ai même essayé de l’embellir […]. Nos services publics ont été améliorés et diversifiés, et les services marchands ont été aussi étoffés. La ligne politique de tous nos mandats, c’était bien vivre et vieillir au village. »
Le 1er mars dernier, Patrick Masclet cessa d’être maire. « C’est un déchirement et un crève-cœur, dit-il. La fonction de maire est une mission exaltante et passionnante qui, humainement, m’a beaucoup apporté. »
Il fit ce choix de prendre du recul pour se mettre en adéquation avec le texte qui va s’appliquer dans quelques semaines, mais aussi par raison. Il eut ce mot : « J’ai encore l’envie, mais il faut être raisonnable. Molière meurt en scène, et après ? »
Figurant en troisième position sur la liste conduite aux élections sénatoriales de septembre 2011 par Valérie Létard et Jean-René Lecerf, Patrick Masclet nous avait rejoints le 22 avril 2015 sur les travées du Palais du Luxembourg, pour y représenter le département du Nord.
Devenu président du conseil départemental du Nord, Jean René Lecerf ne voulait pas être « un sénateur TGV » et souhaitait se consacrer pleinement à ce département qui vit à la fois des souffrances et des espérances.
Patrick Masclet fut, je le crois, un sénateur heureux, au sein du groupe Les Républicains, et un membre actif et estimé de la commission des lois, dont les travaux le passionnaient et dont il considérait, non sans raison, qu’elle est « un peu le cœur du réacteur du Sénat ».
Durant les vingt-cinq mois qu’il passa parmi nous, Patrick Masclet fut un défenseur inlassable des collectivités locales, notamment des communes rurales.
Il rapporta ainsi, en avril 2016 devant le Sénat, au nom de la commission des lois, avec conviction et avec succès, la proposition de loi de Jacques Mézard modifiant la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République et visant, par pragmatisme et par bon sens, à allonger d’un an le délai d’entrée en vigueur des nouvelles intercommunalités.
Malgré les contraintes du traitement qu’il subissait, Patrick Masclet suivit jusqu’à ses derniers jours, avec une attention constante, les travaux du Sénat. Comment ne pas évoquer le café que nous avons partagé dans mon bureau quelques jours avant qu’il ne nous quitte ?
J’ai relu avec émotion l’une de ses dernières interventions, dans cet hémicycle, le 15 mars dernier, lors de l’examen du rapport d’information de la mission de contrôle et de suivi de la mise en œuvre des dernières lois de réforme territoriale, et qui débutait par ces mots : « C’est pour moi un plaisir de vous retrouver après quelques mois d’absence… Je veux vous apporter mon témoignage d’élu du Nord… »
Patrick Masclet représente plus d’un quart de siècle d’engagement politique.
Nous n’oublierons pas son sourire, son calme, sa simplicité. Je le revois, tout près de l’entrée de l’hémicycle Médicis ; c’était toujours un bonheur d’échanger avec lui.
À nos collègues du groupe Les Républicains, à ceux de la commission des lois et à Alain Poyart, auquel il revient la charge de lui succéder dans notre hémicycle, j’exprime notre sympathie attristée.
Je souhaite redire à Mme Masclet, à ses enfants, à toute leur famille, les pensées sincères, humaines, des membres du Sénat, et la part que nous prenons à leur peine.
La parole est à M. le ministre.