La séance est ouverte à quatorze heures vingt.
Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 13 juillet 2017 a été publié sur le site internet du Sénat.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté.
M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, mesdames, messieurs, c’est une fois encore avec beaucoup de tristesse que j’accomplis devant vous un devoir d’amitié et de fidélité en saluant solennellement dans notre hémicycle la mémoire d’un collègue disparu.
Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le ministre de l'action et des comptes publics, se lèvent.
Patrick Masclet nous a quittés le 4 juin dernier. Il s’est éteint à l’hôpital Percy de Clamart, où il luttait avec un courage exceptionnel contre la maladie. Et pourtant, nous avions avec lui tous repris un peu espoir.
C’est au nom du Sénat que je l’ai accompagné le 9 juin en l’église Saint-Nicolas d’Arleux, sa commune, où nous lui avons rendu hommage, autour de sa famille, de ses amis, en votre présence, monsieur le ministre, en présence de plusieurs d’entre nous, notamment le président Bruno Retailleau, Jean-René Lecerf, son ami, et un grand nombre de nos collègues des départements du Nord et du Pas-de-Calais.
Cette belle cérémonie, dans cette église qu’il avait contribué à restaurer, cet adieu au milieu des siens, dans cette commune d’Arleux à laquelle il était si profondément attaché, trouve aujourd’hui son écho dans cet hémicycle.
Sa maladie, sa lutte, Patrick Masclet en parlait avec beaucoup de lucidité, malgré une pudeur naturelle. Son combat ne l’a jamais empêché de continuer à suivre, jusqu’à ses derniers jours, la vie de son département et les travaux du Sénat.
Je souhaite exprimer une nouvelle fois à Mme Masclet, à leurs enfants Stéphanie et Pierre-Antoine, à leur famille et à tous leurs proches les pensées sincères de l’ensemble des sénatrices et des sénateurs.
Avec Patrick Masclet, c’est une figure majeure de l’Arleusis et l’un des élus les plus respectés du département du Nord qui s’en est allé.
Il était un maire, un président de l’association des maires du Nord, un parlementaire, un humaniste à la fois pondéré et chaleureux, un serviteur de la République constamment dévoué à l’intérêt général et un défenseur inlassable des communes rurales de son département.
Au fond, il aimait les gens, auxquels il était attentif, à l’écoute de chacun.
Calme, il était aussi volontaire et énergique dans l’action. Homme de terrain comme de dossiers, il ne laissait place ni à la résignation ni au scepticisme.
Serviteur de la République, il a toujours été porteur des valeurs qu’il avait faites siennes, celles du gaullisme. Lui qui aimait profondément l’Irlande, peut-être a-t-il arpenté les plages de la baie de Cashel, dans le Connemara, comme le général de Gaulle en 1969…
« C’est dans le combat que se révèlent les hommes que notre peuple jugera dignes et capables de diriger ses actions », écrivait Charles de Gaulle. Au fond, Patrick Masclet, dans sa simplicité, était de ces hommes-là.
Né dans le Nord, à Waziers, il aimait raconter qu’enfant il accompagnait son père à la pêche dans les marais d’Arleux – la pêche, une passion qui ne l’a jamais quitté –, une commune dont il deviendra le premier magistrat durant vingt-deux ans.
Patrick Masclet a aussi accompli une longue carrière d’enseignant. Après un diplôme universitaire de technologie de génie électrique, un diplôme d’études approfondies d’automatique, l’École normale de Lille et l’École normale nationale d’apprentissage en électronique, il avait obtenu l’agrégation de génie électrique.
Sa carrière de professeur agrégé le conduisit successivement à Valenciennes, à Cambrai et à Douai, avant d’être chargé de la formation des professeurs de génie électrique à l’Institut universitaire de formation des maîtres de Villeneuve-d’Ascq et d’être professeur en BTS au lycée Pasteur à Hénin-Beaumont.
Patrick Masclet s’investit très tôt dans le milieu associatif. Toujours soucieux de se mettre au service de ses concitoyens et animé par le désir de justice, son engagement associatif le conduisit bientôt à s’engager dans les responsabilités locales.
Il le fit d’abord à la commune d’Arleux, à la croisée du canal du Nord et du canal de la Sensée, dont il fut élu maire dès 1995, puis réélu sans cesse, une nouvelle fois en 2014 avec plus de 78 % des voix…
Il le fit ensuite comme conseiller régional durant plus de dix-sept ans et en président attentif de l’ensemble des maires du Nord.
Il le fit aussi comme membre du bureau puis vice-président de l’Association des maires de France, où il était chargé de la cohésion sociale, comme un homme du Nord qui y était naturellement attaché.
Patrick Masclet fut surtout, durant vingt-deux ans, le maire passionné de cette attachante commune d’Arleux. Il le disait en ces termes il y a quelques mois, je le cite :
« J’ai été un maire heureux et comblé, disait-il voilà quelques mois. Je n’ai été que locataire, mais j’ai essayé de garder la maison dans le meilleur état que je pouvais, j’ai même essayé de l’embellir […]. Nos services publics ont été améliorés et diversifiés, et les services marchands ont été aussi étoffés. La ligne politique de tous nos mandats, c’était bien vivre et vieillir au village. »
Le 1er mars dernier, Patrick Masclet cessa d’être maire. « C’est un déchirement et un crève-cœur, dit-il. La fonction de maire est une mission exaltante et passionnante qui, humainement, m’a beaucoup apporté. »
Il fit ce choix de prendre du recul pour se mettre en adéquation avec le texte qui va s’appliquer dans quelques semaines, mais aussi par raison. Il eut ce mot : « J’ai encore l’envie, mais il faut être raisonnable. Molière meurt en scène, et après ? »
Figurant en troisième position sur la liste conduite aux élections sénatoriales de septembre 2011 par Valérie Létard et Jean-René Lecerf, Patrick Masclet nous avait rejoints le 22 avril 2015 sur les travées du Palais du Luxembourg, pour y représenter le département du Nord.
Devenu président du conseil départemental du Nord, Jean René Lecerf ne voulait pas être « un sénateur TGV » et souhaitait se consacrer pleinement à ce département qui vit à la fois des souffrances et des espérances.
Patrick Masclet fut, je le crois, un sénateur heureux, au sein du groupe Les Républicains, et un membre actif et estimé de la commission des lois, dont les travaux le passionnaient et dont il considérait, non sans raison, qu’elle est « un peu le cœur du réacteur du Sénat ».
Durant les vingt-cinq mois qu’il passa parmi nous, Patrick Masclet fut un défenseur inlassable des collectivités locales, notamment des communes rurales.
Il rapporta ainsi, en avril 2016 devant le Sénat, au nom de la commission des lois, avec conviction et avec succès, la proposition de loi de Jacques Mézard modifiant la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République et visant, par pragmatisme et par bon sens, à allonger d’un an le délai d’entrée en vigueur des nouvelles intercommunalités.
Malgré les contraintes du traitement qu’il subissait, Patrick Masclet suivit jusqu’à ses derniers jours, avec une attention constante, les travaux du Sénat. Comment ne pas évoquer le café que nous avons partagé dans mon bureau quelques jours avant qu’il ne nous quitte ?
J’ai relu avec émotion l’une de ses dernières interventions, dans cet hémicycle, le 15 mars dernier, lors de l’examen du rapport d’information de la mission de contrôle et de suivi de la mise en œuvre des dernières lois de réforme territoriale, et qui débutait par ces mots : « C’est pour moi un plaisir de vous retrouver après quelques mois d’absence… Je veux vous apporter mon témoignage d’élu du Nord… »
Patrick Masclet représente plus d’un quart de siècle d’engagement politique.
Nous n’oublierons pas son sourire, son calme, sa simplicité. Je le revois, tout près de l’entrée de l’hémicycle Médicis ; c’était toujours un bonheur d’échanger avec lui.
À nos collègues du groupe Les Républicains, à ceux de la commission des lois et à Alain Poyart, auquel il revient la charge de lui succéder dans notre hémicycle, j’exprime notre sympathie attristée.
Je souhaite redire à Mme Masclet, à ses enfants, à toute leur famille, les pensées sincères, humaines, des membres du Sénat, et la part que nous prenons à leur peine.
La parole est à M. le ministre.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, chère madame, cher Jean-René Lecerf, il me revient la lourde charge, après vous, monsieur le président, de prononcer quelques mots, au nom du Président de la République et du Gouvernement, d’avoir une pensée que vous me permettrez très amicale envers Patrick Masclet, qui était un homme que personne ne pouvait détester.
Lors de son enterrement, vous l’avez dit, monsieur le président, la foule innombrable des élus locaux, des personnalités, mais aussi des citoyens de sa commune et d’ailleurs, ont rendu un hommage tout à fait mérité à un homme dont Jean-René Lecerf a souligné, dans son oraison, qu’il ne disait jamais de mal de personne. Et il est vrai que Patrick Masclet ne disait jamais de mal de personne !
Je veux dire à l’ensemble de ses collègues à quel point je partage leur peine, celle surtout de son absence, même s’il est toujours présent parmi nous, moi qui ai connu Patrick Masclet lorsqu’il m’a accueilli la première fois au conseil régional.
Je voudrais dire à Bruno Retailleau, en tant que président de groupe, à Valérie Létard, en tant que colistière, et à tous les sénateurs que je leur adresse, au nom du Gouvernement, mes sincères condoléances.
Personnellement, je regrette de ne pas voir Patrick Masclet continuer son combat politique. Il était un militant, avant tout un militant du Nord, un militant des villes, un militant de notre région, un militant du gaullisme, ce qui le poussait sans doute à avoir, à l’égard de chacune et de chacun, beaucoup d’empathie. Il était très attaché, vous l’avez dit, monsieur le président, à la cohésion sociale et à l’attention envers les plus faibles. Il était le maire d’une ville symbolique dans le Nord.
L’été, il aimait se rendre en Irlande pour pêcher, entouré de sa femme, de ses enfants, et je sais tout le bonheur et la tendresse qu’il avait pour sa famille.
Avant de clore cet hommage, je voudrais dire à la famille de Patrick Masclet que celui-ci sera toujours dans le cœur de la République, lui qui était un parlementaire très assidu, notamment en commission des lois, et très attentif, voire pointilleux, mais c’est ce que nous attendions de lui, à l’égard du Gouvernement.
Pour lui qui était si gaulliste, il me revient de citer ces mots de Charles de Gaulle, tirés de ses Mémoires de guerre : « Soyons fermes, purs et fidèles ; au bout de nos peines, il y a la plus grande gloire du monde, celle des hommes qui n’ont pas cédé. »
M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, mesdames, messieurs, je vous invite maintenant à partager un moment de recueillement à la mémoire de Patrick Masclet.
Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le ministre, observent une minute de silence.
Conformément à notre tradition, en signe d’hommage à Patrick Masclet, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à quatorze heures trente-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Thierry Foucaud.
Par lettre en date de ce jour et conformément à l’article 22 ter du règlement, M. Philippe Bas, président de la commission des lois, a indiqué à M. le président du Sénat que la commission des lois demandait au Sénat, en application de l’article 5 ter de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, de lui conférer les prérogatives attribuées aux commissions d’enquête pour le suivi la loi n° 2017-1154 du 11 juillet 2017 prorogeant l’application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence, pour une durée de quatre mois.
Sur la proposition de M. le président du Sénat, nous pourrions examiner cette demande jeudi 20 juillet 2017, à neuf heures trente.
Il n’y a pas d’opposition ?…
Il en est ainsi décidé.
J’informe le Sénat que le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social (n° 637, 2016-2017), dont la commission des affaires sociales est saisie au fond, est envoyé pour avis, à sa demande, à la commission des finances.
Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 18 juillet 2017, que, en application de l’article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation, lui avait adressé un arrêt de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article L. 2326-2 du code du travail (Délégation unique du personnel ; 2017-661 QPC).
Le texte de cet arrêt de renvoi est disponible à la direction de la séance.
Acte est donné de cette communication.
L’ordre du jour appelle la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme (projet n° 587, texte de la commission n° 630, rapport n° 629, avis n° 636).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre d’État.
Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, j’étais vendredi dernier à Nice pour assister à la cérémonie de commémoration de l’attentat du 14 juillet 2016. Toutes celles et ceux qui étaient présents avaient le cœur serré, car c’est toute une ville qui a été touchée, chacun comptant parmi ses proches, ses amis, dans l’école de ses enfants ou sur son lieu de travail une personne tuée ou gravement blessée lors de l’attentat.
Il y a un peu plus d’un an, ils étaient des dizaines de milliers de personnes à regarder le feu d’artifice depuis la promenade des Anglais. Il faut imaginer le sourire des enfants et la joie des parents ou des grands-parents, qui pensaient leur apporter un moment de bonheur en les y amenant. Puis, soudain, l’horreur absolue. Des centaines de blessés. Quatre-vingt-six personnes arrachées à la vie, simplement parce qu’un individu fanatisé par la propagande terroriste avait décidé de passer à l’acte.
Le bilan aurait pu être beaucoup plus lourd si des civils et des policiers n’avaient, au péril de leur vie, intercepté le camion alors qu’il allait entrer dans la zone où la foule était la plus dense.
Dans les rues de Nice aujourd'hui, on ne croise pas une personne qui n’ait été profondément touchée par ce drame. On ne croise pas une personne qui ne se souvienne de ce qu’elle faisait et de l’endroit où elle se trouvait en cet instant tragique. Non, plus jamais les 14 juillet niçois n’auront la même saveur.
C’est avec ce souvenir-là gravé dans l’esprit que je viens vous présenter le projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, pour sortir de l’état d’urgence, mais aussi afin que tout soit mis en œuvre pour que de tels drames abominables ne se reproduisent pas. C’est là ma responsabilité de ministre de l’intérieur, et jamais je n’oublierai ce que nous avons vécu tous ensemble au cours de ces années.
Oui, nous voulons sortir de l’état d’urgence, mais nous ne pouvons le faire sans adapter notre dispositif de lutte contre le terrorisme. Celui-ci a certes déjà été grandement renforcé ces dernières années, sous l’impulsion du Sénat – vous l’avez largement indiqué en commission et dans votre rapport –, par l’adoption de huit textes qui sont venus renforcer les moyens de l’État pour lutter contre ce fléau.
Il nous reste encore à prendre des mesures que nous jugeons essentielles. Ces mesures font l’objet du projet de loi dont nous allons débattre cet après-midi.
En effet, nous le savons, la menace terroriste est toujours là, prégnante. Ceux qui peuvent croire que, depuis la prise de Mossoul et la progression des forces anti-djihadistes à Raqqa, le risque d’attentat serait moins fort se trompent, car Daech demeure présent partout où les États faillissent. Les attentats de Manchester ou de Londres ont montré que ceux qui commettent des attentats terroristes en son nom sont capables de frapper partout et à tout moment.
Par ailleurs, des organisations comme Al-Qaïda ressurgissent, se développent de nouveau au Yémen, au Sahel, sans que l’on puisse exclure qu’elles frappent demain en France.
Nous devons faire face à cette menace, télécommandée, et à celle, plus diffuse, donc plus difficile à prévenir, de ceux que la propagande a fait basculer ou peut faire basculer. Ceux-là peuvent passer à l’action en des temps de plus en plus courts, avec des instruments de plus en plus rudimentaires. La menace est donc plus complexe à détecter. Il faut pouvoir agir plus rapidement, protéger davantage. C’est ce que vise à faire ce projet de loi.
Il ne s’agit donc pas, vous l’aurez compris, d’un texte comme les autres, de ceux que l’on peut décaler au gré d’un calendrier parlementaire. Il s’agit d’une loi urgente, cruciale, d’une loi essentielle, parce qu’elle touche à la sécurité immédiate de nos compatriotes.
Mesdames, messieurs les sénateurs, avant d’en venir au détail des mesures présentes dans ce projet de loi, permettez-moi de souligner que, malgré le danger que je viens de décrire, nous avons eu la volonté constante de concilier dans ce texte efficacité de la lutte antiterroriste et préservation des libertés individuelles, et que c’est à l’aune de cet équilibre qu’il convient d’analyser les mesures que nous vous proposons.
L’article 1er traite des périmètres de protection qui pourront être instaurés par les préfets pour sécuriser les grands événements culturels et sportifs.
Depuis le 14 novembre 2015, cette disposition a été utilisée soixante et onze fois. Sans elle, l’Euro 2016 et des événements comme le tour de France n’auraient sans doute pas pu se tenir.
Si l’on s’en tient à la seule période correspondant à la cinquième prorogation de l’état d’urgence, c’est-à-dire depuis décembre 2016, dix-neuf zones de protection ont été établies par les préfets. Les fouilles et les mesures de sécurité qu’elles autorisent ont rendu possible récemment la sécurisation du festival de Cannes, des Francofolies de La Rochelle et, bien sûr, du défilé des Champs-Élysées le 14 juillet dernier.
Cette mesure ne restreint pas les libertés, non ! Elle les garantit, elle les rend possibles, parce que ce sont ces zones de protection qui permettront aux Français de continuer à se divertir, à se cultiver partout où les terroristes voudraient nous voir renoncer à notre mode de vie.
Elle protège nos libertés collectives, mais dans la rédaction que nous proposons, elle est aussi respectueuse des libertés individuelles, parce que tout individu pourra, s’il le souhaite, se soustraire aux fouilles et sera alors accompagné hors du périmètre par des policiers ou des gendarmes ; parce que, sous le contrôle du juge, la définition du périmètre sera adaptée et proportionnée aux nécessités qu’imposent les circonstances ; enfin, parce que nous avons prévu que les règles d’accès au périmètre devront être adaptées aux impératifs de la vie privée, familiale et professionnelle.
La commission des lois a souhaité que l’établissement de telles zones soit conditionné à l’existence d’un risque actuel et sérieux. Je le dis d’emblée, nous ne partageons pas cette option, parce que nous pensons que, en ce moment, le risque est toujours sérieux.
Tout rassemblement d’ampleur peut aujourd’hui faire l’objet d’une attaque. Aurait-on par exemple évoqué il y a un an un risque actuel et sérieux à propos du feu d’artifice de la promenade des Anglais ?
De même, la volonté émise par la commission d’exempter de fouille les riverains nous semble porteuse de risques importants. On ne peut jamais exclure en effet qu’un individu radicalisé puisse se créer opportunément des attaches au sein de la zone contrôlée.
Par exemple, la fête des Lumières de Lyon occupe un périmètre à la fois vaste et parfaitement identifiable, et elle se tient à des dates connues à l’avance, autour du 8 décembre. Tout individu pourrait louer un appartement, être à ce titre exempté de fouille et ainsi commettre un attentat. Cette fête réunit dans les rues deux à trois millions de personnes en trois jours. Imagine-t-on ce que pourrait donner un attentat dans une telle foule ? De même, si nous exemptons de fouille l’ensemble des habitants de Lille ou de Strasbourg, je crains que nous ne puissions maintenir des événements tels que la Grande Braderie ou le marché de Noël.
C’est pourquoi, sur ces deux points de l’article 1er, je proposerai que nous nous en tenions à la version initiale du texte, qui me semble plus opérationnelle.
L’article 2 du projet de loi traite de la possibilité donnée aux préfets d’ordonner la fermeture administrative de lieux de culte. Cette mesure répond également à un enjeu majeur immédiat pour lutter efficacement contre le terrorisme.
Depuis la mise en place de la cinquième phase de l’état d’urgence, ce sont cinq lieux de culte qui ont été fermés, évitant en ce moment même que plusieurs dizaines d’individus ne suivent des prêches fanatisés. Il est donc important de maintenir cette disposition.
Nous avons prévu dans ce texte un ciblage serré et un contrôle plus important que sous le régime de l’état d’urgence. Ainsi l’exécution de ces mesures sera-t-elle très encadrée, puisque la durée de fermeture ne pourra excéder six mois et que les responsables des lieux de culte pourront en demander la suspension en référé devant le tribunal administratif, ce recours empêchant à la mesure de prendre son caractère exécutoire.
Je me réjouis que cette disposition ait pu faire l’objet d’un vaste consensus en commission.
Les mesures de surveillance dont il est question dans l’article 3 du projet de loi ont suscité de plus vives discussions. Je tiens donc à rassurer toutes celles et tous ceux qui ont fait part de leurs inquiétudes, en soulignant d’abord que le projet de loi met fin à la possibilité existant dans l’état d’urgence d’astreindre à résidence un certain nombre de personnes.
Nous avons cependant souhaité que le ministre de l’intérieur se trouve en capacité de prononcer les mesures de surveillance individuelle qui constituent sans doute la technique la plus efficace pour détecter l’imminence du passage à l’acte d’un individu sur lequel pèsent de lourds soupçons.
Encore fallait-il que cette mesure puisse demeurer très exceptionnelle. Son utilisation sera donc très encadrée, puisque la surveillance ne pourra concerner qu’une personne « à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d’une particulière gravité pour la sécurité et l’ordre publics, qui soit entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme, soit soutient ou adhère à des thèses incitant à la commission d’actes de terrorisme ».
Le texte cible précisément un certain type de personnes, car nous n’avons pas voulu que cette mesure puisse être étendue à tous, et, en particulier, qu’elle puisse concerner l’ordre public.
Par ailleurs, les mesures de surveillance devront être compatibles avec la vie privée et professionnelle des personnes, ce qui implique qu’elles autoriseront des déplacements dans un périmètre au moins équivalent à celui de la commune, je dis bien au moins équivalent, monsieur le rapporteur. Du reste, le texte vise aussi bien les petites communes que les grandes…
M. Michel Mercier, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Et celles qui voudraient grandir !
Sourires.
En outre, conformément aux analyses et recommandations formulées par le Conseil d’État en décembre 2015, ces mesures ne permettront pas d’astreindre la personne à demeurer à son domicile la nuit.
La commission des lois a souhaité revenir sur l’obligation pour les personnes surveillées de pointer une fois par jour au commissariat. Nous ne pouvons accepter cette proposition. La rédaction proposée par la commission pourrait en effet permettre à un individu de passer trois jours sans le moindre signalement. Trois jours, c’est un délai largement suffisant pour échapper à la vigilance des services et passer à l’acte. Je me refuse donc à prendre un tel risque et vous propose d’en revenir au texte initial.
De même, le Gouvernement estime nécessaire de rétablir l’obligation supprimée par la commission de communiquer à l’autorité administrative les numéros d’abonnement et identifiants techniques de tout moyen de communication électronique pour faciliter la surveillance des personnes concernées. Je tiens à redire à cette tribune que cette obligation ne portera pas sur les mots de passe et ne permettra donc pas à l’administration d’avoir accès aux contenus.
Nous aurons à débattre également du mécanisme retenu pour autoriser la prorogation de la mesure que la commission propose de conditionner à l’intervention du juge des libertés et de la détention. Je pense que nous arriverons à trouver un accord sur ce point.
Nous considérons que l’intervention du juge judiciaire n’est pas nécessaire et qu’elle n’est d’ailleurs conforme ni au principe de séparation des pouvoirs ni à la tradition juridique française. Toutefois, le Gouvernement est sensible à la préoccupation exprimée par la commission. J’aurai donc l’occasion de défendre un amendement visant à prendre en compte l’impact que pourrait avoir le renouvellement des mesures de surveillance de la personne concernée.
Enfin, l’article 4 du projet de loi aborde la question des visites domiciliaires et des saisies. Dans le cadre de l’état d’urgence, il s’agissait de perquisitions pouvant être menées à la discrétion de l’autorité administrative pour prévenir tout trouble à l’ordre public.
Cet outil s’est révélé profondément utile, puisque je rappelais devant votre commission des lois que 600 armes, dont plus de 78 armes de guerre avaient ainsi pu être saisies. On me dira que cela valait dans la première période de l’état d’urgence, les terroristes étant alors sujets à un effet de sidération. Eh bien non !
Depuis le cinquième prolongement de l’état d’urgence, le 22 décembre 2016, ces perquisitions nous ont directement permis de prévenir deux préparations d’attentat, alors que les éléments en notre possession ne nous auraient pas permis de procéder à une perquisition judiciaire. Il serait donc peu responsable de se priver d’une telle disposition.
En même temps, nous avons conscience de ce qu’une visite au domicile d’un individu, avec la possibilité de retenir ce dernier durant un certain laps de temps, peut comporter d’atteintes aux libertés. C’est pourquoi le régime des visites domiciliaires et saisies sera lui aussi extrêmement ciblé.
Comme les mesures de surveillance, il ne pourra concerner qu’une personne dont le comportement constitue une menace d’une particulière gravité pour la sécurité et l’ordre public, et qui « soit entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme, soit soutient ou adhère à des thèses incitant à la commission d’actes de terrorisme en France ou à l’étranger ou faisant l’apologie de tels actes ».
Je rappelle que le régime de l’état d’urgence prévoyait que les perquisitions pouvaient être appliquées à tout individu constituant une menace pour la sécurité et l’ordre public. Nous avons souhaité restreindre cette mesure, qui était extrêmement large, à des actions en rapport avec le terrorisme.
C’est pourquoi, en raison de la violation du domicile qu’il autorise, nous avons souhaité que ce régime soit soumis à un double contrôle de l’autorité judiciaire : d’une part, celui du procureur de Paris, qui, du fait de sa spécialisation dans la lutte contre le terrorisme, se verra informé de toute visite effectuée sur le territoire national et pourra ainsi, s’il le juge nécessaire, judiciariser le renseignement et reprendre l’enquête à son compte ; d’autre part – il s’agit là de la principale innovation de ce texte –, celui du juge des libertés et de la détention près le tribunal de grande instance de Paris, qui devra autoriser la visite et contrôler l’exploitation faite du matériel saisi sous son autorisation.
La commission des lois a reconnu que, sous réserve d’une information du procureur territorialement compétent, cette rédaction permettait une meilleure coordination entre autorités administratives et autorités judiciaires, confortant cette dernière dans son rôle de gardienne de la liberté individuelle au sens de l’article 66 de la Constitution. Permettez-moi de remercier le rapporteur et le président de la commission de l’esprit constructif qu’ils ont ainsi manifesté.
Marques de satisfaction sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.
Vous l’aurez compris, mesdames, messieurs les sénateurs, nous avons rédigé ce texte avec l’obsession de concilier la protection face au terrorisme et la préservation absolue des libertés qui constituent le socle de notre démocratie.
Si je parlais en introduction de l’attentat de Nice, c’est parce que je souhaite que durant nos débats, nous ne perdions jamais de vue que les décisions que nous allons prendre durant cette séance vont avoir des impacts très concrets.
Quand nous évoquons les zones de protection, c’est en effet de la possibilité pour les Français de se cultiver, de se divertir en sécurité dont nous parlerons. Quand nous statuerons sur la possibilité de fermer administrativement des lieux de culte, c’est de la manière d’éviter la radicalisation de nombreuses personnes que nous débattrons. Quand nous traiterons des mesures de surveillance individuelle ou des visites et saisies, ce sont des moyens que nous nous donnerons pour démanteler des réseaux terroristes, pour éviter les attentats, qu’il sera question.
Toutes les mesures de ce projet de loi visent à nous épargner de nouveaux morts et de nouveaux blessés. On nous dit parfois que le droit pénal suffit, mais, en matière de lutte contre le terrorisme, nous devons agir en amont du droit pénal, afin qu’en présence d’indices graves et concordants nos services puissent se tourner immédiatement vers l’institution judiciaire.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’évoquerai enfin en quelques mots trois points qui ont été moins présents dans le débat public, mais qui n’en demeurent pas moins essentiels.
Le premier concerne les systèmes de centralisation des données, qui correspondent à la transposition dans le droit français de la directive européenne Passenger Name Record, dite « PNR », ou à la création d’un fichier issu des dossiers des passagers du transport maritime à destination ou au départ de la France.
Si le Gouvernement souscrit aux améliorations juridiques apportées par la commission des lois, il émet néanmoins une réserve sur une modification qui tendrait à figer dans la loi l’organisation des modalités de consultation des données relatives au PNR maritime. Nous aurons l’occasion d’y revenir.
Le deuxième point concerne l’établissement d’un cadre juridique pour les opérations de surveillance des communications hertziennes. Cette mesure tire les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel du 21 octobre 2016, par laquelle ont été censurées, avec effet différé au 31 décembre 2017, des dispositions du code de la sécurité intérieure définissant les règles applicables aux opérations de surveillance des communications électroniques empruntant la voie exclusivement hertzienne.
Sur ce point également, le Gouvernement a souhaité distinguer clairement les techniques qui portent atteinte au secret des correspondances, qui seront soumises au cadre de la loi du 24 juillet 2015, donc contrôlées par la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignements, de celles qui empruntent la voie hertzienne publique, pour lesquelles de telles atteintes n’existent pas.
Enfin, et c’est un point qui a fait débat au sein de votre commission, nous prévoyons, dans l’article 10, le renforcement des possibilités de contrôle aux abords des points de passage frontalier.
L’idée de ce dispositif est conforme à la philosophie de l’ensemble du projet de loi. Il s’agit, sans remettre en cause la libre circulation des biens et des personnes, de renforcer nos marges de manœuvre face à une menace terroriste durable. La commission des lois, invoquant la jurisprudence européenne, a souhaité encadrer davantage ces contrôles dans la durée et l’espace. Le Gouvernement estime toutefois qu’il convient de veiller à ce que ces restrictions ne rendent pas inopérantes les dispositions prévues, alors même qu’il est envisagé de lever les contrôles aux frontières intérieures de la France en novembre prochain.
Mesdames, messieurs les sénateurs, un grand ancien qui siégeait sur ces travées, Victor Hugo
Exclamations.
Durant les discussions que nous allons tenir, ne cessons jamais d’avoir à l’esprit et l’une et l’autre de ces préoccupations ! Les questions dont nous traitons ici exigent en effet un grand sérieux, d’infinies précautions et un sens aigu des responsabilités.
M. Gérard Collomb, ministre d'État. C’est l’état d’esprit avec lequel j’entre dans ce débat et celui qui règnera – je n’en doute pas – sur vos travées.
Applaudissementssur les travées du groupe La République en marche.
M. Gérard Collomb, ministre d'État. C’est l’état d’esprit avec lequel j’entre dans ce débat et celui qui règnera – je n’en doute pas – sur vos travées.
Applaudissementssur les travées du groupe La République en marche.
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre auprès du ministre de l’intérieur, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, mes chers collègues, le texte sur lequel le Gouvernement nous appelle aujourd’hui à débattre est un texte fondamental, comme nous en avons rarement vu – vous avez eu raison de le dire, monsieur le ministre d’État.
En effet, il s’agit de faire entrer dans notre droit commun, celui du quotidien, des mesures qui n’y ont jamais été. Certes, elles étaient présentes dans le cadre de l’état d’urgence, mais à la fin de celui-ci, elles n’auront plus de base légale et ne pourront donc plus exister.
Je souhaite tout d’abord dire clairement, en ce début de discussion, que le Gouvernement propose de mettre en place des mesures qui ne sont pas celles de l’état d’urgence. Il ne s’agit donc pas de faire entrer celui-ci dans le droit commun. En effet, l’état d’urgence permet de prendre des mesures dont le champ d’application, notamment, est beaucoup plus large que les quatre mesures principales contenues dans le projet de loi proposé par le Gouvernement : création de périmètres de protection, fermeture de lieux de culte, obligation de demeurer dans une commune et visites domiciliaires – j’ai sciemment modifié certains intitulés pour bien montrer les différences.
Ces quatre mesures ne s’apparentent pas à celles de l’état d’urgence. Elles n’ont qu’un seul objectif, à savoir prévenir les actions terroristes, et relèvent de la police administrative.
Le projet de loi nous permet finalement de parfaire le droit spécial du terrorisme, qui s’est élaboré progressivement et qui est un droit à la fois pénal et administratif. Le Sénat a pris toute sa part dans la construction de ce droit et, si l’on y regarde de plus près, on voit bien que le terrorisme nous a obligés – peut-être davantage que nous ne l’aurions souhaité, mais telle est la réalité – à dépasser les catégories juridiques traditionnelles et à rapprocher des notions pénales et administratives pour rechercher l’efficacité.
Voilà pourquoi ce texte est fondamental. Vous avez eu raison de dire, monsieur le ministre d’État, que les Français voulaient vivre en sécurité, mais ils veulent également vivre libres. Vous êtes effectivement dans votre rôle, en nous parlant de sécurité, mais le Sénat est aussi dans le sien lorsqu’il met en avant les libertés qui sont garanties par la Constitution.
Nous allons avoir un dialogue franc et loyal, qui nous permettra de bâtir un véritable équilibre, valable dans la durée, et pas seulement pour aujourd’hui, entre deux grandes exigences : assurer la sécurité et garantir les libertés fondamentales, notamment celles d’aller et de venir et d’habiter où l’on veut. Les Français, sans nécessairement les exprimer de manière juridique, sont pleinement conscients de ces exigences.
Plusieurs mesures du texte concernent la prévention du terrorisme. D’autres, comme le partage des données des passagers – le PNR –, les communications hertziennes ou les contrôles aux frontières, visent un objectif différent, puisqu’elles sont d’application générale.
En ce qui concerne les mesures nouvelles visant à prévenir les actions terroristes, je ne vais pas m’appesantir, mais pour démontrer le bien-fondé de vos intentions, monsieur le ministre d’État, vous avez parfois, avec le talent qu’on vous connaît, oublié de présenter complètement l’économie de la pensée de la commission des lois… Permettez-moi de le faire, afin de rétablir l’équilibre !
Tout d’abord, les périmètres de sécurité. Cette mesure, tout à fait importante, existe bien dans la voie judiciaire et l’état d’urgence, mais pas dans le droit commun de l’autorité administrative. Nous sommes prêts à reconnaître ce pouvoir à l’autorité administrative.
Je rappelle que ces périmètres de sécurité permettent à l’autorité administrative de sécuriser des événements, mais aussi des lieux. J’aurais d’ailleurs aimé que le texte distingue mieux ces deux aspects.
On peut en effet penser qu’un périmètre de protection permanent autour des quatre piliers de la tour Eiffel ne pose pas de véritable problème pour les personnes qui habitent non loin. En revanche, s’il s’agit d’une manifestation se tenant place Bellecour à Lyon, où – grâce à la politique avancée que vous menez en matière de logements sociaux, monsieur le ministre d’État… – beaucoup de gens habitent encore, il faut bien qu’ils puissent rentrer chez eux !
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.
M. Michel Mercier, rapporteur. Par parenthèse, je signale qu’il n’y a pas de logements sociaux place Bellecour, mais cela viendra sûrement…
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre auprès du ministre de l’intérieur, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, mes chers collègues, le texte sur lequel le Gouvernement nous appelle aujourd’hui à débattre est un texte fondamental, comme nous en avons rarement vu – vous avez eu raison de le dire, monsieur le ministre d’État.
En effet, il s’agit de faire entrer dans notre droit commun, celui du quotidien, des mesures qui n’y ont jamais été. Certes, elles étaient présentes dans le cadre de l’état d’urgence, mais à la fin de celui-ci, elles n’auront plus de base légale et ne pourront donc plus exister.
Je souhaite tout d’abord dire clairement, en ce début de discussion, que le Gouvernement propose de mettre en place des mesures qui ne sont pas celles de l’état d’urgence. Il ne s’agit donc pas de faire entrer celui-ci dans le droit commun. En effet, l’état d’urgence permet de prendre des mesures dont le champ d’application, notamment, est beaucoup plus large que les quatre mesures principales contenues dans le projet de loi proposé par le Gouvernement : création de périmètres de protection, fermeture de lieux de culte, obligation de demeurer dans une commune et visites domiciliaires – j’ai sciemment modifié certains intitulés pour bien montrer les différences.
Ces quatre mesures ne s’apparentent pas à celles de l’état d’urgence. Elles n’ont qu’un seul objectif, à savoir prévenir les actions terroristes, et relèvent de la police administrative.
Le projet de loi nous permet finalement de parfaire le droit spécial du terrorisme, qui s’est élaboré progressivement et qui est un droit à la fois pénal et administratif. Le Sénat a pris toute sa part dans la construction de ce droit et, si l’on y regarde de plus près, on voit bien que le terrorisme nous a obligés – peut-être davantage que nous ne l’aurions souhaité, mais telle est la réalité – à dépasser les catégories juridiques traditionnelles et à rapprocher des notions pénales et administratives pour rechercher l’efficacité.
Voilà pourquoi ce texte est fondamental. Vous avez eu raison de dire, monsieur le ministre d’État, que les Français voulaient vivre en sécurité, mais ils veulent également vivre libres. Vous êtes effectivement dans votre rôle, en nous parlant de sécurité, mais le Sénat est aussi dans le sien lorsqu’il met en avant les libertés qui sont garanties par la Constitution.
Nous allons avoir un dialogue franc et loyal, qui nous permettra de bâtir un véritable équilibre, valable dans la durée, et pas seulement pour aujourd’hui, entre deux grandes exigences : assurer la sécurité et garantir les libertés fondamentales, notamment celles d’aller et de venir et d’habiter où l’on veut. Les Français, sans nécessairement les exprimer de manière juridique, sont pleinement conscients de ces exigences.
Plusieurs mesures du texte concernent la prévention du terrorisme. D’autres, comme le partage des données des passagers – le PNR –, les communications hertziennes ou les contrôles aux frontières, visent un objectif différent, puisqu’elles sont d’application générale.
En ce qui concerne les mesures nouvelles visant à prévenir les actions terroristes, je ne vais pas m’appesantir, mais pour démontrer le bien-fondé de vos intentions, monsieur le ministre d’État, vous avez parfois, avec le talent qu’on vous connaît, oublié de présenter complètement l’économie de la pensée de la commission des lois… Permettez-moi de le faire, afin de rétablir l’équilibre !
Tout d’abord, les périmètres de sécurité. Cette mesure, tout à fait importante, existe bien dans la voie judiciaire et l’état d’urgence, mais pas dans le droit commun de l’autorité administrative. Nous sommes prêts à reconnaître ce pouvoir à l’autorité administrative.
Je rappelle que ces périmètres de sécurité permettent à l’autorité administrative de sécuriser des événements, mais aussi des lieux. J’aurais d’ailleurs aimé que le texte distingue mieux ces deux aspects.
On peut en effet penser qu’un périmètre de protection permanent autour des quatre piliers de la tour Eiffel ne pose pas de véritable problème pour les personnes qui habitent non loin. En revanche, s’il s’agit d’une manifestation se tenant place Bellecour à Lyon, où – grâce à la politique avancée que vous menez en matière de logements sociaux, monsieur le ministre d’État… – beaucoup de gens habitent encore, il faut bien qu’ils puissent rentrer chez eux !
Sourires.
Sur le fond, nous acceptons que les gens soient éventuellement dans l’obligation d’ouvrir leur sac, même s’ils ne font que rentrer chez eux. Le contrôle ne me pose pas de problème, mais empêcher quelqu’un de rentrer chez lui, si !
M. Michel Mercier, rapporteur. Par parenthèse, je signale qu’il n’y a pas de logements sociaux place Bellecour, mais cela viendra sûrement…
Sourires.
Il faut donc trouver un système qui permette aux gens de rentrer chez eux.
Sur le fond, nous acceptons que les gens soient éventuellement dans l’obligation d’ouvrir leur sac, même s’ils ne font que rentrer chez eux. Le contrôle ne me pose pas de problème, mais empêcher quelqu’un de rentrer chez lui, si !
Sourires sur les travées du RDSE.
Il faut donc trouver un système qui permette aux gens de rentrer chez eux.
Dans votre texte, monsieur le ministre d’État, un tel système n’a pas encore été trouvé. Nous allons vous y aider !
En ce qui concerne l’obligation de résider sur une commune ou un territoire défini, cette mesure est clairement différente de l’assignation prévue dans le cadre de l’état d’urgence, qui consiste, quant à elle, à rester dans un appartement certaines heures de la journée, pas trop pour que la mesure ne soit pas privative de liberté, mais suffisamment pour qu’elle soit restrictive.
La question qui se pose est celle du renouvellement : il ne peut pas y avoir de décision d’obligation de résider sans possibilité de remise en cause ou de rendez-vous.
Aujourd’hui, il s’agit d’une mesure de police administrative et, en 2015, le Conseil d’État a rendu un avis, selon lequel la prolongation dans le temps d’une assignation à résidence pourrait la transformer d’une mesure restrictive de liberté en une mesure privative de liberté. Cela ressort clairement de l’avis du Conseil d’État. Monsieur le ministre d’État, peut-être vous a-t-on caché cet avis ? Si tel est le cas, je veillerai à ce qu’il vous soit communiqué…
Sourires.
Sourires sur les travées du RDSE.
Il faut le lire de manière exhaustive et précise !
Dans votre texte, monsieur le ministre d’État, un tel système n’a pas encore été trouvé. Nous allons vous y aider !
En ce qui concerne l’obligation de résider sur une commune ou un territoire défini, cette mesure est clairement différente de l’assignation prévue dans le cadre de l’état d’urgence, qui consiste, quant à elle, à rester dans un appartement certaines heures de la journée, pas trop pour que la mesure ne soit pas privative de liberté, mais suffisamment pour qu’elle soit restrictive.
La question qui se pose est celle du renouvellement : il ne peut pas y avoir de décision d’obligation de résider sans possibilité de remise en cause ou de rendez-vous.
Aujourd’hui, il s’agit d’une mesure de police administrative et, en 2015, le Conseil d’État a rendu un avis, selon lequel la prolongation dans le temps d’une assignation à résidence pourrait la transformer d’une mesure restrictive de liberté en une mesure privative de liberté. Cela ressort clairement de l’avis du Conseil d’État. Monsieur le ministre d’État, peut-être vous a-t-on caché cet avis ? Si tel est le cas, je veillerai à ce qu’il vous soit communiqué…
De son côté, le Conseil constitutionnel a relevé, en 2017 – certes, dans une décision quelque peu différente de l’avis du Conseil d’État, mais pas tant que cela –, que, si la prolongation d’une assignation à résidence dans le temps ne constitue pas une transformation de la mesure en peine privative de liberté, c’est en raison de l’état d’urgence.
Si le Conseil constitutionnel a pris la peine de préciser qu’en période d’état d’urgence la mesure d’assignation ne changeait pas de nature, on peut à tout le moins penser, du fait de la règle de l’effet utile, qu’il se reposerait la question si nous n’étions plus dans cette situation. Or ce sera effectivement le cas dans le cadre de l’obligation de résider.
Il existe donc bien, pour nous, un véritable problème, que le projet de loi ne résoudra peut-être pas entièrement. En tout état de cause, il est nécessaire que, à un moment donné, ce soit le juge qui intervienne. Cela constitue une limite évidente.
Alors, quel juge ? Il ne vous aura pas échappé, monsieur le ministre d’État, que les choses varient au sein du projet de loi lui-même : l’article 2 fait appel au juge administratif, quand l’article 4 relatif aux visites domiciliaires donne compétence au juge judiciaire.
Dans un premier temps, nous avions choisi le juge judiciaire, mais vous nous avez dit combien c’était impossible. Pour nous, c’est d’abord la présence d’un juge qui est importante et à même de garantir le meilleur équilibre entre sécurité et respect des libertés. C’est pourquoi nous proposerons finalement au Sénat que cette compétence soit donnée au juge administratif.
Sourires.
Il faut le lire de manière exhaustive et précise !
La procédure s’inspirerait donc de celle qui est prévue à l’article 2 du projet de loi. Après une première prorogation, l’autorité administrative devra, si elle entend poursuivre l’exécution de la mesure, avertir la personne concernée cinq jours avant, celle-ci disposant de 72 heures pour saisir le juge administratif des référés. Et, tant que le juge ne se sera pas prononcé, il n’y aura pas d’exécution d’office.
L’économie du dispositif que nous avons choisi permet donc à la fois la sécurité et la protection des libertés grâce à la présence du juge.
S’agissant des identifiants électroniques, il ressort clairement, même si je ne suis pas spécialiste de cette question, que le Gouvernement n’a pas besoin de ce texte, puisque la loi de 2015 relative au renseignement permet de prendre des mesures équivalentes. En outre, le Conseil constitutionnel a déclaré son hostilité à l’obligation de communiquer à l’administration ses identifiants personnels.
Plus tard dans le débat, nous aurons l’occasion de revenir sur les autres points en discussion, notamment les visites domiciliaires, les communications hertziennes – sujet qu’évoquera plus particulièrement le rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées – ou les contrôles aux frontières – question pour laquelle nous trouverons certainement un accord.
En conclusion, nous pensons que c’est le texte issu des travaux de la commission des lois du Sénat qui réalise vraiment un équilibre entre la nécessité de protéger les Français et celle d’assurer leurs libertés.
Monsieur le ministre d’État, madame la ministre auprès du ministre de l’intérieur, la commission des lois s’est livrée à un travail de responsabilité républicaine. J’invite le Sénat à procéder maintenant au même exercice.
De son côté, le Conseil constitutionnel a relevé, en 2017 – certes, dans une décision quelque peu différente de l’avis du Conseil d’État, mais pas tant que cela –, que, si la prolongation d’une assignation à résidence dans le temps ne constitue pas une transformation de la mesure en peine privative de liberté, c’est en raison de l’état d’urgence.
Si le Conseil constitutionnel a pris la peine de préciser qu’en période d’état d’urgence la mesure d’assignation ne changeait pas de nature, on peut à tout le moins penser, du fait de la règle de l’effet utile, qu’il se reposerait la question si nous n’étions plus dans cette situation. Or ce sera effectivement le cas dans le cadre de l’obligation de résider.
Il existe donc bien, pour nous, un véritable problème, que le projet de loi ne résoudra peut-être pas entièrement. En tout état de cause, il est nécessaire que, à un moment donné, ce soit le juge qui intervienne. Cela constitue une limite évidente.
Alors, quel juge ? Il ne vous aura pas échappé, monsieur le ministre d’État, que les choses varient au sein du projet de loi lui-même : l’article 2 fait appel au juge administratif, quand l’article 4 relatif aux visites domiciliaires donne compétence au juge judiciaire.
Dans un premier temps, nous avions choisi le juge judiciaire, mais vous nous avez dit combien c’était impossible. Pour nous, c’est d’abord la présence d’un juge qui est importante et à même de garantir le meilleur équilibre entre sécurité et respect des libertés. C’est pourquoi nous proposerons finalement au Sénat que cette compétence soit donnée au juge administratif.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.
La procédure s’inspirerait donc de celle qui est prévue à l’article 2 du projet de loi. Après une première prorogation, l’autorité administrative devra, si elle entend poursuivre l’exécution de la mesure, avertir la personne concernée cinq jours avant, celle-ci disposant de 72 heures pour saisir le juge administratif des référés. Et, tant que le juge ne se sera pas prononcé, il n’y aura pas d’exécution d’office.
L’économie du dispositif que nous avons choisi permet donc à la fois la sécurité et la protection des libertés grâce à la présence du juge.
S’agissant des identifiants électroniques, il ressort clairement, même si je ne suis pas spécialiste de cette question, que le Gouvernement n’a pas besoin de ce texte, puisque la loi de 2015 relative au renseignement permet de prendre des mesures équivalentes. En outre, le Conseil constitutionnel a déclaré son hostilité à l’obligation de communiquer à l’administration ses identifiants personnels.
Plus tard dans le débat, nous aurons l’occasion de revenir sur les autres points en discussion, notamment les visites domiciliaires, les communications hertziennes – sujet qu’évoquera plus particulièrement le rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées – ou les contrôles aux frontières – question pour laquelle nous trouverons certainement un accord.
En conclusion, nous pensons que c’est le texte issu des travaux de la commission des lois du Sénat qui réalise vraiment un équilibre entre la nécessité de protéger les Français et celle d’assurer leurs libertés.
Monsieur le ministre d’État, madame la ministre auprès du ministre de l’intérieur, la commission des lois s’est livrée à un travail de responsabilité républicaine. J’invite le Sénat à procéder maintenant au même exercice.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre auprès du ministre de l’intérieur, mes chers collègues, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées s’est saisie pour avis des articles relatifs aux dispositions touchant au PNR, le Passenger Name Re cord, ainsi qu’à ce que l’on nomme « l’exception hertzienne ».
Le PNR est issu de la loi de programmation militaire du 18 décembre 2013, qui proposait son expérimentation jusqu’à la fin de l’année 2017.
Cet instrument appréciable dans la lutte contre le terrorisme a enfin été doté d’un cadre juridique européen via une directive adoptée le 21 avril 2016. Tous les États membres doivent à présent s’en doter. Les bases de données existantes ou nouvelles devront impérativement être mises en relation pour offrir à chaque autorité nationale la capacité de sonder l’ensemble des renseignements collectés ; c’est le but principal du passage par le cadre européen.
Quant au système simplifié de PNR maritime proposé par le texte, il sera également fort utile pour lutter contre les formes les plus graves de criminalité, à condition, une fois encore, qu’une coopération efficace entre pays membres permette de partager les renseignements recueillis. Il s’agit pour le moment d’une initiative française, la directive européenne PNR se cantonnant aux données des circulations aériennes.
Par ailleurs, je souhaite rappeler que, lors de la réunion informelle du conseil des ministres « Justice et affaires intérieures » du 26 janvier 2017, la France, la Belgique, les Pays-Bas et la Grande-Bretagne ont formé le vœu que les déplacements ferroviaires internationaux soient également enregistrés.
La commission des affaires étrangères approuve en tout cas les dispositions proposées par le Gouvernement sur le PNR.
En ce qui concerne « l’exception hertzienne », le projet de loi assimile de fait nombre de communications hertziennes à des techniques existantes dans le droit commun et crée une « cinquième technique » de renseignement pour les communications exclusivement hertziennes ou ne transitant pas par un opérateur, échangées au sein d’un réseau privatif ou d’un groupe fermé d’utilisateurs : échanges entre talkies-walkies numériques ou transferts de photos d’un portable vers un ordinateur ; communications entre une montre connectée et un téléphone mobile ou encore entre téléphones d’intérieur.
Ainsi, la grande majorité des interceptions réalisées sur les communications hertziennes seront désormais soumises au régime de droit commun, donc, notamment, autorisées par le Premier ministre, après avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement – la CNCTR –, ce qui constitue un net renforcement du contrôle.
À titre résiduel, il demeure un régime spécifique pour les communications exclusivement hertziennes, sans opérateur et qui sont transmises de façon ouverte, c’est-à-dire qui peuvent être captées et enregistrées par n’importe quel appareil de réception en vente libre, pour peu qu’on soit calé sur la bonne fréquence. C’est le cas des radioamateurs, des cibistes ou des utilisateurs de talkies-walkies analogiques, mais aussi des communications radio et des moyens tactiques utilisés par les militaires.
Pour ces communications, le projet de loi confirme la légalité de leur surveillance, car celle-ci demeure indispensable dans le cadre, en particulier, de la défense militaire, de la contre-ingérence et de la lutte antiterroriste. Il les soumet à un certain nombre de règles : respect des finalités de la loi sur le renseignement, d’une part, et des missions liées à la défense militaire, d’autre part, mais aussi, durée de conservation des données et destruction des extractions et des transcriptions.
Le projet de loi donne à la CNCTR la mission de veiller au respect des champs d’application respectifs des techniques du droit commun et du régime spécifique. C’est sur les modalités de son contrôle que portera, entre autres, la discussion à l’article 9, car, dans l’ensemble, le texte du Gouvernement nous convient.
Depuis plusieurs années maintenant, le législateur a adopté de nombreuses avancées juridiques concernant le contrôle de nos services de renseignement, pour nous hisser au meilleur standard, au sein des grandes démocraties, en termes d’encadrement légal de leurs activités.
Nos partenaires européens nous offrent la possibilité de mener, à nouveaux frais, un dialogue exigeant sur la nécessité de trouver le bon équilibre entre sécurité publique et libertés individuelles. Le vote de la directive sur le PNR aérien démontre l’efficacité de ce dialogue et nous encourageons le Gouvernement à poursuivre les discussions pour mettre la dernière main à un maillage élargi et complété du système PNR.
Sur le dispositif de surveillance hertzienne, j’insiste sur le fait que la CNCTR, créée par la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement, est l’organe de contrôle primordial et qu’il ne s’agit que de confirmer son rôle, en s’assurant de l’effectivité et de l’efficience de l’exécution de ses missions. Celles-ci demeurent parfaitement proportionnées aux contraintes opérationnelles qui peuvent exister, et il ne s’agit que de garder cohérent son champ de contrôle.
Pour toutes ces raisons, concernant le PNR comme la surveillance des communications hertziennes, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l’adoption du projet de loi.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre auprès du ministre de l’intérieur, mes chers collègues, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées s’est saisie pour avis des articles relatifs aux dispositions touchant au PNR, le Passenger Name Re cord, ainsi qu’à ce que l’on nomme « l’exception hertzienne ».
Le PNR est issu de la loi de programmation militaire du 18 décembre 2013, qui proposait son expérimentation jusqu’à la fin de l’année 2017.
Cet instrument appréciable dans la lutte contre le terrorisme a enfin été doté d’un cadre juridique européen via une directive adoptée le 21 avril 2016. Tous les États membres doivent à présent s’en doter. Les bases de données existantes ou nouvelles devront impérativement être mises en relation pour offrir à chaque autorité nationale la capacité de sonder l’ensemble des renseignements collectés ; c’est le but principal du passage par le cadre européen.
Quant au système simplifié de PNR maritime proposé par le texte, il sera également fort utile pour lutter contre les formes les plus graves de criminalité, à condition, une fois encore, qu’une coopération efficace entre pays membres permette de partager les renseignements recueillis. Il s’agit pour le moment d’une initiative française, la directive européenne PNR se cantonnant aux données des circulations aériennes.
Par ailleurs, je souhaite rappeler que, lors de la réunion informelle du conseil des ministres « Justice et affaires intérieures » du 26 janvier 2017, la France, la Belgique, les Pays-Bas et la Grande-Bretagne ont formé le vœu que les déplacements ferroviaires internationaux soient également enregistrés.
La commission des affaires étrangères approuve en tout cas les dispositions proposées par le Gouvernement sur le PNR.
En ce qui concerne « l’exception hertzienne », le projet de loi assimile de fait nombre de communications hertziennes à des techniques existantes dans le droit commun et crée une « cinquième technique » de renseignement pour les communications exclusivement hertziennes ou ne transitant pas par un opérateur, échangées au sein d’un réseau privatif ou d’un groupe fermé d’utilisateurs : échanges entre talkies-walkies numériques ou transferts de photos d’un portable vers un ordinateur ; communications entre une montre connectée et un téléphone mobile ou encore entre téléphones d’intérieur.
Ainsi, la grande majorité des interceptions réalisées sur les communications hertziennes seront désormais soumises au régime de droit commun, donc, notamment, autorisées par le Premier ministre, après avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement – la CNCTR –, ce qui constitue un net renforcement du contrôle.
À titre résiduel, il demeure un régime spécifique pour les communications exclusivement hertziennes, sans opérateur et qui sont transmises de façon ouverte, c’est-à-dire qui peuvent être captées et enregistrées par n’importe quel appareil de réception en vente libre, pour peu qu’on soit calé sur la bonne fréquence. C’est le cas des radioamateurs, des cibistes ou des utilisateurs de talkies-walkies analogiques, mais aussi des communications radio et des moyens tactiques utilisés par les militaires.
Pour ces communications, le projet de loi confirme la légalité de leur surveillance, car celle-ci demeure indispensable dans le cadre, en particulier, de la défense militaire, de la contre-ingérence et de la lutte antiterroriste. Il les soumet à un certain nombre de règles : respect des finalités de la loi sur le renseignement, d’une part, et des missions liées à la défense militaire, d’autre part, mais aussi, durée de conservation des données et destruction des extractions et des transcriptions.
Le projet de loi donne à la CNCTR la mission de veiller au respect des champs d’application respectifs des techniques du droit commun et du régime spécifique. C’est sur les modalités de son contrôle que portera, entre autres, la discussion à l’article 9, car, dans l’ensemble, le texte du Gouvernement nous convient.
Depuis plusieurs années maintenant, le législateur a adopté de nombreuses avancées juridiques concernant le contrôle de nos services de renseignement, pour nous hisser au meilleur standard, au sein des grandes démocraties, en termes d’encadrement légal de leurs activités.
Nos partenaires européens nous offrent la possibilité de mener, à nouveaux frais, un dialogue exigeant sur la nécessité de trouver le bon équilibre entre sécurité publique et libertés individuelles. Le vote de la directive sur le PNR aérien démontre l’efficacité de ce dialogue et nous encourageons le Gouvernement à poursuivre les discussions pour mettre la dernière main à un maillage élargi et complété du système PNR.
Sur le dispositif de surveillance hertzienne, j’insiste sur le fait que la CNCTR, créée par la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement, est l’organe de contrôle primordial et qu’il ne s’agit que de confirmer son rôle, en s’assurant de l’effectivité et de l’efficience de l’exécution de ses missions. Celles-ci demeurent parfaitement proportionnées aux contraintes opérationnelles qui peuvent exister, et il ne s’agit que de garder cohérent son champ de contrôle.
Pour toutes ces raisons, concernant le PNR comme la surveillance des communications hertziennes, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l’adoption du projet de loi.
Je suis saisi, par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, d’une motion n° 13.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme (n° 630, 2016-2017).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour la motion.
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre auprès du ministre de l’intérieur, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord d’avoir une pensée toute particulière, emplie d’émotion, pour l’ensemble des victimes et des familles meurtries lors des attentats qui ont frappé notre pays ces dernières années.
Le groupe communiste républicain et citoyen a souhaité déposer une motion tendant à opposer la question préalable, afin que soit rejeté l’ensemble de ce projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme.
Le 9 septembre 1986, il y a trente ans, la France se dotait de sa première législation en matière de lutte antiterroriste. Cette loi instituait un régime dérogatoire au droit commun et créait un corps spécialisé de magistrats. Depuis lors, de nombreuses réformes ont conduit à la mise en œuvre d’un régime procédural dérogatoire en matière d’enquête, ainsi qu’à la création de nouvelles infractions terroristes.
À la suite des terribles attentats du 13 novembre 2015, le conseil des ministres a adopté un décret déclarant l’état d’urgence. En à peine deux ans, cet état d’urgence a été prorogé six fois, deux de ces lois de prorogation – celles du 20 novembre 2015 et du 21 juillet 2016 – ayant largement renforcé ses dispositions.
En parallèle, ont été promulguées, le 24 juillet 2015, la loi relative au renseignement et, le 3 juin 2016, la loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement et améliorant l’efficacité des garanties de la procédure pénale.
Nous nous sommes opposés à l’ensemble de ces textes, qui constituent un arsenal non seulement dangereux pour l’équilibre de notre démocratie, mais surtout inefficace pour renforcer notre sécurité publique, comme en témoigne, hélas, le terrible attentat qui a meurtri la ville de Nice il y a un an.
La présente réforme s’inscrit dans la même lignée et illustre les choix politiques de ces quinze dernières années : des événements de nature exceptionnelle sont utilisés pour justifier la construction d’un droit d’exception.
À ceci près que ce projet de loi porte en lui le coup d’après : prétendant conditionner la levée de l’état d’urgence à l’adoption de ce texte, le Gouvernement introduit en réalité les mesures mêmes de l’état d’urgence dans notre droit commun, dans une version prétendument édulcorée, mais sans la moindre garantie valable.
Aux personnalités du réseau État d’urgence – antiterrorisme, qu’il recevait le 3 juillet dernier, le chef de l’État a affirmé, tranquillement, qu’il s’agissait de la première et de la dernière loi antiterroriste de son quinquennat. Évidemment, puisqu’inscrire l’état d’urgence dans notre droit commun mettra effectivement fin à ses renouvellements incessants !
Je vous l’ai déjà dit lors de mon intervention concernant la sixième prorogation de l’état d’urgence, il y a quinze jours, ici même, des voix de plus en plus fortes s’élèvent contre son contenu : « Renoncer à l’état d’urgence est nécessaire, mais n’autorise certainement pas à en faire notre droit commun », écrit Mireille Delmas-Marty dans une lettre ouverte au Président de la République. Comment ne pas citer ici le texte signé par plus de cinq cents universitaires, chercheurs, juristes, politistes ou sociologues, qui affirment que les mesures contenues dans ce projet de loi sont dangereuses et font peser des menaces sur notre État de droit ?
Lors de son intervention devant le Parlement réuni en Congrès le 3 juillet dernier, Emmanuel Macron affirmait : « Le code pénal, tel qu’il est, les pouvoirs des magistrats, tels qu’ils sont, peuvent, si le système est bien ordonné, bien organisé, nous permettre d’anéantir nos adversaires. Donner en revanche à l’administration des pouvoirs illimités sur la vie des personnes, sans aucune discrimination, n’a aucun sens, ni en termes de principes ni en termes d’efficacité. »
J’oserai dire que nous sommes d’accord avec lui, mais, hélas, tout ce qu’il nous propose aujourd’hui avec un tel texte est l’exact opposé de ce qu’il semblait affirmer il y a seulement quelques jours…
Monsieur le ministre d’État, vous légitimez l’accroissement des pouvoirs de l’administratif par un prétendu manque d’anticipation du judiciaire. Pourtant, il est faux de prétendre que seuls l’état d’urgence ou les moyens de police administrative seraient susceptibles de prévenir un attentat, et non les outils relevant du judiciaire : tous les jours, les procureurs et juges d’instruction antiterroristes dirigent des enquêtes visant des personnes pour les projets qu’elles élaborent et non qu’elles ont commis.
À titre d’exemple, les perquisitions administratives menées en nombre n’ont abouti qu’à l’ouverture de trente procédures en matière antiterroriste, alors qu’il n’est pas démontré qu’elles n’auraient pas pu intervenir dans un cadre intégralement judiciaire. Sachant qu’entre novembre 2015 et novembre 2016, tandis que seules vingt enquêtes étaient imputables à l’état d’urgence, cent soixante-dix procédures d’information judiciaire avaient été ouvertes par le parquet de Paris dans un cadre « normal ».
M. Macron écrivait dans son livre de campagne, Révolution, pourquoi il souhaitait sortir de l’état d’urgence. Alors, pour quelles raisons propose-t-il un tel texte ? Si ce n’est par pure démagogie, serait-ce pour utiliser la peur légitime de nos concitoyens ?
La raison en est peut-être plus profonde, c’est en tout cas ce que je crains. Ce texte est idéologique ; au-delà de son pragmatisme apparent, il porte en lui de nombreuses questions : celle des répressions administratives et des pouvoirs grandissants des forces de l’ordre toujours plus exemptes de contrôle judiciaire ; celle des migrations et des contrôles aux frontières ; enfin, celle des inégalités grandissantes entre les citoyens.
« Face à des jeunes qui sont tangents […], si vous défoncez leur porte à 4 heures du matin, que vous les assignez à résidence » – ou, ici, dans une commune… – « pendant trois mois, ce qui a pour conséquence que certains perdent leur boulot, expliquez-moi en quoi ils sont moins dangereux ensuite ? […] Tout homme sensé comprend qu’on attise le feu avec de telles méthodes. On tape n’importe qui, n’importe comment ». Ce n’est pas moi qui le dis, c’est l’ancien juge antiterroriste Marc Trévidic, désormais très médiatique.
Face à de telles dérives, qui ne sont plus à prouver, il faut désormais avoir le courage de passer d’une logique de peur irrationnelle, qui justifie une logique de guerre, à une logique de paix.
Pour lutter contre le terrorisme, il n’y a certainement pas de loi instaurant un risque zéro, mais peut-être faudrait-il sérieusement commencer à amorcer une double réflexion ?
Tout d’abord, sur le plan international. Pour combattre ses ennemis, il faut les connaître. Il faut expliquer – contrairement à ce que certains ont pu dire… –, remonter aux origines géopolitiques, rappeler les responsabilités bien réelles des puissances occidentales, ces guerres destructrices en Irak et en Afghanistan, le non-sens de l’intervention en Libye.
Il faut enfin dénoncer le rôle trouble des puissances régionales, comme la Turquie, l’Arabie Saoudite et le Qatar. Le terrorisme se nourrit de la guerre du pétrole et du trafic d’armes.
Nous le répétons depuis le Congrès de Versailles du 16 novembre 2015 : la coalition internationale est au cœur du problème. Il faut rapidement repenser les choses et cesser d’agir en ordre dispersé. Une large coalition internationale sous mandat de l’ONU doit être mise en place, avec l’ambition – au-delà du combat contre Daech – de reconstruire ces régions, de permettre d’établir une paix durable et, ainsi, le retour de milliers de réfugiés. Sans cette perspective, pas d’issue au terrorisme !
Question préalable
Je suis saisi, par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, d’une motion n° 13.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme (n° 630, 2016-2017).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour la motion.
Ensuite, sur le plan national, il faut refonder le vivre ensemble, en bannissant le culte de l’argent, si cher au chef de l’État, qui érige en vertu le statut de milliardaire ! Faire miroiter la fortune à ceux qui ne pourront l’atteindre fait naître colère et désespoir, qui peuvent aller jusqu’à des dérives extrêmes.
La culture et l’éducation sont d’abord le fruit d’un échange, de liens, de partage, de social, d’hommes. Cela n’a pas de prix, si ce n’est celui des politiques publiques et des moyens alloués pour rémunérer nos acteurs sociaux, orienter les budgets vers ce qui n’est pas visible tout de suite, mais indispensable pour l’avenir : éducateurs, assistantes sociales, conseillers en insertion et probation, tous ces métiers essentiels. L’emploi doit être l’objectif primordial.
Les missions de service public de l’État elles-mêmes sont aujourd’hui parfois dévoyées au service de la lutte contre le terrorisme, comme en témoigne la tribune publiée dans Mediapart par plusieurs agents publics, fonctionnaires de l’État.
« Au quotidien, nous accomplissons nos missions respectives du mieux possible malgré des moyens insuffisants, des conditions de plus en plus dégradées », écrivent-ils. « Alors même qu’elles nous semblent essentielles et complémentaires, l’éducation, la culture, l’insertion, la justice, la prévention et la sécurité, la recherche, la santé, la douane… sont aujourd’hui dévoyées pour “raisons de sécurité” et à “des fins de renseignement pour la lutte contre le terrorisme” ».
Depuis 2002, les policiers subissent la politique du chiffre, exacerbée avec l’état d’urgence, une politique axée sur le tout sécuritaire. Or leur rôle est aussi d’être au plus près de la population, pour prévenir et lutter contre les crimes, les délits, mais aussi toute forme de radicalisation en récupérant les renseignements à la source.
Comme eux, nous réclamons en urgence un débat public sur les politiques à mener pour lutter contre le terrorisme, car, après cet ancrage de l’état d’urgence dans notre droit commun, quelle sera la prochaine étape ? L’état de siège sera déclaré ? La guerre matérielle viendra-t-elle prendre nos rues ?
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre auprès du ministre de l’intérieur, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord d’avoir une pensée toute particulière, emplie d’émotion, pour l’ensemble des victimes et des familles meurtries lors des attentats qui ont frappé notre pays ces dernières années.
Le groupe communiste républicain et citoyen a souhaité déposer une motion tendant à opposer la question préalable, afin que soit rejeté l’ensemble de ce projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme.
Le 9 septembre 1986, il y a trente ans, la France se dotait de sa première législation en matière de lutte antiterroriste. Cette loi instituait un régime dérogatoire au droit commun et créait un corps spécialisé de magistrats. Depuis lors, de nombreuses réformes ont conduit à la mise en œuvre d’un régime procédural dérogatoire en matière d’enquête, ainsi qu’à la création de nouvelles infractions terroristes.
À la suite des terribles attentats du 13 novembre 2015, le conseil des ministres a adopté un décret déclarant l’état d’urgence. En à peine deux ans, cet état d’urgence a été prorogé six fois, deux de ces lois de prorogation – celles du 20 novembre 2015 et du 21 juillet 2016 – ayant largement renforcé ses dispositions.
En parallèle, ont été promulguées, le 24 juillet 2015, la loi relative au renseignement et, le 3 juin 2016, la loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement et améliorant l’efficacité des garanties de la procédure pénale.
Nous nous sommes opposés à l’ensemble de ces textes, qui constituent un arsenal non seulement dangereux pour l’équilibre de notre démocratie, mais surtout inefficace pour renforcer notre sécurité publique, comme en témoigne, hélas, le terrible attentat qui a meurtri la ville de Nice il y a un an.
La présente réforme s’inscrit dans la même lignée et illustre les choix politiques de ces quinze dernières années : des événements de nature exceptionnelle sont utilisés pour justifier la construction d’un droit d’exception.
À ceci près que ce projet de loi porte en lui le coup d’après : prétendant conditionner la levée de l’état d’urgence à l’adoption de ce texte, le Gouvernement introduit en réalité les mesures mêmes de l’état d’urgence dans notre droit commun, dans une version prétendument édulcorée, mais sans la moindre garantie valable.
Aux personnalités du réseau État d’urgence – antiterrorisme, qu’il recevait le 3 juillet dernier, le chef de l’État a affirmé, tranquillement, qu’il s’agissait de la première et de la dernière loi antiterroriste de son quinquennat. Évidemment, puisqu’inscrire l’état d’urgence dans notre droit commun mettra effectivement fin à ses renouvellements incessants !
Je vous l’ai déjà dit lors de mon intervention concernant la sixième prorogation de l’état d’urgence, il y a quinze jours, ici même, des voix de plus en plus fortes s’élèvent contre son contenu : « Renoncer à l’état d’urgence est nécessaire, mais n’autorise certainement pas à en faire notre droit commun », écrit Mireille Delmas-Marty dans une lettre ouverte au Président de la République. Comment ne pas citer ici le texte signé par plus de cinq cents universitaires, chercheurs, juristes, politistes ou sociologues, qui affirment que les mesures contenues dans ce projet de loi sont dangereuses et font peser des menaces sur notre État de droit ?
Lors de son intervention devant le Parlement réuni en Congrès le 3 juillet dernier, Emmanuel Macron affirmait : « Le code pénal, tel qu’il est, les pouvoirs des magistrats, tels qu’ils sont, peuvent, si le système est bien ordonné, bien organisé, nous permettre d’anéantir nos adversaires. Donner en revanche à l’administration des pouvoirs illimités sur la vie des personnes, sans aucune discrimination, n’a aucun sens, ni en termes de principes ni en termes d’efficacité. »
J’oserai dire que nous sommes d’accord avec lui, mais, hélas, tout ce qu’il nous propose aujourd’hui avec un tel texte est l’exact opposé de ce qu’il semblait affirmer il y a seulement quelques jours…
Monsieur le ministre d’État, vous légitimez l’accroissement des pouvoirs de l’administratif par un prétendu manque d’anticipation du judiciaire. Pourtant, il est faux de prétendre que seuls l’état d’urgence ou les moyens de police administrative seraient susceptibles de prévenir un attentat, et non les outils relevant du judiciaire : tous les jours, les procureurs et juges d’instruction antiterroristes dirigent des enquêtes visant des personnes pour les projets qu’elles élaborent et non qu’elles ont commis.
À titre d’exemple, les perquisitions administratives menées en nombre n’ont abouti qu’à l’ouverture de trente procédures en matière antiterroriste, alors qu’il n’est pas démontré qu’elles n’auraient pas pu intervenir dans un cadre intégralement judiciaire. Sachant qu’entre novembre 2015 et novembre 2016, tandis que seules vingt enquêtes étaient imputables à l’état d’urgence, cent soixante-dix procédures d’information judiciaire avaient été ouvertes par le parquet de Paris dans un cadre « normal ».
M. Macron écrivait dans son livre de campagne, Révolution, pourquoi il souhaitait sortir de l’état d’urgence. Alors, pour quelles raisons propose-t-il un tel texte ? Si ce n’est par pure démagogie, serait-ce pour utiliser la peur légitime de nos concitoyens ?
La raison en est peut-être plus profonde, c’est en tout cas ce que je crains. Ce texte est idéologique ; au-delà de son pragmatisme apparent, il porte en lui de nombreuses questions : celle des répressions administratives et des pouvoirs grandissants des forces de l’ordre toujours plus exemptes de contrôle judiciaire ; celle des migrations et des contrôles aux frontières ; enfin, celle des inégalités grandissantes entre les citoyens.
« Face à des jeunes qui sont tangents […], si vous défoncez leur porte à 4 heures du matin, que vous les assignez à résidence » – ou, ici, dans une commune… – « pendant trois mois, ce qui a pour conséquence que certains perdent leur boulot, expliquez-moi en quoi ils sont moins dangereux ensuite ? […] Tout homme sensé comprend qu’on attise le feu avec de telles méthodes. On tape n’importe qui, n’importe comment ». Ce n’est pas moi qui le dis, c’est l’ancien juge antiterroriste Marc Trévidic, désormais très médiatique.
Face à de telles dérives, qui ne sont plus à prouver, il faut désormais avoir le courage de passer d’une logique de peur irrationnelle, qui justifie une logique de guerre, à une logique de paix.
Pour lutter contre le terrorisme, il n’y a certainement pas de loi instaurant un risque zéro, mais peut-être faudrait-il sérieusement commencer à amorcer une double réflexion ?
Tout d’abord, sur le plan international. Pour combattre ses ennemis, il faut les connaître. Il faut expliquer – contrairement à ce que certains ont pu dire… –, remonter aux origines géopolitiques, rappeler les responsabilités bien réelles des puissances occidentales, ces guerres destructrices en Irak et en Afghanistan, le non-sens de l’intervention en Libye.
Il faut enfin dénoncer le rôle trouble des puissances régionales, comme la Turquie, l’Arabie Saoudite et le Qatar. Le terrorisme se nourrit de la guerre du pétrole et du trafic d’armes.
Nous le répétons depuis le Congrès de Versailles du 16 novembre 2015 : la coalition internationale est au cœur du problème. Il faut rapidement repenser les choses et cesser d’agir en ordre dispersé. Une large coalition internationale sous mandat de l’ONU doit être mise en place, avec l’ambition – au-delà du combat contre Daech – de reconstruire ces régions, de permettre d’établir une paix durable et, ainsi, le retour de milliers de réfugiés. Sans cette perspective, pas d’issue au terrorisme !
Notre responsabilité est donc grande. Jeter en pâture nos libertés publiques ne grandira pas notre pays et ne renforcera aucunement notre sécurité collective. Ce que veulent nos ennemis obscurantistes, c’est le recul de nos démocraties, la mise à mal de nos droits et libertés publiques pour revenir à cet état primitif de la loi du plus fort.
La France doit se ressaisir et ne pas céder au despotisme, fût-il doux ; elle doit rester fidèle aux idéaux qu’elle défend depuis le Siècle des Lumières en renonçant à la surenchère sécuritaire qui aura pour seul fruit la fracturation de notre société.
Ensuite, sur le plan national, il faut refonder le vivre ensemble, en bannissant le culte de l’argent, si cher au chef de l’État, qui érige en vertu le statut de milliardaire ! Faire miroiter la fortune à ceux qui ne pourront l’atteindre fait naître colère et désespoir, qui peuvent aller jusqu’à des dérives extrêmes.
La culture et l’éducation sont d’abord le fruit d’un échange, de liens, de partage, de social, d’hommes. Cela n’a pas de prix, si ce n’est celui des politiques publiques et des moyens alloués pour rémunérer nos acteurs sociaux, orienter les budgets vers ce qui n’est pas visible tout de suite, mais indispensable pour l’avenir : éducateurs, assistantes sociales, conseillers en insertion et probation, tous ces métiers essentiels. L’emploi doit être l’objectif primordial.
Les missions de service public de l’État elles-mêmes sont aujourd’hui parfois dévoyées au service de la lutte contre le terrorisme, comme en témoigne la tribune publiée dans Mediapart par plusieurs agents publics, fonctionnaires de l’État.
« Au quotidien, nous accomplissons nos missions respectives du mieux possible malgré des moyens insuffisants, des conditions de plus en plus dégradées », écrivent-ils. « Alors même qu’elles nous semblent essentielles et complémentaires, l’éducation, la culture, l’insertion, la justice, la prévention et la sécurité, la recherche, la santé, la douane… sont aujourd’hui dévoyées pour “raisons de sécurité” et à “des fins de renseignement pour la lutte contre le terrorisme” ».
Depuis 2002, les policiers subissent la politique du chiffre, exacerbée avec l’état d’urgence, une politique axée sur le tout sécuritaire. Or leur rôle est aussi d’être au plus près de la population, pour prévenir et lutter contre les crimes, les délits, mais aussi toute forme de radicalisation en récupérant les renseignements à la source.
Comme eux, nous réclamons en urgence un débat public sur les politiques à mener pour lutter contre le terrorisme, car, après cet ancrage de l’état d’urgence dans notre droit commun, quelle sera la prochaine étape ? L’état de siège sera déclaré ? La guerre matérielle viendra-t-elle prendre nos rues ?
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Notre responsabilité est donc grande. Jeter en pâture nos libertés publiques ne grandira pas notre pays et ne renforcera aucunement notre sécurité collective. Ce que veulent nos ennemis obscurantistes, c’est le recul de nos démocraties, la mise à mal de nos droits et libertés publiques pour revenir à cet état primitif de la loi du plus fort.
La France doit se ressaisir et ne pas céder au despotisme, fût-il doux ; elle doit rester fidèle aux idéaux qu’elle défend depuis le Siècle des Lumières en renonçant à la surenchère sécuritaire qui aura pour seul fruit la fracturation de notre société.
Aucun orateur ne s’est inscrit contre la motion.
La parole est à M. le rapporteur.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, la motion que vient de soutenir Mme Assassi ne me semble pas adaptée au texte que nous avons préparé.
En effet, comme nous le savons tous, la menace terroriste perdure à un haut niveau dans notre pays. Le texte qui nous est présenté aujourd’hui nous semble tenir compte de cette menace. Nous faisons crédit au Gouvernement, parce qu’il dispose des moyens d’apprécier l’importance de cette menace grâce aux services de renseignement. S’il présente ce texte, c’est qu’il existe un risque certain.
Notre rôle consiste à concilier la protection due aux Français en fonction de ce risque avec les libertés traditionnelles auxquelles nous sommes attachés. La commission a travaillé en ce sens et pense être arrivée à un équilibre qui est bon, même s’il peut être encore amélioré au cours des discussions à venir.
C’est la raison pour laquelle, avec regret, je ne puis qu’émettre un avis défavorable sur la motion qui vient de nous être présentée par Mme Assassi.
Applaudissements au banc des commissions. – Mme Françoise Gatel applaudit également.
Aucun orateur ne s’est inscrit contre la motion.
La parole est à M. le rapporteur.
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, la motion que vient de soutenir Mme Assassi ne me semble pas adaptée au texte que nous avons préparé.
En effet, comme nous le savons tous, la menace terroriste perdure à un haut niveau dans notre pays. Le texte qui nous est présenté aujourd’hui nous semble tenir compte de cette menace. Nous faisons crédit au Gouvernement, parce qu’il dispose des moyens d’apprécier l’importance de cette menace grâce aux services de renseignement. S’il présente ce texte, c’est qu’il existe un risque certain.
Notre rôle consiste à concilier la protection due aux Français en fonction de ce risque avec les libertés traditionnelles auxquelles nous sommes attachés. La commission a travaillé en ce sens et pense être arrivée à un équilibre qui est bon, même s’il peut être encore amélioré au cours des discussions à venir.
C’est la raison pour laquelle, avec regret, je ne puis qu’émettre un avis défavorable sur la motion qui vient de nous être présentée par Mme Assassi.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, Mme la présidente du groupe CRC s’est un peu éloignée du sujet. Si l’on compare l’état d’urgence et le texte que nous proposons, on s’aperçoit que le cadre juridique des mesures du présent projet de loi est beaucoup plus protecteur que ne l’est celui de l’état d’urgence.
Tout d’abord, notre texte vise uniquement le terrorisme et non pas le maintien de l’ordre public. Vous admettrez que la différence est relativement appréciable.
Ensuite, ce projet de loi est beaucoup plus encadré juridiquement, afin de garantir les droits individuels. Le seuil de déclenchement est beaucoup plus élevé que dans le cas de l’état d’urgence, puisqu’il suppose l’existence d’une « menace d’une particulière gravité ». Les préfets et le ministre de l’intérieur n’utiliseront évidemment pas ce texte en dehors des problématiques que nous évoquons aujourd’hui.
J’observe d’ailleurs que, même dans le cadre de l’état d’urgence, un certain nombre de mesures n’ont été utilisées qu’avec beaucoup de précautions, …
Applaudissements au banc des commissions. – Mme Françoise Gatel applaudit également.
… parce que nous sommes dans un État de droit.
J’ai parlé d’un effet de sidération pour les terroristes, mais cet effet a été réciproque. Nous aussi avons été sidérés lorsqu’il nous a fallu constater que, sur notre territoire, des attentats comme celui de Charlie Hebdo ou du Bataclan pouvaient se produire. Chaque fois qu’un attentat nouveau se produisait, nous refusions d’admettre qu’un tel acte soit possible sur notre sol.
Vous nous avez reproché d’adopter de nombreux textes, mais c’est parce que les terroristes nous ont précédés en montant chaque fois d’un cran dans la violence. C’est pour cela qu’il a été nécessaire de tant légiférer, afin de pouvoir riposter. Si nous avons aujourd’hui réussi à largement maîtriser ce risque, qui reste important, c’est parce que le Gouvernement et le Parlement se sont donné les moyens légaux de pouvoir riposter.
Quant au reste, qui vous dit que nous considérons que la société est parfaite et que tout va bien dans notre pays ? Nous voyons comme vous les 3, 5 millions de chômeurs. Peut-être n’apportons-nous pas exactement la même réponse et ne faisons-nous pas la même analyse de ce qui a provoqué ce chômage de masse dans notre pays ? Comme vous le savez, c’est un autre débat.
Sur le fait qu’un certain nombre de quartiers ou de communes soient aujourd’hui paupérisés et aient tendance à se ghettoïser, je partage la même analyse que vous. Lorsque j’étais maire et président d’agglomération, j’essayais de rétablir une forme de mixité sociale dans la ville. Quand je vois la banlieue parisienne, je me dis qu’une séparation totale entre des communes très pauvres et d’autres qui disposent de moyens importants ne favorise pas la compréhension entre les uns et les autres.
Oui, nous comprenons les maux dont souffre la société française. La fracture sociale est aujourd’hui largement une fracture spatiale, et il convient de la résorber. C’est l’objet d’autres politiques que celles dont le ministre de l’intérieur a la charge, et l’action du Gouvernement doit être appréciée dans un cadre d’ensemble.
Vous dites que les mesures que nous proposons ne seraient pas nécessaires, mais je me permettrais, madame, de ne pas être d’accord avec vous, surtout en connaissant ce qu’un ministre de l’intérieur peut connaître. Avec la commission, nous allons justement chercher un équilibre entre sécurité et liberté.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, Mme la présidente du groupe CRC s’est un peu éloignée du sujet. Si l’on compare l’état d’urgence et le texte que nous proposons, on s’aperçoit que le cadre juridique des mesures du présent projet de loi est beaucoup plus protecteur que ne l’est celui de l’état d’urgence.
Tout d’abord, notre texte vise uniquement le terrorisme et non pas le maintien de l’ordre public. Vous admettrez que la différence est relativement appréciable.
Ensuite, ce projet de loi est beaucoup plus encadré juridiquement, afin de garantir les droits individuels. Le seuil de déclenchement est beaucoup plus élevé que dans le cas de l’état d’urgence, puisqu’il suppose l’existence d’une « menace d’une particulière gravité ». Les préfets et le ministre de l’intérieur n’utiliseront évidemment pas ce texte en dehors des problématiques que nous évoquons aujourd’hui.
J’observe d’ailleurs que, même dans le cadre de l’état d’urgence, un certain nombre de mesures n’ont été utilisées qu’avec beaucoup de précautions, …
Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche, ainsi qu’au banc des commissions.
… parce que nous sommes dans un État de droit.
J’ai parlé d’un effet de sidération pour les terroristes, mais cet effet a été réciproque. Nous aussi avons été sidérés lorsqu’il nous a fallu constater que, sur notre territoire, des attentats comme celui de Charlie Hebdo ou du Bataclan pouvaient se produire. Chaque fois qu’un attentat nouveau se produisait, nous refusions d’admettre qu’un tel acte soit possible sur notre sol.
Vous nous avez reproché d’adopter de nombreux textes, mais c’est parce que les terroristes nous ont précédés en montant chaque fois d’un cran dans la violence. C’est pour cela qu’il a été nécessaire de tant légiférer, afin de pouvoir riposter. Si nous avons aujourd’hui réussi à largement maîtriser ce risque, qui reste important, c’est parce que le Gouvernement et le Parlement se sont donné les moyens légaux de pouvoir riposter.
Quant au reste, qui vous dit que nous considérons que la société est parfaite et que tout va bien dans notre pays ? Nous voyons comme vous les 3, 5 millions de chômeurs. Peut-être n’apportons-nous pas exactement la même réponse et ne faisons-nous pas la même analyse de ce qui a provoqué ce chômage de masse dans notre pays ? Comme vous le savez, c’est un autre débat.
Sur le fait qu’un certain nombre de quartiers ou de communes soient aujourd’hui paupérisés et aient tendance à se ghettoïser, je partage la même analyse que vous. Lorsque j’étais maire et président d’agglomération, j’essayais de rétablir une forme de mixité sociale dans la ville. Quand je vois la banlieue parisienne, je me dis qu’une séparation totale entre des communes très pauvres et d’autres qui disposent de moyens importants ne favorise pas la compréhension entre les uns et les autres.
Oui, nous comprenons les maux dont souffre la société française. La fracture sociale est aujourd’hui largement une fracture spatiale, et il convient de la résorber. C’est l’objet d’autres politiques que celles dont le ministre de l’intérieur a la charge, et l’action du Gouvernement doit être appréciée dans un cadre d’ensemble.
Vous dites que les mesures que nous proposons ne seraient pas nécessaires, mais je me permettrais, madame, de ne pas être d’accord avec vous, surtout en connaissant ce qu’un ministre de l’intérieur peut connaître. Avec la commission, nous allons justement chercher un équilibre entre sécurité et liberté.
On peut comprendre le sens de cette motion, car certaines mesures de ce projet de loi nous inquiètent et nous nous en expliquerons – nous avons d’ailleurs déjà développé ces arguments lors de la discussion de la sixième prorogation de l’état d’urgence.
Néanmoins, nous souhaitons que le débat puisse avoir lieu. Par ailleurs, nous pensons que ce projet de loi contient des mesures nécessaires. Je pense en particulier à celles qu’a rappelées le rapporteur pour avis, Michel Boutant, qui visent à adapter notre législation à une directive européenne, d’une part, et à des décisions du Conseil constitutionnel, d’autre part. L’article 1er comporte également des dispositions qui nous intéressent.
Notre groupe votera donc contre la motion tendant à opposer la question préalable.
Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche, ainsi qu’au banc des commissions.
Je mets aux voix la motion n° 13, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.
La motion n’est pas adoptée.
On peut comprendre le sens de cette motion, car certaines mesures de ce projet de loi nous inquiètent et nous nous en expliquerons – nous avons d’ailleurs déjà développé ces arguments lors de la discussion de la sixième prorogation de l’état d’urgence.
Néanmoins, nous souhaitons que le débat puisse avoir lieu. Par ailleurs, nous pensons que ce projet de loi contient des mesures nécessaires. Je pense en particulier à celles qu’a rappelées le rapporteur pour avis, Michel Boutant, qui visent à adapter notre législation à une directive européenne, d’une part, et à des décisions du Conseil constitutionnel, d’autre part. L’article 1er comporte également des dispositions qui nous intéressent.
Notre groupe votera donc contre la motion tendant à opposer la question préalable.
Je mets aux voix la motion n° 13, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.
Discussion générale
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre, mes chers collègues, « À mes yeux, nous avons créé les conditions qui rendent possible une sortie de l’état d’urgence, sans nous affaiblir ni demeurer impuissants face à la menace du terrorisme » : tels étaient les mots de Jean-Jacques Urvoas devant les représentants des juridictions administratives, en mars dernier…
Qu’est-ce qui a changé depuis mars dernier pour que vous nous proposiez un nouveau, ou plutôt, devrais-je dire, un énième texte pour renforcer la sécurité intérieure et lutter contre le terrorisme ?
La réponse la plus évidente serait l’élection d’un nouveau Président de la République, malgré les écrits de novembre 2016 de ce dernier, expliquant que « nous avons tout l’appareil législatif permettant de répondre, dans la durée, à la situation qui est la nôtre ».
Certes, l’élection du Président de la République est un élément structurant de nos institutions, mais insuffisant pour justifier à lui seul une nouvelle législation de droit commun intégrant des dispositions que certains ont dénommées « la pilule empoisonnée ». Ne nous trompons pas de cible, mes chers collègues, la pilule empoisonnée est le terrorisme qui sévit sur notre territoire, en Europe et au-delà, au nom de valeurs atroces et d’expéditions sanglantes.
La situation est grave et la menace élevée. Vous nous l’avez rappelé, monsieur le ministre d’État, la nature de l’intimidation a évolué : la menace n’est plus seulement exogène, elle est aussi endogène. Voilà ce qui a changé depuis mars dernier.
Une alternative s’offre aujourd’hui à nous. Après avoir prorogé pour la sixième fois l’état d’urgence jusqu’au 1er novembre prochain, soit il faut choisir de légiférer sur des dispositions que notre commission des lois a rendues « exceptionnelles » au sens lexical du terme, évitant toute dérive pernicieuse, soit il faut envisager de proroger de nouveau l’état d’urgence dans trois mois.
Il n’est pas question, pour nous, de nous accoutumer à l’état d’urgence, ce régime exceptionnel relevant de l’autorité administrative, même si l’extrémisme islamiste continue d’exister dans notre environnement quotidien. Nous tenons ardemment à maintenir l’équilibre précieux de nos institutions démocratiques issu des Lumières, fondé sur la pensée de Montesquieu, qui écrivait que « pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir ».
Nous tenons à ce que le pouvoir législatif, que nous incarnons, puisse exercer la plénitude de ses compétences constitutionnelles et que l’autorité judiciaire, gardienne des libertés individuelles, joue son rôle protecteur, comme le rappelle notre collègue François Pillet dans un ouvrage qu’il vient de publier.
Notre rapporteur nous a très justement interrogés sur la nécessité de rechercher l’existence d’autres moyens pour atteindre les objectifs assignés, en assurant le respect des garanties de notre État de droit. Comme aime à le rappeler le président du Sénat, « la mission historique de notre assemblée est d’être le protecteur des libertés publiques ».
Le rôle fondamental du Sénat et, plus largement, celui du Parlement dans la défense et le contrôle des libertés devaient retrouver une réalité efficace, que le Sénat avait su imposer dans l’état d’urgence. Je remercie donc le président de la commission des lois et le rapporteur d’avoir habilement imposé l’expérimentation des deux mesures les plus attentatoires aux libertés individuelles que sont la surveillance individuelle et la visite de domicile, erronément appelées assignations et perquisitions.
Alors, oui, la situation est ambivalente. Le Gouvernement a imaginé qu’il suffirait d’inscrire dans le droit commun un certain nombre de pouvoirs supplémentaires qui seraient exercés par l’autorité administrative avec l’autorisation du juge des libertés.
Pourtant, comme le président de la commission des lois vous en a averti dès la semaine dernière, monsieur le ministre d’État, « ces dispositions ne constituent pas, par rapport à l’ensemble des dispositions déjà prises, un saut décisif permettant d’améliorer notre arsenal juridique ». Lors de votre audition, vous nous avez dit que le Gouvernement souhaitait apporter des garanties à la sécurité des Français. Eh bien, nous aussi !
Nous avons, au cours des deux dernières années, déjà inscrit dans le droit commun de très nombreuses mesures permettant de répondre aux manques manifestes de moyens et de procédures. Le Sénat est d’ailleurs à l’origine d’un certain nombre d’entre elles.
Je pense notamment à l’élargissement des facultés de recours aux perquisitions nocturnes et à la meilleure prise en charge de la radicalisation par les juges, en étendant la possibilité de prescrire des actions de prise en charge de la radicalisation, dans le cadre d’un sursis avec mise à l’épreuve, comme nous l’a rappelé notre collègue Catherine Troendlé en présentant son rapport d’information sur le désembrigadement.
Je pense encore à la création de deux nouveaux délits terroristes que sont le délit d’entrave au blocage des sites incitant à la commission d’actes de terrorisme et le délit de consultation habituelle de tels sites, mais aussi à la possibilité de rendre applicable la période de sûreté incompressible de 30 ans, au lieu de 22 ans actuellement, pour les criminels terroristes condamnés à la perpétuité.
Enfin, nous avons réussi à obtenir un régime procédural spécifique permettant d’empêcher l’accès des personnes condamnées pour terrorisme à la libération conditionnelle.
Ces mesures, personne ne peut le négliger, sont efficaces judiciairement, comme l’a d’ailleurs expliqué le Président de la République devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles. C’est pourquoi nous sommes aujourd’hui extrêmement vigilants aux propositions que le Gouvernement formule. Il n’est pas question d’accepter un état d’urgence masqué, dégradé, qui serait introduit dans le droit commun.
Je me dois donc de saluer notre rapporteur, Michel Mercier, qui a su, comme à son habitude, détecter toute mesure attentatoire aux libertés fondamentales qui ne serait pas conforme à notre Constitution.
Les Français demandent aux pouvoirs publics de les protéger, de leur apporter la sécurité nécessaire pour vivre en liberté. Il est de notre devoir de leur répondre, en les éclairant.
Vous nous avez rassurés sur un certain nombre d’interrogations, ce qui me permet de dire que plusieurs dispositions de votre texte ne soulèvent pas de difficulté particulière pour notre groupe, qu’il s’agisse du renforcement du contrôle aux frontières, des opérations de surveillance des communications hertziennes, de la transposition de la directive européenne sur le PNR, que nous appelons de nos vœux depuis des années, ou encore de la fermeture des lieux de culte, aux seules fins de prévenir des actes terroristes.
En effet, le cœur de notre débat porte bien sur la prévention des actes terroristes, comme finalité de chacune des mesures envisagées.
L’analyse des procédures en matière de terrorisme montre d’ailleurs que le fonctionnement est optimal lorsque les actions sont engagées en coopération entre la justice administrative et la justice judiciaire, le meilleur exemple étant celui de Paris, où le préfet de police et le procureur coopèrent de manière permanente, permettant de judiciariser une grande partie des dossiers. C’est pourquoi il est fondamental pour nous que toutes ces nouvelles procédures administratives de droit commun impliquent la justice judiciaire, garante des libertés individuelles.
Nous nous satisfaisons donc pleinement des avancées proposées par la commission des lois en la matière, essentiellement dans le dispositif des mesures de surveillance individuelle, en imposant que celles-ci ne puissent être prononcées que pour une durée limitée et renouvelées sur autorisation d’un juge, afin qu’elles ne puissent devenir des mesures privatives de libertés, ce qui les détournerait de leur objet.
Une garantie supplémentaire au dispositif des visites de domicile et saisies a été apportée en prévoyant l’accord exprès du juge pour retenir, pendant le temps des opérations, toute personne à l’égard de laquelle la visite a été autorisée.
Cette implication de l’autorité judiciaire peut rassurer nos concitoyens et démontre que nous sortons réellement du régime juridique de l’état d’urgence, de caractère purement administratif. Il n’est donc pas question pour nous de faire perdurer, comme j’ai pu le lire, le régime d’exception qu’est l’état d’urgence. Il n’est pas non plus question de marginaliser l’autorité judiciaire au profit de l’autorité administrative et au détriment des droits des justiciables.
Notre démarche s’inscrit en faux par rapport à ces présupposés qui laissent penser à nos concitoyens que nous ferions reculer les libertés par le glissement d’un contrôle des mesures contraignantes et attentatoires aux libertés, effectué par le juge judiciaire, vers un contrôle a posteriori effectué par le juge administratif.
En conclusion, je souhaiterais ajouter que nous ne devons pas oublier, mes chers collègues – je me tourne particulièrement vers Alain Marc et Philippe Dominati, deux de nos rapporteurs budgétaires chargés de la mission Sécurités – que les dispositifs que nous allons voter aujourd’hui nécessiteront encore plus d’efforts de la part de l’État pour que chaque maillon de la chaîne de sécurité, puis judiciaire, puisse assumer nos décisions.
Le soupçon ne constitue pas pour nous un motif légitime d’application de mesures restrictives de libertés. La lutte contre le terrorisme est en revanche un motif suffisant pour nous battre, collectivement, pour la sécurité de nos concitoyens et la liberté de notre pays.
M. le président. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. François-Noël Buffet.
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre, mes chers collègues, « À mes yeux, nous avons créé les conditions qui rendent possible une sortie de l’état d’urgence, sans nous affaiblir ni demeurer impuissants face à la menace du terrorisme » : tels étaient les mots de Jean-Jacques Urvoas devant les représentants des juridictions administratives, en mars dernier…
Qu’est-ce qui a changé depuis mars dernier pour que vous nous proposiez un nouveau, ou plutôt, devrais-je dire, un énième texte pour renforcer la sécurité intérieure et lutter contre le terrorisme ?
La réponse la plus évidente serait l’élection d’un nouveau Président de la République, malgré les écrits de novembre 2016 de ce dernier, expliquant que « nous avons tout l’appareil législatif permettant de répondre, dans la durée, à la situation qui est la nôtre ».
Certes, l’élection du Président de la République est un élément structurant de nos institutions, mais insuffisant pour justifier à lui seul une nouvelle législation de droit commun intégrant des dispositions que certains ont dénommées « la pilule empoisonnée ». Ne nous trompons pas de cible, mes chers collègues, la pilule empoisonnée est le terrorisme qui sévit sur notre territoire, en Europe et au-delà, au nom de valeurs atroces et d’expéditions sanglantes.
La situation est grave et la menace élevée. Vous nous l’avez rappelé, monsieur le ministre d’État, la nature de l’intimidation a évolué : la menace n’est plus seulement exogène, elle est aussi endogène. Voilà ce qui a changé depuis mars dernier.
Une alternative s’offre aujourd’hui à nous. Après avoir prorogé pour la sixième fois l’état d’urgence jusqu’au 1er novembre prochain, soit il faut choisir de légiférer sur des dispositions que notre commission des lois a rendues « exceptionnelles » au sens lexical du terme, évitant toute dérive pernicieuse, soit il faut envisager de proroger de nouveau l’état d’urgence dans trois mois.
Il n’est pas question, pour nous, de nous accoutumer à l’état d’urgence, ce régime exceptionnel relevant de l’autorité administrative, même si l’extrémisme islamiste continue d’exister dans notre environnement quotidien. Nous tenons ardemment à maintenir l’équilibre précieux de nos institutions démocratiques issu des Lumières, fondé sur la pensée de Montesquieu, qui écrivait que « pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir ».
Nous tenons à ce que le pouvoir législatif, que nous incarnons, puisse exercer la plénitude de ses compétences constitutionnelles et que l’autorité judiciaire, gardienne des libertés individuelles, joue son rôle protecteur, comme le rappelle notre collègue François Pillet dans un ouvrage qu’il vient de publier.
Notre rapporteur nous a très justement interrogés sur la nécessité de rechercher l’existence d’autres moyens pour atteindre les objectifs assignés, en assurant le respect des garanties de notre État de droit. Comme aime à le rappeler le président du Sénat, « la mission historique de notre assemblée est d’être le protecteur des libertés publiques ».
Le rôle fondamental du Sénat et, plus largement, celui du Parlement dans la défense et le contrôle des libertés devaient retrouver une réalité efficace, que le Sénat avait su imposer dans l’état d’urgence. Je remercie donc le président de la commission des lois et le rapporteur d’avoir habilement imposé l’expérimentation des deux mesures les plus attentatoires aux libertés individuelles que sont la surveillance individuelle et la visite de domicile, erronément appelées assignations et perquisitions.
Alors, oui, la situation est ambivalente. Le Gouvernement a imaginé qu’il suffirait d’inscrire dans le droit commun un certain nombre de pouvoirs supplémentaires qui seraient exercés par l’autorité administrative avec l’autorisation du juge des libertés.
Pourtant, comme le président de la commission des lois vous en a averti dès la semaine dernière, monsieur le ministre d’État, « ces dispositions ne constituent pas, par rapport à l’ensemble des dispositions déjà prises, un saut décisif permettant d’améliorer notre arsenal juridique ». Lors de votre audition, vous nous avez dit que le Gouvernement souhaitait apporter des garanties à la sécurité des Français. Eh bien, nous aussi !
Nous avons, au cours des deux dernières années, déjà inscrit dans le droit commun de très nombreuses mesures permettant de répondre aux manques manifestes de moyens et de procédures. Le Sénat est d’ailleurs à l’origine d’un certain nombre d’entre elles.
Je pense notamment à l’élargissement des facultés de recours aux perquisitions nocturnes et à la meilleure prise en charge de la radicalisation par les juges, en étendant la possibilité de prescrire des actions de prise en charge de la radicalisation, dans le cadre d’un sursis avec mise à l’épreuve, comme nous l’a rappelé notre collègue Catherine Troendlé en présentant son rapport d’information sur le désembrigadement.
Je pense encore à la création de deux nouveaux délits terroristes que sont le délit d’entrave au blocage des sites incitant à la commission d’actes de terrorisme et le délit de consultation habituelle de tels sites, mais aussi à la possibilité de rendre applicable la période de sûreté incompressible de 30 ans, au lieu de 22 ans actuellement, pour les criminels terroristes condamnés à la perpétuité.
Enfin, nous avons réussi à obtenir un régime procédural spécifique permettant d’empêcher l’accès des personnes condamnées pour terrorisme à la libération conditionnelle.
Ces mesures, personne ne peut le négliger, sont efficaces judiciairement, comme l’a d’ailleurs expliqué le Président de la République devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles. C’est pourquoi nous sommes aujourd’hui extrêmement vigilants aux propositions que le Gouvernement formule. Il n’est pas question d’accepter un état d’urgence masqué, dégradé, qui serait introduit dans le droit commun.
Je me dois donc de saluer notre rapporteur, Michel Mercier, qui a su, comme à son habitude, détecter toute mesure attentatoire aux libertés fondamentales qui ne serait pas conforme à notre Constitution.
Les Français demandent aux pouvoirs publics de les protéger, de leur apporter la sécurité nécessaire pour vivre en liberté. Il est de notre devoir de leur répondre, en les éclairant.
Vous nous avez rassurés sur un certain nombre d’interrogations, ce qui me permet de dire que plusieurs dispositions de votre texte ne soulèvent pas de difficulté particulière pour notre groupe, qu’il s’agisse du renforcement du contrôle aux frontières, des opérations de surveillance des communications hertziennes, de la transposition de la directive européenne sur le PNR, que nous appelons de nos vœux depuis des années, ou encore de la fermeture des lieux de culte, aux seules fins de prévenir des actes terroristes.
En effet, le cœur de notre débat porte bien sur la prévention des actes terroristes, comme finalité de chacune des mesures envisagées.
L’analyse des procédures en matière de terrorisme montre d’ailleurs que le fonctionnement est optimal lorsque les actions sont engagées en coopération entre la justice administrative et la justice judiciaire, le meilleur exemple étant celui de Paris, où le préfet de police et le procureur coopèrent de manière permanente, permettant de judiciariser une grande partie des dossiers. C’est pourquoi il est fondamental pour nous que toutes ces nouvelles procédures administratives de droit commun impliquent la justice judiciaire, garante des libertés individuelles.
Nous nous satisfaisons donc pleinement des avancées proposées par la commission des lois en la matière, essentiellement dans le dispositif des mesures de surveillance individuelle, en imposant que celles-ci ne puissent être prononcées que pour une durée limitée et renouvelées sur autorisation d’un juge, afin qu’elles ne puissent devenir des mesures privatives de libertés, ce qui les détournerait de leur objet.
Une garantie supplémentaire au dispositif des visites de domicile et saisies a été apportée en prévoyant l’accord exprès du juge pour retenir, pendant le temps des opérations, toute personne à l’égard de laquelle la visite a été autorisée.
Cette implication de l’autorité judiciaire peut rassurer nos concitoyens et démontre que nous sortons réellement du régime juridique de l’état d’urgence, de caractère purement administratif. Il n’est donc pas question pour nous de faire perdurer, comme j’ai pu le lire, le régime d’exception qu’est l’état d’urgence. Il n’est pas non plus question de marginaliser l’autorité judiciaire au profit de l’autorité administrative et au détriment des droits des justiciables.
Notre démarche s’inscrit en faux par rapport à ces présupposés qui laissent penser à nos concitoyens que nous ferions reculer les libertés par le glissement d’un contrôle des mesures contraignantes et attentatoires aux libertés, effectué par le juge judiciaire, vers un contrôle a posteriori effectué par le juge administratif.
En conclusion, je souhaiterais ajouter que nous ne devons pas oublier, mes chers collègues – je me tourne particulièrement vers Alain Marc et Philippe Dominati, deux de nos rapporteurs budgétaires chargés de la mission Sécurités – que les dispositifs que nous allons voter aujourd’hui nécessiteront encore plus d’efforts de la part de l’État pour que chaque maillon de la chaîne de sécurité, puis judiciaire, puisse assumer nos décisions.
Le soupçon ne constitue pas pour nous un motif légitime d’application de mesures restrictives de libertés. La lutte contre le terrorisme est en revanche un motif suffisant pour nous battre, collectivement, pour la sécurité de nos concitoyens et la liberté de notre pays.
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, pourquoi une telle logorrhée législative sur le sujet du terrorisme ? La menace a-t-elle si profondément changé en seulement quatre années pour que nous ayons dû voter huit textes ?
Non, en réalité, je crois que les gouvernements ont pris la mauvaise habitude de faire voter des textes pour fuir leurs responsabilités, de faire voter des textes pour faire croire aux Français qu’ils agissent, de faire voter des textes plutôt que de mettre en œuvre une politique de sécurité ferme et courageuse !
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.
Mme Éliane Assassi s’exclame.
Il faut dire que les gouvernements successifs sont largement responsables de la difficile situation sécuritaire de nous vivons !
Responsables d’avoir laissé se développer le communautarisme, en particulier le communautarisme islamiste ; responsables d’avoir laissé les portes de la maison France grandes ouvertes avec les accords de Schengen ; responsables d’avoir permis, quand ce n’est pas encouragé, qu’une immigration de masse s’installe en France, y compris illégalement
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, pourquoi une telle logorrhée législative sur le sujet du terrorisme ? La menace a-t-elle si profondément changé en seulement quatre années pour que nous ayons dû voter huit textes ?
Non, en réalité, je crois que les gouvernements ont pris la mauvaise habitude de faire voter des textes pour fuir leurs responsabilités, de faire voter des textes pour faire croire aux Français qu’ils agissent, de faire voter des textes plutôt que de mettre en œuvre une politique de sécurité ferme et courageuse !
Mme Éliane Assassi s’exclame.
Il faut dire que les gouvernements successifs sont largement responsables de la difficile situation sécuritaire de nous vivons !
Responsables d’avoir laissé se développer le communautarisme, en particulier le communautarisme islamiste ; responsables d’avoir laissé les portes de la maison France grandes ouvertes avec les accords de Schengen ; responsables d’avoir permis, quand ce n’est pas encouragé, qu’une immigration de masse s’installe en France, y compris illégalement
Alors, à défaut de mener réellement le combat, vous nous faites voter des textes ! Permettez-moi de croire qu’un contrôle strict, à la frontière franco-belge, des terroristes qui ont lâchement attaqué la France le soir d’un 13 novembre, aurait été plus efficace que l’ajout de quelques pages au code pénal !
Cela fait presque deux ans que nous sommes sous le régime de l’état d’urgence, et bon nombre de mesures permises par cet état d’exception n’ont pas été prises, je pense par exemple à la fermeture immédiate de la centaine de mosquées radicales.
En outre, un certain nombre de mesures efficaces pour limiter le risque terroriste ne sont pas mises en œuvre et, pourtant, vous n’êtes nullement limités par le droit existant : expulsion des étrangers « fichés S », condamnation des Français coupables d’intelligence avec l’ennemi, plan de désarmement des banlieues, mais aussi renforcement des moyens humains et techniques des forces de sécurité, mesures qui, si j’ai bien suivi l’actualité, ne sont pas vraiment d’actualité, précisément !
C’est ainsi qu’à Fréjus, comme dans beaucoup d’autres villes, la police ne pourra plus faire appel à ses réservistes. Il faut dire que, pour vous, la sécurité des Français passe après le respect de la règle des 3 % imposée par l’Union européenne…
Alors, oui, nous pensons que l’arsenal législatif est déjà bien suffisant pour commencer vraiment à mener une véritable lutte contre le terrorisme islamiste qui menace notre pays. Pour cela, il faut du courage politique, qui ne se limite pas à dire : « Je suis le chef, faites-moi confiance ! » La confiance se mérite et, pour l’accorder, plutôt que des paroles, on attend des actes.
Si j’en crois le grand nombre d’actes délictueux commis à l’occasion du 14 juillet et le faible nombre d’interpellations, les délinquants en tout genre ont de beaux jours devant eux. Or l’histoire tragique de ces dernières années nous apprend que certains d’entre eux seront les terroristes de demain.
Nous ne voterons donc pas ce texte, pour trois raisons : le droit actuel permet déjà de lutter contre le terrorisme – encore faudrait-il avoir le courage et la volonté de l’utiliser ; ce texte ne supprime pas le principe de l’état d’urgence, que le Gouvernement peut donc à tout moment rétablir en cas de menaces imminentes, afin de mettre alors en œuvre des mesures d’exception ; enfin, nous sommes trop attachés à la liberté pour voir cette valeur une nouvelle fois grignotée.
Mme Éliane Assassi proteste.
Mme Catherine Troendlé s’exclame.
Alors, mes chers collègues, faisons plutôt nôtre cette belle devise du lieutenant Tom Morel, le héros des Glières : « Vivre libre ou mourir ».
Alors, à défaut de mener réellement le combat, vous nous faites voter des textes ! Permettez-moi de croire qu’un contrôle strict, à la frontière franco-belge, des terroristes qui ont lâchement attaqué la France le soir d’un 13 novembre, aurait été plus efficace que l’ajout de quelques pages au code pénal !
Cela fait presque deux ans que nous sommes sous le régime de l’état d’urgence, et bon nombre de mesures permises par cet état d’exception n’ont pas été prises, je pense par exemple à la fermeture immédiate de la centaine de mosquées radicales.
En outre, un certain nombre de mesures efficaces pour limiter le risque terroriste ne sont pas mises en œuvre et, pourtant, vous n’êtes nullement limités par le droit existant : expulsion des étrangers « fichés S », condamnation des Français coupables d’intelligence avec l’ennemi, plan de désarmement des banlieues, mais aussi renforcement des moyens humains et techniques des forces de sécurité, mesures qui, si j’ai bien suivi l’actualité, ne sont pas vraiment d’actualité, précisément !
C’est ainsi qu’à Fréjus, comme dans beaucoup d’autres villes, la police ne pourra plus faire appel à ses réservistes. Il faut dire que, pour vous, la sécurité des Français passe après le respect de la règle des 3 % imposée par l’Union européenne…
Alors, oui, nous pensons que l’arsenal législatif est déjà bien suffisant pour commencer vraiment à mener une véritable lutte contre le terrorisme islamiste qui menace notre pays. Pour cela, il faut du courage politique, qui ne se limite pas à dire : « Je suis le chef, faites-moi confiance ! » La confiance se mérite et, pour l’accorder, plutôt que des paroles, on attend des actes.
Si j’en crois le grand nombre d’actes délictueux commis à l’occasion du 14 juillet et le faible nombre d’interpellations, les délinquants en tout genre ont de beaux jours devant eux. Or l’histoire tragique de ces dernières années nous apprend que certains d’entre eux seront les terroristes de demain.
Nous ne voterons donc pas ce texte, pour trois raisons : le droit actuel permet déjà de lutter contre le terrorisme – encore faudrait-il avoir le courage et la volonté de l’utiliser ; ce texte ne supprime pas le principe de l’état d’urgence, que le Gouvernement peut donc à tout moment rétablir en cas de menaces imminentes, afin de mettre alors en œuvre des mesures d’exception ; enfin, nous sommes trop attachés à la liberté pour voir cette valeur une nouvelle fois grignotée.
Murmures.
Mme Catherine Troendlé s’exclame.
Alors, mes chers collègues, faisons plutôt nôtre cette belle devise du lieutenant Tom Morel, le héros des Glières : « Vivre libre ou mourir ».
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre, mes chers collègues, nous allons à nouveau légiférer. Au-delà des attitudes et des formules d’éloquence, examinons donc de près pourquoi il faut de nouveau légiférer et sur quoi nous allons nous prononcer.
La menace pour la sécurité de nos concitoyens du fait de mouvements terroristes persistants va se poursuivre. Sans esquisser un panorama trop large, nous savons bien que le changement de situation au Proche-Orient et la réduction progressive des capacités opérationnelles de Daech ne sont pas, à court terme au moins, un facteur d’allégement de la menace sur notre sol et sur notre population. Voilà pourquoi il faut légiférer.
Le chef de l’État a souhaité, comme nous tous déjà avant le 14 juillet 2016, que l’on mette fin à l’état d’exception que constitue l’état d’urgence. De ce fait, il faut examiner précisément, textes à la main, quelles sont les mesures de limitation et de prévention du risque dont nous avons besoin.
Si nous voulons être précis et objectifs, respectons le contenu de la loi sur laquelle nous allons nous prononcer. Elle comporte en réalité quatre dispositions nouvelles.
Deux d’entre elles sont des dispositions de police administrative que nous appliquons en permanence.
La première autorise la création de périmètres de protection. Au cours de la semaine passée, dans combien de nos communes avons-nous dû organiser le 14 juillet avec des contrôles accrus par rapport à ceux des périodes antérieures ? En nous appuyant sur des dispositions légales un peu fragiles, il nous a fallu organiser des limitations d’accès aux zones de spectacle et des fouilles de sac sur instruction de nos préfets, avec un léger risque d’irrégularité. Qui peut prétendre y voir une atteinte aux libertés ? Qui ne voit qu’il s’agit au contraire du moyen de concilier la liberté, l’initiative culturelle et festive, avec l’exigence de la prévention du terrorisme ?
La deuxième est relative à la fermeture des lieux de culte. Ceux d’entre nous qui ont quelque appétence historique savent que, dès l’origine, la loi de 1905, dans son article 35, sanctionnait pénalement les propos prononcés lors de l’exercice du culte et constituant une atteinte à l’ordre public. En outre, la possibilité de prévenir de tels troubles existe par décision administrative depuis l’arrêt Benjamin rendu par le Conseil d’État en 1933.
Par rapport au droit commun de la police administrative, le dispositif proposé par le Gouvernement présente l’avantage de permettre l’action dans le temps le plus réduit possible et, en même temps, d’assurer les droits de la défense de l’association cultuelle ou de l’officiant qui serait mis en cause.
Deux mesures de ce projet de loi, et deux seulement, apportent une limitation aux libertés individuelles, tempérée et organisée. Il s’agit, d’une part, de la possibilité de visites avec saisie sur décision administrative et, d’autre part, de ce que j’appellerai une limitation individuelle de mouvement et de contact.
Dans leur substance, ces deux mesures diffèrent respectivement de la perquisition administrative et de l’assignation à résidence. Dans les deux cas, ces mesures nouvelles sont des outils indispensables à la poursuite d’une activité de renseignement qui fournit l’énergie nécessaire à la lutte effective contre le terrorisme.
La visite avec saisie est nécessaire, comme l’a dit M. le ministre d’État, pour repérer des situations dans lesquelles des poursuites judiciaires ne peuvent être engagées, parce qu’elles seraient infructueuses, et permettre une action de prévention en temps utile pour empêcher la préparation d’actes de terrorisme.
Cette mesure a un caractère intrusif ; par conséquent, la commission et le Gouvernement sont d’accord pour prévoir qu’elle soit précédée par l’autorisation d’un magistrat judiciaire, le juge des libertés et de la détention. Où est donc l’atteinte à la liberté individuelle, puisque cette procédure permet de vérifier l’adéquation de la mesure aux nécessités de la sécurité nationale ?
Quant à la limitation de mouvement, c’est typiquement une mesure de police administrative qui apparaît comme une mesure restrictive de liberté au sens où l’entend le Conseil constitutionnel. Elle doit être prise par l’administration et non par un juge. Une telle limitation prononcée par un juge supposerait qu’une procédure judiciaire complète ait eu lieu, alors qu’il y a éventuellement urgence.
Cette limitation de mouvement et de contact est donc organisée dans le projet de loi. Là encore, après un dialogue qui s’est poursuivi ces derniers jours, un accord a été trouvé entre le Gouvernement et la commission pour que des dispositions d’encadrement procédural strictes accompagnement cette mesure. Il s’agit d’éviter que cette mesure de contrainte soit d’appréciation trop générale, donc susceptible d’être détournée.
D’ailleurs, je note que, parmi ceux qui proclament leur hostilité à ce projet de loi, aucun ne conteste sur le fond ses dispositions.
J’ai aussi relevé une mesure, plutôt d’inspiration libérale, qui a pour objet de fixer le cadre légal des interceptions des liaisons hertziennes. Ce dispositif ancien n’était pas vraiment encadré, et il avait été abrogé pour ce motif par le Conseil constitutionnel. La lacune est ainsi réparée.
Si l’on examine les critères de l’État de droit, force est de constater qu’ils sont satisfaits par le projet de loi. De toute façon, ses contempteurs le porteront devant le Conseil constitutionnel, sous une forme ou sous une autre, et cette conformité sera examinée.
Pour autant, je le répète, je constate que les critiques portées contre ce projet de loi correspondent plus à des postures et ne portent pas sur son contenu.
Il me semble que le Sénat fait son travail en répondant au Gouvernement sur les objectifs de ce texte et en fixant un cadre.
En menant ce travail de législateur, nous revient à l’esprit la discussion d’Antigone et de Créon. Rappelons-nous : comme le narre Sophocle, quand Créon prenait cette responsabilité, la cité était menacée. En ce qui nous concerne, nous sommes aussi menacés, donc nous pouvons nous placer dans la position de Créon tout en respectant les principes des Lumières.
Murmures.
Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche.
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre, mes chers collègues, nous allons à nouveau légiférer. Au-delà des attitudes et des formules d’éloquence, examinons donc de près pourquoi il faut de nouveau légiférer et sur quoi nous allons nous prononcer.
La menace pour la sécurité de nos concitoyens du fait de mouvements terroristes persistants va se poursuivre. Sans esquisser un panorama trop large, nous savons bien que le changement de situation au Proche-Orient et la réduction progressive des capacités opérationnelles de Daech ne sont pas, à court terme au moins, un facteur d’allégement de la menace sur notre sol et sur notre population. Voilà pourquoi il faut légiférer.
Le chef de l’État a souhaité, comme nous tous déjà avant le 14 juillet 2016, que l’on mette fin à l’état d’exception que constitue l’état d’urgence. De ce fait, il faut examiner précisément, textes à la main, quelles sont les mesures de limitation et de prévention du risque dont nous avons besoin.
Si nous voulons être précis et objectifs, respectons le contenu de la loi sur laquelle nous allons nous prononcer. Elle comporte en réalité quatre dispositions nouvelles.
Deux d’entre elles sont des dispositions de police administrative que nous appliquons en permanence.
La première autorise la création de périmètres de protection. Au cours de la semaine passée, dans combien de nos communes avons-nous dû organiser le 14 juillet avec des contrôles accrus par rapport à ceux des périodes antérieures ? En nous appuyant sur des dispositions légales un peu fragiles, il nous a fallu organiser des limitations d’accès aux zones de spectacle et des fouilles de sac sur instruction de nos préfets, avec un léger risque d’irrégularité. Qui peut prétendre y voir une atteinte aux libertés ? Qui ne voit qu’il s’agit au contraire du moyen de concilier la liberté, l’initiative culturelle et festive, avec l’exigence de la prévention du terrorisme ?
La deuxième est relative à la fermeture des lieux de culte. Ceux d’entre nous qui ont quelque appétence historique savent que, dès l’origine, la loi de 1905, dans son article 35, sanctionnait pénalement les propos prononcés lors de l’exercice du culte et constituant une atteinte à l’ordre public. En outre, la possibilité de prévenir de tels troubles existe par décision administrative depuis l’arrêt Benjamin rendu par le Conseil d’État en 1933.
Par rapport au droit commun de la police administrative, le dispositif proposé par le Gouvernement présente l’avantage de permettre l’action dans le temps le plus réduit possible et, en même temps, d’assurer les droits de la défense de l’association cultuelle ou de l’officiant qui serait mis en cause.
Deux mesures de ce projet de loi, et deux seulement, apportent une limitation aux libertés individuelles, tempérée et organisée. Il s’agit, d’une part, de la possibilité de visites avec saisie sur décision administrative et, d’autre part, de ce que j’appellerai une limitation individuelle de mouvement et de contact.
Dans leur substance, ces deux mesures diffèrent respectivement de la perquisition administrative et de l’assignation à résidence. Dans les deux cas, ces mesures nouvelles sont des outils indispensables à la poursuite d’une activité de renseignement qui fournit l’énergie nécessaire à la lutte effective contre le terrorisme.
La visite avec saisie est nécessaire, comme l’a dit M. le ministre d’État, pour repérer des situations dans lesquelles des poursuites judiciaires ne peuvent être engagées, parce qu’elles seraient infructueuses, et permettre une action de prévention en temps utile pour empêcher la préparation d’actes de terrorisme.
Cette mesure a un caractère intrusif ; par conséquent, la commission et le Gouvernement sont d’accord pour prévoir qu’elle soit précédée par l’autorisation d’un magistrat judiciaire, le juge des libertés et de la détention. Où est donc l’atteinte à la liberté individuelle, puisque cette procédure permet de vérifier l’adéquation de la mesure aux nécessités de la sécurité nationale ?
Quant à la limitation de mouvement, c’est typiquement une mesure de police administrative qui apparaît comme une mesure restrictive de liberté au sens où l’entend le Conseil constitutionnel. Elle doit être prise par l’administration et non par un juge. Une telle limitation prononcée par un juge supposerait qu’une procédure judiciaire complète ait eu lieu, alors qu’il y a éventuellement urgence.
Cette limitation de mouvement et de contact est donc organisée dans le projet de loi. Là encore, après un dialogue qui s’est poursuivi ces derniers jours, un accord a été trouvé entre le Gouvernement et la commission pour que des dispositions d’encadrement procédural strictes accompagnement cette mesure. Il s’agit d’éviter que cette mesure de contrainte soit d’appréciation trop générale, donc susceptible d’être détournée.
D’ailleurs, je note que, parmi ceux qui proclament leur hostilité à ce projet de loi, aucun ne conteste sur le fond ses dispositions.
J’ai aussi relevé une mesure, plutôt d’inspiration libérale, qui a pour objet de fixer le cadre légal des interceptions des liaisons hertziennes. Ce dispositif ancien n’était pas vraiment encadré, et il avait été abrogé pour ce motif par le Conseil constitutionnel. La lacune est ainsi réparée.
Si l’on examine les critères de l’État de droit, force est de constater qu’ils sont satisfaits par le projet de loi. De toute façon, ses contempteurs le porteront devant le Conseil constitutionnel, sous une forme ou sous une autre, et cette conformité sera examinée.
Pour autant, je le répète, je constate que les critiques portées contre ce projet de loi correspondent plus à des postures et ne portent pas sur son contenu.
Il me semble que le Sénat fait son travail en répondant au Gouvernement sur les objectifs de ce texte et en fixant un cadre.
En menant ce travail de législateur, nous revient à l’esprit la discussion d’Antigone et de Créon. Rappelons-nous : comme le narre Sophocle, quand Créon prenait cette responsabilité, la cité était menacée. En ce qui nous concerne, nous sommes aussi menacés, donc nous pouvons nous placer dans la position de Créon tout en respectant les principes des Lumières.
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre auprès du ministre de l’intérieur, mes chers collègues, cet énième projet de loi renforçant la lutte antiterroriste marque un tournant important : il vise à inscrire dans notre droit commun les principales mesures autorisées à titre exceptionnel dans le cadre de l’état d’urgence, au détriment de notre équilibre démocratique entre sécurité et liberté.
En vous présentant notre motion de procédure, ma collègue Éliane Assassi vous a déjà exposé le point de vue de notre groupe sur les problèmes que soulève ce texte. Je vais, pour ma part, me concentrer davantage sur les mesures proposées en elles-mêmes et sur les modifications apportées par la commission des lois.
En assistant aux débats en commission des lois, la semaine dernière, j’ai été assez étonné des remarques de certains de mes collègues, notamment du groupe Les Républicains, qui ont apporté plusieurs nuances à leurs propos d’ordinaire plus tranchés et plus guerriers au sujet de la sécurité intérieure et de la lutte contre le terrorisme. M. Pillet nous a même enjoints de réfléchir aux mots suivants de Benjamin Franklin : « Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l’une ni l’autre et finit par perdre les deux. » Quelle lucidité, mon cher collègue !
J’ai été encore davantage surpris par les réflexions de nos collègues socialistes, qui semblent découvrir un texte jugé aujourd’hui particulièrement dangereux, estimant opportun de supprimer les articles 3 et 4 dès le travail en commission, et allant jusqu’à invoquer la Cour européenne des droits de l’homme, qui s’opposera sûrement à cette instauration de l’état d’urgence dans le droit commun.
Il faut pourtant rappeler que l’entaille dans le droit commun a été ouverte par le gouvernement de Manuel Valls, avec sa loi du 3 juin 2016, œuvre que le président Macron se contente aujourd’hui de parachever.
Comme à son habitude, la commission des lois s’est ainsi posée en défenseur des libertés publiques.
Certes, toutes les mises en garde soulevées par notre rapporteur sont bien légitimes et ne peuvent que recueillir notre assentiment, mais, là où le bât blesse, c’est que le rapporteur, ainsi que le président et la majorité de notre commission, en reste aux considérations de mise en garde, aux préventions, aux prétendues garanties, comme si les mesures qui nous étaient proposées étaient inédites, n’avaient jamais mises en œuvre, et comme si aucune dérive n’avait jamais été notée.
Çà et là, notre rapporteur a amendé le texte, afin de « rechercher un meilleur équilibre entre la nécessité d’assurer la sécurité et l’ordre public et celle de protéger les droits et libertés constitutionnellement garantis. »
Ainsi, à l’article 1er, la commission a admis l’instauration de « périmètres de protection » sur arrêté préfectoral, mais en a timidement circonscrit l’usage. Pourtant, il reste toujours à craindre que les mesures proposées permettent une application discriminatoire, dès lors que les fouilles ne requièrent aucune base objective.
Par ailleurs, la définition des agents identifiés comme pouvant intervenir pour mettre en œuvre ces mesures suscite notre plus vive opposition. Je pense en particulier au recours à des agents de sécurité privés, mais nous y reviendrons sûrement dans la discussion.
Enfin, il est à redouter que ce type de mesure laisse place à une utilisation autre que celle qui a été définie initialement, par exemple pour l’étouffement ou la répression de contestations politiques sur la voie publique. Hélas, nous en avons déjà eu plusieurs exemples ces derniers mois.
Concernant les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance contenues à l’article 3, la commission des lois a certes aligné les conditions de pointage sur celles qui sont prévues pour le contrôle administratif des retours sur le territoire et placé le renouvellement de ces mesures sous le contrôle de l’autorité judiciaire. Elle a également supprimé l’obligation de déclaration des numéros d’abonnement et d’identifiant de communications électroniques. Il n’empêche que cet article ancre dans notre droit commun les mesures d’assignation administrative.
L’article 4 vise à transcrire le régime des perquisitions de l’état d’urgence en mettant en place un régime juridique de « visites domiciliaires et des saisies ». La différence réside pour le Gouvernement dans l’introduction d’une autorisation par ordonnance motivée du juge des libertés et de la détention de Paris, communiquée au parquet de Paris. Hélas, cela ne constitue en rien une garantie. Soumis à la pression et contraints de travailler dans l’urgence et en petit nombre, ces magistrats se verront difficilement refuser ce genre d’intervention.
En outre, le texte ne prévoit pas quelles pièces seront versées au dossier qui lui sera soumis, donc l’appréciation de l’autorité administrative résultera des éléments fournis par les services de renseignement.
Pour ces deux articles du projet de loi qui reprennent dans notre droit commun deux dispositions emblématiques de l’état d’urgence, la commission des lois, sur l’initiative de son rapporteur a limité dans le temps, à savoir jusqu’au 31 décembre 2021, leur application, au moyen de ce qui s’apparente à une clause « d’autodestruction ». Une telle originalité en dit beaucoup sur la gravité de telles dispositions et sur le danger de les faire entrer durablement de notre droit commun.
Pour notre part, nous ne pouvons accepter, pour quelque période que ce soit, que ce genre de mesure vienne contaminer notre droit et remettre en cause nos libertés publiques. C’est la raison qui nous conduira à vous proposer plusieurs amendements de suppression.
On constate un glissement très dangereux de la police judiciaire vers la police administrative. On accorde aujourd’hui à l’autorité administrative des pouvoirs permanents qu’elle n’avait auparavant que dans le cadre de l’état d’urgence. Certes, celui-ci a été reconduit six fois, mais il avait l’avantage d’être a priori « bordé ». Ce que chacun pouvait craindre avec ces prorogations incessantes finit donc par se produire : nous voilà, avec ce texte, à l’aube d’un état d’urgence permanent, et les quelques garanties apportées n’y changeront rien.
Il nous est désormais proposé d’avoir en parallèle l’autorité administrative et l’autorité judiciaire, qui pourront être compétentes en même temps. Il est ainsi créé un système hybride incarné par le juge des libertés et de la détention, à un moment où nous avons au contraire plutôt besoin de clarification.
Quoi qu’il en soit, la sécurité collective et la lutte contre le terrorisme ne peuvent s’envisager qu’au travers d’un travail de plus long terme des services de renseignement, épaulés par une police de proximité rénovée, la police judiciaire et les magistrats en charge de ces contentieux complexes, selon des règles procédurales clairement définies en référence à des infractions pénales, ce que ce texte semble ignorer. Pour notre part, nous continuerons à œuvrer en ce sens, tout en nous opposant à ce type de dérive.
Ainsi, mes chers collègues, vous l’aurez compris, les membres du groupe communiste républicain et citoyen refuseront cette banalisation d’un état d’urgence permanent, véritable menace pour nos libertés publiques, en votant unanimement contre ce texte.
Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre auprès du ministre de l’intérieur, mes chers collègues, cet énième projet de loi renforçant la lutte antiterroriste marque un tournant important : il vise à inscrire dans notre droit commun les principales mesures autorisées à titre exceptionnel dans le cadre de l’état d’urgence, au détriment de notre équilibre démocratique entre sécurité et liberté.
En vous présentant notre motion de procédure, ma collègue Éliane Assassi vous a déjà exposé le point de vue de notre groupe sur les problèmes que soulève ce texte. Je vais, pour ma part, me concentrer davantage sur les mesures proposées en elles-mêmes et sur les modifications apportées par la commission des lois.
En assistant aux débats en commission des lois, la semaine dernière, j’ai été assez étonné des remarques de certains de mes collègues, notamment du groupe Les Républicains, qui ont apporté plusieurs nuances à leurs propos d’ordinaire plus tranchés et plus guerriers au sujet de la sécurité intérieure et de la lutte contre le terrorisme. M. Pillet nous a même enjoints de réfléchir aux mots suivants de Benjamin Franklin : « Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l’une ni l’autre et finit par perdre les deux. » Quelle lucidité, mon cher collègue !
J’ai été encore davantage surpris par les réflexions de nos collègues socialistes, qui semblent découvrir un texte jugé aujourd’hui particulièrement dangereux, estimant opportun de supprimer les articles 3 et 4 dès le travail en commission, et allant jusqu’à invoquer la Cour européenne des droits de l’homme, qui s’opposera sûrement à cette instauration de l’état d’urgence dans le droit commun.
Il faut pourtant rappeler que l’entaille dans le droit commun a été ouverte par le gouvernement de Manuel Valls, avec sa loi du 3 juin 2016, œuvre que le président Macron se contente aujourd’hui de parachever.
Comme à son habitude, la commission des lois s’est ainsi posée en défenseur des libertés publiques.
Certes, toutes les mises en garde soulevées par notre rapporteur sont bien légitimes et ne peuvent que recueillir notre assentiment, mais, là où le bât blesse, c’est que le rapporteur, ainsi que le président et la majorité de notre commission, en reste aux considérations de mise en garde, aux préventions, aux prétendues garanties, comme si les mesures qui nous étaient proposées étaient inédites, n’avaient jamais mises en œuvre, et comme si aucune dérive n’avait jamais été notée.
Çà et là, notre rapporteur a amendé le texte, afin de « rechercher un meilleur équilibre entre la nécessité d’assurer la sécurité et l’ordre public et celle de protéger les droits et libertés constitutionnellement garantis. »
Ainsi, à l’article 1er, la commission a admis l’instauration de « périmètres de protection » sur arrêté préfectoral, mais en a timidement circonscrit l’usage. Pourtant, il reste toujours à craindre que les mesures proposées permettent une application discriminatoire, dès lors que les fouilles ne requièrent aucune base objective.
Par ailleurs, la définition des agents identifiés comme pouvant intervenir pour mettre en œuvre ces mesures suscite notre plus vive opposition. Je pense en particulier au recours à des agents de sécurité privés, mais nous y reviendrons sûrement dans la discussion.
Enfin, il est à redouter que ce type de mesure laisse place à une utilisation autre que celle qui a été définie initialement, par exemple pour l’étouffement ou la répression de contestations politiques sur la voie publique. Hélas, nous en avons déjà eu plusieurs exemples ces derniers mois.
Concernant les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance contenues à l’article 3, la commission des lois a certes aligné les conditions de pointage sur celles qui sont prévues pour le contrôle administratif des retours sur le territoire et placé le renouvellement de ces mesures sous le contrôle de l’autorité judiciaire. Elle a également supprimé l’obligation de déclaration des numéros d’abonnement et d’identifiant de communications électroniques. Il n’empêche que cet article ancre dans notre droit commun les mesures d’assignation administrative.
L’article 4 vise à transcrire le régime des perquisitions de l’état d’urgence en mettant en place un régime juridique de « visites domiciliaires et des saisies ». La différence réside pour le Gouvernement dans l’introduction d’une autorisation par ordonnance motivée du juge des libertés et de la détention de Paris, communiquée au parquet de Paris. Hélas, cela ne constitue en rien une garantie. Soumis à la pression et contraints de travailler dans l’urgence et en petit nombre, ces magistrats se verront difficilement refuser ce genre d’intervention.
En outre, le texte ne prévoit pas quelles pièces seront versées au dossier qui lui sera soumis, donc l’appréciation de l’autorité administrative résultera des éléments fournis par les services de renseignement.
Pour ces deux articles du projet de loi qui reprennent dans notre droit commun deux dispositions emblématiques de l’état d’urgence, la commission des lois, sur l’initiative de son rapporteur a limité dans le temps, à savoir jusqu’au 31 décembre 2021, leur application, au moyen de ce qui s’apparente à une clause « d’autodestruction ». Une telle originalité en dit beaucoup sur la gravité de telles dispositions et sur le danger de les faire entrer durablement de notre droit commun.
Pour notre part, nous ne pouvons accepter, pour quelque période que ce soit, que ce genre de mesure vienne contaminer notre droit et remettre en cause nos libertés publiques. C’est la raison qui nous conduira à vous proposer plusieurs amendements de suppression.
On constate un glissement très dangereux de la police judiciaire vers la police administrative. On accorde aujourd’hui à l’autorité administrative des pouvoirs permanents qu’elle n’avait auparavant que dans le cadre de l’état d’urgence. Certes, celui-ci a été reconduit six fois, mais il avait l’avantage d’être a priori « bordé ». Ce que chacun pouvait craindre avec ces prorogations incessantes finit donc par se produire : nous voilà, avec ce texte, à l’aube d’un état d’urgence permanent, et les quelques garanties apportées n’y changeront rien.
Il nous est désormais proposé d’avoir en parallèle l’autorité administrative et l’autorité judiciaire, qui pourront être compétentes en même temps. Il est ainsi créé un système hybride incarné par le juge des libertés et de la détention, à un moment où nous avons au contraire plutôt besoin de clarification.
Quoi qu’il en soit, la sécurité collective et la lutte contre le terrorisme ne peuvent s’envisager qu’au travers d’un travail de plus long terme des services de renseignement, épaulés par une police de proximité rénovée, la police judiciaire et les magistrats en charge de ces contentieux complexes, selon des règles procédurales clairement définies en référence à des infractions pénales, ce que ce texte semble ignorer. Pour notre part, nous continuerons à œuvrer en ce sens, tout en nous opposant à ce type de dérive.
Ainsi, mes chers collègues, vous l’aurez compris, les membres du groupe communiste républicain et citoyen refuseront cette banalisation d’un état d’urgence permanent, véritable menace pour nos libertés publiques, en votant unanimement contre ce texte.
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre, mes chers collègues, dans son ouvrage Effondrement, le géographe américain Jared Diamond s’attache à démontrer quels mécanismes décisionnels précipitent les sociétés vers leur disparition ou, à l’inverse, leur permettent de se maintenir.
Il met notamment en évidence qu’une des premières qualités des sociétés qui résistent dans le temps face aux aléas réside dans leur capacité à prendre conscience des maux qui les traversent pour pouvoir ensuite formuler des solutions. Les sociétés qui, au contraire, tarderaient à regarder la réalité en face accéléreraient, quant à elles, leur « effondrement ».
En adossant à une sixième loi de prorogation de l’état d’urgence, votée la semaine dernière, ce projet de loi renforçant la sécurité intérieure, le Gouvernement manifeste clairement sa volonté d’ériger la lutte contre le terrorisme en priorité. Alors que nous venons de commémorer l’attentat de Nice, qui a coûté la vie à 86 innocents qui n’avaient d’autre tort que de vouloir admirer le traditionnel feu d’artifice du 14 juillet, c’est une preuve, plutôt rassurante, je trouve, qu’il a pris la mesure de la gravité de la situation dans laquelle se trouve notre pays.
Je le dis quitte à paraître insistant, car je sais que ce texte ne laisse pas indifférent, voire inquiète, et que des tentations existent, dès lors que pas moins de cinq lois relatives à la lutte contre le terrorisme ont été adoptées ces dernières années, de porter un coup d’arrêt à ce que l’on qualifie de « logique sécuritaire ».
Sans balayer d’un revers de la main les arguments avancés par les tenants d’une telle position, je veux vous faire partager ma conviction, mes chers collègues, que nous avons besoin, plus que jamais, de faire preuve de réalisme et d’efficacité pour maintenir notre société en vie.
Cela étant, je suis persuadé, comme la majorité d’entre vous, de la nécessité de sortir de l’état d’urgence pour lui redonner son caractère exceptionnel, dès lors que la menace terroriste est devenue permanente.
Dans les Yvelines, mon département, qui a été marqué par l’attentat de Magnanville, commis contre un couple de policiers, assassinés dans leur maison et sous les yeux de leur enfant, mais également ailleurs, l’état d’urgence a été conduit avec un grand professionnalisme par les autorités préfectorales, sous le contrôle attentif des juges administratif et constitutionnel. Depuis novembre 2015, les forces de l’ordre ont fait preuve d’un dévouement exemplaire pour mettre en œuvre ces mesures exceptionnelles, dans des circonstances particulièrement dangereuses.
Cependant, il faut bien admettre que le régime de l’état d’urgence, désormais, s’essouffle. Son efficacité décroît, et sa seule évocation est devenue un signal paradoxal pour les Français, qui exigent que soit maintenu un niveau de vigilance maximal, mais aspirent à « tourner la page » des attentats meurtriers.
Face à ce constat, monsieur le ministre d’État, vous proposez de créer de nouveaux outils administratifs permanents, tirés du bilan de l’application prolongée de l’état d’urgence après retour d’expérience.
Ainsi, certaines mesures se sont montrées particulièrement efficaces et il apparaît donc pertinent de faire en sorte de pouvoir profiter de leur bénéfice sur le long terme, sans avoir à passer par la lourde procédure de l’état d’urgence : je pense notamment aux perquisitions administratives.
Vous proposez également de nouveaux dispositifs, tels que la protection des lieux et événements soumis à une menace particulière ou encore la fermeture administrative de lieux de culte.
Ces mesures répondent à des évolutions concrètes de la menace terroriste. Les lieux accueillant des événements culturels ont en effet montré leur vulnérabilité, que l’on pense à l’attentat du Bataclan ou encore à celui, plus récent, qui a endeuillé Manchester.
De même, la nouvelle procédure de fermeture des lieux de culte sur décision du préfet pour endiguer les phénomènes de radicalisation constitue un outil intéressant et complémentaire de la possibilité qui leur est déjà offerte de recourir à l’expulsion de prédicateurs radicalisés étrangers ou d’interdire les réunions. Il s’agit également d’un message fort de responsabilisation adressé aux propriétaires des lieux de culte, qui ne peuvent tout simplement pas fermer les yeux sur ce qui se passe dans leurs murs.
Cependant, nous ne légiférons pas ex nihilo, et, depuis l’Habeas Corpus, de nombreux textes ont construit une architecture institutionnelle équilibrée destinée à assurer notre sécurité tout en protégeant nos libertés. C’est la raison pour laquelle les membres du RDSE, dans une démarche de coconstruction avec le Gouvernement, ont proposé d’introduire quelques modifications afin de garantir cet équilibre.
Le texte ayant été ainsi doté de garde-fous destinés, notamment, à ce que ses dispositions ne puissent être détournées de leurs fins, le RDSE ne souhaite dès lors pas priver l’État des outils qu’il réclame, même si nous ne nous privons pas de lui dire que, seuls, ils seront insuffisants. C’est pourquoi nous voulons réaffirmer dans le même temps que lutter efficacement contre le terrorisme suppose aussi de donner des moyens à la justice et, surtout, aux services de renseignement.
Enfin, permettez-nous de regretter que, s’agissant d’une loi aussi importante pour notre régime démocratique, le choix de la procédure accélérée ait de nouveau été fait.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Applaudissements sur les travées du RDSE.
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre, mes chers collègues, dans son ouvrage Effondrement, le géographe américain Jared Diamond s’attache à démontrer quels mécanismes décisionnels précipitent les sociétés vers leur disparition ou, à l’inverse, leur permettent de se maintenir.
Il met notamment en évidence qu’une des premières qualités des sociétés qui résistent dans le temps face aux aléas réside dans leur capacité à prendre conscience des maux qui les traversent pour pouvoir ensuite formuler des solutions. Les sociétés qui, au contraire, tarderaient à regarder la réalité en face accéléreraient, quant à elles, leur « effondrement ».
En adossant à une sixième loi de prorogation de l’état d’urgence, votée la semaine dernière, ce projet de loi renforçant la sécurité intérieure, le Gouvernement manifeste clairement sa volonté d’ériger la lutte contre le terrorisme en priorité. Alors que nous venons de commémorer l’attentat de Nice, qui a coûté la vie à 86 innocents qui n’avaient d’autre tort que de vouloir admirer le traditionnel feu d’artifice du 14 juillet, c’est une preuve, plutôt rassurante, je trouve, qu’il a pris la mesure de la gravité de la situation dans laquelle se trouve notre pays.
Je le dis quitte à paraître insistant, car je sais que ce texte ne laisse pas indifférent, voire inquiète, et que des tentations existent, dès lors que pas moins de cinq lois relatives à la lutte contre le terrorisme ont été adoptées ces dernières années, de porter un coup d’arrêt à ce que l’on qualifie de « logique sécuritaire ».
Sans balayer d’un revers de la main les arguments avancés par les tenants d’une telle position, je veux vous faire partager ma conviction, mes chers collègues, que nous avons besoin, plus que jamais, de faire preuve de réalisme et d’efficacité pour maintenir notre société en vie.
Cela étant, je suis persuadé, comme la majorité d’entre vous, de la nécessité de sortir de l’état d’urgence pour lui redonner son caractère exceptionnel, dès lors que la menace terroriste est devenue permanente.
Dans les Yvelines, mon département, qui a été marqué par l’attentat de Magnanville, commis contre un couple de policiers, assassinés dans leur maison et sous les yeux de leur enfant, mais également ailleurs, l’état d’urgence a été conduit avec un grand professionnalisme par les autorités préfectorales, sous le contrôle attentif des juges administratif et constitutionnel. Depuis novembre 2015, les forces de l’ordre ont fait preuve d’un dévouement exemplaire pour mettre en œuvre ces mesures exceptionnelles, dans des circonstances particulièrement dangereuses.
Cependant, il faut bien admettre que le régime de l’état d’urgence, désormais, s’essouffle. Son efficacité décroît, et sa seule évocation est devenue un signal paradoxal pour les Français, qui exigent que soit maintenu un niveau de vigilance maximal, mais aspirent à « tourner la page » des attentats meurtriers.
Face à ce constat, monsieur le ministre d’État, vous proposez de créer de nouveaux outils administratifs permanents, tirés du bilan de l’application prolongée de l’état d’urgence après retour d’expérience.
Ainsi, certaines mesures se sont montrées particulièrement efficaces et il apparaît donc pertinent de faire en sorte de pouvoir profiter de leur bénéfice sur le long terme, sans avoir à passer par la lourde procédure de l’état d’urgence : je pense notamment aux perquisitions administratives.
Vous proposez également de nouveaux dispositifs, tels que la protection des lieux et événements soumis à une menace particulière ou encore la fermeture administrative de lieux de culte.
Ces mesures répondent à des évolutions concrètes de la menace terroriste. Les lieux accueillant des événements culturels ont en effet montré leur vulnérabilité, que l’on pense à l’attentat du Bataclan ou encore à celui, plus récent, qui a endeuillé Manchester.
De même, la nouvelle procédure de fermeture des lieux de culte sur décision du préfet pour endiguer les phénomènes de radicalisation constitue un outil intéressant et complémentaire de la possibilité qui leur est déjà offerte de recourir à l’expulsion de prédicateurs radicalisés étrangers ou d’interdire les réunions. Il s’agit également d’un message fort de responsabilisation adressé aux propriétaires des lieux de culte, qui ne peuvent tout simplement pas fermer les yeux sur ce qui se passe dans leurs murs.
Cependant, nous ne légiférons pas ex nihilo, et, depuis l’Habeas Corpus, de nombreux textes ont construit une architecture institutionnelle équilibrée destinée à assurer notre sécurité tout en protégeant nos libertés. C’est la raison pour laquelle les membres du RDSE, dans une démarche de coconstruction avec le Gouvernement, ont proposé d’introduire quelques modifications afin de garantir cet équilibre.
Le texte ayant été ainsi doté de garde-fous destinés, notamment, à ce que ses dispositions ne puissent être détournées de leurs fins, le RDSE ne souhaite dès lors pas priver l’État des outils qu’il réclame, même si nous ne nous privons pas de lui dire que, seuls, ils seront insuffisants. C’est pourquoi nous voulons réaffirmer dans le même temps que lutter efficacement contre le terrorisme suppose aussi de donner des moyens à la justice et, surtout, aux services de renseignement.
Enfin, permettez-nous de regretter que, s’agissant d’une loi aussi importante pour notre régime démocratique, le choix de la procédure accélérée ait de nouveau été fait.
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre auprès du ministre de l’intérieur, mes chers collègues, nous avons adopté, le 4 juillet dernier, la sixième prorogation de l’état d’urgence ; l’Assemblée nationale en a fait de même le 6 juillet, la promulgation de ce texte datant, elle, du 11 juillet.
De sa déclaration, le 14 novembre 2015, au 1er novembre 2017, date de sa fin programmée, notre pays aura vécu pratiquement deux années sous le régime de l’état d’urgence.
Par ailleurs, au cours des quatre dernières années, huit lois ont été adoptées afin de lutter contre le terrorisme : les lois du 18 décembre 2013, du 13 novembre 2014, du 24 juillet 2015, du 30 novembre 2015, du 22 mars 2016, du 3 juin 2016, du 21 juillet 2016 et du 28 février 2017.
Notre pays a pu compter sur l’engagement sans faille du Parlement dans la lutte contre le terrorisme. L’exécutif et le législatif ont conjointement doté notre nation de l’arsenal juridique le plus complet pour combattre le terrorisme, tout en faisant en sorte que notre pays reste une démocratie protectrice des libertés publiques.
Il reste à sortir de l’état d’urgence, régime d’exception dont chacun s’accorde à admettre qu’il ne peut devenir permanent. Tel est l’objet du projet de loi qui nous est soumis, après une réécriture pour tenir compte de l’avis du Conseil d’État du 15 juin, et une deuxième réécriture imposée par notre commission des lois, sous l’impulsion de son rapporteur, Michel Mercier.
Je le dis d’emblée, je ne vais pas reprendre le détail des articles ou des amendements adoptés en commission : le rapporteur et mes collègues viennent de le faire remarquablement. Je voudrais pour ma part insister sur deux éléments.
Premièrement, le texte, dans la version qui nous est proposée, rend assimilables, aux sens politique et juridique, les mesures souhaitées par l’exécutif. Deuxièmement, ce texte me semble être une réussite en ce qui concerne la recherche d’équilibres.
Je commence par l’acceptabilité. L’assimilation politique et juridique des dispositions issues de l’état d’urgence dans notre droit commun répond à la commande passée par le Président de la République et par le Gouvernement.
À l’issue de l’examen du texte en commission des lois, je prenais connaissance du titre suivant d’un article de presse : « Projet de loi antiterroriste : le Sénat ampute les ambitions sécuritaires du Gouvernement ». C’est excessif, mais c’est surtout inexact !
Le travail effectué, avec par exemple la définition plus précise du cadre juridique d’intervention à l’article 2, l’autorisation du juge judiciaire, la proportionnalité, le contrôle parlementaire ou la limitation dans le temps, est bienvenu. Ce travail est aussi nécessaire si nous voulons que le projet de loi passe avec succès les contrôles du Conseil constitutionnel, puis de la Cour européenne des droits de l’homme.
En d’autres termes, le travail qui a été réalisé et que nous nous apprêtons à compléter en séance publique consiste non pas à raboter le texte, mais, au contraire, à en permettre la mise en œuvre effective.
J’en viens maintenant à l’équilibre, ou plutôt aux différentes formes d’équilibre – j’en ai dénombré quatre –, comme fil rouge du travail du Sénat.
L’équilibre entre la lutte contre le terrorisme et la protection des libertés individuelles proposé par le Sénat avec détermination et finesse – je sais que, pour M. le président de la commission des lois, cela va sans dire –, est suffisamment évident pour me permettre d’aller directement à une deuxième forme d’équilibre, à savoir l’équilibre dans la durée entre les pouvoirs exécutif, judiciaire, mais aussi législatif, qui est assuré grâce au maintien du contrôle par le Parlement que vous avez proposé, monsieur le rapporteur.
Une autre forme d’équilibre a été trouvée dans la répartition des rôles entre le juge judiciaire et le juge administratif. Nous n’aurions rien à gagner au maintien de tensions entre ces deux autorités juridictionnelles, et cela n’est pas qu’une question de susceptibilité.
Nous avons assisté au fil des textes à une optimisation ou à une extension de la police dite « administrative » et à la même optimisation en matière de droit pénal.
Les mesures de police administrative ne portent plus simplement sur la prévention, mais se rapprochent de l’objet même du droit pénal, à savoir la sanction, et le droit pénal définit les infractions en matière de terrorisme de plus en plus en amont, de sorte qu’il participe lui aussi à la prévention. Entre le droit administratif spécial de lutte contre le terrorisme et le droit pénal spécial de même objet s’est produit ce que Michel Mercier qualifie à juste titre d’« hybridation » dans son rapport. Pour que cela fonctionne, pour que les dispositions se coordonnent, il faut de la précision et une certaine élégance dans l’écriture.
Enfin, nous avons visé un équilibre entre les notions de droit commun et de droit d’exception. La commande politique était connue : intégrer les dispositions utiles de l’état d’urgence dans le droit commun. Nous partageons cette logique, monsieur le ministre d’État, mais l’état d’urgence ne peut pas fonctionner comme une boîte à mails où l’on transférerait les messages d’une adresse à une autre, ou d’une corbeille à une autre si vous préférez.
Comment l’exception peut-elle devenir le droit commun ? Quelle place donner à l’état d’urgence dans notre système institutionnel si le droit d’exception devient le droit commun ? Comment donner en démocratie une réponse progressive et différenciée à des situations de crise ? L’exercice n’est indiscutablement pas aisé.
Le Parlement accepte de s’y soumettre, puisqu’il est conscient de la gravité de cette guerre menée par les terroristes, qui s’inscrit dans la durée, avec des auteurs endogènes comme exogènes, pour reprendre la formule de l’un de mes prédécesseurs à cette tribune, agissant soit individuellement soit collectivement, après autoradicalisation ou sur des missions sinon commandées, du moins inspirées. Nous avons à l’esprit la fermeté nécessaire dans la durée.
Tel est le sens de la palette d’amendements qui ont été adoptés par la commission, sous l’impulsion de son rapporteur, en espérant que le Gouvernement voudra bien en reconnaître la pertinence pour nous permettre de réussir dans notre objectif commun de lutte contre le terrorisme.
En conclusion, je dirai que le groupe Union Centriste est favorable au projet de doter l’État de droit de moyens lui permettant de se défendre face à une menace terroriste non pas ponctuelle, mais permanente, dans le respect des droits et des libertés.
Applaudissements sur les travées du RDSE.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre auprès du ministre de l’intérieur, mes chers collègues, nous avons adopté, le 4 juillet dernier, la sixième prorogation de l’état d’urgence ; l’Assemblée nationale en a fait de même le 6 juillet, la promulgation de ce texte datant, elle, du 11 juillet.
De sa déclaration, le 14 novembre 2015, au 1er novembre 2017, date de sa fin programmée, notre pays aura vécu pratiquement deux années sous le régime de l’état d’urgence.
Par ailleurs, au cours des quatre dernières années, huit lois ont été adoptées afin de lutter contre le terrorisme : les lois du 18 décembre 2013, du 13 novembre 2014, du 24 juillet 2015, du 30 novembre 2015, du 22 mars 2016, du 3 juin 2016, du 21 juillet 2016 et du 28 février 2017.
Notre pays a pu compter sur l’engagement sans faille du Parlement dans la lutte contre le terrorisme. L’exécutif et le législatif ont conjointement doté notre nation de l’arsenal juridique le plus complet pour combattre le terrorisme, tout en faisant en sorte que notre pays reste une démocratie protectrice des libertés publiques.
Il reste à sortir de l’état d’urgence, régime d’exception dont chacun s’accorde à admettre qu’il ne peut devenir permanent. Tel est l’objet du projet de loi qui nous est soumis, après une réécriture pour tenir compte de l’avis du Conseil d’État du 15 juin, et une deuxième réécriture imposée par notre commission des lois, sous l’impulsion de son rapporteur, Michel Mercier.
Je le dis d’emblée, je ne vais pas reprendre le détail des articles ou des amendements adoptés en commission : le rapporteur et mes collègues viennent de le faire remarquablement. Je voudrais pour ma part insister sur deux éléments.
Premièrement, le texte, dans la version qui nous est proposée, rend assimilables, aux sens politique et juridique, les mesures souhaitées par l’exécutif. Deuxièmement, ce texte me semble être une réussite en ce qui concerne la recherche d’équilibres.
Je commence par l’acceptabilité. L’assimilation politique et juridique des dispositions issues de l’état d’urgence dans notre droit commun répond à la commande passée par le Président de la République et par le Gouvernement.
À l’issue de l’examen du texte en commission des lois, je prenais connaissance du titre suivant d’un article de presse : « Projet de loi antiterroriste : le Sénat ampute les ambitions sécuritaires du Gouvernement ». C’est excessif, mais c’est surtout inexact !
Le travail effectué, avec par exemple la définition plus précise du cadre juridique d’intervention à l’article 2, l’autorisation du juge judiciaire, la proportionnalité, le contrôle parlementaire ou la limitation dans le temps, est bienvenu. Ce travail est aussi nécessaire si nous voulons que le projet de loi passe avec succès les contrôles du Conseil constitutionnel, puis de la Cour européenne des droits de l’homme.
En d’autres termes, le travail qui a été réalisé et que nous nous apprêtons à compléter en séance publique consiste non pas à raboter le texte, mais, au contraire, à en permettre la mise en œuvre effective.
J’en viens maintenant à l’équilibre, ou plutôt aux différentes formes d’équilibre – j’en ai dénombré quatre –, comme fil rouge du travail du Sénat.
L’équilibre entre la lutte contre le terrorisme et la protection des libertés individuelles proposé par le Sénat avec détermination et finesse – je sais que, pour M. le président de la commission des lois, cela va sans dire –, est suffisamment évident pour me permettre d’aller directement à une deuxième forme d’équilibre, à savoir l’équilibre dans la durée entre les pouvoirs exécutif, judiciaire, mais aussi législatif, qui est assuré grâce au maintien du contrôle par le Parlement que vous avez proposé, monsieur le rapporteur.
Une autre forme d’équilibre a été trouvée dans la répartition des rôles entre le juge judiciaire et le juge administratif. Nous n’aurions rien à gagner au maintien de tensions entre ces deux autorités juridictionnelles, et cela n’est pas qu’une question de susceptibilité.
Nous avons assisté au fil des textes à une optimisation ou à une extension de la police dite « administrative » et à la même optimisation en matière de droit pénal.
Les mesures de police administrative ne portent plus simplement sur la prévention, mais se rapprochent de l’objet même du droit pénal, à savoir la sanction, et le droit pénal définit les infractions en matière de terrorisme de plus en plus en amont, de sorte qu’il participe lui aussi à la prévention. Entre le droit administratif spécial de lutte contre le terrorisme et le droit pénal spécial de même objet s’est produit ce que Michel Mercier qualifie à juste titre d’« hybridation » dans son rapport. Pour que cela fonctionne, pour que les dispositions se coordonnent, il faut de la précision et une certaine élégance dans l’écriture.
Enfin, nous avons visé un équilibre entre les notions de droit commun et de droit d’exception. La commande politique était connue : intégrer les dispositions utiles de l’état d’urgence dans le droit commun. Nous partageons cette logique, monsieur le ministre d’État, mais l’état d’urgence ne peut pas fonctionner comme une boîte à mails où l’on transférerait les messages d’une adresse à une autre, ou d’une corbeille à une autre si vous préférez.
Comment l’exception peut-elle devenir le droit commun ? Quelle place donner à l’état d’urgence dans notre système institutionnel si le droit d’exception devient le droit commun ? Comment donner en démocratie une réponse progressive et différenciée à des situations de crise ? L’exercice n’est indiscutablement pas aisé.
Le Parlement accepte de s’y soumettre, puisqu’il est conscient de la gravité de cette guerre menée par les terroristes, qui s’inscrit dans la durée, avec des auteurs endogènes comme exogènes, pour reprendre la formule de l’un de mes prédécesseurs à cette tribune, agissant soit individuellement soit collectivement, après autoradicalisation ou sur des missions sinon commandées, du moins inspirées. Nous avons à l’esprit la fermeté nécessaire dans la durée.
Tel est le sens de la palette d’amendements qui ont été adoptés par la commission, sous l’impulsion de son rapporteur, en espérant que le Gouvernement voudra bien en reconnaître la pertinence pour nous permettre de réussir dans notre objectif commun de lutte contre le terrorisme.
En conclusion, je dirai que le groupe Union Centriste est favorable au projet de doter l’État de droit de moyens lui permettant de se défendre face à une menace terroriste non pas ponctuelle, mais permanente, dans le respect des droits et des libertés.
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre auprès du ministre de l’intérieur, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, mes chers collègues, personne ne saurait ici nier l’existence du risque terroriste, sa permanence, le drame que vivent les victimes du terrorisme, non plus que l’angoisse de nos concitoyens face à ce phénomène.
Pour autant, le rappeler, comme vous l’avez fait, tout à l’heure, monsieur le ministre d’État, ne justifie pas forcément l’ampleur des atteintes à notre système démocratique et judiciaire que vous proposez, d’autant que le risque terroriste semble s’amplifier à mesure qu’il change de nature.
Charlie Hebdo et le Bataclan étaient des opérations très organisées et télécommandées. Aujourd’hui, on constate de plus en plus, comme à Saint-Étienne-du-Rouvray, à Nice ou récemment sur les Champs-Élysées, que l’on est en présence d’individus isolés, entrés en contact par le biais d’Internet, qui organisent leur propre activité terroriste de manière complètement isolée. Le danger a donc tendance à se renforcer, et il faut bien être conscient que la chute de Daech au Moyen-Orient ne va pas limiter les risques ; au contraire, ceux-ci risquent d’être démultipliés.
Pour autant, comme le Président de la République l’a fait il y a déjà un certain temps, nous devons nous rendre à l’évidence : nous ne pouvons rester dans le cadre de la loi de 1955, bien qu’elle ait été modifiée et renforcée par des mesures démocratiques importantes ; je pense notamment à l’article 4-1, qui oblige le Gouvernement à informer le Parlement et à rendre compte régulièrement des mesures prises. Je le répète, nous ne pouvons pas rester en permanence dans ce système d’état d’urgence, qui, en plus, inquiète d’une certaine manière nos concitoyens en leur rappelant que le risque existe. Certes, il faut tout de même le leur rappeler, même s’ils l’ont bien compris lorsqu’il a fallu prolonger l’état d’urgence à la veille de l’Euro de football.
Par la suite, forts des convictions que nous partagions les uns et les autres, ce qui s’est concrétisé par le vote de la loi du 3 juin 2016, qui a renforcé les moyens donnés aux services de renseignement, au procureur de la République, aux services judiciaires, nous avons cru que tout avait été fait pour que n’ayons plus besoin de l’état d’urgence. Peine perdue, après l’attentat de Nice, le Gouvernement nous a demandé de le prolonger encore, puis nous l’a demandé de nouveau en décembre dernier, en insistant essentiellement sur les assignations à résidence et les perquisitions administratives.
Pourtant, si nous avions écouté celui qui est aujourd’hui notre Président de la République, nous n’aurions pas dû voter en décembre 2016 la prorogation de l’état d’urgence, puisque lui-même écrivait au mois de novembre dernier dans son livre, qui a déjà été cité, que nous devions sortir de l’état d’urgence, notre arsenal législatif comprenant tous les moyens juridiques nécessaires pour lutter contre le terrorisme. Nous n’avions donc plus besoin des mesures de l’état d’urgence.
Dans le texte que vous nous proposez, monsieur le ministre d’État, il y a des mesures administratives qui peuvent nous paraître nécessaires.
S’agissant de l’article 1er, qui est aussi controversé, comme d’autres, il faut être conscient que nos concitoyens veulent que l’on puisse continuer à organiser des manifestations d’ampleur, comme vous l’avez rappelé, tout en cherchant la sécurité maximale.
Nous sommes là dans la compétence tout à fait normale de l’autorité administrative, notamment du préfet, qui doit pouvoir prendre les mesures décrites à l’article 1er, si possible tel qu’il a été modifié par la commission, qui a choisi de l’encadrer de façon prudente. Je crois que nos concitoyens le comprennent bien.
S’agissant de l’article 2 et de la fermeture des lieux de culte en cas, notamment, d’apologie du terrorisme, nous sommes à la limite de la commission d’une infraction. De tels comportements pourraient déjà en eux-mêmes justifier des poursuites pénales et l’application d’un certain nombre de mesures.
Néanmoins, il est utile de pouvoir recourir à une mesure administrative. Il faut souligner que le texte, qui mérite là aussi quelques modifications, ouvre la possibilité pour le président de l’association gérant le lieu de culte de saisir le juge des référés administratif. Dans ce cas, la mesure ne prendra effet qu’après que le juge se sera prononcé dans les 48 heures. Il s’agit, à mon sens, d’une forme de protection des libertés intéressante, malgré une mesure assez contraignante.
Les dispositions dont notre collègue Michel Boutant a parlé ne nous posent pas de difficultés particulières, d’autant qu’il est proposé un fort contrôle de l’utilisation de la prise de renseignements par voie hertzienne et de l’interception des communications. De ce point de vue, nous pourrons soutenir les propositions qui vous sont faites.
Notre collègue Alain Richard, qui s’exprimait au nom du groupe La République en marche, l’a dit à l’instant, les mesures les plus décriées sont celles qui sont contenues dans les articles 3 et 4.
Ces mesures sont très attentatoires aux libertés et elles sont dénoncées tout à la fois par le Défenseur des droits, qui est un ancien garde des sceaux, par la Commission nationale consultative des droits de l’homme, la CNCDH, et par tout un important mouvement composé de professeurs d’université, de magistrats – deux organisations syndicales –, et pas forcément des gens qui soient à l’extrême gauche !
Pour voter ces articles, nous avons besoin d’explications claires, car nous ne pouvons pas envisager de prolonger dans le droit commun les mesures de l’état d’urgence.
Monsieur le rapporteur, je tiens à saluer votre habileté. Vous avez en effet réussi à montrer que la rédaction nouvelle des articles 3 et 4 traduit votre souhait d’adoucir la mesure. Nous observons toutefois que la nouvelle rédaction desdits articles prouve, si besoin était, que l’on aurait pu rester entièrement dans le champ judiciaire. À côté du pouvoir de police, pouvoir administratif, on trouve en effet le contrôle et l’autorité du procureur de la République et du juge des libertés. Il est donc parfaitement possible d’inscrire ces mesures dans le cadre judiciaire.
On ne peut pas se contenter de dire que quelqu’un est mis sous surveillance – on ne parle plus d’assignation à résidence – « pour des raisons sérieuses ». S’il y a « des raisons sérieuses de penser » que le comportement de cette personne constitue une menace, n’est-ce pas parce qu’elle a commis des infractions, qui sont déjà sanctionnées par les articles de la loi ?
Vous convenez vous-même, monsieur le rapporteur, que les articles 3 et 4 suscitent de telles interrogations que vous nous proposez d’en faire des mesures d’exception, limitées dans le temps. Ce temps, il va au-delà des six mois, puisqu’il s’étend sur quatre ans pendant lesquels le Parlement n’intervient aucunement. La chose mérite d’être soulignée ! M. Bonnecarrère rappelait l’importance du pouvoir législatif. Dans l’état d’urgence, le Parlement était informé et il avait un pouvoir de contrôle, qu’il exerçait tous les six mois, au moment de la demande de renouvellement.
Dans le dispositif que vous proposez ici, monsieur le rapporteur, le pouvoir exécutif pourra faire ce qu’il veut pendant quatre ans. Il sera soumis à un simple contrôle, exercé pour l’essentiel par la juridiction administrative.
Il n’est pas question pour moi d’ouvrir ici un débat sur les vertus comparées du juge administratif et du juge judiciaire en matière de libertés individuelles. L’un n’est pas plus liberticide que l’autre, et inversement. La seule différence, c’est que le juge administratif, auquel il revient de contrôler l’excès de pouvoir, intervient toujours a posteriori, alors que le juge judiciaire est celui qui autorise. À ce titre, il peut parfaitement prendre toutes les mesures déclinées aux articles 3 et 4, mais il le fait au terme de débats contradictoires prévus le cas échéant dans le cadre de mesures d’instruction sous le contrôle judiciaire. C’est ce que nous démontrerons tout à l’heure et il n’y a pas de raison de déroger à ces principes.
C'est la raison pour laquelle nous proposerons, comme d’autres, des amendements de suppression de ces deux articles. Ils ne nous paraissent pas utiles, sauf à leur reconnaître une seule utilité – mais alors ce serait très grave, monsieur le ministre d’État –, celle de laisser croire aux Françaises et aux Français que le Président de la République, convaincu qu’il faut quitter l’état d’urgence, a trouvé la bonne solution, en maintenant quand même un état d’urgence déguisé pour les rassurer !
Eh bien, non ! Comme l’a dit François Pillet devant la commission des lois, nous sommes sans doute allés au bout du bout de ce que peut faire la loi. Peut-être le moment est-il venu d’expliquer à nos concitoyens ce qu’il est possible de faire et qu’on ne peut leur apporter une sécurité absolue.
Nous serons, en revanche, toujours à vos côtés pour apporter à la police les moyens dont elle a besoin. Nous espérons que le Gouvernement accordera aussi à la justice les moyens dont elle a besoin. En effet, donner des pouvoirs au juge des libertés et au procureur de la République suppose qu’ils aient des moyens. Or nous le savons, ces moyens ne sont pas au rendez-vous. Le rapport déposé par le président de la commission des lois auquel j’ai activement participé l’a prouvé, démontrant le besoin urgent d’une loi de programmation qui attribuerait à la justice plus de moyens, lui garantissant ainsi une meilleure efficacité.
Pour toutes ces raisons, dans l’attente du débat, je ne formulerai, monsieur le ministre d’État, qu’une demande : retirez les articles 3 et 4 et nous serons ravis de voter la loi ! Si vous ne les retirez pas, nous serons contraints de vous rappeler ce que le Président de la République a lui-même dit en novembre 2016 !
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, madame la ministre auprès du ministre de l’intérieur, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, mes chers collègues, personne ne saurait ici nier l’existence du risque terroriste, sa permanence, le drame que vivent les victimes du terrorisme, non plus que l’angoisse de nos concitoyens face à ce phénomène.
Pour autant, le rappeler, comme vous l’avez fait, tout à l’heure, monsieur le ministre d’État, ne justifie pas forcément l’ampleur des atteintes à notre système démocratique et judiciaire que vous proposez, d’autant que le risque terroriste semble s’amplifier à mesure qu’il change de nature.
Charlie Hebdo et le Bataclan étaient des opérations très organisées et télécommandées. Aujourd’hui, on constate de plus en plus, comme à Saint-Étienne-du-Rouvray, à Nice ou récemment sur les Champs-Élysées, que l’on est en présence d’individus isolés, entrés en contact par le biais d’Internet, qui organisent leur propre activité terroriste de manière complètement isolée. Le danger a donc tendance à se renforcer, et il faut bien être conscient que la chute de Daech au Moyen-Orient ne va pas limiter les risques ; au contraire, ceux-ci risquent d’être démultipliés.
Pour autant, comme le Président de la République l’a fait il y a déjà un certain temps, nous devons nous rendre à l’évidence : nous ne pouvons rester dans le cadre de la loi de 1955, bien qu’elle ait été modifiée et renforcée par des mesures démocratiques importantes ; je pense notamment à l’article 4-1, qui oblige le Gouvernement à informer le Parlement et à rendre compte régulièrement des mesures prises. Je le répète, nous ne pouvons pas rester en permanence dans ce système d’état d’urgence, qui, en plus, inquiète d’une certaine manière nos concitoyens en leur rappelant que le risque existe. Certes, il faut tout de même le leur rappeler, même s’ils l’ont bien compris lorsqu’il a fallu prolonger l’état d’urgence à la veille de l’Euro de football.
Par la suite, forts des convictions que nous partagions les uns et les autres, ce qui s’est concrétisé par le vote de la loi du 3 juin 2016, qui a renforcé les moyens donnés aux services de renseignement, au procureur de la République, aux services judiciaires, nous avons cru que tout avait été fait pour que n’ayons plus besoin de l’état d’urgence. Peine perdue, après l’attentat de Nice, le Gouvernement nous a demandé de le prolonger encore, puis nous l’a demandé de nouveau en décembre dernier, en insistant essentiellement sur les assignations à résidence et les perquisitions administratives.
Pourtant, si nous avions écouté celui qui est aujourd’hui notre Président de la République, nous n’aurions pas dû voter en décembre 2016 la prorogation de l’état d’urgence, puisque lui-même écrivait au mois de novembre dernier dans son livre, qui a déjà été cité, que nous devions sortir de l’état d’urgence, notre arsenal législatif comprenant tous les moyens juridiques nécessaires pour lutter contre le terrorisme. Nous n’avions donc plus besoin des mesures de l’état d’urgence.
Dans le texte que vous nous proposez, monsieur le ministre d’État, il y a des mesures administratives qui peuvent nous paraître nécessaires.
S’agissant de l’article 1er, qui est aussi controversé, comme d’autres, il faut être conscient que nos concitoyens veulent que l’on puisse continuer à organiser des manifestations d’ampleur, comme vous l’avez rappelé, tout en cherchant la sécurité maximale.
Nous sommes là dans la compétence tout à fait normale de l’autorité administrative, notamment du préfet, qui doit pouvoir prendre les mesures décrites à l’article 1er, si possible tel qu’il a été modifié par la commission, qui a choisi de l’encadrer de façon prudente. Je crois que nos concitoyens le comprennent bien.
S’agissant de l’article 2 et de la fermeture des lieux de culte en cas, notamment, d’apologie du terrorisme, nous sommes à la limite de la commission d’une infraction. De tels comportements pourraient déjà en eux-mêmes justifier des poursuites pénales et l’application d’un certain nombre de mesures.
Néanmoins, il est utile de pouvoir recourir à une mesure administrative. Il faut souligner que le texte, qui mérite là aussi quelques modifications, ouvre la possibilité pour le président de l’association gérant le lieu de culte de saisir le juge des référés administratif. Dans ce cas, la mesure ne prendra effet qu’après que le juge se sera prononcé dans les 48 heures. Il s’agit, à mon sens, d’une forme de protection des libertés intéressante, malgré une mesure assez contraignante.
Les dispositions dont notre collègue Michel Boutant a parlé ne nous posent pas de difficultés particulières, d’autant qu’il est proposé un fort contrôle de l’utilisation de la prise de renseignements par voie hertzienne et de l’interception des communications. De ce point de vue, nous pourrons soutenir les propositions qui vous sont faites.
Notre collègue Alain Richard, qui s’exprimait au nom du groupe La République en marche, l’a dit à l’instant, les mesures les plus décriées sont celles qui sont contenues dans les articles 3 et 4.
Ces mesures sont très attentatoires aux libertés et elles sont dénoncées tout à la fois par le Défenseur des droits, qui est un ancien garde des sceaux, par la Commission nationale consultative des droits de l’homme, la CNCDH, et par tout un important mouvement composé de professeurs d’université, de magistrats – deux organisations syndicales –, et pas forcément des gens qui soient à l’extrême gauche !
Pour voter ces articles, nous avons besoin d’explications claires, car nous ne pouvons pas envisager de prolonger dans le droit commun les mesures de l’état d’urgence.
Monsieur le rapporteur, je tiens à saluer votre habileté. Vous avez en effet réussi à montrer que la rédaction nouvelle des articles 3 et 4 traduit votre souhait d’adoucir la mesure. Nous observons toutefois que la nouvelle rédaction desdits articles prouve, si besoin était, que l’on aurait pu rester entièrement dans le champ judiciaire. À côté du pouvoir de police, pouvoir administratif, on trouve en effet le contrôle et l’autorité du procureur de la République et du juge des libertés. Il est donc parfaitement possible d’inscrire ces mesures dans le cadre judiciaire.
On ne peut pas se contenter de dire que quelqu’un est mis sous surveillance – on ne parle plus d’assignation à résidence – « pour des raisons sérieuses ». S’il y a « des raisons sérieuses de penser » que le comportement de cette personne constitue une menace, n’est-ce pas parce qu’elle a commis des infractions, qui sont déjà sanctionnées par les articles de la loi ?
Vous convenez vous-même, monsieur le rapporteur, que les articles 3 et 4 suscitent de telles interrogations que vous nous proposez d’en faire des mesures d’exception, limitées dans le temps. Ce temps, il va au-delà des six mois, puisqu’il s’étend sur quatre ans pendant lesquels le Parlement n’intervient aucunement. La chose mérite d’être soulignée ! M. Bonnecarrère rappelait l’importance du pouvoir législatif. Dans l’état d’urgence, le Parlement était informé et il avait un pouvoir de contrôle, qu’il exerçait tous les six mois, au moment de la demande de renouvellement.
Dans le dispositif que vous proposez ici, monsieur le rapporteur, le pouvoir exécutif pourra faire ce qu’il veut pendant quatre ans. Il sera soumis à un simple contrôle, exercé pour l’essentiel par la juridiction administrative.
Il n’est pas question pour moi d’ouvrir ici un débat sur les vertus comparées du juge administratif et du juge judiciaire en matière de libertés individuelles. L’un n’est pas plus liberticide que l’autre, et inversement. La seule différence, c’est que le juge administratif, auquel il revient de contrôler l’excès de pouvoir, intervient toujours a posteriori, alors que le juge judiciaire est celui qui autorise. À ce titre, il peut parfaitement prendre toutes les mesures déclinées aux articles 3 et 4, mais il le fait au terme de débats contradictoires prévus le cas échéant dans le cadre de mesures d’instruction sous le contrôle judiciaire. C’est ce que nous démontrerons tout à l’heure et il n’y a pas de raison de déroger à ces principes.
C'est la raison pour laquelle nous proposerons, comme d’autres, des amendements de suppression de ces deux articles. Ils ne nous paraissent pas utiles, sauf à leur reconnaître une seule utilité – mais alors ce serait très grave, monsieur le ministre d’État –, celle de laisser croire aux Françaises et aux Français que le Président de la République, convaincu qu’il faut quitter l’état d’urgence, a trouvé la bonne solution, en maintenant quand même un état d’urgence déguisé pour les rassurer !
Eh bien, non ! Comme l’a dit François Pillet devant la commission des lois, nous sommes sans doute allés au bout du bout de ce que peut faire la loi. Peut-être le moment est-il venu d’expliquer à nos concitoyens ce qu’il est possible de faire et qu’on ne peut leur apporter une sécurité absolue.
Nous serons, en revanche, toujours à vos côtés pour apporter à la police les moyens dont elle a besoin. Nous espérons que le Gouvernement accordera aussi à la justice les moyens dont elle a besoin. En effet, donner des pouvoirs au juge des libertés et au procureur de la République suppose qu’ils aient des moyens. Or nous le savons, ces moyens ne sont pas au rendez-vous. Le rapport déposé par le président de la commission des lois auquel j’ai activement participé l’a prouvé, démontrant le besoin urgent d’une loi de programmation qui attribuerait à la justice plus de moyens, lui garantissant ainsi une meilleure efficacité.
Pour toutes ces raisons, dans l’attente du débat, je ne formulerai, monsieur le ministre d’État, qu’une demande : retirez les articles 3 et 4 et nous serons ravis de voter la loi ! Si vous ne les retirez pas, nous serons contraints de vous rappeler ce que le Président de la République a lui-même dit en novembre 2016 !
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vais répondre en quelques mots aux différents orateurs.
M. Buffet a explicité, dans son intervention, quelques orientations de la commission. Nous aurons l’occasion, tout au long de l’examen des articles, de discuter de l’équilibre que nous souhaitons parvenir à trouver ensemble.
Je ne répondrai pas à M. Rachline, sinon pour lui dire que le héros du plateau des Glières ne pensait pas être cité de la sorte dans cette assemblée…
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
M. Richard, dont l’esprit de finesse n’a d’égal que celui de M. le rapporteur, a exposé toutes les subtilités des articles 3 et 4, dont nous aurons évidemment l’occasion de discuter. Nous préciserons ce qui peut permettre de trouver un équilibre, toujours difficile à faire émerger, entre protection et sécurité. Il faut tout à la fois prendre un certain nombre de décisions en amont et, en même temps, garantir les libertés individuelles.
Je sais que M. Favier est, par principe, hostile à toutes les mesures de l’ordre de celles qui sont proposées dans le texte. Il n’a d’ailleurs voté aucune des dispositions précédemment soumises au Parlement et il continue dans sa logique.
Permettez-moi simplement de vous dire, monsieur le sénateur, que nous avons en face de nous un certain nombre d’adversaires qui ne suivent peut-être pas exactement les mêmes logiques. Nous avons, hélas, à affronter un danger bien réel dont les notes qui me sont transmises montrent l’étendue. Croyez-moi, s’il n’y avait pas besoin de prendre ce type de mesures, je ne les aurai pas portées !
Je veux remercier M. Esnol pour avoir dit que les sociétés qui tarderaient à prendre conscience de la réalité seraient des sociétés en péril. Je partage totalement cet avis. Si nous défendons ce projet de loi, c’est évidemment parce que nous avons conscience de la difficulté dans laquelle nous sommes.
J’entends souvent citer des phrases du Président de la République. Il faut savoir que la prise de conscience de l’ampleur du danger va de pair avec la lecture d’un certain nombre de notes dont on ne dispose pas forcément avant d’être Président de la République. De plus, il avait dit qu’il forgerait sa propre décision au moment où il serait élu, c'est-à-dire quand il aurait la véritable connaissance de la situation dans laquelle nous sommes.
M. Bonnecarrère nous a appelés au travail d’hybridation cher à Michel Mercier, qui a montré l’émergence d’une sorte d’équilibre entre police administrative et police judiciaire, les uns intervenant plus en amont et les autres ayant le souci de pouvoir conserver un certain nombre de prérogatives qui tendaient à rapprocher les deux institutions.
J’en viens à M. Bigot, auquel je dis que nous aurons l’occasion de discuter des articles 3 et 4. Je m’aperçois qu’il est d’accord avec l’article 1er. Ce en quoi il a raison ! En effet, sans cet article, le marché de Noël de Strasbourg ne pourrait pas avoir lieu, ce qui serait moyennement apprécié par ses concitoyens !
Enfin, je veux le lui dire, entre un certain nombre de dispositions qui avaient été votées précédemment et celles que nous proposons aujourd'hui, il me semble y avoir comme un air de continuité ! Je ne sais pas où il situe le changement, mais je le laisse juge de sa propre évolution de pensée.
En tout cas, mesdames, messieurs les sénateurs, tout au long de ce débat, nous nous efforcerons d’atteindre le point d’équilibre.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vais répondre en quelques mots aux différents orateurs.
M. Buffet a explicité, dans son intervention, quelques orientations de la commission. Nous aurons l’occasion, tout au long de l’examen des articles, de discuter de l’équilibre que nous souhaitons parvenir à trouver ensemble.
Je ne répondrai pas à M. Rachline, sinon pour lui dire que le héros du plateau des Glières ne pensait pas être cité de la sorte dans cette assemblée…
La discussion générale est close.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures vingt.
M. Richard, dont l’esprit de finesse n’a d’égal que celui de M. le rapporteur, a exposé toutes les subtilités des articles 3 et 4, dont nous aurons évidemment l’occasion de discuter. Nous préciserons ce qui peut permettre de trouver un équilibre, toujours difficile à faire émerger, entre protection et sécurité. Il faut tout à la fois prendre un certain nombre de décisions en amont et, en même temps, garantir les libertés individuelles.
Je sais que M. Favier est, par principe, hostile à toutes les mesures de l’ordre de celles qui sont proposées dans le texte. Il n’a d’ailleurs voté aucune des dispositions précédemment soumises au Parlement et il continue dans sa logique.
Permettez-moi simplement de vous dire, monsieur le sénateur, que nous avons en face de nous un certain nombre d’adversaires qui ne suivent peut-être pas exactement les mêmes logiques. Nous avons, hélas, à affronter un danger bien réel dont les notes qui me sont transmises montrent l’étendue. Croyez-moi, s’il n’y avait pas besoin de prendre ce type de mesures, je ne les aurai pas portées !
Je veux remercier M. Esnol pour avoir dit que les sociétés qui tarderaient à prendre conscience de la réalité seraient des sociétés en péril. Je partage totalement cet avis. Si nous défendons ce projet de loi, c’est évidemment parce que nous avons conscience de la difficulté dans laquelle nous sommes.
J’entends souvent citer des phrases du Président de la République. Il faut savoir que la prise de conscience de l’ampleur du danger va de pair avec la lecture d’un certain nombre de notes dont on ne dispose pas forcément avant d’être Président de la République. De plus, il avait dit qu’il forgerait sa propre décision au moment où il serait élu, c'est-à-dire quand il aurait la véritable connaissance de la situation dans laquelle nous sommes.
M. Bonnecarrère nous a appelés au travail d’hybridation cher à Michel Mercier, qui a montré l’émergence d’une sorte d’équilibre entre police administrative et police judiciaire, les uns intervenant plus en amont et les autres ayant le souci de pouvoir conserver un certain nombre de prérogatives qui tendaient à rapprocher les deux institutions.
J’en viens à M. Bigot, auquel je dis que nous aurons l’occasion de discuter des articles 3 et 4. Je m’aperçois qu’il est d’accord avec l’article 1er. Ce en quoi il a raison ! En effet, sans cet article, le marché de Noël de Strasbourg ne pourrait pas avoir lieu, ce qui serait moyennement apprécié par ses concitoyens !
Enfin, je veux le lui dire, entre un certain nombre de dispositions qui avaient été votées précédemment et celles que nous proposons aujourd'hui, il me semble y avoir comme un air de continuité ! Je ne sais pas où il situe le changement, mais je le laisse juge de sa propre évolution de pensée.
En tout cas, mesdames, messieurs les sénateurs, tout au long de ce débat, nous nous efforcerons d’atteindre le point d’équilibre.
La séance est reprise.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
La discussion générale est close.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 5 est présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 25 rectifié est présenté par Mmes Benbassa et Bouchoux et M. Desessard.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour défendre l’amendement n° 5.
Article 1er
À travers cet amendement de suppression de l’article 1er, nous souhaitons alerter sur cet article, qui confie au préfet la compétence pour instaurer des périmètres de protection permettant d’assurer la sécurité des lieux ou d’événements soumis à un risque d’actes de terrorisme à raison de leur nature ou de l’ampleur de la fréquentation. Au sein de ce périmètre, le préfet peut également règlementer l’accès, la circulation ou le stationnement des personnes, afin de pouvoir organiser le filtrage des accès au périmètre protégé. Ce filtrage permet de procéder à des palpations de sécurité, à l’inspection visuelle, voire à la fouille de bagages.
Nous sommes inquiets des nouvelles dispositions mises en place par le Gouvernement, qui confèrent de fait au préfet des pouvoirs disproportionnés en matière de sécurité publique. Les mesures proposées risquent, en outre, de permettre une application discriminatoire, dès lors que les fouilles ne requièrent aucune base objective.
La définition des agents habilités pour mettre en œuvre ces mesures suscite également notre plus vive inquiétude. En effet, les agents de police municipale, les agents de sécurité privée ou les agents de gardiennage ne disposent pas de la formation nécessaire pour appliquer sur un mode égalitaire ce genre de mesures.
Enfin, nous sommes inquiets de l’usage qui pourrait être fait de ce type de mesures. En effet, même si j’ai entendu ce que vous avez dit voilà quelques instants, monsieur le ministre d’État, dans vos réponses aux orateurs, ces mesures pourraient, une fois inscrites dans la loi, permettre d’étouffer ou de réprimer tout type de contestations politiques sur la voie publique.
Pour toutes ces raisons et bien d’autres que je n’ai pas le temps de développer, nous nous opposons à l’adoption d’une telle disposition et nous proposons par conséquent la suppression de cet article 1er.
I. – Le titre II du livre II du code de la sécurité intérieure est complété par un chapitre VI ainsi rédigé :
« Chapitre VI
« Périmètres de protection
« Art. L. 226-1. – Afin d’assurer la sécurité d’un lieu ou d’un événement soumis à un risque actuel et sérieux d’actes de terrorisme à raison de sa nature ou de l’ampleur de sa fréquentation, le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police, peut instituer par arrêté motivé un périmètre de protection au sein duquel l’accès et la circulation des personnes sont réglementés.
« L’arrêté est transmis sans délai au procureur de la République.
« L’arrêté définit ce périmètre, limité aux lieux soumis à la menace et à leurs abords immédiats, ainsi que ses points d’accès. Son étendue et sa durée sont adaptées et proportionnées aux nécessités que font apparaître les circonstances. L’arrêté prévoit les règles d’accès et de circulation des personnes dans le périmètre, ainsi que les vérifications, parmi celles mentionnées aux quatrième et sixième alinéas et à l’exclusion de toute autre, auxquelles elles peuvent être soumises pour y accéder ou y circuler, ainsi que les catégories d’agents habilités à procéder à ces vérifications. Il ne peut avoir pour conséquence ni d’empêcher l’accès des personnes à leur domicile ou à leur lieu de travail, ni de porter atteinte à leur vie privée, professionnelle ou familiale.
« L’arrêté peut autoriser les agents mentionnés aux 2°à 4° de l’article 16 du code de procédure pénale et, sous leur responsabilité, ceux mentionnés à l’article 20 et aux 1°, 1° bis et 1° ter de l’article 21 du même code à procéder, au sein du périmètre de protection, avec le consentement des personnes faisant l’objet de ces vérifications, à des palpations de sécurité ainsi qu’à l’inspection visuelle et à la fouille des bagages. La palpation de sécurité est effectuée par une personne de même sexe que la personne qui en fait l’objet. Pour la mise en œuvre de ces opérations, ces agents peuvent être assistés par des agents exerçant l’activité mentionnée au 1°de l’article L. 611-1 du présent code, placés sous l’autorité d’un officier de police judiciaire.
« Après accord du maire, l’arrêté peut autoriser les agents de police municipale mentionnés à l’article L. 511-1 à participer à ces opérations sous l’autorité d’un officier de police judiciaire.
« Lorsque, compte tenu de la configuration des lieux, des véhicules sont susceptibles de pénétrer au sein de ce périmètre, l’arrêté peut également en subordonner l’accès à la visite du véhicule, avec le consentement de son propriétaire. Ces opérations ne peuvent être accomplies que par les agents mentionnés aux 2° à 4° de l’article 16 du code de procédure pénale et, sous leur responsabilité, ceux mentionnés à l’article 20 et aux 1°, 1° bis et 1° ter de l’article 21 du même code.
« Les personnes qui refusent de se soumettre, pour accéder ou circuler à l’intérieur de ce périmètre, aux palpations de sécurité, à l’inspection visuelle ou à la fouille de leurs bagages ou à la visite de leur véhicule, s’en voient interdire l’accès ou sont reconduites d’office à l’extérieur du périmètre par les agents mentionnés au sixième alinéa du présent article.
« Le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police ne peut instaurer, par un cumul d’arrêtés d’une durée limitée, un périmètre de protection pérenne dans un lieu déterminé. »
II. – À la première phrase du sixième alinéa de l’article L. 511-1 du code de la sécurité intérieure, après les mots : « à l’article L. 613-3 », sont insérés les mots : « ou à celle des périmètres de protection institués en application de l’article L. 226-1 ».
III. – La sous-section 1 de la section 1 du chapitre III du titre Ier du livre VI du code de la sécurité intérieure est ainsi modifiée :
1° Le premier alinéa de l’article L. 613-1 est complété par les mots : «, y compris dans les périmètres de protection institués en application de l’article L. 226-1 » ;
2° Le second alinéa de l’article L. 613-2 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après les mots : « pour la sécurité publique », sont insérés les mots : « ou lorsqu’un périmètre de protection a été institué en application de l’article L. 226-1 » ;
b) Au début de la deuxième phrase, sont ajoutés les mots : « En l’absence d’arrêté instituant un périmètre de protection, ».
La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l'amendement n° 25 rectifié.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 5 est présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 25 rectifié est présenté par Mmes Benbassa et Bouchoux et M. Desessard.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour défendre l’amendement n° 5.
Principale innovation par rapport à l’état d’urgence, l’article 1er du projet de loi confère aux préfets et, à Paris, au préfet de police, le pouvoir d’instituer, afin d’assurer la sécurité de lieux ou d’événements soumis à un risque d’actes de terrorisme, des périmètres de protection au sein desquels l’accès et la circulation des personnes seraient réglementés.
Quelle idée de société transparaît au travers de cette disposition ? Une société du soupçon qui permet de contrôler, de fouiller sans motif valable. Une société qui favorise la stigmatisation de nos concitoyens musulmans, une société qui, loin de lutter contre les discriminations, les facilite. Notre devoir est de lutter contre les contrôles au faciès et non de les encourager.
De surcroît, dans la période que nous vivons, quels sont les lieux ou les événements qui ne soient soumis à aucun risque d’actes de terreur ?
Soyons sérieux, mes chers collègues, une telle restriction des libertés n’est pas nécessaire pour lutter contre le terrorisme ! Ce qui est efficace, en revanche, c’est une action coordonnée des services de renseignement et des services d’enquête judiciaire auxquels des moyens importants seraient alloués.
Ce qui est efficace, c’est aussi de réfléchir aux causes de cette situation et de faire de la prévention une priorité. Nous avons débattu ici de nombreux textes visant à renforcer l’arsenal juridique en matière de lutte contre le terrorisme. Certains d’entre nous ont alors dénoncé cette inflation législative, souvent fondée sur l’émotion et sur la volonté de donner une réponse à nos concitoyens inquiets.
Le Président de la République change, le Premier ministre change, mais rien ne change ! Et nous voici à nouveau réunis autour d’un texte un peu plus attentatoire aux libertés individuelles que les précédents. Et une fois de plus, nous sommes bien peu nombreux à en débattre aujourd'hui, comme si le législateur lui-même était devenu apathique !
À travers cet amendement de suppression de l’article 1er, nous souhaitons alerter sur cet article, qui confie au préfet la compétence pour instaurer des périmètres de protection permettant d’assurer la sécurité des lieux ou d’événements soumis à un risque d’actes de terrorisme à raison de leur nature ou de l’ampleur de la fréquentation. Au sein de ce périmètre, le préfet peut également règlementer l’accès, la circulation ou le stationnement des personnes, afin de pouvoir organiser le filtrage des accès au périmètre protégé. Ce filtrage permet de procéder à des palpations de sécurité, à l’inspection visuelle, voire à la fouille de bagages.
Nous sommes inquiets des nouvelles dispositions mises en place par le Gouvernement, qui confèrent de fait au préfet des pouvoirs disproportionnés en matière de sécurité publique. Les mesures proposées risquent, en outre, de permettre une application discriminatoire, dès lors que les fouilles ne requièrent aucune base objective.
La définition des agents habilités pour mettre en œuvre ces mesures suscite également notre plus vive inquiétude. En effet, les agents de police municipale, les agents de sécurité privée ou les agents de gardiennage ne disposent pas de la formation nécessaire pour appliquer sur un mode égalitaire ce genre de mesures.
Enfin, nous sommes inquiets de l’usage qui pourrait être fait de ce type de mesures. En effet, même si j’ai entendu ce que vous avez dit voilà quelques instants, monsieur le ministre d’État, dans vos réponses aux orateurs, ces mesures pourraient, une fois inscrites dans la loi, permettre d’étouffer ou de réprimer tout type de contestations politiques sur la voie publique.
Pour toutes ces raisons et bien d’autres que je n’ai pas le temps de développer, nous nous opposons à l’adoption d’une telle disposition et nous proposons par conséquent la suppression de cet article 1er.
La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l'amendement n° 25 rectifié.
J’ai exposé voilà quelques instants l’intérêt que présentait cette mesure. Effectivement nouvelle dans notre droit, elle permet qu’un certain nombre de manifestations, culturelles ou autres, puissent avoir lieu. M. le ministre d’État a parlé du marché de Noël à Strasbourg. Je pourrais également citer l’Euro 2016 ou d’autres manifestations de ce type.
Si je conviens que cette mesure mérite d’être précisée et encadrée, je pense qu’elle doit exister, car c’est grâce à elle que les événements comme ceux que je viens de mentionner pourront continuer à se tenir.
Aussi, l’avis est défavorable sur les amendements identiques n° 5 et 25 rectifié.
Principale innovation par rapport à l’état d’urgence, l’article 1er du projet de loi confère aux préfets et, à Paris, au préfet de police, le pouvoir d’instituer, afin d’assurer la sécurité de lieux ou d’événements soumis à un risque d’actes de terrorisme, des périmètres de protection au sein desquels l’accès et la circulation des personnes seraient réglementés.
Quelle idée de société transparaît au travers de cette disposition ? Une société du soupçon qui permet de contrôler, de fouiller sans motif valable. Une société qui favorise la stigmatisation de nos concitoyens musulmans, une société qui, loin de lutter contre les discriminations, les facilite. Notre devoir est de lutter contre les contrôles au faciès et non de les encourager.
De surcroît, dans la période que nous vivons, quels sont les lieux ou les événements qui ne soient soumis à aucun risque d’actes de terreur ?
Soyons sérieux, mes chers collègues, une telle restriction des libertés n’est pas nécessaire pour lutter contre le terrorisme ! Ce qui est efficace, en revanche, c’est une action coordonnée des services de renseignement et des services d’enquête judiciaire auxquels des moyens importants seraient alloués.
Ce qui est efficace, c’est aussi de réfléchir aux causes de cette situation et de faire de la prévention une priorité. Nous avons débattu ici de nombreux textes visant à renforcer l’arsenal juridique en matière de lutte contre le terrorisme. Certains d’entre nous ont alors dénoncé cette inflation législative, souvent fondée sur l’émotion et sur la volonté de donner une réponse à nos concitoyens inquiets.
Le Président de la République change, le Premier ministre change, mais rien ne change ! Et nous voici à nouveau réunis autour d’un texte un peu plus attentatoire aux libertés individuelles que les précédents. Et une fois de plus, nous sommes bien peu nombreux à en débattre aujourd'hui, comme si le législateur lui-même était devenu apathique !
Avis défavorable, pour les raisons que j’ai évoquées voilà quelques instants. Pour de grands événements, la Biennale du design, par exemple, il peut arriver que nous ayons besoin d’établir ce type de périmètre et de procéder, aux fins de sécuriser les lieux, à un certain nombre de palpations.
Je dirai à l’intention de Mme Benbassa qu’il n’y aura jamais, tant que je serai ministre de l’intérieur, de discriminations et de contrôles au faciès. Ce texte ne prévoit d'ailleurs aucun contrôle d’identité. Il s’agit simplement d’autoriser l’ouverture des sacs et de pouvoir vérifier qu’aucune personne assistant à ce type de grande manifestation n’a en sa possession d’armes diverses et variées.
J’ai exposé voilà quelques instants l’intérêt que présentait cette mesure. Effectivement nouvelle dans notre droit, elle permet qu’un certain nombre de manifestations, culturelles ou autres, puissent avoir lieu. M. le ministre d’État a parlé du marché de Noël à Strasbourg. Je pourrais également citer l’Euro 2016 ou d’autres manifestations de ce type.
Si je conviens que cette mesure mérite d’être précisée et encadrée, je pense qu’elle doit exister, car c’est grâce à elle que les événements comme ceux que je viens de mentionner pourront continuer à se tenir.
Aussi, l’avis est défavorable sur les amendements identiques n° 5 et 25 rectifié.
J’exprimerai mon avis sur l’économie générale du projet de loi, lequel ne va selon moi pas dans le bon sens, lors de l’examen des articles 3 et 4.
Pour ce qui concerne cette mesure précise, je m’interroge.
Il nous faut aborder, en examinant cet article 1er et les autres articles du texte, cette question qui nous occupe depuis le début de la vague d’attentats, et que vous avez rappelée, monsieur le rapporteur : comment protéger, sécuriser, nous défendre et, en même temps, défendre les libertés individuelles et collectives ?
Tel est le défi que nous ont lancé les terroristes. Si nous choisissons la sécurité contre les libertés, ils auront gagné. La lutte contre le terrorisme passe par notre vigilance, pendant cette lutte mais aussi à son issue, à garantir les libertés.
Vous avez évoqué, monsieur le ministre d’État, le marché de Noël de Strasbourg et un certain nombre de manifestations, dont chacun conçoit qu’elles justifient une attitude de vigilance permettant de prévenir d’éventuels actes de terrorisme. Il s’agit d’une situation permanente qui durera encore quelques mois, voire quelques années.
Car si les terroristes sont en train de perdre sur le terrain, comme on nous le dit, cela signifie aussi que nombre d’entre eux vont faire leur retour dans notre pays… La menace est donc présente pour longtemps.
Vous n’avez pas évoqué, en revanche, un aspect qui me tient particulièrement à cœur : les manifestations revendicatives et celles issues du mouvement social.
Avis défavorable, pour les raisons que j’ai évoquées voilà quelques instants. Pour de grands événements, la Biennale du design, par exemple, il peut arriver que nous ayons besoin d’établir ce type de périmètre et de procéder, aux fins de sécuriser les lieux, à un certain nombre de palpations.
Je dirai à l’intention de Mme Benbassa qu’il n’y aura jamais, tant que je serai ministre de l’intérieur, de discriminations et de contrôles au faciès. Ce texte ne prévoit d'ailleurs aucun contrôle d’identité. Il s’agit simplement d’autoriser l’ouverture des sacs et de pouvoir vérifier qu’aucune personne assistant à ce type de grande manifestation n’a en sa possession d’armes diverses et variées.
S’agissant du marché de Noël de Strasbourg non plus ! Je ne parlais pas de la nature de la manifestation.
Dès lors qu’il est possible, lors d’une grande manifestation se déroulant à Paris – place de la République ou place de la Bastille, par exemple –, de contrôler l’accès, fouiller, établir un périmètre, on pourrait invoquer le danger terroriste. Il est d’ailleurs arrivé qu’on le fasse ! C’est la raison pour laquelle le Défenseur des droits, qui n’est pourtant pas un gauchiste
J’exprimerai mon avis sur l’économie générale du projet de loi, lequel ne va selon moi pas dans le bon sens, lors de l’examen des articles 3 et 4.
Pour ce qui concerne cette mesure précise, je m’interroge.
Il nous faut aborder, en examinant cet article 1er et les autres articles du texte, cette question qui nous occupe depuis le début de la vague d’attentats, et que vous avez rappelée, monsieur le rapporteur : comment protéger, sécuriser, nous défendre et, en même temps, défendre les libertés individuelles et collectives ?
Tel est le défi que nous ont lancé les terroristes. Si nous choisissons la sécurité contre les libertés, ils auront gagné. La lutte contre le terrorisme passe par notre vigilance, pendant cette lutte mais aussi à son issue, à garantir les libertés.
Vous avez évoqué, monsieur le ministre d’État, le marché de Noël de Strasbourg et un certain nombre de manifestations, dont chacun conçoit qu’elles justifient une attitude de vigilance permettant de prévenir d’éventuels actes de terrorisme. Il s’agit d’une situation permanente qui durera encore quelques mois, voire quelques années.
Car si les terroristes sont en train de perdre sur le terrain, comme on nous le dit, cela signifie aussi que nombre d’entre eux vont faire leur retour dans notre pays… La menace est donc présente pour longtemps.
Vous n’avez pas évoqué, en revanche, un aspect qui me tient particulièrement à cœur : les manifestations revendicatives et celles issues du mouvement social.
Mme Éliane Assassi opine.
Monsieur le ministre d’État, comment ce dispositif sera-t-il utilisé lors des manifestations, lesquelles sont importantes et nombreuses, qui se dérouleront dans notre pays, et notamment dans la capitale ? Le contrôle systématique étant de nature à dissuader de participer à ces manifestations, cela pose un problème touchant aux libertés collectives, qu’il faut à chaque fois mettre en face du danger réel.
Lorsque l’on participe à une manifestation, on sait aujourd’hui qu’il y a un danger. Comment trancher entre les deux branches du problème ? J’aimerais entendre les explications de M. le ministre d’État.
S’agissant du marché de Noël de Strasbourg non plus ! Je ne parlais pas de la nature de la manifestation.
Dès lors qu’il est possible, lors d’une grande manifestation se déroulant à Paris – place de la République ou place de la Bastille, par exemple –, de contrôler l’accès, fouiller, établir un périmètre, on pourrait invoquer le danger terroriste. Il est d’ailleurs arrivé qu’on le fasse ! C’est la raison pour laquelle le Défenseur des droits, qui n’est pourtant pas un gauchiste
Mme Éliane Assassi opine.
J’exprimerai les mêmes inquiétudes que David Assouline.
Cette mesure relève typiquement – et c’est le problème avec ce projet de loi – de l’état d’urgence, c’est-à-dire d’une situation exceptionnelle qui ne saurait devenir une norme habituelle. La décision qui est prise là est lourde, et la définition retenue est vague.
Prendre des mesures exceptionnelles lorsque la situation est à l’état d’urgence, c’est logique. En faire des mesures habituelles me semble, en revanche, très discutable.
Je compléterai la question de mon collègue Assouline en demandant à M. le ministre d’État ce qu’il en est des recours. Comment peut-on remettre en cause le jugement du préfet lorsque celui-ci décide qu’il existe un risque terroriste ?
Si les organisateurs de manifestations eux-mêmes contestent le classement en situation de risque terroriste, nous allons connaître de nombreuses situations conflictuelles.
Monsieur le ministre d’État, comment ce dispositif sera-t-il utilisé lors des manifestations, lesquelles sont importantes et nombreuses, qui se dérouleront dans notre pays, et notamment dans la capitale ? Le contrôle systématique étant de nature à dissuader de participer à ces manifestations, cela pose un problème touchant aux libertés collectives, qu’il faut à chaque fois mettre en face du danger réel.
Lorsque l’on participe à une manifestation, on sait aujourd’hui qu’il y a un danger. Comment trancher entre les deux branches du problème ? J’aimerais entendre les explications de M. le ministre d’État.
Lorsque nous examinons un texte comme celui-ci, nous devons essayer de nous projeter dans l’avenir.
Vos propos m’inquiètent, monsieur le ministre d’État. Vous avez dit qu’il ne serait pas possible d’instaurer des périmètres de protection visant à empêcher des manifestations tant que vous seriez ministre de l’intérieur.
J’exprimerai les mêmes inquiétudes que David Assouline.
Cette mesure relève typiquement – et c’est le problème avec ce projet de loi – de l’état d’urgence, c’est-à-dire d’une situation exceptionnelle qui ne saurait devenir une norme habituelle. La décision qui est prise là est lourde, et la définition retenue est vague.
Prendre des mesures exceptionnelles lorsque la situation est à l’état d’urgence, c’est logique. En faire des mesures habituelles me semble, en revanche, très discutable.
Je compléterai la question de mon collègue Assouline en demandant à M. le ministre d’État ce qu’il en est des recours. Comment peut-on remettre en cause le jugement du préfet lorsque celui-ci décide qu’il existe un risque terroriste ?
Si les organisateurs de manifestations eux-mêmes contestent le classement en situation de risque terroriste, nous allons connaître de nombreuses situations conflictuelles.
Mme Éliane Assassi. Je vous laisse la paternité de vos propos, mon cher collègue, mais, de toute évidence, M. Collomb ne sera pas ministre de l’intérieur à vie !
Lorsque nous examinons un texte comme celui-ci, nous devons essayer de nous projeter dans l’avenir.
Vos propos m’inquiètent, monsieur le ministre d’État. Vous avez dit qu’il ne serait pas possible d’instaurer des périmètres de protection visant à empêcher des manifestations tant que vous seriez ministre de l’intérieur.
Sourires.
Mme Éliane Assassi. Je vous laisse la paternité de vos propos, mon cher collègue, mais, de toute évidence, M. Collomb ne sera pas ministre de l’intérieur à vie !
Sourires.
… – nous ferons tout, en ce qui nous concerne, pour qu’il n’en soit pas ainsi ! Si cette mesure entrait dans notre droit commun, nous pourrions être confrontés à des interdictions majeures qui toucheraient le cœur même de notre démocratie.
C’est l’une de raisons pour lesquelles nous souhaitons la suppression de l’article 1er.
Si un régime d’extrême droite parvenait au pouvoir, madame Assassi, je pense qu’il prendrait d’autres lois que celle-ci…
… – nous ferons tout, en ce qui nous concerne, pour qu’il n’en soit pas ainsi ! Si cette mesure entrait dans notre droit commun, nous pourrions être confrontés à des interdictions majeures qui toucheraient le cœur même de notre démocratie.
C’est l’une de raisons pour lesquelles nous souhaitons la suppression de l’article 1er.
Et ce n’est, hélas, pas le présent texte qui serait appliqué.
Monsieur Assouline, je rappelle que nous parlons ici d’événements culturels et sportifs, et non des défilés, cortèges ou rassemblements de personnes sur la voie publique, lesquels relèvent des articles L. 211–1 et L. 214 du code de la sécurité intérieure.
Nous l’avons affirmé et réaffirmé, ces mesures ne seront pas utilisées pour maintenir l’ordre public.
Si un régime d’extrême droite parvenait au pouvoir, madame Assassi, je pense qu’il prendrait d’autres lois que celle-ci…
Les amendements ne sont pas adoptés.
Et ce n’est, hélas, pas le présent texte qui serait appliqué.
Monsieur Assouline, je rappelle que nous parlons ici d’événements culturels et sportifs, et non des défilés, cortèges ou rassemblements de personnes sur la voie publique, lesquels relèvent des articles L. 211–1 et L. 214 du code de la sécurité intérieure.
Nous l’avons affirmé et réaffirmé, ces mesures ne seront pas utilisées pour maintenir l’ordre public.
L’amendement n° 53 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Supprimer les mots :
d’un lieu ou
La parole est à M. Guillaume Arnell.
Nous abordons l’examen de cet article dans l’état d’esprit suivant : nous sommes favorables à la création d’un outil juridique nouveau destiné à former un périmètre de sécurité pour protéger les lieux accueillant ponctuellement des événements. Toutefois, nous sommes vigilants à ce que ce nouveau dispositif ne constitue pas une charge supplémentaire pour les communes. C’est le risque si la police municipale devient – certes, avec l’accord des maires – la clef de voûte de ces périmètres de sécurité.
Nous souhaitons également que ces nouveaux périmètres ne constituent pas un obstacle à la vie culturelle normale de nos territoires et ne s’installent pas dans le temps, selon les lieux.
Cela étant clarifié, j’en viens à l’amendement n° 53 rectifié.
Nous considérons que l’article pourrait se passer de la mention de lieux à protéger, en ne gardant que celle d’événements. En effet, s’il s’agit de se prémunir du risque temporaire lié à l’afflux de population ou d’un risque anormal pesant sur des lieux liés à un événement sensible, la mention d’événements suffit : elle permettra la protection de ces lieux aux seuls moments où ces événements se dérouleront.
Si, en revanche, des lieux sont, par essence, soumis à un risque particulier pour ce qu’ils représentent, il nous semble nécessaire de prévoir des dispositifs pérennes pour les protéger, comme cela est déjà le cas pour les centrales nucléaires, par exemple.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L’amendement n° 53 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Supprimer les mots :
d’un lieu ou
La parole est à M. Guillaume Arnell.
Nous abordons l’examen de cet article dans l’état d’esprit suivant : nous sommes favorables à la création d’un outil juridique nouveau destiné à former un périmètre de sécurité pour protéger les lieux accueillant ponctuellement des événements. Toutefois, nous sommes vigilants à ce que ce nouveau dispositif ne constitue pas une charge supplémentaire pour les communes. C’est le risque si la police municipale devient – certes, avec l’accord des maires – la clef de voûte de ces périmètres de sécurité.
Nous souhaitons également que ces nouveaux périmètres ne constituent pas un obstacle à la vie culturelle normale de nos territoires et ne s’installent pas dans le temps, selon les lieux.
Cela étant clarifié, j’en viens à l’amendement n° 53 rectifié.
Nous considérons que l’article pourrait se passer de la mention de lieux à protéger, en ne gardant que celle d’événements. En effet, s’il s’agit de se prémunir du risque temporaire lié à l’afflux de population ou d’un risque anormal pesant sur des lieux liés à un événement sensible, la mention d’événements suffit : elle permettra la protection de ces lieux aux seuls moments où ces événements se dérouleront.
Si, en revanche, des lieux sont, par essence, soumis à un risque particulier pour ce qu’ils représentent, il nous semble nécessaire de prévoir des dispositifs pérennes pour les protéger, comme cela est déjà le cas pour les centrales nucléaires, par exemple.
Ces mesures doivent pouvoir être prises dans un certain nombre de lieux, comme la tour Eiffel, qu’a citée M. le rapporteur.
L’avis est donc défavorable.
La réponse de M. le ministre d’État à ma question me pose problème. En effet, le texte ne parle pas de mesures visant des manifestations culturelles ou sportives !
Je cite le projet de loi : « Afin d’assurer la sécurité d’un lieu ou d’un événement soumis à un risque d’actes de terrorisme à raison de sa nature ou de l’ampleur de sa fréquentation, le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police, peut instituer par arrêté motivé un périmètre de protection au sein duquel l’accès et la circulation des personnes sont réglementés. »
On peut toujours discuter d’autre chose, à moins que vous ne vouliez proposer un amendement visant les manifestations sportives ou culturelles… Mais ce qui est en cause, en l’occurrence, c’est tout événement ou toute manifestation comportant un risque terroriste. Je rappelle que tout grand rassemblement se déroulant à Paris, qu’il s’agisse d’une manifestation revendicative, sociale, ou d’un autre événement, comporte un tel risque.
Peut-être vous apprêtez-vous à déposer un amendement ? Mais ne me dites pas que le texte circonscrit la mesure aux manifestations culturelles et sportives. Ce n’est pas le cas ! J’attends donc encore une réponse.
Ces mesures doivent pouvoir être prises dans un certain nombre de lieux, comme la tour Eiffel, qu’a citée M. le rapporteur.
L’avis est donc défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
La réponse de M. le ministre d’État à ma question me pose problème. En effet, le texte ne parle pas de mesures visant des manifestations culturelles ou sportives !
Je cite le projet de loi : « Afin d’assurer la sécurité d’un lieu ou d’un événement soumis à un risque d’actes de terrorisme à raison de sa nature ou de l’ampleur de sa fréquentation, le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police, peut instituer par arrêté motivé un périmètre de protection au sein duquel l’accès et la circulation des personnes sont réglementés. »
On peut toujours discuter d’autre chose, à moins que vous ne vouliez proposer un amendement visant les manifestations sportives ou culturelles… Mais ce qui est en cause, en l’occurrence, c’est tout événement ou toute manifestation comportant un risque terroriste. Je rappelle que tout grand rassemblement se déroulant à Paris, qu’il s’agisse d’une manifestation revendicative, sociale, ou d’un autre événement, comporte un tel risque.
Peut-être vous apprêtez-vous à déposer un amendement ? Mais ne me dites pas que le texte circonscrit la mesure aux manifestations culturelles et sportives. Ce n’est pas le cas ! J’attends donc encore une réponse.
L’amendement n° 67, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 4
1° Supprimer les mots :
actuel et sérieux
2° Remplacer la deuxième occurrence du mot :
ou
par le mot :
et
II. - Alinéa 6
1° Troisième phrase
a) Après le mot :
périmètre,
insérer les mots :
en les adaptant aux impératifs de leur vie privée, professionnelle et familiale,
b) Remplacer la seconde occurrence des mots :
ainsi que
par le mot :
et
2° Supprimer la dernière phrase.
III. - Alinéa 11
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police ne peut renouveler un arrêté instituant un périmètre de protection que si les conditions prévues au premier alinéa du présent article continuent d’être réunies. »
La parole est à M. le ministre d'État.
Nous souhaitons revenir à la rédaction initiale proposée par le Gouvernement.
En premier lieu, la commission a introduit, pour qualifier le risque terroriste, les mots « actuel et sérieux ». Je l’ai dit lors de mon intervention liminaire, nous pensons que le risque est aujourd’hui, malheureusement, toujours actuel et sérieux.
En second lieu, le Gouvernement est, bien entendu, pleinement conscient de la nécessité d’adapter les dispositions d’accès et de circulation dans les périmètres concernés aux impératifs de la vie privée, familiale ou professionnelle. Pourtant, il lui paraît tout aussi indispensable de préserver la possibilité de soumettre aux vérifications prévues à cet article – inspection des bagages et visite des véhicules – les personnes travaillant dans le périmètre ou devant s’y rendre pour un motif familial ; en effet, il est toujours possible de prendre un faux domicile pour pouvoir commettre un attentat.
L'amendement n'est pas adopté.
Le sous-amendement n° 83, présenté par M. M. Mercier, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Amendement n° 67, dernier alinéa
Rédiger ainsi cet alinéa :
« La durée d'un arrêté préfectoral instaurant un périmètre de protection en application du présent article ne peut excéder un mois. Le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police ne peut renouveler l'arrêté au-delà de ce délai que si les conditions prévues au premier alinéa continuent d'être réunies. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ce sous-amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 67.
L’amendement n° 67, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 4
1° Supprimer les mots :
actuel et sérieux
2° Remplacer la deuxième occurrence du mot :
ou
par le mot :
et
II. - Alinéa 6
1° Troisième phrase
a) Après le mot :
périmètre,
insérer les mots :
en les adaptant aux impératifs de leur vie privée, professionnelle et familiale,
b) Remplacer la seconde occurrence des mots :
ainsi que
par le mot :
et
2° Supprimer la dernière phrase.
III. - Alinéa 11
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police ne peut renouveler un arrêté instituant un périmètre de protection que si les conditions prévues au premier alinéa du présent article continuent d’être réunies. »
La parole est à M. le ministre d'État.
On peut se rendre aux arguments du Gouvernement s’agissant des termes « actuel et sérieux ».
Après en avoir délibéré ce matin, la commission des lois a donné son accord pour y renoncer, sous réserve que les deux conditions justifiant l’instauration d’un périmètre de protection, la nature et l’ampleur de la fréquentation, soient cumulatives, et non alternatives.
Par ailleurs, s’il est nécessaire que la durée de certaines mesures soit plus longue, la commission ne peut accepter que le texte ne prévoie pas de délai maximal.
C’est pourquoi nous proposons un sous-amendement visant à préciser que la durée maximale d’un périmètre serait fixée à un mois, lequel délai serait renouvelable. Le préfet pourrait en effet constater que les conditions ayant conduit à prendre l’arrêté qui crée le périmètre de protection sont toujours réunies. Ce renouvellement se ferait donc de mois en mois.
Sous réserve de l’adoption du sous-amendement de la commission, l’avis sur l’amendement n° 67 est favorable.
Nous souhaitons revenir à la rédaction initiale proposée par le Gouvernement.
En premier lieu, la commission a introduit, pour qualifier le risque terroriste, les mots « actuel et sérieux ». Je l’ai dit lors de mon intervention liminaire, nous pensons que le risque est aujourd’hui, malheureusement, toujours actuel et sérieux.
En second lieu, le Gouvernement est, bien entendu, pleinement conscient de la nécessité d’adapter les dispositions d’accès et de circulation dans les périmètres concernés aux impératifs de la vie privée, familiale ou professionnelle. Pourtant, il lui paraît tout aussi indispensable de préserver la possibilité de soumettre aux vérifications prévues à cet article – inspection des bagages et visite des véhicules – les personnes travaillant dans le périmètre ou devant s’y rendre pour un motif familial ; en effet, il est toujours possible de prendre un faux domicile pour pouvoir commettre un attentat.
Le sous-amendement n° 83, présenté par M. M. Mercier, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Amendement n° 67, dernier alinéa
Rédiger ainsi cet alinéa :
« La durée d'un arrêté préfectoral instaurant un périmètre de protection en application du présent article ne peut excéder un mois. Le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police ne peut renouveler l'arrêté au-delà de ce délai que si les conditions prévues au premier alinéa continuent d'être réunies. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ce sous-amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 67.
L’avis est favorable.
Je souhaite revenir sur le caractère d’abord immédiat. Il faudra une expertise juridique et technique pour déterminer les conséquences que pourrait entraîner l’usage du mot « immédiat ».
On peut se rendre aux arguments du Gouvernement s’agissant des termes « actuel et sérieux ».
Après en avoir délibéré ce matin, la commission des lois a donné son accord pour y renoncer, sous réserve que les deux conditions justifiant l’instauration d’un périmètre de protection, la nature et l’ampleur de la fréquentation, soient cumulatives, et non alternatives.
Par ailleurs, s’il est nécessaire que la durée de certaines mesures soit plus longue, la commission ne peut accepter que le texte ne prévoie pas de délai maximal.
C’est pourquoi nous proposons un sous-amendement visant à préciser que la durée maximale d’un périmètre serait fixée à un mois, lequel délai serait renouvelable. Le préfet pourrait en effet constater que les conditions ayant conduit à prendre l’arrêté qui crée le périmètre de protection sont toujours réunies. Ce renouvellement se ferait donc de mois en mois.
Sous réserve de l’adoption du sous-amendement de la commission, l’avis sur l’amendement n° 67 est favorable.
Le sous-amendement est adopté.
L’avis est favorable.
Je souhaite revenir sur le caractère d’abord immédiat. Il faudra une expertise juridique et technique pour déterminer les conséquences que pourrait entraîner l’usage du mot « immédiat ».
Le sous-amendement est adopté.
L’amendement n° 54 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Barbier, Bertrand, Esnol et Hue et Mmes Jouve, Laborde et Malherbe, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
, au plus tard quarante-huit heures avant son application, sauf éléments nouveaux et circonstanciés
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
Comme on l’a souligné précédemment, l’objectif est de maintenir une vie culturelle normale dans tous les territoires, en s’assurant que les événements se déroulent dans les meilleures conditions possible de sécurité.
En l’occurrence, il s’agit de clarifier la modalité de définition des mesures de protection déployées dans le périmètre, et notamment de mieux associer les organisateurs d’événements à leur définition.
L’amendement vise en particulier à ce que les organisateurs de l’événement à protéger soient informés en amont du dispositif mis en œuvre, afin qu’ils puissent éventuellement adapter leur programmation, tout en laissant la marge de manœuvre nécessaire au préfet pour modifier le dispositif, s’il est informé d’éléments nouveaux et circonstanciés susceptibles de représenter un risque terroriste.
L'amendement est adopté.
L’amendement n° 54 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Barbier, Bertrand, Esnol et Hue et Mmes Jouve, Laborde et Malherbe, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
, au plus tard quarante-huit heures avant son application, sauf éléments nouveaux et circonstanciés
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
Il est nécessaire, bien entendu, que l’autorité administrative dialogue avec les organisateurs de manifestations, et que l’arrêté préfectoral instaurant un périmètre de protection soit le résultat de ces échanges.
On ne peut pas instaurer un périmètre de protection à l’occasion d’un match de football sans en parler aux organisateurs du match !
L’information ayant eu lieu, l’amendement semble surabondant. Aussi, la commission en demande le retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Comme on l’a souligné précédemment, l’objectif est de maintenir une vie culturelle normale dans tous les territoires, en s’assurant que les événements se déroulent dans les meilleures conditions possible de sécurité.
En l’occurrence, il s’agit de clarifier la modalité de définition des mesures de protection déployées dans le périmètre, et notamment de mieux associer les organisateurs d’événements à leur définition.
L’amendement vise en particulier à ce que les organisateurs de l’événement à protéger soient informés en amont du dispositif mis en œuvre, afin qu’ils puissent éventuellement adapter leur programmation, tout en laissant la marge de manœuvre nécessaire au préfet pour modifier le dispositif, s’il est informé d’éléments nouveaux et circonstanciés susceptibles de représenter un risque terroriste.
Même avis que la commission, pour les mêmes raisons.
Il est nécessaire, bien entendu, que l’autorité administrative dialogue avec les organisateurs de manifestations, et que l’arrêté préfectoral instaurant un périmètre de protection soit le résultat de ces échanges.
On ne peut pas instaurer un périmètre de protection à l’occasion d’un match de football sans en parler aux organisateurs du match !
L’information ayant eu lieu, l’amendement semble surabondant. Aussi, la commission en demande le retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Même avis que la commission, pour les mêmes raisons.
L’amendement n° 54 rectifié est retiré.
L’amendement n° 37 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
et au maire de la commune concernée
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
L’article 1er du projet de loi prévoit que les maires seront informés de la mise en œuvre du périmètre de sécurité au moment où le préfet sollicitera leur contribution, via la demande d’appui de la police municipale.
J’en profite pour faire une petite digression. L’association de la police municipale à ces nouveaux dispositifs relève évidemment du bon sens. Si cette force existe, il est normal qu’elle contribue au périmètre de sécurité.
Cette disposition suscite cependant des inquiétudes. La mise en œuvre du périmètre de sécurité risque en effet, selon les arbitrages du préfet, de reposer essentiellement sur la mobilisation de la police municipale. En d’autres termes, nous redoutons que cela ne constitue un transfert de charge caché de l’État vers les collectivités territoriales. Vaste débat, monsieur Mercier ! Je vous vois très étonné.
Nous serons particulièrement vigilants à ce que l’État tienne ses promesses et à ce que le fonds dédié à la protection des événements culturels, effectif jusqu’en 2018, ne soit pas remis en cause.
Pour en revenir à l’amendement, il paraît important de mentionner dans le texte que le maire sera toujours informé de l’instauration du périmètre, au même titre que le procureur de la République, y compris dans les communes ne disposant pas de police nationale ou lorsque le préfet choisira de ne pas la mobiliser.
L’amendement n° 54 rectifié est retiré.
L’amendement n° 37 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
et au maire de la commune concernée
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
Il semble de bon sens que le maire soit informé de l’arrêté préfectoral instaurant un périmètre de sécurité sur sa commune.
S’agissant de l’utilisation de la police municipale, je le rappelle à M. Guérini, celle-ci est soumise à l’autorisation du maire.
L’article 1er du projet de loi prévoit que les maires seront informés de la mise en œuvre du périmètre de sécurité au moment où le préfet sollicitera leur contribution, via la demande d’appui de la police municipale.
J’en profite pour faire une petite digression. L’association de la police municipale à ces nouveaux dispositifs relève évidemment du bon sens. Si cette force existe, il est normal qu’elle contribue au périmètre de sécurité.
Cette disposition suscite cependant des inquiétudes. La mise en œuvre du périmètre de sécurité risque en effet, selon les arbitrages du préfet, de reposer essentiellement sur la mobilisation de la police municipale. En d’autres termes, nous redoutons que cela ne constitue un transfert de charge caché de l’État vers les collectivités territoriales. Vaste débat, monsieur Mercier ! Je vous vois très étonné.
Nous serons particulièrement vigilants à ce que l’État tienne ses promesses et à ce que le fonds dédié à la protection des événements culturels, effectif jusqu’en 2018, ne soit pas remis en cause.
Pour en revenir à l’amendement, il paraît important de mentionner dans le texte que le maire sera toujours informé de l’instauration du périmètre, au même titre que le procureur de la République, y compris dans les communes ne disposant pas de police nationale ou lorsque le préfet choisira de ne pas la mobiliser.
Si le maire a accepté d’y recourir, il ne saurait donc y avoir de transfert de charge.
Il semble de bon sens que le maire soit informé de l’arrêté préfectoral instaurant un périmètre de sécurité sur sa commune.
S’agissant de l’utilisation de la police municipale, je le rappelle à M. Guérini, celle-ci est soumise à l’autorisation du maire.
Si le maire a accepté d’y recourir, il ne saurait donc y avoir de transfert de charge.
Je ne pense pas que le préfet puisse omettre d’informer le maire de la commune de l’instauration d’un périmètre de sécurité.
S’agissant de l’organisation des grands événements, ce sont d’ailleurs plutôt les maires qui sont demandeurs de ce type de dispositif et qui appellent le préfet à cette fin. Ils font aussi appel, en général, à la police nationale et à la gendarmerie. Ainsi, je le rappelle, lors des 14 et 15 juillet derniers, ce sont 86 000 policiers et gendarmes qui ont été mobilisés.
Je demande le retrait de l’amendement.
L’amendement n° 37 rectifié est retiré.
L’amendement n° 35 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Barbier, Castelli, Collin et Collombat, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Toute personne y ayant un intérêt peut saisir le tribunal administratif sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative afin d’obtenir la suspension de l’exécution de tout ou partie des mesures manifestement disproportionnées de l’arrêté. L’urgence est alors présumée.
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
Je ne pense pas que le préfet puisse omettre d’informer le maire de la commune de l’instauration d’un périmètre de sécurité.
S’agissant de l’organisation des grands événements, ce sont d’ailleurs plutôt les maires qui sont demandeurs de ce type de dispositif et qui appellent le préfet à cette fin. Ils font aussi appel, en général, à la police nationale et à la gendarmerie. Ainsi, je le rappelle, lors des 14 et 15 juillet derniers, ce sont 86 000 policiers et gendarmes qui ont été mobilisés.
Je demande le retrait de l’amendement.
Cet amendement vise à faciliter le recours au juge administratif, par la voie du référé-liberté, des personnes ayant intérêt à agir contre l’instauration d’un périmètre de sécurité, en prévoyant que l’urgence est présumée.
L’urgence n’aura pas à être démontrée par le requérant, qui pourra se concentrer sur la démonstration des autres moyens de sa requête.
L’objectif de cet amendement est donc de faciliter l’accès au juge administratif en cas d’instauration d’un périmètre de sécurité.
L’amendement n° 37 rectifié est retiré.
L’amendement n° 35 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Barbier, Castelli, Collin et Collombat, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Toute personne y ayant un intérêt peut saisir le tribunal administratif sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative afin d’obtenir la suspension de l’exécution de tout ou partie des mesures manifestement disproportionnées de l’arrêté. L’urgence est alors présumée.
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
Cet amendement a pour objet de présumer l’urgence dans le cadre d’un référé-liberté.
Je pense, quant à moi, qu’il appartient au demandeur de démontrer qu’il y a urgence, c’est-à-dire que la mesure prise par le préfet va bouleverser ses conditions de vie et d’exercice, et mettre en cause, dans son cas particulier, une liberté fondamentale.
L’avis est donc défavorable.
Cet amendement vise à faciliter le recours au juge administratif, par la voie du référé-liberté, des personnes ayant intérêt à agir contre l’instauration d’un périmètre de sécurité, en prévoyant que l’urgence est présumée.
L’urgence n’aura pas à être démontrée par le requérant, qui pourra se concentrer sur la démonstration des autres moyens de sa requête.
L’objectif de cet amendement est donc de faciliter l’accès au juge administratif en cas d’instauration d’un périmètre de sécurité.
Je partage l’avis de M. le rapporteur. L’appréciation de l’urgence relève du juge, au regard des circonstances particulières de chaque situation. Il n’est pas nécessaire de contraindre cette appréciation par la loi.
Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Cet amendement a pour objet de présumer l’urgence dans le cadre d’un référé-liberté.
Je pense, quant à moi, qu’il appartient au demandeur de démontrer qu’il y a urgence, c’est-à-dire que la mesure prise par le préfet va bouleverser ses conditions de vie et d’exercice, et mettre en cause, dans son cas particulier, une liberté fondamentale.
L’avis est donc défavorable.
Je partage l’avis de M. le rapporteur. L’appréciation de l’urgence relève du juge, au regard des circonstances particulières de chaque situation. Il n’est pas nécessaire de contraindre cette appréciation par la loi.
Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Il faut ajouter une nuance aux propos et de M. le rapporteur et de M. le ministre d’État.
Dans le cas où une liberté est en cause, c’est-à-dire si le juge considère qu’il est saisi de la contestation d’une mesure administrative mettant en cause une liberté, et que la procédure du référé-liberté doit donc s’appliquer, alors l’urgence est présumée. Le juge peut par conséquent se prononcer dans un délai de quarante-huit heures.
Selon Jean-Noël Guérini, dès l’instant qu’une décision instaure un périmètre de sécurité, la liberté individuelle d’une personne est forcément mise en jeu.
Je pense, quant à moi, que c’est au requérant de démontrer une telle atteinte à la liberté individuelle. Il ne faut donc pas obliger le juge à considérer dans tous les cas que la liberté individuelle est en cause.
Des événements de ce genre, rassemblant jusqu’à 100 000 personnes, sont organisés dans mon département. Il peut effectivement arriver, à cette occasion, que le préfet prenne des mesures excessives. L’amendement est donc justifié.
Ces mesures sont d’ailleurs plutôt prises par les directeurs de cabinet des préfets, qui ont peur que le ministre ne fasse « sauter » leur préfet en cas de problème. Cela s’est toujours passé ainsi !
Il faut ajouter une nuance aux propos et de M. le rapporteur et de M. le ministre d’État.
Dans le cas où une liberté est en cause, c’est-à-dire si le juge considère qu’il est saisi de la contestation d’une mesure administrative mettant en cause une liberté, et que la procédure du référé-liberté doit donc s’appliquer, alors l’urgence est présumée. Le juge peut par conséquent se prononcer dans un délai de quarante-huit heures.
Selon Jean-Noël Guérini, dès l’instant qu’une décision instaure un périmètre de sécurité, la liberté individuelle d’une personne est forcément mise en jeu.
Je pense, quant à moi, que c’est au requérant de démontrer une telle atteinte à la liberté individuelle. Il ne faut donc pas obliger le juge à considérer dans tous les cas que la liberté individuelle est en cause.
L’amendement n° 35 rectifié est retiré.
L’amendement n° 19 rectifié, présenté par MM. Grand et Cambon, Mme Garriaud-Maylam, MM. Calvet, Huré et Vasselle, Mmes Imbert et Deromedi, MM. Chasseing, P. Leroy, G. Bailly, Bonhomme et J.P. Fournier, Mmes Duchêne et de Rose, MM. Laménie et Dassault, Mme Micouleau, MM. Joyandet, Lefèvre et Cuypers, Mme Giudicelli et MM. Revet, Charon et Chaize, est ainsi libellé :
Alinéa 9, seconde phrase
Remplacer les mots :
1° bis et 1° ter
par les mots :
1° bis, 1° ter et, après accord du maire, 2°
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
Des événements de ce genre, rassemblant jusqu’à 100 000 personnes, sont organisés dans mon département. Il peut effectivement arriver, à cette occasion, que le préfet prenne des mesures excessives. L’amendement est donc justifié.
Ces mesures sont d’ailleurs plutôt prises par les directeurs de cabinet des préfets, qui ont peur que le ministre ne fasse « sauter » leur préfet en cas de problème. Cela s’est toujours passé ainsi !
Les policiers municipaux sont considérés comme la troisième force de sécurité de notre pays. Si l’on peut se féliciter du fait que ce projet de loi sur la sécurité intérieure n’oublie pas la police municipale, il convient d’aller un peu plus loin.
L’article 1er prévoit que le filtrage des accès au périmètre de protection – palpations de sécurité, inspection visuelle, fouille des bagages – est assuré par les policiers et les gendarmes, c’est-à-dire des officiers et agents de police judiciaire. Après accord du maire, ils peuvent être assistés par des agents de police municipale. Néanmoins, ces derniers ne peuvent les assister pour la fouille des véhicules susceptibles de pénétrer au sein du périmètre de protection.
Il est donc proposé d’autoriser les policiers municipaux à effectuer ces fouilles après accord du maire, sous l’autorité de l’officier de police judiciaire compétent et, bien sûr, avec le consentement du propriétaire du véhicule.
Je veux profiter de cette occasion, monsieur le ministre d’État, pour rappeler, au moment où l’on demande à nos collectivités de faire un effort financier extraordinaire, le poids budgétaire des polices municipales. En tant que maire, j’ai aussi pu mesurer, au fil du temps, l’importance du travail en commun entre les polices municipales et les forces de l’ordre de l’État.
Je rappelle que nos collectivités, nos communes, mettent aussi à la disposition de l’État tous les moyens modernes de vidéoprotection. Dans les calculs que nous allons faire ensemble, dans les prochains mois, en vue de faire des économies, il nous faudra réfléchir sur le poids budgétaire d’une mission qui n’est pas la nôtre, mais que nous assumons tout de même pour compléter efficacement celle de l’État.
L’amendement n° 35 rectifié est retiré.
L’amendement n° 19 rectifié, présenté par MM. Grand et Cambon, Mme Garriaud-Maylam, MM. Calvet, Huré et Vasselle, Mmes Imbert et Deromedi, MM. Chasseing, P. Leroy, G. Bailly, Bonhomme et J.P. Fournier, Mmes Duchêne et de Rose, MM. Laménie et Dassault, Mme Micouleau, MM. Joyandet, Lefèvre et Cuypers, Mme Giudicelli et MM. Revet, Charon et Chaize, est ainsi libellé :
Alinéa 9, seconde phrase
Remplacer les mots :
1° bis et 1° ter
par les mots :
1° bis, 1° ter et, après accord du maire, 2°
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
Cet amendement vise à étendre aux agents de police municipale la possibilité de procéder à des visites de véhicules au sein des périmètres de protection instaurés par arrêté préfectoral.
Dans notre droit, le véhicule est une sorte de démembrement du domicile. Il y a d’ailleurs une jurisprudence constante en ce sens. Accorder aux agents de police municipale le droit de fouiller un véhicule, avec le consentement du propriétaire, sinon il faut entrer dans une procédure judiciaire, me semble donc attentatoire aux libertés individuelles.
Réserver ce droit aux agents de police et de gendarmerie formés à cet effet me semble une bonne mesure d’équilibre, qui permet de respecter les libertés individuelles.
L’avis est par conséquent défavorable.
Les policiers municipaux sont considérés comme la troisième force de sécurité de notre pays. Si l’on peut se féliciter du fait que ce projet de loi sur la sécurité intérieure n’oublie pas la police municipale, il convient d’aller un peu plus loin.
L’article 1er prévoit que le filtrage des accès au périmètre de protection – palpations de sécurité, inspection visuelle, fouille des bagages – est assuré par les policiers et les gendarmes, c’est-à-dire des officiers et agents de police judiciaire. Après accord du maire, ils peuvent être assistés par des agents de police municipale. Néanmoins, ces derniers ne peuvent les assister pour la fouille des véhicules susceptibles de pénétrer au sein du périmètre de protection.
Il est donc proposé d’autoriser les policiers municipaux à effectuer ces fouilles après accord du maire, sous l’autorité de l’officier de police judiciaire compétent et, bien sûr, avec le consentement du propriétaire du véhicule.
Je veux profiter de cette occasion, monsieur le ministre d’État, pour rappeler, au moment où l’on demande à nos collectivités de faire un effort financier extraordinaire, le poids budgétaire des polices municipales. En tant que maire, j’ai aussi pu mesurer, au fil du temps, l’importance du travail en commun entre les polices municipales et les forces de l’ordre de l’État.
Je rappelle que nos collectivités, nos communes, mettent aussi à la disposition de l’État tous les moyens modernes de vidéoprotection. Dans les calculs que nous allons faire ensemble, dans les prochains mois, en vue de faire des économies, il nous faudra réfléchir sur le poids budgétaire d’une mission qui n’est pas la nôtre, mais que nous assumons tout de même pour compléter efficacement celle de l’État.
Je ne mésestime pas le rôle des polices municipales, qui concourent de façon très importante à la sécurité de nos collectivités locales.
S’agissant des opérations de visite des véhicules, ces vérifications qui touchent, comme l’a dit Michel Mercier, au droit au respect de la vie privée, sont actuellement réservées, dans le code de procédure pénale, aux policiers nationaux et aux gendarmes, qui peuvent y procéder dans certaines conditions à l’occasion d’un contrôle d’identité.
Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Cet amendement vise à étendre aux agents de police municipale la possibilité de procéder à des visites de véhicules au sein des périmètres de protection instaurés par arrêté préfectoral.
Dans notre droit, le véhicule est une sorte de démembrement du domicile. Il y a d’ailleurs une jurisprudence constante en ce sens. Accorder aux agents de police municipale le droit de fouiller un véhicule, avec le consentement du propriétaire, sinon il faut entrer dans une procédure judiciaire, me semble donc attentatoire aux libertés individuelles.
Réserver ce droit aux agents de police et de gendarmerie formés à cet effet me semble une bonne mesure d’équilibre, qui permet de respecter les libertés individuelles.
L’avis est par conséquent défavorable.
Cet amendement n’arrive pas de nulle part. Il m’a été inspiré par la lecture des rapports de police nocturne établis dans nos communes urbaines.
Lorsque deux gendarmes font face à quatre ou cinq personnes dans un véhicule, et que la police municipale est présente, il s’établit une complémentarité d’action sur le terrain. Le problème est en effet de savoir qui tient en respect et qui procède à la fouille : est-ce la gendarmerie qui tient en respect et la police municipale qui procède à la fouille, ou l’inverse ? C’est du vécu, du terrain !
Je vais bien évidemment retirer cet amendement.
Je ne mésestime pas le rôle des polices municipales, qui concourent de façon très importante à la sécurité de nos collectivités locales.
S’agissant des opérations de visite des véhicules, ces vérifications qui touchent, comme l’a dit Michel Mercier, au droit au respect de la vie privée, sont actuellement réservées, dans le code de procédure pénale, aux policiers nationaux et aux gendarmes, qui peuvent y procéder dans certaines conditions à l’occasion d’un contrôle d’identité.
Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Monsieur le ministre d’État, il faut modifier cette partie du code de procédure pénale. Le président de la commission des lois et le rapporteur devront se pencher sur ce sujet. Une telle mesure est réclamée par les polices municipales.
Cet amendement n’arrive pas de nulle part. Il m’a été inspiré par la lecture des rapports de police nocturne établis dans nos communes urbaines.
Lorsque deux gendarmes font face à quatre ou cinq personnes dans un véhicule, et que la police municipale est présente, il s’établit une complémentarité d’action sur le terrain. Le problème est en effet de savoir qui tient en respect et qui procède à la fouille : est-ce la gendarmerie qui tient en respect et la police municipale qui procède à la fouille, ou l’inverse ? C’est du vécu, du terrain !
Je vais bien évidemment retirer cet amendement.
Pour ma part, je pense que tout doit se dérouler dans l’ordre que j’ai décrit.
Je retire l’amendement.
Monsieur le ministre d’État, il faut modifier cette partie du code de procédure pénale. Le président de la commission des lois et le rapporteur devront se pencher sur ce sujet. Une telle mesure est réclamée par les polices municipales.
L'amendement n° 19 rectifié est retiré.
L'amendement n° 38 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Castelli, Collin, Esnol et Hue, Mmes Jouve et Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
Le recours croissant à des agents de sécurité privée pour effectuer des missions habituellement assurées par des agents publics de la police ou la gendarmerie est, pour nous, un autre sujet d’inquiétude.
Les dispositions prévues à l’article 1er permettent aux agents de sécurité privée d’assister les forces de l’ordre dans l’exécution du périmètre de sécurité, notamment de pratiquer les palpations de sécurité et les fouilles de bagages. Cela nous paraît acceptable, à condition qu’ils soient bien formés pour le faire.
Sous le regard vigilant du Défenseur des droits notamment, nos forces de l’ordre sont soumises à une déontologie de plus en plus précise. On peut à l’inverse s’interroger sur la qualité de la formation déontologique des agents de sécurité privée, compte tenu de l’importance des recrutements rendus nécessaires par l’instauration des périmètres de sécurité.
Pour en revenir à l’amendement, l’alinéa 14 du projet de loi prévoit de façon un peu « cryptée » la possibilité pour ces agents de participer à la prévention des éventuels « vols, dégradations et effractions » dans le périmètre de protection, qui concernera non seulement le lieu de l’événement mais aussi ses abords. Cette disposition nous semble un peu éloignée du texte, qui vise à renforcer la lutte contre le terrorisme.
C’est pourquoi, sauf explication plus approfondie par le Gouvernement, nous proposons la suppression de cet alinéa.
Pour ma part, je pense que tout doit se dérouler dans l’ordre que j’ai décrit.
Je retire l’amendement.
L'amendement n° 19 rectifié est retiré.
L'amendement n° 38 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Castelli, Collin, Esnol et Hue, Mmes Jouve et Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
L’alinéa 14 opère une coordination avec l’article L. 613-1 du code de la sécurité intérieure, afin que les agents de sécurité privée puissent intervenir au sein des périmètres de protection. Il paraît nécessaire de le conserver.
C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Le recours croissant à des agents de sécurité privée pour effectuer des missions habituellement assurées par des agents publics de la police ou la gendarmerie est, pour nous, un autre sujet d’inquiétude.
Les dispositions prévues à l’article 1er permettent aux agents de sécurité privée d’assister les forces de l’ordre dans l’exécution du périmètre de sécurité, notamment de pratiquer les palpations de sécurité et les fouilles de bagages. Cela nous paraît acceptable, à condition qu’ils soient bien formés pour le faire.
Sous le regard vigilant du Défenseur des droits notamment, nos forces de l’ordre sont soumises à une déontologie de plus en plus précise. On peut à l’inverse s’interroger sur la qualité de la formation déontologique des agents de sécurité privée, compte tenu de l’importance des recrutements rendus nécessaires par l’instauration des périmètres de sécurité.
Pour en revenir à l’amendement, l’alinéa 14 du projet de loi prévoit de façon un peu « cryptée » la possibilité pour ces agents de participer à la prévention des éventuels « vols, dégradations et effractions » dans le périmètre de protection, qui concernera non seulement le lieu de l’événement mais aussi ses abords. Cette disposition nous semble un peu éloignée du texte, qui vise à renforcer la lutte contre le terrorisme.
C’est pourquoi, sauf explication plus approfondie par le Gouvernement, nous proposons la suppression de cet alinéa.
M. Guérini soulève toujours des questions de fond importantes…
Aujourd’hui, les agents de sécurité privée prennent une place déterminante dans toute une série de manifestations. Il conviendra donc de réfléchir à l’avenir aux moyens de renforcer leur professionnalisation et leur formation, afin d’affermir notre confiance en eux.
Dans les mesures que nous avons prévues, ces agents agissent sous le contrôle d’un policier ou d’un gendarme. Ils ne jouent donc pas un rôle majeur. Je rappelle d’ailleurs que, lorsque quelqu’un est exclu du périmètre de protection, c’est toujours un policier ou un gendarme qui le raccompagne.
L’alinéa 14 opère une coordination avec l’article L. 613-1 du code de la sécurité intérieure, afin que les agents de sécurité privée puissent intervenir au sein des périmètres de protection. Il paraît nécessaire de le conserver.
C'est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
M. Guérini soulève toujours des questions de fond importantes…
Aujourd’hui, les agents de sécurité privée prennent une place déterminante dans toute une série de manifestations. Il conviendra donc de réfléchir à l’avenir aux moyens de renforcer leur professionnalisation et leur formation, afin d’affermir notre confiance en eux.
Dans les mesures que nous avons prévues, ces agents agissent sous le contrôle d’un policier ou d’un gendarme. Ils ne jouent donc pas un rôle majeur. Je rappelle d’ailleurs que, lorsque quelqu’un est exclu du périmètre de protection, c’est toujours un policier ou un gendarme qui le raccompagne.
La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote sur l'article.
Je prends cet exercice parlementaire au sérieux. J’ai posé une question au ministre d’État, mais sa réponse n’est pas factuelle, puisque je lui ai donné lecture de l’alinéa 4 de l’article 1er du projet de loi. Je conçois tout à fait qu’il soit nécessaire d’assurer des périmètres de protection, par exemple à l’occasion du marché de Noël de Strasbourg ou d’autres événements, culturels et sportifs, notamment l’Euro de football, et il n’y a aucune raison que cela donne lieu à des abus de la part des pouvoirs publics.
Dans notre pays, la liberté de manifester existe. Aujourd'hui, le préfet peut interdire une manifestation, s’il considère que la situation le justifie. En revanche, si cette manifestation est autorisée et qu’il s’agit par exemple d’une manifestation de contestation du pouvoir, avec cet article, des abus sont possibles.
À l’inverse de ce qu’a affirmé le ministre d’État, cet article ne concerne pas que les manifestations culturelles et sportives : il est question « d’un lieu ou d’un d’événement soumis à un risque d’actes de terrorisme à raison de sa nature ou de l’ampleur de sa fréquentation ». Une manifestation à Paris ou dans n’importe quelle autre grande ville entre pleinement dans cette définition.
J’attends que le ministre d’État réponde à ma question : il peut tout à fait assumer qu’il en sera ainsi.
J’aborde ce débat avec une totale ouverture d’esprit et je comprends qu’il s’agit avant tout de protéger nos concitoyens, mais je pointe quelque chose et on me répond à côté ! J’aimerais vraiment une réponse, sinon, malgré toute ma bienveillance, je ne pourrai pas voter cet article.
L'amendement n'est pas adopté.
La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote sur l'article.
L'article 1 er est adopté.
Je prends cet exercice parlementaire au sérieux. J’ai posé une question au ministre d’État, mais sa réponse n’est pas factuelle, puisque je lui ai donné lecture de l’alinéa 4 de l’article 1er du projet de loi. Je conçois tout à fait qu’il soit nécessaire d’assurer des périmètres de protection, par exemple à l’occasion du marché de Noël de Strasbourg ou d’autres événements, culturels et sportifs, notamment l’Euro de football, et il n’y a aucune raison que cela donne lieu à des abus de la part des pouvoirs publics.
Dans notre pays, la liberté de manifester existe. Aujourd'hui, le préfet peut interdire une manifestation, s’il considère que la situation le justifie. En revanche, si cette manifestation est autorisée et qu’il s’agit par exemple d’une manifestation de contestation du pouvoir, avec cet article, des abus sont possibles.
À l’inverse de ce qu’a affirmé le ministre d’État, cet article ne concerne pas que les manifestations culturelles et sportives : il est question « d’un lieu ou d’un d’événement soumis à un risque d’actes de terrorisme à raison de sa nature ou de l’ampleur de sa fréquentation ». Une manifestation à Paris ou dans n’importe quelle autre grande ville entre pleinement dans cette définition.
J’attends que le ministre d’État réponde à ma question : il peut tout à fait assumer qu’il en sera ainsi.
J’aborde ce débat avec une totale ouverture d’esprit et je comprends qu’il s’agit avant tout de protéger nos concitoyens, mais je pointe quelque chose et on me répond à côté ! J’aimerais vraiment une réponse, sinon, malgré toute ma bienveillance, je ne pourrai pas voter cet article.
L'amendement n° 26 rectifié, présenté par Mmes Benbassa et Bouchoux et M. Desessard, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Article 2
L’article 2 permet au préfet de police à Paris ou au représentant de l’État dans le département, aux seules fins de prévenir des actes de terrorisme, d’ordonner « la fermeture d’un lieu de culte dans lequel les propos qui sont tenus, les idées ou théories qui sont diffusées ou les activités qui se déroulent, provoquent à la violence, provoquent à la commission d’actes de terrorisme ou font l’apologie de tels actes ».
Disons-le clairement : nous sommes ici en présence d’un article se fondant sur l’arbitraire le plus complet ! Comment définir clairement les « idées » ou « théories » qui pourraient entraîner une fermeture ? Ce motif imprécis ouvre en réalité un véritable boulevard aux fermetures abusives de lieux de culte. Bien sûr, cela ne signifie pas qu’il ne conviendra pas de fermer des mosquées quand la radicalité de son imam est attestée.
Le droit de tout individu à exercer paisiblement son culte – ce que, bien sûr, personne dans cet hémicycle n’oserait remettre en question ! – se trouvera profondément bafoué par cette disposition. Que penser d’un pays où la pratique du culte est entravée au moindre soupçon ?
Le commissaire européen aux droits de l’homme ne s’y est pas trompé, lui qui s’est récemment inquiété de la portée de cet article, susceptible de limiter considérablement la liberté de culte garantie par l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Enfin, comment ne pas reconnaître le caractère punitif et stigmatisant d’une telle mesure pour les communautés religieuses entières concernées ? Soyons réalistes, cette disposition vise particulièrement les musulmans et l’arbitraire des fermetures ne fera que raviver un sentiment de stigmatisation et de discrimination §déjà bien installé – et à juste titre ! – au sein de cette communauté.
Cette disposition, plus étendue que celle qui est contenue dans la loi sur l’état d’urgence, est insuffisamment encadrée et menace lourdement la liberté de culte. Nous en proposons donc la suppression.
Le titre II du livre II du code de la sécurité intérieure est complété par un chapitre VII ainsi rédigé :
« Chapitre VII
« Fermeture de lieux de culte
« Art. L. 227-1. – Aux seules fins de prévenir des actes de terrorisme, le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police, peut prononcer la fermeture des lieux de culte, dans lesquels les propos qui sont tenus, les idées ou théories qui sont diffusées ou les activités qui se déroulent, provoquent à la violence, provoquent à la commission d’actes de terrorisme ou font l’apologie de tels actes.
« Cette fermeture, dont la durée doit être proportionnée aux circonstances qui l’ont motivée et qui ne peut excéder six mois, est prononcée par arrêté motivé et précédée d’une procédure contradictoire dans les conditions prévues au chapitre II du titre II du livre Ier du code des relations entre le public et l’administration.
« L’arrêté de fermeture est assorti d’un délai d’exécution qui ne peut être inférieur à quarante-huit heures, à l’expiration duquel la mesure peut faire l’objet d’une exécution d’office. Toutefois, si une personne y ayant un intérêt a saisi le tribunal administratif, dans ce délai, d’une demande présentée sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, la mesure ne peut être exécutée d’office avant que le juge des référés n’ait informé les parties de la tenue ou non d’une audience publique en application du deuxième alinéa de l’article L. 522-1 du même code ni, si les parties ont été informées d’une telle audience, avant que le juge n’ait statué sur la demande.
« Art. L. 227-2. – La violation d’une mesure de fermeture d’un lieu de culte prise en application de l’article L. 227-1 est punie d’une peine de six mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende. »
L'amendement n° 26 rectifié, présenté par Mmes Benbassa et Bouchoux et M. Desessard, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Cet amendement vise à supprimer l’article 2, qui institue un pouvoir de police spéciale au profit du préfet en matière de fermeture de lieux de culte. S’il est adopté, nous retomberons dans le droit actuel, qui sera non plus celui de l’état d’urgence, mais celui de la loi de 1905. J’ai relu le compte rendu des débats, Aristide Briand était le rapporteur de ce texte.
L’article 2 permet au préfet de police à Paris ou au représentant de l’État dans le département, aux seules fins de prévenir des actes de terrorisme, d’ordonner « la fermeture d’un lieu de culte dans lequel les propos qui sont tenus, les idées ou théories qui sont diffusées ou les activités qui se déroulent, provoquent à la violence, provoquent à la commission d’actes de terrorisme ou font l’apologie de tels actes ».
Disons-le clairement : nous sommes ici en présence d’un article se fondant sur l’arbitraire le plus complet ! Comment définir clairement les « idées » ou « théories » qui pourraient entraîner une fermeture ? Ce motif imprécis ouvre en réalité un véritable boulevard aux fermetures abusives de lieux de culte. Bien sûr, cela ne signifie pas qu’il ne conviendra pas de fermer des mosquées quand la radicalité de son imam est attestée.
Le droit de tout individu à exercer paisiblement son culte – ce que, bien sûr, personne dans cet hémicycle n’oserait remettre en question ! – se trouvera profondément bafoué par cette disposition. Que penser d’un pays où la pratique du culte est entravée au moindre soupçon ?
Le commissaire européen aux droits de l’homme ne s’y est pas trompé, lui qui s’est récemment inquiété de la portée de cet article, susceptible de limiter considérablement la liberté de culte garantie par l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Enfin, comment ne pas reconnaître le caractère punitif et stigmatisant d’une telle mesure pour les communautés religieuses entières concernées ? Soyons réalistes, cette disposition vise particulièrement les musulmans et l’arbitraire des fermetures ne fera que raviver un sentiment de stigmatisation et de discrimination §déjà bien installé – et à juste titre ! – au sein de cette communauté.
Cette disposition, plus étendue que celle qui est contenue dans la loi sur l’état d’urgence, est insuffisamment encadrée et menace lourdement la liberté de culte. Nous en proposons donc la suppression.
L'article 25 prévoit que la police peut intervenir uniquement pour maintenir l’ordre public. Une telle disposition est tout de même un peu datée ! En 1905, il s’agissait d’abord de régler le problème de la séparation des Églises et de l’État : il fallait maintenir l’ordre public, parce qu’un certain nombre de manifestations avaient lieu.
Cet amendement vise à supprimer l’article 2, qui institue un pouvoir de police spéciale au profit du préfet en matière de fermeture de lieux de culte. S’il est adopté, nous retomberons dans le droit actuel, qui sera non plus celui de l’état d’urgence, mais celui de la loi de 1905. J’ai relu le compte rendu des débats, Aristide Briand était le rapporteur de ce texte.
Cela a bien changé maintenant.
Créer un pouvoir de police spéciale au profit du préfet pour fermer des lieux de culte – vous avez raison, madame la sénatrice, il s’agit d’abord de fermer des lieux de culte musulman, c’est-à-dire des mosquées –, comme le propose le Gouvernement, semble donc plus adapté que de s’appuyer sur la loi de 1905. Ce pouvoir est suffisamment encadré ; d’ailleurs, d’autres amendements vont être examinés.
L'article 25 prévoit que la police peut intervenir uniquement pour maintenir l’ordre public. Une telle disposition est tout de même un peu datée ! En 1905, il s’agissait d’abord de régler le problème de la séparation des Églises et de l’État : il fallait maintenir l’ordre public, parce qu’un certain nombre de manifestations avaient lieu.
Cela a bien changé maintenant.
Créer un pouvoir de police spéciale au profit du préfet pour fermer des lieux de culte – vous avez raison, madame la sénatrice, il s’agit d’abord de fermer des lieux de culte musulman, c’est-à-dire des mosquées –, comme le propose le Gouvernement, semble donc plus adapté que de s’appuyer sur la loi de 1905. Ce pouvoir est suffisamment encadré ; d’ailleurs, d’autres amendements vont être examinés.
Selon Mme Benbassa, ces dispositions seraient totalement arbitraires. Or, aux termes de l’alinéa 3 de l'article L. 227–1, « l’arrêté de fermeture est assorti d’un délai d’exécution qui ne peut être inférieur à quarante-huit heures, à l’expiration duquel la mesure peut faire l’objet d’une exécution d’office. Toutefois, si une personne y ayant un intérêt a saisi le tribunal administratif, dans ce délai, d’une demande présentée sur le fondement de l’article L. 521–2 du code de justice administrative, la mesure ne peut être exécutée d’office avant que le juge des référés n’ait informé les parties de la tenue ou non d’une audience publique en application du deuxième alinéa de l’article L. 522–1 du même code ni, si les parties ont été informées d’une telle audience, avant que le juge n’ait statué sur la demande ». En d’autres termes, il n’y a pas d’arbitraire. Il est même possible, pour celui qui pense la mesure arbitraire, d’en appeler au juge en référé.
Je ne suis pas d’accord avec M. le rapporteur. Ce n’est pas parce qu’on débat sur ce texte concernant l’état d’urgence que l’on va faire fi de la loi de 1905 qui autorise la liberté de culte. Je ne comprends pas du tout la distinction qu’il opère.
Monsieur le ministre d’État, vous savez bien que la plupart des mosquées en France sont en fait des appartements ou de toutes petites salles. Peu de personnes iraient jusqu’à s’adresser au juge pour mettre en question la fermeture qui a été imposée.
On ne peut pas penser du commissaire européen aux droits de l’homme qu’il ne comprend pas la loi. S’il prend position, c’est bien qu’il y a un problème et que cet article bafouerait la liberté de culte en France.
Selon Mme Benbassa, ces dispositions seraient totalement arbitraires. Or, aux termes de l’alinéa 3 de l'article L. 227–1, « l’arrêté de fermeture est assorti d’un délai d’exécution qui ne peut être inférieur à quarante-huit heures, à l’expiration duquel la mesure peut faire l’objet d’une exécution d’office. Toutefois, si une personne y ayant un intérêt a saisi le tribunal administratif, dans ce délai, d’une demande présentée sur le fondement de l’article L. 521–2 du code de justice administrative, la mesure ne peut être exécutée d’office avant que le juge des référés n’ait informé les parties de la tenue ou non d’une audience publique en application du deuxième alinéa de l’article L. 522–1 du même code ni, si les parties ont été informées d’une telle audience, avant que le juge n’ait statué sur la demande ». En d’autres termes, il n’y a pas d’arbitraire. Il est même possible, pour celui qui pense la mesure arbitraire, d’en appeler au juge en référé.
J’ai eu le plaisir et le privilège de présider une commission d’enquête sur l’organisation et les moyens de la lutte contre les réseaux djihadistes en France et en Europe, et d’être le rapporteur d’une mission d’information sur l’organisation, la place et le financement de l’Islam en France et de ses lieux de culte.
Je formulerai quelques observations.
Premièrement, la radicalisation se fait assez peu dans les mosquées, mais plutôt à l’extérieur.
Deuxièmement, de nombreuses fermetures de lieux de culte ont déjà été prononcées quand il était avéré que des problèmes se posaient. Je souhaite que l’on me confirme que c’était grâce à l’état d’urgence et non en raison d’une législation particulière.
Troisièmement, compte tenu d’une histoire partagée, je m’interroge sur la façon dont les propos qui autoriseraient le préfet à prendre des dispositions pour fermer le lieu de culte lui seraient rapportés et remonteraient jusqu’à lui.
Comment prouver ces propos, d’ailleurs ? Je comprends la nécessité absolue de pouvoir fermer des lieux qui prêchent la violence, contrairement aux vertus de la République. Je m’interroge toutefois sur la justification des éléments qui vont permettre la mise en œuvre de cet article.
Quatrièmement, je souhaite avoir la certitude que tous les lieux de culte qui ont été fermés lorsque Bernard Cazeneuve était ministre de l’intérieur l’ont été uniquement dans le cadre de l’état d’urgence.
Je ne suis pas d’accord avec M. le rapporteur. Ce n’est pas parce qu’on débat sur ce texte concernant l’état d’urgence que l’on va faire fi de la loi de 1905 qui autorise la liberté de culte. Je ne comprends pas du tout la distinction qu’il opère.
Monsieur le ministre d’État, vous savez bien que la plupart des mosquées en France sont en fait des appartements ou de toutes petites salles. Peu de personnes iraient jusqu’à s’adresser au juge pour mettre en question la fermeture qui a été imposée.
On ne peut pas penser du commissaire européen aux droits de l’homme qu’il ne comprend pas la loi. S’il prend position, c’est bien qu’il y a un problème et que cet article bafouerait la liberté de culte en France.
Cette mesure a été utilisée, même au moment de l’état d’urgence, avec beaucoup de précautions. Ainsi, dix-sept lieux de culte ont été fermés, onze le sont encore aujourd'hui. J’ai assisté à la fermeture d’un lieu de culte dans mon département : cela s’est fait en accord avec les autorités musulmanes du département. Si un délai de six mois a été prévu, c’est pour que le lieu de culte puisse rouvrir avec une autre association cultuelle que celle qui a été à l’origine de la dissolution.
J’ai eu le plaisir et le privilège de présider une commission d’enquête sur l’organisation et les moyens de la lutte contre les réseaux djihadistes en France et en Europe, et d’être le rapporteur d’une mission d’information sur l’organisation, la place et le financement de l’Islam en France et de ses lieux de culte.
Je formulerai quelques observations.
Premièrement, la radicalisation se fait assez peu dans les mosquées, mais plutôt à l’extérieur.
Deuxièmement, de nombreuses fermetures de lieux de culte ont déjà été prononcées quand il était avéré que des problèmes se posaient. Je souhaite que l’on me confirme que c’était grâce à l’état d’urgence et non en raison d’une législation particulière.
Troisièmement, compte tenu d’une histoire partagée, je m’interroge sur la façon dont les propos qui autoriseraient le préfet à prendre des dispositions pour fermer le lieu de culte lui seraient rapportés et remonteraient jusqu’à lui.
Comment prouver ces propos, d’ailleurs ? Je comprends la nécessité absolue de pouvoir fermer des lieux qui prêchent la violence, contrairement aux vertus de la République. Je m’interroge toutefois sur la justification des éléments qui vont permettre la mise en œuvre de cet article.
Quatrièmement, je souhaite avoir la certitude que tous les lieux de culte qui ont été fermés lorsque Bernard Cazeneuve était ministre de l’intérieur l’ont été uniquement dans le cadre de l’état d’urgence.
L'amendement n'est pas adopté.
Cette mesure a été utilisée, même au moment de l’état d’urgence, avec beaucoup de précautions. Ainsi, dix-sept lieux de culte ont été fermés, onze le sont encore aujourd'hui. J’ai assisté à la fermeture d’un lieu de culte dans mon département : cela s’est fait en accord avec les autorités musulmanes du département. Si un délai de six mois a été prévu, c’est pour que le lieu de culte puisse rouvrir avec une autre association cultuelle que celle qui a été à l’origine de la dissolution.
L'amendement n° 42 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Hue et Mmes Jouve, Laborde et Malherbe, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après les mots :
la fermeture des lieux de culte
insérer les mots :
ou l’interdiction de se réunir dans un lieu afin d’exercer une pratique cultuelle
La parole est à M. Philippe Esnol.
Mes chers collègues, vous connaissez l’attachement des membres de notre groupe au principe de laïcité. Vous comprendrez donc que nous ayons été particulièrement vigilants sur cette partie du texte.
L’article 2 permet la fermeture d’un lieu de culte quand y sont proférés des propos faisant l’apologie d’actes terroristes – ce n’est pas rien ! –, dans la perspective de lutter contre les phénomènes de radicalisation. Compte tenu de la diversité des lieux où peuvent s’exercer les pratiques cultuelles – cela ne concerne pas seulement des lieux de culte désignés comme tels –, nous souhaitons que soit ajoutée « l’interdiction de se réunir dans un lieu afin d’exercer une pratique cultuelle ».
En effet, il nous semble important de combattre la tenue de tels propos autant lors de ce type de réunions religieuses que dans des lieux de culte identifiés.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 42 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Hue et Mmes Jouve, Laborde et Malherbe, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après les mots :
la fermeture des lieux de culte
insérer les mots :
ou l’interdiction de se réunir dans un lieu afin d’exercer une pratique cultuelle
La parole est à M. Philippe Esnol.
Les auteurs de l’amendement souhaitent pouvoir pour fermer tout lieu de culte. La rédaction actuelle de l’article le permet déjà. Cet amendement est donc satisfait.
Je précise que cette police spéciale est très encadrée. Lorsque l’autorité administrative décidera de fermer un lieu de culte, quel qu’il soit, elle avertira les personnes concernées, lesquelles disposeront d’un délai minimal de quarante-huit heures pour saisir, sur la base de l’article L. 512-1, le juge des référés administratifs. Cette action est suspensive et la mesure ne pourra être exécutée d’office. C’est lorsque le juge aura rendu sa décision, et seulement si celle-ci est positive, que l’administration pourra mettre à exécution sa décision.
Il s’agit donc d’un régime très encadré, qui réalise un bon équilibre entre la liberté d’être croyant et d’exercer son culte et la police de prévention des actes de terrorisme que l’on met en place.
Pour toutes ces raisons, la commission demande le retrait de cet amendement.
Mes chers collègues, vous connaissez l’attachement des membres de notre groupe au principe de laïcité. Vous comprendrez donc que nous ayons été particulièrement vigilants sur cette partie du texte.
L’article 2 permet la fermeture d’un lieu de culte quand y sont proférés des propos faisant l’apologie d’actes terroristes – ce n’est pas rien ! –, dans la perspective de lutter contre les phénomènes de radicalisation. Compte tenu de la diversité des lieux où peuvent s’exercer les pratiques cultuelles – cela ne concerne pas seulement des lieux de culte désignés comme tels –, nous souhaitons que soit ajoutée « l’interdiction de se réunir dans un lieu afin d’exercer une pratique cultuelle ».
En effet, il nous semble important de combattre la tenue de tels propos autant lors de ce type de réunions religieuses que dans des lieux de culte identifiés.
Cet amendement qui se veut de précision vise à inclure dans le champ de la disposition relative à la fermeture des lieux de culte ceux des lieux dans lesquels se réunissent les personnes afin d’exercer une pratique cultuelle.
Or tel est déjà le cas, les lieux de culte étant ceux dans lesquels est exercé un culte de manière régulière et organisée, quelle que soit l’affectation initiale de ce lieu. La notion de lieu de culte, au sens des dispositions de cet article, est donc plus large que celle des édifices du culte, employée par la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État.
Les auteurs de l’amendement souhaitent pouvoir pour fermer tout lieu de culte. La rédaction actuelle de l’article le permet déjà. Cet amendement est donc satisfait.
Je précise que cette police spéciale est très encadrée. Lorsque l’autorité administrative décidera de fermer un lieu de culte, quel qu’il soit, elle avertira les personnes concernées, lesquelles disposeront d’un délai minimal de quarante-huit heures pour saisir, sur la base de l’article L. 512-1, le juge des référés administratifs. Cette action est suspensive et la mesure ne pourra être exécutée d’office. C’est lorsque le juge aura rendu sa décision, et seulement si celle-ci est positive, que l’administration pourra mettre à exécution sa décision.
Il s’agit donc d’un régime très encadré, qui réalise un bon équilibre entre la liberté d’être croyant et d’exercer son culte et la police de prévention des actes de terrorisme que l’on met en place.
Pour toutes ces raisons, la commission demande le retrait de cet amendement.
L'amendement n° 42 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 27, présenté par Mmes Benbassa et Bouchoux, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Supprimer les mots :
, les idées ou théories qui sont diffusées
II. – Alinéa 5
1° Remplacer les mots :
six mois
par les mots :
quatre mois
2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Elle ne peut faire l’objet que d’un seul renouvellement.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Cet amendement qui se veut de précision vise à inclure dans le champ de la disposition relative à la fermeture des lieux de culte ceux des lieux dans lesquels se réunissent les personnes afin d’exercer une pratique cultuelle.
Or tel est déjà le cas, les lieux de culte étant ceux dans lesquels est exercé un culte de manière régulière et organisée, quelle que soit l’affectation initiale de ce lieu. La notion de lieu de culte, au sens des dispositions de cet article, est donc plus large que celle des édifices du culte, employée par la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État.
L’article 2 permet la fermeture d’un lieu de culte dans lequel « les idées ou théories qui sont diffusées » provoquent à la violence, provoquent à la commission d’actes de terrorisme ou font l’apologie de tels actes.
La diffusion d’« idées ou théories » est, selon nous, un motif de fermeture beaucoup trop large. L’interprétation abusive qui peut être faite de ces deux termes et le flou inhérent qui les entoure sont des facteurs de risques susceptibles de déboucher sur des dérives et des fermetures de lieux de culte injustifiées.
De surcroît, comme le rappelle le Défenseur des droits dans son avis du 7 juillet dernier, « en mettant en place un régime juridique fondé sur la diffusion des idées ou théories, en l’absence de tout acte matériel, le texte semble s’affranchir du droit commun de la preuve ». Nous demandons par conséquent la suppression de cette possibilité.
L’article 2 prévoit également que la fermeture ne puisse excéder six mois, mais il n’est pas fait mention du nombre de renouvellements possibles de la décision de fermeture. Cela pourrait aboutir à de possibles reconductions abusives de la sanction. En outre, nous estimons qu’une durée de fermeture de six mois constitue une atteinte grave à la liberté de culte. C’est pourquoi nous proposons, sans adhérer à la disposition, d’en atténuer les effets en limitant à quatre mois, renouvelable une seule fois, la durée maximale de la fermeture.
Je terminerai en reprenant les termes sans appel de la Commission nationale consultative des droits de l'homme : « La mise en œuvre de ces mesures particulièrement attentatoires aux libertés obéit simplement à un principe de précaution et érige un simple soupçon au rang des motifs légitimes d’intervention. Confusion des régimes ou disproportion : dans les deux cas, l’État de droit, garant du respect des droits fondamentaux, est mis à mal. »
L'amendement n° 18 rectifié ter, présenté par MM. Leconte, Bigot, Sueur, Boutant et Vandierendonck, Mmes Blondin et S. Robert, MM. Devinaz, Assouline et Marie, Mmes Lienemann, Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
les idées ou théories qui sont diffusées
par les mots :
les écrits qui sont diffusés
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
L'amendement n° 42 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 27, présenté par Mmes Benbassa et Bouchoux, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Supprimer les mots :
, les idées ou théories qui sont diffusées
II. – Alinéa 5
1° Remplacer les mots :
six mois
par les mots :
quatre mois
2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Elle ne peut faire l’objet que d’un seul renouvellement.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
L'alinéa 4 de l'article 2 relatif à la fermeture des lieux de cultes crée, dans le code de la sécurité intérieure, un article L. 227–1 aux termes duquel « aux seules fins de prévenir des actes de terrorisme, le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police, peut prononcer la fermeture des lieux de culte, dans lesquels les propos qui sont tenus, les idées ou théories qui sont diffusées ou les activités qui se déroulent, provoquent à la violence, provoquent à la commission d’actes de terrorisme ou font l’apologie de tels actes ».
La possibilité de prononcer la fermeture du lieu de culte peut donc découler de « propos tenus » ou d’« activités » se déroulant dans ce lieu, ce qui est facile à caractériser. Néanmoins, comme l’a rappelé le rapporteur lors de l’audition au Sénat de M. le ministre d’État sur ce texte, « les idées ou théories qui sont diffusées » sont des « notions aux contours indécis ».
Or nos lois se doivent d'être claires, précises et intelligibles, comme le rappelle fréquemment la jurisprudence du Conseil constitutionnel. En l’espèce, ce n’est pas le cas s’agissant de la formulation relative aux idées et théories qui sont diffusées retenue à l’article 2 du présent texte. C’est la raison pour laquelle nous proposons la rédaction suivante : « dans lesquels les propos qui sont tenus, les écrits qui sont diffusés ou les activités qui se déroulent ».
L’article 2 permet la fermeture d’un lieu de culte dans lequel « les idées ou théories qui sont diffusées » provoquent à la violence, provoquent à la commission d’actes de terrorisme ou font l’apologie de tels actes.
La diffusion d’« idées ou théories » est, selon nous, un motif de fermeture beaucoup trop large. L’interprétation abusive qui peut être faite de ces deux termes et le flou inhérent qui les entoure sont des facteurs de risques susceptibles de déboucher sur des dérives et des fermetures de lieux de culte injustifiées.
De surcroît, comme le rappelle le Défenseur des droits dans son avis du 7 juillet dernier, « en mettant en place un régime juridique fondé sur la diffusion des idées ou théories, en l’absence de tout acte matériel, le texte semble s’affranchir du droit commun de la preuve ». Nous demandons par conséquent la suppression de cette possibilité.
L’article 2 prévoit également que la fermeture ne puisse excéder six mois, mais il n’est pas fait mention du nombre de renouvellements possibles de la décision de fermeture. Cela pourrait aboutir à de possibles reconductions abusives de la sanction. En outre, nous estimons qu’une durée de fermeture de six mois constitue une atteinte grave à la liberté de culte. C’est pourquoi nous proposons, sans adhérer à la disposition, d’en atténuer les effets en limitant à quatre mois, renouvelable une seule fois, la durée maximale de la fermeture.
Je terminerai en reprenant les termes sans appel de la Commission nationale consultative des droits de l'homme : « La mise en œuvre de ces mesures particulièrement attentatoires aux libertés obéit simplement à un principe de précaution et érige un simple soupçon au rang des motifs légitimes d’intervention. Confusion des régimes ou disproportion : dans les deux cas, l’État de droit, garant du respect des droits fondamentaux, est mis à mal. »
L'amendement n° 18 rectifié ter, présenté par MM. Leconte, Bigot, Sueur, Boutant et Vandierendonck, Mmes Blondin et S. Robert, MM. Devinaz, Assouline et Marie, Mmes Lienemann, Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
les idées ou théories qui sont diffusées
par les mots :
les écrits qui sont diffusés
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
L’amendement n° 27 vise notamment à réduire de six mois à quatre mois la durée de la fermeture. L’expérience – certes, petite – acquise avec la mise en œuvre de telles mesures dans le cadre de l’état d’urgence montre qu’il faut un certain temps pour rouvrir un lieu de culte, c'est-à-dire reconstituer une association cultuelle, trouver des personnes qui acceptent de prendre la relève, etc. Quatre mois, c’est trop court. Un délai de six mois semble préférable. Aussi, je demande le retrait de cette partie de l’amendement.
Par ailleurs, l’amendement n° 27 comme l’amendement n° 18 rectifié ter ont pour objet de supprimer la mention « idées ou théories qui sont diffusées ».
L'article 2, dans la rédaction de la commission, mentionne « les propos qui sont tenus, les idées ou théories qui sont diffusées ou les activités qui se déroulent ». Le terme « propos » couvre tous les discours prononcés oralement.
Je rappelle que la rédaction proposée par le Gouvernement était très insuffisante, dans la mesure où elle ne couvrait pas les écrits, par exemple la distribution de tracts. En recherchant l’intention profonde du Gouvernement, la commission a considéré qu’il était préférable de prévoir « propos et écrits », plutôt que « propos et idées ou théories » qui semble d’ailleurs tautologique.
Sans une telle précision, il serait impossible de se fonder sur les distributions de tracts ou la diffusion de documents écrits dans ces lieux de culte.
Le terme « propos » englobe d’ailleurs idées ou théories : un propos est une suite de mots constituant une phrase, plusieurs phrases constituant un discours par lequel on diffuse des idées ou des théories. Celles-ci peuvent être également diffusées à l’aide de documents écrits. Les termes « propos et écrits » permettent de couvrir la totalité du champ de communication.
C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 27 et un avis favorable sur l’amendement n° 18 rectifié ter.
L'alinéa 4 de l'article 2 relatif à la fermeture des lieux de cultes crée, dans le code de la sécurité intérieure, un article L. 227–1 aux termes duquel « aux seules fins de prévenir des actes de terrorisme, le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police, peut prononcer la fermeture des lieux de culte, dans lesquels les propos qui sont tenus, les idées ou théories qui sont diffusées ou les activités qui se déroulent, provoquent à la violence, provoquent à la commission d’actes de terrorisme ou font l’apologie de tels actes ».
La possibilité de prononcer la fermeture du lieu de culte peut donc découler de « propos tenus » ou d’« activités » se déroulant dans ce lieu, ce qui est facile à caractériser. Néanmoins, comme l’a rappelé le rapporteur lors de l’audition au Sénat de M. le ministre d’État sur ce texte, « les idées ou théories qui sont diffusées » sont des « notions aux contours indécis ».
Or nos lois se doivent d'être claires, précises et intelligibles, comme le rappelle fréquemment la jurisprudence du Conseil constitutionnel. En l’espèce, ce n’est pas le cas s’agissant de la formulation relative aux idées et théories qui sont diffusées retenue à l’article 2 du présent texte. C’est la raison pour laquelle nous proposons la rédaction suivante : « dans lesquels les propos qui sont tenus, les écrits qui sont diffusés ou les activités qui se déroulent ».
M. Gérard Collomb, ministre d'État. Je ne reprends pas l’explication du rapporteur sur l’amendement n° 27. Pour avoir eu à effectuer ce genre de fermeture, je confirme qu’il faut un certain temps pour retrouver des membres capables de former une association cultuelle et un imam. Une fermeture ne se passe pas toujours dans la douceur ! Les pratiquants qui ont vu leurs lieux de culte fermer sont un peu violents à l’égard de ceux qui les remplacent.
L’amendement n° 27 vise notamment à réduire de six mois à quatre mois la durée de la fermeture. L’expérience – certes, petite – acquise avec la mise en œuvre de telles mesures dans le cadre de l’état d’urgence montre qu’il faut un certain temps pour rouvrir un lieu de culte, c'est-à-dire reconstituer une association cultuelle, trouver des personnes qui acceptent de prendre la relève, etc. Quatre mois, c’est trop court. Un délai de six mois semble préférable. Aussi, je demande le retrait de cette partie de l’amendement.
Par ailleurs, l’amendement n° 27 comme l’amendement n° 18 rectifié ter ont pour objet de supprimer la mention « idées ou théories qui sont diffusées ».
L'article 2, dans la rédaction de la commission, mentionne « les propos qui sont tenus, les idées ou théories qui sont diffusées ou les activités qui se déroulent ». Le terme « propos » couvre tous les discours prononcés oralement.
Je rappelle que la rédaction proposée par le Gouvernement était très insuffisante, dans la mesure où elle ne couvrait pas les écrits, par exemple la distribution de tracts. En recherchant l’intention profonde du Gouvernement, la commission a considéré qu’il était préférable de prévoir « propos et écrits », plutôt que « propos et idées ou théories » qui semble d’ailleurs tautologique.
Sans une telle précision, il serait impossible de se fonder sur les distributions de tracts ou la diffusion de documents écrits dans ces lieux de culte.
Le terme « propos » englobe d’ailleurs idées ou théories : un propos est une suite de mots constituant une phrase, plusieurs phrases constituant un discours par lequel on diffuse des idées ou des théories. Celles-ci peuvent être également diffusées à l’aide de documents écrits. Les termes « propos et écrits » permettent de couvrir la totalité du champ de communication.
C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 27 et un avis favorable sur l’amendement n° 18 rectifié ter.
M. André Reichardt opine.
La notion que nous avons inscrite dans le projet de loi vise un certain nombre de théoriciens de Daech et de l’action violente. Je suis parfaitement d’accord pour ajouter le terme « écrits » dans le texte, à condition que la notion de théorie y subsiste. Je rappelle que les théories de certains prédicateurs, dont je pourrai donner les noms au Sénat, sont en fait des appels au djihad et que ces théories ont une influence sur la radicalisation d’un certain nombre de personnes.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’amendement de Mme Benbassa. Il s’en remet à la sagesse du Sénat sur l’amendement de M. Leconte.
M. Gérard Collomb, ministre d'État. Je ne reprends pas l’explication du rapporteur sur l’amendement n° 27. Pour avoir eu à effectuer ce genre de fermeture, je confirme qu’il faut un certain temps pour retrouver des membres capables de former une association cultuelle et un imam. Une fermeture ne se passe pas toujours dans la douceur ! Les pratiquants qui ont vu leurs lieux de culte fermer sont un peu violents à l’égard de ceux qui les remplacent.
M. André Reichardt opine.
Monsieur le ministre d'État, les mesures administratives qui seront prises sous votre autorité seront, par construction, soumises au contrôle du juge. Ce contrôle, vous le savez, vise à demander avec insistance à l'administration de justifier le risque qui sert de fondement à la mesure.
Or le texte prévoit la fermeture des lieux de culte dans lesquels « les propos qui sont tenus […] provoquent à la commission d’actes de terrorisme ». La base légale de cette possibilité de mesure est le fait qu’une expression provoque à la commission d’actes de terrorisme. Les idées ou théories n’entreront donc dans ce champ que si vos services, localement, peuvent démontrer qu’elles ont été exprimées d’une façon ou d'une autre. Si cela n’a pas été exposé verbalement, cela a été exprimé par un support écrit, qui peut d’ailleurs être numérique. Mais la théorie en elle-même, si elle n’est exprimée par personne, ne pourra pas être retenue comme base légale.
Il me semble que la formulation qui a été dégagée en commission, et qui va dans le sens de la volonté du Gouvernement, est meilleure. L’expression « idées ou théories » n’apporte rien dès lors que l’on a mentionné « propos et écrits ».
La notion que nous avons inscrite dans le projet de loi vise un certain nombre de théoriciens de Daech et de l’action violente. Je suis parfaitement d’accord pour ajouter le terme « écrits » dans le texte, à condition que la notion de théorie y subsiste. Je rappelle que les théories de certains prédicateurs, dont je pourrai donner les noms au Sénat, sont en fait des appels au djihad et que ces théories ont une influence sur la radicalisation d’un certain nombre de personnes.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’amendement de Mme Benbassa. Il s’en remet à la sagesse du Sénat sur l’amendement de M. Leconte.
La question de la liberté de culte ou de religion est bien sûr extrêmement importante. Je comprends les éléments de ce débat.
Je tiens à souligner que la rédaction retenue par la commission est assez protectrice et plus exigeante, paradoxalement, que les dispositions de la Convention européenne des droits de l’homme. Dans l’arrêt Refah Partisi du 30 janvier 1998, la Cour européenne des droits de l’homme considère en effet que la liberté de religion, comme toutes les autres libertés, peut faire l’objet de limitations, notamment « lorsque le discours religieux ou l’entité religieuse, quelle que soit sa forme, prônent la violence et soutiennent des valeurs incompatibles avec la démocratie ».
Monsieur le ministre d'État, les mesures administratives qui seront prises sous votre autorité seront, par construction, soumises au contrôle du juge. Ce contrôle, vous le savez, vise à demander avec insistance à l'administration de justifier le risque qui sert de fondement à la mesure.
Or le texte prévoit la fermeture des lieux de culte dans lesquels « les propos qui sont tenus […] provoquent à la commission d’actes de terrorisme ». La base légale de cette possibilité de mesure est le fait qu’une expression provoque à la commission d’actes de terrorisme. Les idées ou théories n’entreront donc dans ce champ que si vos services, localement, peuvent démontrer qu’elles ont été exprimées d’une façon ou d'une autre. Si cela n’a pas été exposé verbalement, cela a été exprimé par un support écrit, qui peut d’ailleurs être numérique. Mais la théorie en elle-même, si elle n’est exprimée par personne, ne pourra pas être retenue comme base légale.
Il me semble que la formulation qui a été dégagée en commission, et qui va dans le sens de la volonté du Gouvernement, est meilleure. L’expression « idées ou théories » n’apporte rien dès lors que l’on a mentionné « propos et écrits ».
Je soutiens la position de la commission et l’amendement de M. Leconte parce que verba volant, scripta manent. Il me semble évident que les choses sont toujours plus faciles avec des écrits.
Par ailleurs, en réponse à ce qu’a dit M. le ministre d’État, il me semble qu’il devient extrêmement urgent de rouvrir le dossier de Bernard Cazeneuve de la formation des imams, sachant que 312 imams dans notre pays sont formés à l’étranger, dont ceux qui viennent de Turquie et qui ne parlent pas français.
La question de la liberté de culte ou de religion est bien sûr extrêmement importante. Je comprends les éléments de ce débat.
Je tiens à souligner que la rédaction retenue par la commission est assez protectrice et plus exigeante, paradoxalement, que les dispositions de la Convention européenne des droits de l’homme. Dans l’arrêt Refah Partisi du 30 janvier 1998, la Cour européenne des droits de l’homme considère en effet que la liberté de religion, comme toutes les autres libertés, peut faire l’objet de limitations, notamment « lorsque le discours religieux ou l’entité religieuse, quelle que soit sa forme, prônent la violence et soutiennent des valeurs incompatibles avec la démocratie ».
L'amendement n'est pas adopté.
Je soutiens la position de la commission et l’amendement de M. Leconte parce que verba volant, scripta manent. Il me semble évident que les choses sont toujours plus faciles avec des écrits.
Par ailleurs, en réponse à ce qu’a dit M. le ministre d’État, il me semble qu’il devient extrêmement urgent de rouvrir le dossier de Bernard Cazeneuve de la formation des imams, sachant que 312 imams dans notre pays sont formés à l’étranger, dont ceux qui viennent de Turquie et qui ne parlent pas français.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 41, présenté par M. Guérini, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
ou font l’apologie de tels actes
par les mots :
, font l’apologie de tels actes ou l’apologie de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité ou de crimes et délits de collaboration avec l’ennemi
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
Cet amendement vise à étendre la faculté de fermeture des lieux de culte aux cas où des propos faisant l’apologie de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité ou de crimes et délits de collaboration avec l’ennemi y sont prononcés. La gravité de ces crimes nous semble comparable à celle des actes terroristes.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 41, présenté par M. Guérini, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
ou font l’apologie de tels actes
par les mots :
, font l’apologie de tels actes ou l’apologie de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité ou de crimes et délits de collaboration avec l’ennemi
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
Cet amendement est restrictif, car il vise à permettre la fermeture de lieux de culte en cas de commission d’une infraction pénale. L’autorisation que nous venons de donner dans l’amendement précédent est beaucoup plus large.
Cet amendement illustre parfaitement la raison pour laquelle il fallait inscrire dans le texte « les propos et les écrits ». Il fallait s’en tenir au support et de ne pas entrer dans le contenu. Il appartiendra au juge de vérifier la proportionnalité.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Cet amendement vise à étendre la faculté de fermeture des lieux de culte aux cas où des propos faisant l’apologie de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité ou de crimes et délits de collaboration avec l’ennemi y sont prononcés. La gravité de ces crimes nous semble comparable à celle des actes terroristes.
Le Gouvernement s’en étant remis à la sagesse du Sénat sur l’amendement précédent, il demande le retrait de l’amendement n° 41.
Cet amendement est restrictif, car il vise à permettre la fermeture de lieux de culte en cas de commission d’une infraction pénale. L’autorisation que nous venons de donner dans l’amendement précédent est beaucoup plus large.
Cet amendement illustre parfaitement la raison pour laquelle il fallait inscrire dans le texte « les propos et les écrits ». Il fallait s’en tenir au support et de ne pas entrer dans le contenu. Il appartiendra au juge de vérifier la proportionnalité.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Le Gouvernement s’en étant remis à la sagesse du Sénat sur l’amendement précédent, il demande le retrait de l’amendement n° 41.
L'amendement n° 41 est retiré.
L'amendement n° 58 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol et Hue, Mmes Jouve et Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La répétition de tels propos ainsi que l’absence de mesure de radiation prise à l’encontre de son auteur, a fortiori lorsqu’il y exerce un magistère religieux ou participe à la gestion du lieu de culte, constituent des éléments de nature à en justifier la fermeture.
La parole est à M. Guillaume Arnell.
Cet amendement vise à préciser les éléments pouvant justifier la fermeture de lieux de culte. Il vise à responsabiliser les dirigeants de tels lieux.
Le bon fonctionnement des cultes repose tout d’abord sur la capacité de leurs responsables à faire preuve d’autorité sur les membres de leur communauté susceptibles de dévier vers des pratiques sectaires ou extrémistes.
Dans la lutte contre la radicalisation, les responsables religieux comme les gestionnaires de lieux de culte doivent être aux avant-postes. Ils constituent un échelon crucial pour faire appliquer les lois de la République. Cet amendement vise à le rappeler.
L'amendement n° 41 est retiré.
L'amendement n° 58 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol et Hue, Mmes Jouve et Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La répétition de tels propos ainsi que l’absence de mesure de radiation prise à l’encontre de son auteur, a fortiori lorsqu’il y exerce un magistère religieux ou participe à la gestion du lieu de culte, constituent des éléments de nature à en justifier la fermeture.
La parole est à M. Guillaume Arnell.
Cet amendement de précision a pour objet d’indiquer que la répétition de propos interdits justifie la fermeture d’un lieu de culte. Cet amendement étant déjà satisfait, je prie son auteur de bien vouloir le retirer.
Cet amendement vise à préciser les éléments pouvant justifier la fermeture de lieux de culte. Il vise à responsabiliser les dirigeants de tels lieux.
Le bon fonctionnement des cultes repose tout d’abord sur la capacité de leurs responsables à faire preuve d’autorité sur les membres de leur communauté susceptibles de dévier vers des pratiques sectaires ou extrémistes.
Dans la lutte contre la radicalisation, les responsables religieux comme les gestionnaires de lieux de culte doivent être aux avant-postes. Ils constituent un échelon crucial pour faire appliquer les lois de la République. Cet amendement vise à le rappeler.
Je partage l’avis de M. le rapporteur.
Il faut évidemment faire en sorte que tous les responsables de culte dénoncent les radicalisations et l’apologie des crimes terroristes. Nous sommes pour un islam républicain, respectant la loi de 1905 telle qu’Aristide Briand l’a définie, c’est-à-dire une loi prévoyant la liberté de culte, celle de croire ou de ne pas croire.
Cet amendement de précision a pour objet d’indiquer que la répétition de propos interdits justifie la fermeture d’un lieu de culte. Cet amendement étant déjà satisfait, je prie son auteur de bien vouloir le retirer.
Je partage l’avis de M. le rapporteur.
Il faut évidemment faire en sorte que tous les responsables de culte dénoncent les radicalisations et l’apologie des crimes terroristes. Nous sommes pour un islam républicain, respectant la loi de 1905 telle qu’Aristide Briand l’a définie, c’est-à-dire une loi prévoyant la liberté de culte, celle de croire ou de ne pas croire.
L’article 2 est adopté.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 6 est présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 23 rectifié est présenté par MM. Bigot, Sueur, Boutant, Leconte et Vandierendonck, Mmes Blondin et S. Robert, MM. Devinaz, Assouline et Marie, Mmes Lienemann, Monier et les membres du groupe socialiste et républicain.
L'amendement n° 28 est présenté par Mmes Benbassa et Bouchoux.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Christian Favier, pour présenter l’amendement n° 6.
Article 3
L’article 3 prévoit les mesures de surveillance que le ministre de l’intérieur peut prendre à l’encontre de « toute personne à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d’une particulière gravité pour la sécurité et l’ordre publics ». Il instaure notamment l’« assignation à commune », un possible pointage quotidien et le port du bracelet électronique.
La commission des lois a pris des précautions, lesquelles sont positives. Elle a ainsi supprimé l’obligation de déclarer les numéros d’abonnement ou les identifiants techniques de tout moyen de communication électronique. Elle a surtout prévu un contrôle du Parlement et exigé un nouveau débat en 2021 sur cette mesure précise, ainsi que sur l’article 4 relatif aux perquisitions administratives, rebaptisées « visites ». Malgré cela, nous ne pouvons nous résoudre à faire entrer dans notre droit commun ce genre de mesures individuelles, issues de l’état d’urgence et inspirées d’un dangereux principe de précaution.
Ces mesures bafouent les droits et les libertés des personnes, que ce soit au regard du droit à la sûreté prévu par l’article II de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ou des principes de légalité et de nécessité des délits et des peines – ce sont les articles 7, 8 et 66 de la Constitution. C’est pourquoi nous proposons la suppression pure et simple de cet article.
Le titre II du livre II du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :
1° Le chapitre V est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa de l’article L. 225-2, après les mots : « de Paris », sont insérés les mots : « et le procureur de la République territorialement compétent » ;
b) Au premier alinéa de l’article L. 225-3, après les mots : « de Paris », sont insérés les mots : « et le procureur de la République territorialement compétent » ;
2° Il est ajouté un chapitre VIII ainsi rédigé :
« Chapitre VIII
« Mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance
« Art. L. 228-1. – Aux seules fins de prévenir des actes de terrorisme, toute personne à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d’une particulière gravité pour la sécurité et l’ordre publics et qui, soit entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme, soit soutient ou adhère à des thèses incitant à la commission d’actes de terrorisme ou faisant l’apologie de tels actes peut se voir prescrire, par le ministre de l’intérieur, les obligations prévues au présent chapitre.
« Art. L. 228-2. – Le ministre de l’intérieur peut, après en avoir informé le procureur de la République de Paris et le procureur de la République territorialement compétent, faire obligation à la personne mentionnée à l’article L. 228-1 de :
« 1° Ne pas se déplacer à l’extérieur d’un périmètre géographique déterminé, qui ne peut être inférieur à la commune. La délimitation de ce périmètre permet à l’intéressé de poursuivre une vie familiale et professionnelle normale, et s’étend, le cas échéant, à d’autres communes ou d’autres départements que ceux de son lieu habituel de résidence ;
« 2° Se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie, dans la limite de trois fois par semaine, en précisant si cette obligation s’applique les dimanches et jours fériés ou chômés ;
« 3° Déclarer son lieu d’habitation et tout changement de lieu d’habitation.
« Les obligations prévues aux 1° à 3° du présent article sont prononcées pour une durée maximale de trois mois à compter de la notification de la décision du ministre. Elles peuvent être renouvelées par ordonnance motivée du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris, saisi par le ministre de l’intérieur s’il existe, au regard des éléments produits par l’autorité administrative, des raisons sérieuses de penser que le comportement de la personne continue de constituer une menace pour la sécurité et l’ordre publics. Chaque prolongation ne peut excéder une durée de trois mois. L’ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d’appel devant le premier président de la cour d’appel de Paris ou son délégué dans des conditions définies par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 228-3. – À la place de l’obligation prévue au 2° de l’article L. 228-2, le ministre de l’intérieur peut proposer à la personne faisant l’objet de la mesure prévue au 1° du même article L. 228-2 de la placer sous surveillance électronique mobile, après en avoir informé le procureur de la République de Paris et le procureur de la République territorialement compétent. Ce placement est subordonné à l’accord écrit de la personne concernée. Dans ce cas, le périmètre géographique imposé en application du même 1° ne peut être inférieur au département.
« Le placement sous surveillance électronique mobile est décidé pour la durée de la mesure prise en application dudit 1°. Il y est mis fin en cas de dysfonctionnement temporaire du dispositif ou sur demande de l’intéressé, qui peut alors être assujetti à l’obligation prévue au 2° dudit article L. 228-2.
« La personne concernée est astreinte, pendant toute la durée du placement, au port d’un dispositif technique permettant à tout moment à l’autorité administrative de s’assurer à distance qu’elle n’a pas quitté le périmètre défini en application du 1° du même article L. 228-2. Le dispositif technique ne peut être utilisé par l’autorité administrative pour localiser la personne, sauf lorsque celle-ci a quitté ledit périmètre ou en cas de fonctionnement altéré du dispositif technique.
« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. Il peut déterminer les conditions dans lesquelles la mise en œuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance prévu au troisième alinéa, pour lequel peut être mis en œuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel, peut être confiée à une personne de droit privé habilitée.
« Art. L. 228-4. – S’il ne fait pas application des articles L. 228-2 et L. 228-3, le ministre de l’intérieur peut, après en avoir informé le procureur de la République de Paris et le procureur de la République territorialement compétent, faire obligation à toute personne mentionnée à l’article L. 228-1 de :
« 1° Déclarer son domicile et tout changement de domicile ;
« 2° Signaler ses déplacements à l’extérieur d’un périmètre déterminé ne pouvant être plus restreint que le territoire de la commune de son domicile.
« Les obligations mentionnées aux 1° et 2° du présent article sont prononcées pour une durée maximale de six mois à compter de la notification de la décision du ministre. Elles peuvent être renouvelées par ordonnance motivée du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris, saisi par le ministre de l’intérieur s’il existe, au regard des éléments produits par l’autorité administrative, des raisons sérieuses de penser que le comportement de la personne continue de constituer une menace pour la sécurité et l’ordre publics. Chaque prolongation ne peut excéder une durée de six mois. L’ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d’appel devant le premier président de la cour d’appel de Paris ou son délégué dans des conditions définies par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 228-5. – Le ministre de l’intérieur peut, après en avoir informé le procureur de la République de Paris et le procureur de la République territorialement compétent, faire obligation à toute personne mentionnée à l’article L. 228-1, y compris lorsqu’il est fait application des articles L. 228-2 à L. 228–4, de ne pas se trouver en relation directe ou indirecte avec certaines personnes, nommément désignées, dont le comportement est lié à des activités à caractère terroriste.
« L’obligation mentionnée au premier alinéa est prononcée pour une durée maximale de six mois à compter de la notification de la décision du ministre. Elle peut être renouvelée par ordonnance motivée du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris, saisi par le ministre de l’intérieur s’il existe, au regard des éléments produits par l’autorité administrative, des raisons sérieuses de penser que le comportement de la personne continue de constituer une menace pour la sécurité et l’ordre publics. Chaque prolongation ne peut excéder une durée de six mois. L’ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d’appel devant le premier président de la cour d’appel de Paris ou son délégué dans des conditions définies par décret en Conseil d’État.
« Art L. 228–6. – Les décisions du ministre de l’intérieur prises en application des articles L. 228–2 à L. 228–5 sont écrites et motivées. À l’exception des mesures prises sur le fondement de l’article L. 228-3, le ministre de l’intérieur ou son représentant met la personne concernée en mesure de lui présenter ses observations dans un délai maximum de huit jours après la notification de la décision.
« Art. L. 228-7. – Le fait de se soustraire aux obligations fixées en application des articles L. 228-2 à L. 228-5 est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende. »
La parole est à M. Jacques Bigot, pour présenter l’amendement n° 23 rectifié.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 6 est présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 23 rectifié est présenté par MM. Bigot, Sueur, Boutant, Leconte et Vandierendonck, Mmes Blondin et S. Robert, MM. Devinaz, Assouline et Marie, Mmes Lienemann, Monier et les membres du groupe socialiste et républicain.
L'amendement n° 28 est présenté par Mmes Benbassa et Bouchoux.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Christian Favier, pour présenter l’amendement n° 6.
Nous proposons également la suppression de cet article, comme je l’ai annoncé lors de la discussion générale.
Cet article prévoit qu’« aux seules fins de prévenir des actes de terrorisme, toute personne à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d’une particulière gravité pour la sécurité et l’ordre publics » peut être mise sous surveillance, en réalité assignée à résidence.
Le périmètre de l’assignation à résidence ne peut pas être inférieur à celui de la commune. Il peut être étendu au département, à condition que la personne accepte de porter un bracelet électronique. C’est là plus qu’une mesure restrictive de liberté, c’est une atteinte très forte à la liberté. Une telle mesure est acceptée dans le cadre de l’état d’urgence parce que l’état d’urgence est destiné à faire face à un péril imminent pendant une durée déterminée. L’état d’urgence n’aurait donc pas dû durer si longtemps.
En outre, les comportements décrits dans l’article L. 228–1 peuvent parfaitement justifier l’ouverture d’une procédure judiciaire, soit pour apologie du terrorisme, soit pour complicité avec des personnes se préparant à commettre des actes terroristes. Un contrôle judiciaire peut être mis en place après saisine d’un juge d’instruction par le procureur de la République.
En outre, les personnes assignées à résidence – dans le cadre de l’état d’urgence, certaines d’entre elles, nous le savons, l’ont été durant une année entière – se sachant surveillées, elles n’ont évidemment pas de comportement constituant une menace.
Ce que souhaitent en fait les services de renseignement, c’est pouvoir disposer d’éléments nouveaux susceptibles de justifier des poursuites, mais cela ne fonctionne pas.
Donner un tel pouvoir au ministre de l’intérieur est excessif alors que le juge des libertés et de la détention, qui est celui qui, en France, est compétent y compris en matière de rétention des étrangers et de placement en hôpital psychiatrique, ne disposera pas de moyens de contrôle.
Nous donnons là un pouvoir excessif au pouvoir exécutif !
L’article 3 prévoit les mesures de surveillance que le ministre de l’intérieur peut prendre à l’encontre de « toute personne à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d’une particulière gravité pour la sécurité et l’ordre publics ». Il instaure notamment l’« assignation à commune », un possible pointage quotidien et le port du bracelet électronique.
La commission des lois a pris des précautions, lesquelles sont positives. Elle a ainsi supprimé l’obligation de déclarer les numéros d’abonnement ou les identifiants techniques de tout moyen de communication électronique. Elle a surtout prévu un contrôle du Parlement et exigé un nouveau débat en 2021 sur cette mesure précise, ainsi que sur l’article 4 relatif aux perquisitions administratives, rebaptisées « visites ». Malgré cela, nous ne pouvons nous résoudre à faire entrer dans notre droit commun ce genre de mesures individuelles, issues de l’état d’urgence et inspirées d’un dangereux principe de précaution.
Ces mesures bafouent les droits et les libertés des personnes, que ce soit au regard du droit à la sûreté prévu par l’article II de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ou des principes de légalité et de nécessité des délits et des peines – ce sont les articles 7, 8 et 66 de la Constitution. C’est pourquoi nous proposons la suppression pure et simple de cet article.
La parole est à M. Jacques Bigot, pour présenter l’amendement n° 23 rectifié.
L’article 3 concerne les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance. Issu à la fois des mesures d’assignation à résidence prévues par la loi sur l’état d’urgence et des dispositions de contrôle administratif des personnes de retour en France d’un théâtre d’opérations terroristes, il donne pouvoir au ministre de l’intérieur de procéder à la surveillance de personnes répondant à un certain nombre de critères.
Pour notre part, nous considérons toujours que la généralisation excessive des mesures exceptionnelles de police administrative est dangereuse, malgré les améliorations apportées par le rapporteur. De surcroît, comme le relève le Défenseur des droits dans son avis du 7 juillet 2017, l’imprécision des critères d’application de ces mesures de surveillance constitue une atteinte certaine aux principes de légalité et de sécurité juridique.
Faut-il encore le rappeler, cette disposition permet de prendre des mesures privatives ou restrictives de liberté à l’encontre de personnes à qui aucune infraction pénale n’est reprochée. Cela n’a rien d’anodin et en dit long sur la vision de l’État de droit qui semble aujourd’hui dominer, d’autant que le droit pénal antiterroriste a été largement étoffé ces dernières années et que de nombreuses infractions de soutien au terrorisme ont été créées.
Notre arsenal juridique est suffisant. Ce point de vue est d’ailleurs partagé par d’autres que les écologistes puisque près de 500 personnalités du droit, chercheurs, universitaires et associations dénoncent un projet de loi qui « hypothèque les libertés de tous de manière absolument inédite » en « proposant d’inscrire dans le droit ordinaire les principales mesures autorisées à titre exceptionnel dans le cadre de l’état d’urgence ».
Nous proposons également la suppression de cet article, comme je l’ai annoncé lors de la discussion générale.
Cet article prévoit qu’« aux seules fins de prévenir des actes de terrorisme, toute personne à l’égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d’une particulière gravité pour la sécurité et l’ordre publics » peut être mise sous surveillance, en réalité assignée à résidence.
Le périmètre de l’assignation à résidence ne peut pas être inférieur à celui de la commune. Il peut être étendu au département, à condition que la personne accepte de porter un bracelet électronique. C’est là plus qu’une mesure restrictive de liberté, c’est une atteinte très forte à la liberté. Une telle mesure est acceptée dans le cadre de l’état d’urgence parce que l’état d’urgence est destiné à faire face à un péril imminent pendant une durée déterminée. L’état d’urgence n’aurait donc pas dû durer si longtemps.
En outre, les comportements décrits dans l’article L. 228–1 peuvent parfaitement justifier l’ouverture d’une procédure judiciaire, soit pour apologie du terrorisme, soit pour complicité avec des personnes se préparant à commettre des actes terroristes. Un contrôle judiciaire peut être mis en place après saisine d’un juge d’instruction par le procureur de la République.
En outre, les personnes assignées à résidence – dans le cadre de l’état d’urgence, certaines d’entre elles, nous le savons, l’ont été durant une année entière – se sachant surveillées, elles n’ont évidemment pas de comportement constituant une menace.
Ce que souhaitent en fait les services de renseignement, c’est pouvoir disposer d’éléments nouveaux susceptibles de justifier des poursuites, mais cela ne fonctionne pas.
Donner un tel pouvoir au ministre de l’intérieur est excessif alors que le juge des libertés et de la détention, qui est celui qui, en France, est compétent y compris en matière de rétention des étrangers et de placement en hôpital psychiatrique, ne disposera pas de moyens de contrôle.
Nous donnons là un pouvoir excessif au pouvoir exécutif !
La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l’amendement n° 28.
Ces trois amendements visent à supprimer l’article 3 du projet de loi.
Cet article contient une mesure essentielle du projet de loi, à savoir non pas l’assignation à résidence telle qu’on l’a connue avec l’état d’urgence, mais l’obligation de demeurer dans un territoire dont le périmètre est au minimum celui de la commune, ce périmètre pouvant être étendu au département si la personne concernée accepte de porter un bracelet électronique.
Permettez-moi de rappeler une chose toute simple : le terrorisme n’est pas une action contre la société comme les autres, il vise à détruire notre société. Le terrorisme est protéiforme et on n’en connaît pas toutes les formes. De nouvelles apparaissent probablement tous les jours. Quant aux formes de radicalisation, elles changent elles aussi perpétuellement. Les gens sont de plus en plus isolés et décident d’eux-mêmes de commettre des attentats. Ils se revendiquent ensuite d’une organisation dont ils ne connaissent pas grand-chose.
Si nous ne nous dotons pas, dans notre droit commun, de mesures suffisantes pour lutter contre le terrorisme, nous aurons des difficultés à préserver notre société. Je sais bien qu’il n’y a pas de liberté sans protection, mais il ne peut pas y avoir de véritable protection sans liberté. C’est cet équilibre que nous essayons de bâtir petit à petit dans ce texte, mais ce n’est pas facile.
Le plus facile serait, en tant que commissaire à quelque chose, de décider, dans un grand discours, de supprimer toutes les mesures attentatoires aux libertés, de s’asseoir sous un arbre et d’attendre. Or ce n’est pas ainsi que cela se passe.
L’État doit agir, …
L’article 3 concerne les mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance. Issu à la fois des mesures d’assignation à résidence prévues par la loi sur l’état d’urgence et des dispositions de contrôle administratif des personnes de retour en France d’un théâtre d’opérations terroristes, il donne pouvoir au ministre de l’intérieur de procéder à la surveillance de personnes répondant à un certain nombre de critères.
Pour notre part, nous considérons toujours que la généralisation excessive des mesures exceptionnelles de police administrative est dangereuse, malgré les améliorations apportées par le rapporteur. De surcroît, comme le relève le Défenseur des droits dans son avis du 7 juillet 2017, l’imprécision des critères d’application de ces mesures de surveillance constitue une atteinte certaine aux principes de légalité et de sécurité juridique.
Faut-il encore le rappeler, cette disposition permet de prendre des mesures privatives ou restrictives de liberté à l’encontre de personnes à qui aucune infraction pénale n’est reprochée. Cela n’a rien d’anodin et en dit long sur la vision de l’État de droit qui semble aujourd’hui dominer, d’autant que le droit pénal antiterroriste a été largement étoffé ces dernières années et que de nombreuses infractions de soutien au terrorisme ont été créées.
Notre arsenal juridique est suffisant. Ce point de vue est d’ailleurs partagé par d’autres que les écologistes puisque près de 500 personnalités du droit, chercheurs, universitaires et associations dénoncent un projet de loi qui « hypothèque les libertés de tous de manière absolument inédite » en « proposant d’inscrire dans le droit ordinaire les principales mesures autorisées à titre exceptionnel dans le cadre de l’état d’urgence ».
… mais il peut bien évidemment se tromper. Malgré notre arsenal juridique, un terroriste peut nous échapper et commettre des attentats. Des attentats ont d’ailleurs été commis sous l’état d’urgence, d’autres le seront probablement demain. Toutefois, si nous dotons l’État d’armes efficaces, mais aussi des armes de la liberté, nous aurons fait notre travail. Si nous nous y refusons, nous perdrons notre liberté. Tel est le dilemme dans lequel nous sommes enfermés. C’est un travail très difficile, très délicat.
La commission a choisi de ne pas supprimer les articles 3 et 4. Elle a prévu une autre mesure, essentielle – je laisserai au président de la commission le soin d’en parler –, qui permettra au Parlement de jouer tout son rôle.
L’obligation de résider dans une commune ou dans le département est enserrée dans un certain nombre de règles destinées à préserver un équilibre entre le respect de la liberté individuelle et la nécessité de protéger ceux qui veulent vivre leur liberté individuelle.
La commission vous propose donc de rejeter ces amendements de suppression.
Ces trois amendements visent à supprimer l’article 3 du projet de loi.
Cet article contient une mesure essentielle du projet de loi, à savoir non pas l’assignation à résidence telle qu’on l’a connue avec l’état d’urgence, mais l’obligation de demeurer dans un territoire dont le périmètre est au minimum celui de la commune, ce périmètre pouvant être étendu au département si la personne concernée accepte de porter un bracelet électronique.
Permettez-moi de rappeler une chose toute simple : le terrorisme n’est pas une action contre la société comme les autres, il vise à détruire notre société. Le terrorisme est protéiforme et on n’en connaît pas toutes les formes. De nouvelles apparaissent probablement tous les jours. Quant aux formes de radicalisation, elles changent elles aussi perpétuellement. Les gens sont de plus en plus isolés et décident d’eux-mêmes de commettre des attentats. Ils se revendiquent ensuite d’une organisation dont ils ne connaissent pas grand-chose.
Si nous ne nous dotons pas, dans notre droit commun, de mesures suffisantes pour lutter contre le terrorisme, nous aurons des difficultés à préserver notre société. Je sais bien qu’il n’y a pas de liberté sans protection, mais il ne peut pas y avoir de véritable protection sans liberté. C’est cet équilibre que nous essayons de bâtir petit à petit dans ce texte, mais ce n’est pas facile.
Le plus facile serait, en tant que commissaire à quelque chose, de décider, dans un grand discours, de supprimer toutes les mesures attentatoires aux libertés, de s’asseoir sous un arbre et d’attendre. Or ce n’est pas ainsi que cela se passe.
L’État doit agir, …
Nous l’avons rappelé tout au long de notre débat, la menace terroriste est élevée dans notre pays. Comme l’a dit Alain Richard, elle a également changé de forme.
Auparavant, la menace terroriste était exogène. Les attentats étaient pilotés par une organisation. Aujourd’hui, la menace est protéiforme. Des individus se radicalisent seuls. Lorsque l’on creuse les dossiers, on s’aperçoit que des réseaux leur apportent parfois armes et soutien logistique et que terrorisme et grand banditisme ont partie liée.
Il faut effectivement se protéger et pouvoir travailler en amont. Si nous attendons dans l’État de droit que les faits soient totalement élucidés, nous risquons d’arriver toujours après l’attentat. Nous avons donc inscrit un certain nombre de mesures dans le texte, tout en veillant à ce qu’il soit équilibré.
Il a été dit voilà quelques instants de manière un peu rapide qu’il s’agissait de transcrire l’état d’urgence dans le droit commun. Je rappelle qu’il n’y a pas d’obligation d’assignation à résidence. Le périmètre de déplacement est au moins la commune, voire le département si la personne concernée accepte le port d’un bracelet électronique, ce qui constitue pour elle une liberté. Il s’agit de pouvoir contrôler celui que l’on suspecte de vouloir commettre un attentat et de ne pas prendre le risque de le voir disparaître dans la nature, comme cela s’est produit dans le passé. Ainsi, le terroriste ayant décapité son chef d’entreprise dans la région de Lyon était passé d’un département à l’autre, ce qui explique qu’il n’était plus suivi par aucun service. Si nous ne mettons pas en place ce type de dispositif, nous pourrons nous dire que nous avons commis des fautes.
De même, après l’attentat qui a failli être commis sur les Champs-Élysées, nous nous sommes rendu compte que des personnes fichées S pouvaient détenir un port d’arme. Nous avons résolu ce problème par voie de circulaire afin que les préfets soient avertis quand une personne était fichée pour terrorisme.
Par ailleurs, nous avons permis le recours au juge administratif. Je rappelle qu’il y a non pas privation, mais restriction de liberté, et que c’est donc le juge administratif qui est compétent. C’est pour cela que les dispositifs de l’article 3 et de l’article 4 sont différents. Quand il y a privation de liberté, c’est le juge des libertés et de la détention qui intervient.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous sommes défavorables aux amendements de suppression présentés par M. Favier, M. Bigot et Mme Benbassa.
… mais il peut bien évidemment se tromper. Malgré notre arsenal juridique, un terroriste peut nous échapper et commettre des attentats. Des attentats ont d’ailleurs été commis sous l’état d’urgence, d’autres le seront probablement demain. Toutefois, si nous dotons l’État d’armes efficaces, mais aussi des armes de la liberté, nous aurons fait notre travail. Si nous nous y refusons, nous perdrons notre liberté. Tel est le dilemme dans lequel nous sommes enfermés. C’est un travail très difficile, très délicat.
La commission a choisi de ne pas supprimer les articles 3 et 4. Elle a prévu une autre mesure, essentielle – je laisserai au président de la commission le soin d’en parler –, qui permettra au Parlement de jouer tout son rôle.
L’obligation de résider dans une commune ou dans le département est enserrée dans un certain nombre de règles destinées à préserver un équilibre entre le respect de la liberté individuelle et la nécessité de protéger ceux qui veulent vivre leur liberté individuelle.
La commission vous propose donc de rejeter ces amendements de suppression.
Je soutiendrai l’amendement de notre collègue Jacques Bigot.
Permettez ensuite de vous lire ce qu’Emmanuel Macron écrivait dans son ouvrage Révolution en novembre 2016 - ce n’est pas si vieux…
Nous l’avons rappelé tout au long de notre débat, la menace terroriste est élevée dans notre pays. Comme l’a dit Alain Richard, elle a également changé de forme.
Auparavant, la menace terroriste était exogène. Les attentats étaient pilotés par une organisation. Aujourd’hui, la menace est protéiforme. Des individus se radicalisent seuls. Lorsque l’on creuse les dossiers, on s’aperçoit que des réseaux leur apportent parfois armes et soutien logistique et que terrorisme et grand banditisme ont partie liée.
Il faut effectivement se protéger et pouvoir travailler en amont. Si nous attendons dans l’État de droit que les faits soient totalement élucidés, nous risquons d’arriver toujours après l’attentat. Nous avons donc inscrit un certain nombre de mesures dans le texte, tout en veillant à ce qu’il soit équilibré.
Il a été dit voilà quelques instants de manière un peu rapide qu’il s’agissait de transcrire l’état d’urgence dans le droit commun. Je rappelle qu’il n’y a pas d’obligation d’assignation à résidence. Le périmètre de déplacement est au moins la commune, voire le département si la personne concernée accepte le port d’un bracelet électronique, ce qui constitue pour elle une liberté. Il s’agit de pouvoir contrôler celui que l’on suspecte de vouloir commettre un attentat et de ne pas prendre le risque de le voir disparaître dans la nature, comme cela s’est produit dans le passé. Ainsi, le terroriste ayant décapité son chef d’entreprise dans la région de Lyon était passé d’un département à l’autre, ce qui explique qu’il n’était plus suivi par aucun service. Si nous ne mettons pas en place ce type de dispositif, nous pourrons nous dire que nous avons commis des fautes.
De même, après l’attentat qui a failli être commis sur les Champs-Élysées, nous nous sommes rendu compte que des personnes fichées S pouvaient détenir un port d’arme. Nous avons résolu ce problème par voie de circulaire afin que les préfets soient avertis quand une personne était fichée pour terrorisme.
Par ailleurs, nous avons permis le recours au juge administratif. Je rappelle qu’il y a non pas privation, mais restriction de liberté, et que c’est donc le juge administratif qui est compétent. C’est pour cela que les dispositifs de l’article 3 et de l’article 4 sont différents. Quand il y a privation de liberté, c’est le juge des libertés et de la détention qui intervient.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous sommes défavorables aux amendements de suppression présentés par M. Favier, M. Bigot et Mme Benbassa.
Je soutiendrai l’amendement de notre collègue Jacques Bigot.
Permettez ensuite de vous lire ce qu’Emmanuel Macron écrivait dans son ouvrage Révolution en novembre 2016 - ce n’est pas si vieux…
Quand on veut bâtir le nouveau monde, il faut faire ce qu’on a annoncé que l’on ferait.
En tout cas, je suis d’accord avec ce qu’il disait à cette époque : « Nous ne pouvons pas vivre en permanence dans un régime d’exception. Il faut donc revenir au droit commun tel qu’il a été renforcé par le législateur et agir avec les bons instruments. Nous avons tout l’appareil législatif permettant de répondre dans la durée à la situation qui est la nôtre. »
Mes chers collègues, chacun d’entre nous s’accorde sur la nécessité pour la Nation d’être ferme et de se défendre âprement contre la menace terroriste. La question centrale, c’est l’efficacité au regard des principes. Ce qu’a dit le Président de la République à Versailles est exact : on ne peut pas combattre les ennemis de la liberté en étant soi-même porteur d’un recul des libertés. Cela étant dit, existe-t-il une autre méthode pour être plus efficace ? Il n’est jamais répondu à cette question !
À titre d’exemple, on va assigner non pas à résidence mais dans la commune une personne que l’on suspecte, sans preuve, de vouloir commettre un attentat. Or cette personne peut très bien trucider quelqu’un dans la commune ! De mémoire, le prêtre de Saint-Étienne-du-Rouvray a été tué par quelqu’un qui habitait la commune ou non loin. Les personnes assignées dans leur commune peuvent rencontrer plein de gens et commettre des actes terroristes. On le voit bien, cette méthode n’est donc pas la plus efficace.
En revanche, il faudrait renforcer l’efficacité des services et des personnes sur le terrain, celle des filatures, et instaurer des évaluations pluralistes de la dangerosité potentielle des personnes fichées S. On le voit, certaines de ces personnes basculent alors qu’on n’imaginait pas qu’elles le feraient, et inversement. Un travail d’investigation, de suivi, de renseignement est indispensable, mais on n’en parle jamais, et ce pour une raison simple : cela coûte cher !
Il est plus simple d’imaginer des mécanismes de restriction de liberté, qui, au bout du compte, du fait de leur caractère durable et répétitif, deviennent des mécanismes de privation de liberté. Permettez-moi de vous dire que nous reculons sur les principes. Nous ne gagnons pas en efficacité et nous mettons le doigt dans un engrenage. Vous allez voir qu’à chaque nouvel attentat, on va nous faire le coup d’une énième loi terroriste pour durcir encore plus la législation. Nous n’en serons pas pour autant plus puissants pour faire reculer ce fléau qui nécessite la mobilisation de toute la Nation et de grands moyens.
Quand on veut bâtir le nouveau monde, il faut faire ce qu’on a annoncé que l’on ferait.
En tout cas, je suis d’accord avec ce qu’il disait à cette époque : « Nous ne pouvons pas vivre en permanence dans un régime d’exception. Il faut donc revenir au droit commun tel qu’il a été renforcé par le législateur et agir avec les bons instruments. Nous avons tout l’appareil législatif permettant de répondre dans la durée à la situation qui est la nôtre. »
Mes chers collègues, chacun d’entre nous s’accorde sur la nécessité pour la Nation d’être ferme et de se défendre âprement contre la menace terroriste. La question centrale, c’est l’efficacité au regard des principes. Ce qu’a dit le Président de la République à Versailles est exact : on ne peut pas combattre les ennemis de la liberté en étant soi-même porteur d’un recul des libertés. Cela étant dit, existe-t-il une autre méthode pour être plus efficace ? Il n’est jamais répondu à cette question !
À titre d’exemple, on va assigner non pas à résidence mais dans la commune une personne que l’on suspecte, sans preuve, de vouloir commettre un attentat. Or cette personne peut très bien trucider quelqu’un dans la commune ! De mémoire, le prêtre de Saint-Étienne-du-Rouvray a été tué par quelqu’un qui habitait la commune ou non loin. Les personnes assignées dans leur commune peuvent rencontrer plein de gens et commettre des actes terroristes. On le voit bien, cette méthode n’est donc pas la plus efficace.
En revanche, il faudrait renforcer l’efficacité des services et des personnes sur le terrain, celle des filatures, et instaurer des évaluations pluralistes de la dangerosité potentielle des personnes fichées S. On le voit, certaines de ces personnes basculent alors qu’on n’imaginait pas qu’elles le feraient, et inversement. Un travail d’investigation, de suivi, de renseignement est indispensable, mais on n’en parle jamais, et ce pour une raison simple : cela coûte cher !
Il est plus simple d’imaginer des mécanismes de restriction de liberté, qui, au bout du compte, du fait de leur caractère durable et répétitif, deviennent des mécanismes de privation de liberté. Permettez-moi de vous dire que nous reculons sur les principes. Nous ne gagnons pas en efficacité et nous mettons le doigt dans un engrenage. Vous allez voir qu’à chaque nouvel attentat, on va nous faire le coup d’une énième loi terroriste pour durcir encore plus la législation. Nous n’en serons pas pour autant plus puissants pour faire reculer ce fléau qui nécessite la mobilisation de toute la Nation et de grands moyens.
Je trouve que ce débat honore une nouvelle fois le Sénat. Le sujet dont nous débattons est très délicat. Le président Bas vous présentera toutes les précautions auxquelles la commission a pensé et qui seront de nature à vous rassurer, précautions que certains connaissent peut-être déjà en raison de leur appartenance à la commission.
Je comprends les hésitations concernant l’article 3. Cela étant dit, on n’abandonne pas du tout le recours au juge, puisque, dans ce domaine, en toute hypothèse, restera le recours au juge administratif. Notre inquiétude tient peut-être au fait que nous pensons que le juge administratif défend moins bien les libertés que le juge judiciaire. Ce n’est historiquement pas vrai, comme l’atteste la jurisprudence.
Pour ma part, je pense que nous pouvons tenter cette solution, étant précisé que si une personne considère qu’elle a été assignée trop longtemps et qu’elle n’est plus dans la restriction de liberté, mais dans quelque chose de beaucoup plus fort, la réponse sur ce point interviendra par le mécanisme de la question prioritaire de constitutionnalité.
Encore une fois, ne donnons pas à penser qu’il y aurait des sous-juges en matière de respect des libertés. Le juge administratif, et je suis un profond admirateur des juges de l’ordre judiciaire, ne mérite pas que, ne serait-ce que sur un fragment de raisonnement, on lui fasse le procès selon lequel il serait un mauvais juge en ce qui concerne le respect des libertés.
Nous touchons aux deux articles de ce projet de loi qui appellent un débat, car franchement, que chacun au moins l’avoue, y compris ceux qui défendent ces dispositions, nous changeons de conception.
Vous pouvez invoquer la nouveauté de la menace ou le terrorisme, mes chers collègues. Il n’empêche que nous passons à une autre façon de concevoir la justice, comme cela a été développé par Mireille Delmas-Marty, et que nous devons aussi placer la discussion à ce niveau.
Nous étions dans une société dans laquelle la justice punissait l’acte, et nous entrons subrepticement dans une société dans laquelle on punit au titre de la prévention de l’acte. Il s’agit d’un véritable changement de paradigme !
Inutile de hocher la tête, mes chers collègues, comme si vous saviez tout et nous rien : il y a débat.
D’ailleurs, pourquoi ce débat aujourd'hui ? Le terrorisme et les menaces existaient déjà par le passé. Nous balaierions ce que, tous bords confondus, nous avons toujours dit dans cet hémicycle – c’est pourquoi l’état d’urgence avait un caractère exceptionnel –, mais qu’est-ce qui a changé concrètement ?
Certes, une nouvelle forme de terrorisme menace et il faut parfaire notre droit pour répondre à l’inédit de la situation. Mais nous avons déjà légiféré pour intégrer dans la loi toutes les dispositions de l’état d’urgence qui devaient être rendues permanentes.
Nous n’en sommes pas au commencement du débat ! Il y a eu un quinquennat avant ! Nous avons souvent légiféré et, même si je n’étais pas toujours d’accord avec les mesures proposées, j’ai soutenu ces lois car je comprenais bien à quel point il était nécessaire de se défendre.
Jean-Jacques Urvoas a été à l’avant-garde de ce combat, comme président de la commission des lois à l’Assemblée nationale, puis comme ministre de la justice. Il a toujours très fermement défendu cette nécessité de se protéger. Pourtant, il estime aujourd’hui que ce projet de loi est superflu et que nous avons suffisamment légiféré pour pouvoir lever l’état d’urgence.
Le précédent Président de la République, lui aussi, avait indiqué en juillet dernier que l’état d’urgence ne s’imposait plus et qu’il fallait le lever. Le nouvel attentat perpétré à ce moment-là ne l’a pas été du fait d’une quelconque levée de cet état d’urgence – il était justement en place – ou d’une absence de moyens.
Donc, ne faisons pas comme si tout ceci n’était qu’une péripétie : c’est un véritable changement que nous envisageons et il aurait de graves répercussions sur nos libertés.
Les terroristes nous ont mis au défi de nous protéger d’eux et de les combattre rigoureusement, sans jamais leur céder le fait qu’ils auront mis en danger les libertés individuelles et collectives sur lesquelles repose l’équilibre de notre pays. Avec ces articles, mes chers collègues, nous cédons et, d’une certaine manière, nous leur accordons une victoire.
Je trouve que ce débat honore une nouvelle fois le Sénat. Le sujet dont nous débattons est très délicat. Le président Bas vous présentera toutes les précautions auxquelles la commission a pensé et qui seront de nature à vous rassurer, précautions que certains connaissent peut-être déjà en raison de leur appartenance à la commission.
Je comprends les hésitations concernant l’article 3. Cela étant dit, on n’abandonne pas du tout le recours au juge, puisque, dans ce domaine, en toute hypothèse, restera le recours au juge administratif. Notre inquiétude tient peut-être au fait que nous pensons que le juge administratif défend moins bien les libertés que le juge judiciaire. Ce n’est historiquement pas vrai, comme l’atteste la jurisprudence.
Pour ma part, je pense que nous pouvons tenter cette solution, étant précisé que si une personne considère qu’elle a été assignée trop longtemps et qu’elle n’est plus dans la restriction de liberté, mais dans quelque chose de beaucoup plus fort, la réponse sur ce point interviendra par le mécanisme de la question prioritaire de constitutionnalité.
Encore une fois, ne donnons pas à penser qu’il y aurait des sous-juges en matière de respect des libertés. Le juge administratif, et je suis un profond admirateur des juges de l’ordre judiciaire, ne mérite pas que, ne serait-ce que sur un fragment de raisonnement, on lui fasse le procès selon lequel il serait un mauvais juge en ce qui concerne le respect des libertés.
M. Alain Richard hoche la tête en signe de dénégation.
Nous touchons aux deux articles de ce projet de loi qui appellent un débat, car franchement, que chacun au moins l’avoue, y compris ceux qui défendent ces dispositions, nous changeons de conception.
Vous pouvez invoquer la nouveauté de la menace ou le terrorisme, mes chers collègues. Il n’empêche que nous passons à une autre façon de concevoir la justice, comme cela a été développé par Mireille Delmas-Marty, et que nous devons aussi placer la discussion à ce niveau.
Nous étions dans une société dans laquelle la justice punissait l’acte, et nous entrons subrepticement dans une société dans laquelle on punit au titre de la prévention de l’acte. Il s’agit d’un véritable changement de paradigme !
Inutile de hocher la tête, mes chers collègues, comme si vous saviez tout et nous rien : il y a débat.
D’ailleurs, pourquoi ce débat aujourd'hui ? Le terrorisme et les menaces existaient déjà par le passé. Nous balaierions ce que, tous bords confondus, nous avons toujours dit dans cet hémicycle – c’est pourquoi l’état d’urgence avait un caractère exceptionnel –, mais qu’est-ce qui a changé concrètement ?
Certes, une nouvelle forme de terrorisme menace et il faut parfaire notre droit pour répondre à l’inédit de la situation. Mais nous avons déjà légiféré pour intégrer dans la loi toutes les dispositions de l’état d’urgence qui devaient être rendues permanentes.
Nous n’en sommes pas au commencement du débat ! Il y a eu un quinquennat avant ! Nous avons souvent légiféré et, même si je n’étais pas toujours d’accord avec les mesures proposées, j’ai soutenu ces lois car je comprenais bien à quel point il était nécessaire de se défendre.
Jean-Jacques Urvoas a été à l’avant-garde de ce combat, comme président de la commission des lois à l’Assemblée nationale, puis comme ministre de la justice. Il a toujours très fermement défendu cette nécessité de se protéger. Pourtant, il estime aujourd’hui que ce projet de loi est superflu et que nous avons suffisamment légiféré pour pouvoir lever l’état d’urgence.
Le précédent Président de la République, lui aussi, avait indiqué en juillet dernier que l’état d’urgence ne s’imposait plus et qu’il fallait le lever. Le nouvel attentat perpétré à ce moment-là ne l’a pas été du fait d’une quelconque levée de cet état d’urgence – il était justement en place – ou d’une absence de moyens.
Donc, ne faisons pas comme si tout ceci n’était qu’une péripétie : c’est un véritable changement que nous envisageons et il aurait de graves répercussions sur nos libertés.
Les terroristes nous ont mis au défi de nous protéger d’eux et de les combattre rigoureusement, sans jamais leur céder le fait qu’ils auront mis en danger les libertés individuelles et collectives sur lesquelles repose l’équilibre de notre pays. Avec ces articles, mes chers collègues, nous cédons et, d’une certaine manière, nous leur accordons une victoire.
Devant le Congrès, le Président de la République nous a dit vouloir rendre aux Français leurs libertés… Mais, dans le nouveau monde, on change les mots : on remplace « état d’urgence » par « état permanent », « assignation à résidence » par « mesure individuelle de contrôle ». Et la liberté, en quoi va-t-on la changer ?…
Depuis plusieurs années, nous avons fait évoluer le code pénal pour, justement, l’adapter aux nouvelles formes de terrorisme et créer de nouvelles incriminations. Nous avons permis l’ouverture d’un certain nombre d’informations judiciaires, donc rendues possibles, dans le respect du juge judiciaire, des procédures inexistantes par le passé, pour mieux protéger et punir.
Nous avons même eu le sentiment, parfois, de faire « tangenter » le code pénal et le principe de précaution, en particulier lorsque nous avons voté des lois en 2014 et en 2016, lois que j’ai pourtant soutenues.
Mais là, nous sommes ailleurs ! Il n’est plus question du code pénal ; il s’agit de créer, à côté de ce code pénal et des mesures judiciaires susceptibles d’être prises, une seconde voie, une voie administrative. Allons-nous vraiment dans le sens de la clarté et de la responsabilité ?
Si l’on veut agir efficacement, il faut en effet clarifier les responsabilités. Je ne comprends pas pourquoi, après avoir tant progressé dans l’idée que la justice devait être la solution, on en appellerait maintenant aux mesures administratives. Nous ne pouvons pas aller dans cette direction.
Il faut être clair, la justice doit avoir la pleine responsabilité de l’étude et de la répression des actes terroristes. C’est à elle que revient la démonstration ; c’est elle qui doit s’engager.
Vous avez évoqué Victor Hugo, monsieur le ministre d’État, et cette idée selon laquelle, en augmentant la liberté, on augmentait la responsabilité. Cette dernière notion est absolument indispensable, aujourd'hui, si nous voulons que chacun se mobilise pour défendre la sécurité de notre société. Par ailleurs, on ne peut pas opposer liberté et sécurité ; les deux vont ensemble, comme vous l’avez d’ailleurs dit lors de votre audition.
Ce n’est pas, me semble-t-il, en étendant ce que certains auraient pu appeler le périmètre de la violence légitime de l’État §que nous trouverons la solution. Celle-ci réside, au contraire, dans la justice et dans la notion de responsabilité.
Je ne pense pas non plus qu’une démarche de ce type, avec tous les moyens qu’elle nécessite, puisse être engagée quand 10 % des annulations de crédits envisagées concernent vos missions en matière de sécurité.
M. Alain Richard hoche la tête en signe de dénégation.
Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit.
Devant le Congrès, le Président de la République nous a dit vouloir rendre aux Français leurs libertés… Mais, dans le nouveau monde, on change les mots : on remplace « état d’urgence » par « état permanent », « assignation à résidence » par « mesure individuelle de contrôle ». Et la liberté, en quoi va-t-on la changer ?…
Depuis plusieurs années, nous avons fait évoluer le code pénal pour, justement, l’adapter aux nouvelles formes de terrorisme et créer de nouvelles incriminations. Nous avons permis l’ouverture d’un certain nombre d’informations judiciaires, donc rendues possibles, dans le respect du juge judiciaire, des procédures inexistantes par le passé, pour mieux protéger et punir.
Nous avons même eu le sentiment, parfois, de faire « tangenter » le code pénal et le principe de précaution, en particulier lorsque nous avons voté des lois en 2014 et en 2016, lois que j’ai pourtant soutenues.
Mais là, nous sommes ailleurs ! Il n’est plus question du code pénal ; il s’agit de créer, à côté de ce code pénal et des mesures judiciaires susceptibles d’être prises, une seconde voie, une voie administrative. Allons-nous vraiment dans le sens de la clarté et de la responsabilité ?
Si l’on veut agir efficacement, il faut en effet clarifier les responsabilités. Je ne comprends pas pourquoi, après avoir tant progressé dans l’idée que la justice devait être la solution, on en appellerait maintenant aux mesures administratives. Nous ne pouvons pas aller dans cette direction.
Il faut être clair, la justice doit avoir la pleine responsabilité de l’étude et de la répression des actes terroristes. C’est à elle que revient la démonstration ; c’est elle qui doit s’engager.
Vous avez évoqué Victor Hugo, monsieur le ministre d’État, et cette idée selon laquelle, en augmentant la liberté, on augmentait la responsabilité. Cette dernière notion est absolument indispensable, aujourd'hui, si nous voulons que chacun se mobilise pour défendre la sécurité de notre société. Par ailleurs, on ne peut pas opposer liberté et sécurité ; les deux vont ensemble, comme vous l’avez d’ailleurs dit lors de votre audition.
Ce n’est pas, me semble-t-il, en étendant ce que certains auraient pu appeler le périmètre de la violence légitime de l’État §que nous trouverons la solution. Celle-ci réside, au contraire, dans la justice et dans la notion de responsabilité.
Je ne pense pas non plus qu’une démarche de ce type, avec tous les moyens qu’elle nécessite, puisse être engagée quand 10 % des annulations de crédits envisagées concernent vos missions en matière de sécurité.
Je voudrais tout d’abord signaler qu’Adel Kermiche, l’un des deux criminels de Saint-Étienne-du-Rouvray, bénéficiait d’un aménagement de peine et portait un bracelet électronique.
Donc, oui, nous sommes engagés dans une guerre totalement asymétrique et, face à cela, nous devons prendre des mesures. Toutefois, à l’instar de notre collègue Jean-Yves Leconte, je voudrais tout de même attirer votre attention, monsieur le ministre d’État, sur les problèmes de budget.
Les décrets d’application n’étant pas encore sortis, la loi relative au renseignement que nous avons votée n’est toujours pas appliquée. L’armée va subir des restrictions budgétaires, comme c’est le cas actuellement du ministère de la justice et, encore une fois, du ministère de l’intérieur.
Si je saisis bien la réalité d’une guerre asymétrique à mener contre le terrorisme, je ne vois pas du tout comment, en votant ce type de dispositions, et alors que notre justice est complètement défaillante, par manque de moyens, nous allons pouvoir combattre.
Ce projet de loi est plein de bonne volonté et, effectivement, il ne fait pas de doute que nous flirtons avec le principe de précaution, en cherchant, de plus en plus, à réprimer les intentions. Mais avec quels moyens allez-vous mettre ces mesures en application ?
Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit.
Nous sommes en train de voter des dispositions qui ne sont pas financées, pas plus que ne l’étaient celles de la loi relative au renseignement qu’on nous a fait adopter voilà quelques mois, au motif qu’elles étaient absolument indispensables. Et je ne parle pas du partage des données des dossiers passagers – le PNR ou Passenger Name Record –, que nous évoquerons peut-être tout à l’heure.
Comment allez-vous appliquer de telles mesures sans gendarmerie sur les territoires, sans moyens pour la justice et pour nos militaires ?
Je voudrais tout d’abord signaler qu’Adel Kermiche, l’un des deux criminels de Saint-Étienne-du-Rouvray, bénéficiait d’un aménagement de peine et portait un bracelet électronique.
Donc, oui, nous sommes engagés dans une guerre totalement asymétrique et, face à cela, nous devons prendre des mesures. Toutefois, à l’instar de notre collègue Jean-Yves Leconte, je voudrais tout de même attirer votre attention, monsieur le ministre d’État, sur les problèmes de budget.
Les décrets d’application n’étant pas encore sortis, la loi relative au renseignement que nous avons votée n’est toujours pas appliquée. L’armée va subir des restrictions budgétaires, comme c’est le cas actuellement du ministère de la justice et, encore une fois, du ministère de l’intérieur.
Si je saisis bien la réalité d’une guerre asymétrique à mener contre le terrorisme, je ne vois pas du tout comment, en votant ce type de dispositions, et alors que notre justice est complètement défaillante, par manque de moyens, nous allons pouvoir combattre.
Ce projet de loi est plein de bonne volonté et, effectivement, il ne fait pas de doute que nous flirtons avec le principe de précaution, en cherchant, de plus en plus, à réprimer les intentions. Mais avec quels moyens allez-vous mettre ces mesures en application ?
Nous sommes en train de voter des dispositions qui ne sont pas financées, pas plus que ne l’étaient celles de la loi relative au renseignement qu’on nous a fait adopter voilà quelques mois, au motif qu’elles étaient absolument indispensables. Et je ne parle pas du partage des données des dossiers passagers – le PNR ou Passenger Name Record –, que nous évoquerons peut-être tout à l’heure.
Comment allez-vous appliquer de telles mesures sans gendarmerie sur les territoires, sans moyens pour la justice et pour nos militaires ?
Beaucoup a été dit sur cet article et à mon tour, mes chers collègues, je voudrais vous faire part de ma propre conviction.
D’abord, je veux souligner que cet article s’inscrit dans le cadre de notre État de droit.
Il faut le lire en ayant à l’esprit les contrôles qui s’exerceront sur la décision du ministre de l’intérieur.
Cette décision est assortie de nombreuses conditions, que j’ai à l’instant même sous les yeux.
Il s’agit de prévenir des actes de terrorisme, quand il existe des raisons sérieuses de penser que le comportement de l’individu constitue une menace d’une particulière gravité pour la sécurité et l’ordre publics.
À cela, s’ajoute une autre condition : l’individu « soit entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme » – ce n’est tout de même pas rien –, soit « soutient ou adhère à des thèses incitant à la commission d’actes de terrorisme ou faisant l’apologie de tels actes ».
C’est seulement quand ces conditions sont remplies…
… que le ministre de l’intérieur peut prendre sa décision et s’il le fait, soyez certains que le Conseil d’État en sera saisi, comme cela fut le cas pour les décisions prises dans le cadre de l’état d’urgence, et qu’il demandera audit ministre de démontrer la réalité des renseignements sur le fondement desquels sa décision aura été prise.
Pourquoi insister sur le fait que la mesure s’inscrit dans le cadre de notre État de droit ? Certains orateurs ont invoqué l’intervention du juge judiciaire au motif qu’il s’agissait ici de punir. Ce n’est précisément pas le cas : nous cherchons à prévenir, non à punir !
Nous n’en sommes pas au stade où l’on recherche les auteurs d’un attentat pour les punir ; nous en sommes au stade où – fort heureusement – il n’y a pas de victime et où l’on cherche à éviter qu’il y en ait en prenant des mesures préventives.
Beaucoup a été dit sur cet article et à mon tour, mes chers collègues, je voudrais vous faire part de ma propre conviction.
D’abord, je veux souligner que cet article s’inscrit dans le cadre de notre État de droit.
Il faut le lire en ayant à l’esprit les contrôles qui s’exerceront sur la décision du ministre de l’intérieur.
Cette décision est assortie de nombreuses conditions, que j’ai à l’instant même sous les yeux.
Il s’agit de prévenir des actes de terrorisme, quand il existe des raisons sérieuses de penser que le comportement de l’individu constitue une menace d’une particulière gravité pour la sécurité et l’ordre publics.
À cela, s’ajoute une autre condition : l’individu « soit entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme » – ce n’est tout de même pas rien –, soit « soutient ou adhère à des thèses incitant à la commission d’actes de terrorisme ou faisant l’apologie de tels actes ».
C’est seulement quand ces conditions sont remplies…
M. Jean-Yves Leconte s’exclame.
Ces mesures préventives sont plus importantes encore que les mesures punitives. Chaque fois que l’on empêchera que des vies humaines soient fauchées par des terroristes, on aura rendu aux Français le service le plus éminent que l’on puisse leur rendre. On aura assuré leur sécurité et, à ce titre aussi, nous nous positionnons dans le cadre de l’État de droit, républicain, établissant une parfaite distinction entre prévention et punition.
Il s’agit donc ici de prévenir, en prenant des mesures administratives qui ne sont pas privatives de liberté.
Il est question non d’enfermer l’individu, mais de réduire sa liberté d’aller et venir pour mieux le surveiller, dans des conditions précisées par la loi, sous le contrôle du Conseil d’État dont chacun sait l’exigence en matière de protection des libertés et de vérification de la proportionnalité de la mesure aux finalités que le législateur autorise le ministre de l’intérieur à poursuivre.
J’ajouterai que ce régime, consistant à limiter la liberté de mouvement d’un individu dangereux, est plus souple que celui des assignations à résidence, pourtant très utiles, qui ont été prononcées pendant la durée de l’état d’urgence. Alors que ces dernières peuvent intervenir en dehors de toute menace terroriste, par exemple en cas de menace pour la sécurité, lui se restreint au seul terrorisme.
Sa souplesse tient aussi au fait que les exigences de la vie professionnelle et familiale de l’individu mis sous surveillance sont prises en compte, que ce dernier peut se déplacer sur le territoire de sa commune, au moins, et sur un périmètre plus large si le ministre de l’intérieur le décide.
Enfin, la mesure est prononcée pour trois mois et son renouvellement, grâce aux initiatives de notre rapporteur, sera assorti de conditions extrêmement sévères, avec une intervention obligatoire du Conseil d’État.
Donc, le dispositif proposé est beaucoup plus souple que celui de l’assignation à résidence.
Enfin, la question de l’efficacité a été posée, et c’est une vraie question. M. le ministre de l’intérieur aura-t-il besoin de ce dispositif ? Oui, j’en suis convaincu. Mais c’est là une profession de foi que nous devons pouvoir vérifier.
C’est pourquoi nous avons décidé, au sein de la commission des lois, d’imposer au ministre de l’intérieur de nous rendre compte, comme il l’a fait pendant l’état d’urgence, des dispositions qui seront prises en application de cet article.
Chaque année, nous saurons combien de mesures auront été engagées, dans combien de cas le Conseil d’État aura annulé la décision du ministre et dans combien de cas nous aurons réussi – et c’est un objectif utile – à judiciariser la surveillance, c'est-à-dire à permettre au juge judiciaire, en cas de délit commis par l’individu placé sous surveillance, d’engager des poursuites et, éventuellement, de condamner celui-ci à une peine de prison.
Le Parlement pourra s’appuyer sur ce rapport annuel lorsqu’il aura à se prononcer, à nouveau, sur le dispositif que je vous propose aujourd'hui de voter.
Nous avons effectivement prévu, au sein de la commission, que ce dispositif soit temporaire : ces dispositions législatives tomberont donc d’elles-mêmes le 31 décembre 2021, si elles ne sont pas reconduites par un nouveau vote de l’Assemblée nationale et du Sénat.
À nouveau, nous nous inspirons du régime mis en place pour l’état d’urgence, dont l’une des forces a été, selon nous, nos yeux, d’adosser au contrôle du Conseil constitutionnel et du Conseil d’État notre propre contrôle.
Ainsi, nous avons instauré une mission de suivi, dont le rapporteur spécial était Michel Mercier. Cette mission de suivi a été dotée par le Sénat des pouvoirs d’investigation d’une commission d’enquête, si bien que nous savons tout de ce qui a été mis en œuvre par l’État dans le cadre de l’état d’urgence. Qui plus est, toute prolongation de ce dernier implique un vote de notre part.
De la même manière, nous devrons voter à nouveau pour prolonger, au-delà du 31 décembre 2021, les présentes mesures. Grâce à cette clause d’autodestruction que nous avons introduite, le ministre de l’intérieur sera tenu d’en démontrer l’utilité et vos doutes, mes chers collègues, seront alors soit confirmés, soit levés. Quoi qu’il en soit, le dispositif ne survivra pas, si les exigences de la lutte contre le terrorisme ne l’imposent pas.
… que le ministre de l’intérieur peut prendre sa décision et s’il le fait, soyez certains que le Conseil d’État en sera saisi, comme cela fut le cas pour les décisions prises dans le cadre de l’état d’urgence, et qu’il demandera audit ministre de démontrer la réalité des renseignements sur le fondement desquels sa décision aura été prise.
Pourquoi insister sur le fait que la mesure s’inscrit dans le cadre de notre État de droit ? Certains orateurs ont invoqué l’intervention du juge judiciaire au motif qu’il s’agissait ici de punir. Ce n’est précisément pas le cas : nous cherchons à prévenir, non à punir !
Nous n’en sommes pas au stade où l’on recherche les auteurs d’un attentat pour les punir ; nous en sommes au stade où – fort heureusement – il n’y a pas de victime et où l’on cherche à éviter qu’il y en ait en prenant des mesures préventives.
Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.
M. Jean-Yves Leconte s’exclame.
Ces mesures préventives sont plus importantes encore que les mesures punitives. Chaque fois que l’on empêchera que des vies humaines soient fauchées par des terroristes, on aura rendu aux Français le service le plus éminent que l’on puisse leur rendre. On aura assuré leur sécurité et, à ce titre aussi, nous nous positionnons dans le cadre de l’État de droit, républicain, établissant une parfaite distinction entre prévention et punition.
Il s’agit donc ici de prévenir, en prenant des mesures administratives qui ne sont pas privatives de liberté.
Il est question non d’enfermer l’individu, mais de réduire sa liberté d’aller et venir pour mieux le surveiller, dans des conditions précisées par la loi, sous le contrôle du Conseil d’État dont chacun sait l’exigence en matière de protection des libertés et de vérification de la proportionnalité de la mesure aux finalités que le législateur autorise le ministre de l’intérieur à poursuivre.
J’ajouterai que ce régime, consistant à limiter la liberté de mouvement d’un individu dangereux, est plus souple que celui des assignations à résidence, pourtant très utiles, qui ont été prononcées pendant la durée de l’état d’urgence. Alors que ces dernières peuvent intervenir en dehors de toute menace terroriste, par exemple en cas de menace pour la sécurité, lui se restreint au seul terrorisme.
Sa souplesse tient aussi au fait que les exigences de la vie professionnelle et familiale de l’individu mis sous surveillance sont prises en compte, que ce dernier peut se déplacer sur le territoire de sa commune, au moins, et sur un périmètre plus large si le ministre de l’intérieur le décide.
Enfin, la mesure est prononcée pour trois mois et son renouvellement, grâce aux initiatives de notre rapporteur, sera assorti de conditions extrêmement sévères, avec une intervention obligatoire du Conseil d’État.
Donc, le dispositif proposé est beaucoup plus souple que celui de l’assignation à résidence.
Enfin, la question de l’efficacité a été posée, et c’est une vraie question. M. le ministre de l’intérieur aura-t-il besoin de ce dispositif ? Oui, j’en suis convaincu. Mais c’est là une profession de foi que nous devons pouvoir vérifier.
C’est pourquoi nous avons décidé, au sein de la commission des lois, d’imposer au ministre de l’intérieur de nous rendre compte, comme il l’a fait pendant l’état d’urgence, des dispositions qui seront prises en application de cet article.
Chaque année, nous saurons combien de mesures auront été engagées, dans combien de cas le Conseil d’État aura annulé la décision du ministre et dans combien de cas nous aurons réussi – et c’est un objectif utile – à judiciariser la surveillance, c'est-à-dire à permettre au juge judiciaire, en cas de délit commis par l’individu placé sous surveillance, d’engager des poursuites et, éventuellement, de condamner celui-ci à une peine de prison.
Le Parlement pourra s’appuyer sur ce rapport annuel lorsqu’il aura à se prononcer, à nouveau, sur le dispositif que je vous propose aujourd'hui de voter.
Nous avons effectivement prévu, au sein de la commission, que ce dispositif soit temporaire : ces dispositions législatives tomberont donc d’elles-mêmes le 31 décembre 2021, si elles ne sont pas reconduites par un nouveau vote de l’Assemblée nationale et du Sénat.
À nouveau, nous nous inspirons du régime mis en place pour l’état d’urgence, dont l’une des forces a été, selon nous, nos yeux, d’adosser au contrôle du Conseil constitutionnel et du Conseil d’État notre propre contrôle.
Ainsi, nous avons instauré une mission de suivi, dont le rapporteur spécial était Michel Mercier. Cette mission de suivi a été dotée par le Sénat des pouvoirs d’investigation d’une commission d’enquête, si bien que nous savons tout de ce qui a été mis en œuvre par l’État dans le cadre de l’état d’urgence. Qui plus est, toute prolongation de ce dernier implique un vote de notre part.
De la même manière, nous devrons voter à nouveau pour prolonger, au-delà du 31 décembre 2021, les présentes mesures. Grâce à cette clause d’autodestruction que nous avons introduite, le ministre de l’intérieur sera tenu d’en démontrer l’utilité et vos doutes, mes chers collègues, seront alors soit confirmés, soit levés. Quoi qu’il en soit, le dispositif ne survivra pas, si les exigences de la lutte contre le terrorisme ne l’imposent pas.
Je voudrais ajouter quelques réflexions dans ce débat touchant aux principes.
Je rappelle à mes collègues qui s’interrogent sur les rôles respectifs du juge et de l’administration l’existence du principe de séparation des pouvoirs.
Dans ce cadre, la prévention des attaques, la recherche et la protection de l’ordre public sont la mission constitutionnelle de l’exécutif. Les mesures visant à limiter la liberté de mouvements de personnes à l’encontre desquelles existent des raisons sérieuses de suspicion d’aide au terrorisme relèvent de la prévention, c'est-à-dire de l’acte de gouverner.
Ce n’est en rien une découverte ; il est donc tout à fait logique que cette mission revienne au représentant de l’exécutif.
L’exécutif est placé sous le contrôle d’une justice, la justice administrative, reconnue par la Constitution et ayant, dans son champ de compétences, le même niveau de responsabilité et d’autorité que l’autorité judiciaire.
Comme l’a souligné le rapporteur, à de multiples reprises au cours des mois qui viennent de s’écouler, les juges administratifs et, en dernier ressort, le Conseil d’État ont démontré une capacité de contrôle critique des mesures éventuellement injustifiées qui constitue une garantie pour tous les citoyens.
Enfin, s’agissant des moyens, je me permets d’appeler votre attention sur ce fait : la mesure dont nous parlons vise à placer sous surveillance des personnes qui présentent une dangerosité, avérée, car elles sont susceptibles d’aider à la préparation d’actes terroristes. Pouvoir circonscrire leurs mouvements, plutôt que de devoir mobiliser des dizaines d’inspecteurs de police pour les filer, permet précisément une économie de moyens.
Ainsi, sous l’angle de la bonne gestion des moyens de sécurité, cette mesure d’aide à l’exécutif est à la fois légale et nécessaire.
Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 6, 23 rectifié et 28.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe La République en marche.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Je voudrais ajouter quelques réflexions dans ce débat touchant aux principes.
Je rappelle à mes collègues qui s’interrogent sur les rôles respectifs du juge et de l’administration l’existence du principe de séparation des pouvoirs.
Dans ce cadre, la prévention des attaques, la recherche et la protection de l’ordre public sont la mission constitutionnelle de l’exécutif. Les mesures visant à limiter la liberté de mouvements de personnes à l’encontre desquelles existent des raisons sérieuses de suspicion d’aide au terrorisme relèvent de la prévention, c'est-à-dire de l’acte de gouverner.
Ce n’est en rien une découverte ; il est donc tout à fait logique que cette mission revienne au représentant de l’exécutif.
L’exécutif est placé sous le contrôle d’une justice, la justice administrative, reconnue par la Constitution et ayant, dans son champ de compétences, le même niveau de responsabilité et d’autorité que l’autorité judiciaire.
Comme l’a souligné le rapporteur, à de multiples reprises au cours des mois qui viennent de s’écouler, les juges administratifs et, en dernier ressort, le Conseil d’État ont démontré une capacité de contrôle critique des mesures éventuellement injustifiées qui constitue une garantie pour tous les citoyens.
Enfin, s’agissant des moyens, je me permets d’appeler votre attention sur ce fait : la mesure dont nous parlons vise à placer sous surveillance des personnes qui présentent une dangerosité, avérée, car elles sont susceptibles d’aider à la préparation d’actes terroristes. Pouvoir circonscrire leurs mouvements, plutôt que de devoir mobiliser des dizaines d’inspecteurs de police pour les filer, permet précisément une économie de moyens.
Ainsi, sous l’angle de la bonne gestion des moyens de sécurité, cette mesure d’aide à l’exécutif est à la fois légale et nécessaire.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 6, 23 rectifié et 28.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe La République en marche.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Le scrutin a lieu.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 122 :
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 43 rectifié ter, présenté par Mme Costes et M. Castelli, n'est pas soutenu.
L'amendement n° 45 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 228 -2. – Le ministre de l’intérieur informe sans délai le procureur de la République de Paris et le procureur de la République territorialement compétent des mesures mentionnées aux 1°, 2° et 3° ci-dessous, qu’il veut prendre à l’encontre d’une personne mentionnée à l’article L. 228-1. Le procureur de la République de Paris saisit le juge des libertés et de la détention près le tribunal de grande instance de Paris pour qu’il se prononce sur l’opportunité d’ordonner les mesures suivantes :
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
L’article 3, comme les deux précédents, a fait l’objet d’une attention particulière de notre part.
En effet, à la suite de certaines réactions de personnalités qualifiées dans la presse après la publication du projet de loi soumis au Conseil d’État, le Gouvernement a accepté de faire évoluer l’article 4 relatif aux visites domiciliaires.
Sur l’article 3, le rapporteur a apporté des modifications substantielles, en encadrant mieux le renouvellement des mesures individuelles de surveillance et en supprimant la disposition gouvernementale permettant d’obliger une personne à communiquer ses identifiants et abonnements électroniques.
Nous considérons néanmoins que deux points restent particulièrement problématiques dans l’article 3 : d’une part, la question du contrôle des mesures individuelles de surveillance initiales, qui reste, semble-t-il, dévolu au juge administratif ; d’autre part, la question du port de bracelets électroniques comme alternative à l’assignation à résidence.
Cet amendement a donc pour objet de poursuivre le chemin parcouru par le rapporteur et de soumettre la décision de prononcer des mesures individuelles de surveillance à l’appréciation du juge des libertés et de la détention auprès du tribunal de grande instance de Paris.
Il s’agit de restaurer la compétence du juge judiciaire en la matière dès lors que ces mesures ressemblent à celles qui sont prévues aux articles 142-5 à 142-13 du code de procédure pénale.
Il paraît effectivement incohérent d’exclure le juge judiciaire de cette procédure qui lui est familière, et d’en charger les juridictions administratives qui l’appliquent seulement depuis le début de l’état d’urgence, étant précisé que cela constituera pour ces dernières, en outre, une charge supplémentaire de travail.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 122 :
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 43 rectifié ter, présenté par Mme Costes et M. Castelli, n'est pas soutenu.
L'amendement n° 45 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 228 -2. – Le ministre de l’intérieur informe sans délai le procureur de la République de Paris et le procureur de la République territorialement compétent des mesures mentionnées aux 1°, 2° et 3° ci-dessous, qu’il veut prendre à l’encontre d’une personne mentionnée à l’article L. 228-1. Le procureur de la République de Paris saisit le juge des libertés et de la détention près le tribunal de grande instance de Paris pour qu’il se prononce sur l’opportunité d’ordonner les mesures suivantes :
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
Dans ces conditions, je ne peux que lui demander de retirer son amendement.
L’article 3, comme les deux précédents, a fait l’objet d’une attention particulière de notre part.
En effet, à la suite de certaines réactions de personnalités qualifiées dans la presse après la publication du projet de loi soumis au Conseil d’État, le Gouvernement a accepté de faire évoluer l’article 4 relatif aux visites domiciliaires.
Sur l’article 3, le rapporteur a apporté des modifications substantielles, en encadrant mieux le renouvellement des mesures individuelles de surveillance et en supprimant la disposition gouvernementale permettant d’obliger une personne à communiquer ses identifiants et abonnements électroniques.
Nous considérons néanmoins que deux points restent particulièrement problématiques dans l’article 3 : d’une part, la question du contrôle des mesures individuelles de surveillance initiales, qui reste, semble-t-il, dévolu au juge administratif ; d’autre part, la question du port de bracelets électroniques comme alternative à l’assignation à résidence.
Cet amendement a donc pour objet de poursuivre le chemin parcouru par le rapporteur et de soumettre la décision de prononcer des mesures individuelles de surveillance à l’appréciation du juge des libertés et de la détention auprès du tribunal de grande instance de Paris.
Il s’agit de restaurer la compétence du juge judiciaire en la matière dès lors que ces mesures ressemblent à celles qui sont prévues aux articles 142-5 à 142-13 du code de procédure pénale.
Il paraît effectivement incohérent d’exclure le juge judiciaire de cette procédure qui lui est familière, et d’en charger les juridictions administratives qui l’appliquent seulement depuis le début de l’état d’urgence, étant précisé que cela constituera pour ces dernières, en outre, une charge supplémentaire de travail.
M. Jean-Noël Guérini. Comme d’habitude ! Vous êtes extraordinaire, monsieur le rapporteur !
Dans ces conditions, je ne peux que lui demander de retirer son amendement.
Sourires.
M. Alain Fouché. Décidément, cela ressemble à un règlement de comptes !
M. Jean-Noël Guérini. Comme d’habitude ! Vous êtes extraordinaire, monsieur le rapporteur !
Nouveaux sourires.
Sourires.
M. Alain Fouché. Décidément, cela ressemble à un règlement de comptes !
Le Gouvernement demande lui aussi le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.
Nouveaux sourires.
Le Gouvernement demande lui aussi le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.
L’amendement n° 45 rectifié est retiré.
L'amendement n° 47 rectifié, présenté par Mme Costes, MM. Arnell, Barbier, Castelli, Collin, Esnol, Guérini et Hue, Mmes Jouve et Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 1° Ne pas se déplacer à l’extérieur d’un périmètre géographique déterminé, qui ne peut être inférieur au département. La délimitation de ce périmètre permet à l’intéressé de poursuivre une vie familiale et professionnelle normale, et s’étend, le cas échéant, à d’autres départements que celui de son lieu habituel de résidence ;
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
M. Jean-Noël Guérini. J’espère que, cette fois-ci, M. le rapporteur se montrera plus attentif et plus attentionné !
Sourires.
L’amendement n° 45 rectifié est retiré.
L'amendement n° 47 rectifié, présenté par Mme Costes, MM. Arnell, Barbier, Castelli, Collin, Esnol, Guérini et Hue, Mmes Jouve et Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 1° Ne pas se déplacer à l’extérieur d’un périmètre géographique déterminé, qui ne peut être inférieur au département. La délimitation de ce périmètre permet à l’intéressé de poursuivre une vie familiale et professionnelle normale, et s’étend, le cas échéant, à d’autres départements que celui de son lieu habituel de résidence ;
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
Cet amendement vise à alerter le Gouvernement quant au risque d’application inégale des mesures individuelles de surveillance selon que l’on habite une petite commune ou une métropole.
Au vu de la rédaction du présent article, nous espérons que les divergences territoriales seront prises en compte et que la commune constituera rarement le cadre d’application de ces mesures. Toutefois, nous tenons à rappeler l’ensemble des configurations existantes sur notre territoire, que l’on oublie parfois lorsqu’on légifère depuis Paris, ou Lyon…
M. Jean-Noël Guérini. J’espère que, cette fois-ci, M. le rapporteur se montrera plus attentif et plus attentionné !
Sourires. – Mme Éliane Assassi rit.
Sourires.
Cet amendement vise à alerter le Gouvernement quant au risque d’application inégale des mesures individuelles de surveillance selon que l’on habite une petite commune ou une métropole.
Au vu de la rédaction du présent article, nous espérons que les divergences territoriales seront prises en compte et que la commune constituera rarement le cadre d’application de ces mesures. Toutefois, nous tenons à rappeler l’ensemble des configurations existantes sur notre territoire, que l’on oublie parfois lorsqu’on légifère depuis Paris, ou Lyon…
Sourires. – Mme Éliane Assassi rit.
… et je remercie Mme Costes et M. Guérini de l’avoir présenté.
Cet amendement vise à étendre de la commune au département le périmètre minimal dans lequel s’appliquerait l’obligation de demeurer.
La commission a fait un choix différent : elle a décidé que ce périmètre devrait être au minimum la commune. Pour autant, rien n’empêche de retenir les limites du département. Cette décision sera prise par l’autorité administrative, sous le contrôle du juge.
Je considère donc que l’amendement de M. Guérini est satisfait, et je lui demande de le retirer.
M. Jean-Noël Guérini rit.
… et je remercie Mme Costes et M. Guérini de l’avoir présenté.
Cet amendement vise à étendre de la commune au département le périmètre minimal dans lequel s’appliquerait l’obligation de demeurer.
La commission a fait un choix différent : elle a décidé que ce périmètre devrait être au minimum la commune. Pour autant, rien n’empêche de retenir les limites du département. Cette décision sera prise par l’autorité administrative, sous le contrôle du juge.
Je considère donc que l’amendement de M. Guérini est satisfait, et je lui demande de le retirer.
Toutefois, comme M. le rapporteur vient de l’indiquer, le texte de la commission indique que le périmètre fixé est au moins celui de la commune. Si l’autorité administrative le juge nécessaire, il peut donc s’agir du département.
Ainsi, monsieur Guérini, vous avez au moins partiellement satisfaction et vous pouvez retirer votre amendement.
M. Jean-Noël Guérini rit.
L’amendement n° 47 rectifié est retiré.
L'amendement n° 68, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Remplacer les mots :
de trois fois par semaine
par les mots :
d’une fois par jour
La parole est à M. le ministre d'État.
Toutefois, comme M. le rapporteur vient de l’indiquer, le texte de la commission indique que le périmètre fixé est au moins celui de la commune. Si l’autorité administrative le juge nécessaire, il peut donc s’agir du département.
Ainsi, monsieur Guérini, vous avez au moins partiellement satisfaction et vous pouvez retirer votre amendement.
Cet amendement tend à revenir à la possibilité d’imposer un pointage par jour.
En effet, comme je l’ai indiqué au début de ce débat, avec trois pointages par semaine, l’individu concerné risque de rester sans surveillance pendant trois jours, ce qui lui laisse le temps d’échapper au contrôle dont il fait l’objet et, éventuellement, de commettre un attentat.
Selon nous, le pointage quotidien auprès d’un commissariat ou d’une brigade de gendarmerie territoriale est une disposition cohérente.
L’amendement n° 47 rectifié est retiré.
L'amendement n° 68, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Remplacer les mots :
de trois fois par semaine
par les mots :
d’une fois par jour
La parole est à M. le ministre d'État.
Monsieur le ministre d’État, j’ai bien compris quelle était votre position. En revanche, je n’en saisis ni le fondement ni l’économie générale.
Dans ce domaine, un autre système a été établi par la loi, et il fonctionne. Il s’agit du contrôle administratif des retours sur le territoire, le CART. Les personnes concernées, à savoir celles qui reviennent du théâtre des opérations irako-syriennes, ont pour obligation de pointer trois fois par semaine.
Nous ne comprenons pas cette distorsion, alors que a priori les personnes soumises au CART sont plus près de passer à l’acte. Je le répète, elles se sont rendues en Irak ou en Syrie. On les surveille, car on pense qu’elles reviennent en France pour y commettre des attentats, et on leur demande de pointer trois fois par semaine.
L’article 3, lui, traite de personnes qui, d’après tel renseignement, selon telle source communiquée à l’administration, pourraient exiger une surveillance particulière. La commission accepte qu’elles soient soumises à l’obligation de demeurer, au minimum, dans le périmètre de la commune et qu’elles soient tenues de pointer trois fois par semaine, comme dans le cas du CART. Or vous nous répondez qu’elles doivent pointer tous les jours.
Nous aurions compris cette position si vous aviez réformé le CART. Mais vous n’avez pas voulu procéder ainsi, dans la mesure où le CART vous est apparu comme un bon outil. Dès lors, pourquoi vous priver d’un bon outil que vous avez vous-même choisi ?
Aussi, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Cet amendement tend à revenir à la possibilité d’imposer un pointage par jour.
En effet, comme je l’ai indiqué au début de ce débat, avec trois pointages par semaine, l’individu concerné risque de rester sans surveillance pendant trois jours, ce qui lui laisse le temps d’échapper au contrôle dont il fait l’objet et, éventuellement, de commettre un attentat.
Selon nous, le pointage quotidien auprès d’un commissariat ou d’une brigade de gendarmerie territoriale est une disposition cohérente.
Monsieur le rapporteur, je vous rappelle que, dans le cadre du CART, la personne est assignée à domicile pendant au moins huit heures par jour, ce qui n’est pas le cas en l’occurrence. La mesure définie au titre du CART est beaucoup plus contraignante que celle que nous prévoyons à l’article 3 du présent texte.
Toutefois, comme vous le suggérez, peut-être devrions-nous également imposer un pointage par jour dans le cadre du CART !
Monsieur le ministre d’État, j’ai bien compris quelle était votre position. En revanche, je n’en saisis ni le fondement ni l’économie générale.
Dans ce domaine, un autre système a été établi par la loi, et il fonctionne. Il s’agit du contrôle administratif des retours sur le territoire, le CART. Les personnes concernées, à savoir celles qui reviennent du théâtre des opérations irako-syriennes, ont pour obligation de pointer trois fois par semaine.
Nous ne comprenons pas cette distorsion, alors que a priori les personnes soumises au CART sont plus près de passer à l’acte. Je le répète, elles se sont rendues en Irak ou en Syrie. On les surveille, car on pense qu’elles reviennent en France pour y commettre des attentats, et on leur demande de pointer trois fois par semaine.
L’article 3, lui, traite de personnes qui, d’après tel renseignement, selon telle source communiquée à l’administration, pourraient exiger une surveillance particulière. La commission accepte qu’elles soient soumises à l’obligation de demeurer, au minimum, dans le périmètre de la commune et qu’elles soient tenues de pointer trois fois par semaine, comme dans le cas du CART. Or vous nous répondez qu’elles doivent pointer tous les jours.
Nous aurions compris cette position si vous aviez réformé le CART. Mais vous n’avez pas voulu procéder ainsi, dans la mesure où le CART vous est apparu comme un bon outil. Dès lors, pourquoi vous priver d’un bon outil que vous avez vous-même choisi ?
Aussi, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Monsieur le rapporteur, je vous rappelle que, dans le cadre du CART, la personne est assignée à domicile pendant au moins huit heures par jour, ce qui n’est pas le cas en l’occurrence. La mesure définie au titre du CART est beaucoup plus contraignante que celle que nous prévoyons à l’article 3 du présent texte.
Toutefois, comme vous le suggérez, peut-être devrions-nous également imposer un pointage par jour dans le cadre du CART !
J’avoue qu’à présent je ne comprends plus du tout le système élaboré.
Certains affirment, notamment notre collègue Alain Richard et M. le ministre d’État, que le but est de permettre de surveiller un certain nombre de personnes. Mais nos services n’ont pas les moyens techniques et humains de le faire : dans ces conditions, un pointage tous les jours ou tous les trois jours ne suffit pas.
Il n’y a qu’une seule solution, et je ne comprends pas pourquoi elle n’est pas proposée : soumettre toutes les personnes concernées au port du bracelet électronique. Dès lors, il sera possible de surveiller leurs allées et venues. Ce système de GPS permettra d’être sûr qu’elles se trouvent à telle heure à tel endroit. Il faut aller jusqu’au bout de la logique.
Cela prouve bien que ce dispositif est incomplet et absurde. Tout cela nous confirme dans notre conviction qu’il faut supprimer le présent article.
J’avoue qu’à présent je ne comprends plus du tout le système élaboré.
Certains affirment, notamment notre collègue Alain Richard et M. le ministre d’État, que le but est de permettre de surveiller un certain nombre de personnes. Mais nos services n’ont pas les moyens techniques et humains de le faire : dans ces conditions, un pointage tous les jours ou tous les trois jours ne suffit pas.
Il n’y a qu’une seule solution, et je ne comprends pas pourquoi elle n’est pas proposée : soumettre toutes les personnes concernées au port du bracelet électronique. Dès lors, il sera possible de surveiller leurs allées et venues. Ce système de GPS permettra d’être sûr qu’elles se trouvent à telle heure à tel endroit. Il faut aller jusqu’au bout de la logique.
L'amendement n'est pas adopté.
Cela prouve bien que ce dispositif est incomplet et absurde. Tout cela nous confirme dans notre conviction qu’il faut supprimer le présent article.
L'amendement n° 46 rectifié, présenté par MM. Guérini, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Remplacer (deux fois) les mots :
d’habitation
par les mots :
de domicile
La parole est à Mme Mireille Jouve.
Mme Mireille Jouve. Le présent texte mentionne parfois « l’habitation » et parfois « le domicile » des personnes. Nous nous interrogeons sur le sens de ces variations et nous proposons une harmonisation des termes, sauf si cette distinction cache en fait des subtilités qui nous échappent.
L'amendement n'est pas adopté.
Sourires.
L'amendement n° 46 rectifié, présenté par MM. Guérini, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Remplacer (deux fois) les mots :
d’habitation
par les mots :
de domicile
La parole est à Mme Mireille Jouve.
Mme Mireille Jouve. Le présent texte mentionne parfois « l’habitation » et parfois « le domicile » des personnes. Nous nous interrogeons sur le sens de ces variations et nous proposons une harmonisation des termes, sauf si cette distinction cache en fait des subtilités qui nous échappent.
M. Michel Mercier, rapporteur. Cette question est tout à fait pertinente, et elle exige l’avis du Gouvernement !
Sourires.
Sourires et exclamations. – MM. Guillaume Arnell et Jean-Noël Guérini applaudissent.
M. Michel Mercier, rapporteur. Cette question est tout à fait pertinente, et elle exige l’avis du Gouvernement !
Les latinistes se souviendront que « domicile » vient de domus, la maison.
Sourires et exclamations. – MM. Guillaume Arnell et Jean-Noël Guérini applaudissent.
D’ailleurs, en règle générale, le domicile est aussi le lieu d’habitation. Pour notre part, nous souhaitons maintenir ces deux termes dans le présent projet de loi.
Les latinistes se souviendront que « domicile » vient de domus, la maison.
Pour répondre à la question tout à fait pertinente posée au travers de l’amendement de Mme Jouve, il faut garder à l’esprit que le domicile est une notion juridique. Il y a un lien de droit entre la personne et son lieu de domicile qui répond à des conditions légales.
Le terme « domicile » ouvrirait des possibilités d’annulation de la mesure lorsque la personne dont il s’agit de limiter les mouvements ne se trouve pas à son domicile juridique, mais dans un lieu d’habitation momentané qui est, par exemple, le résultat de ses contacts de réseau.
Cette mesure se fonde sur un souci d’efficacité et de prévention. À l’évidence, le terme d’habitation doit être privilégié, car il correspond à une réalité de fait : il désigne le lieu où la personne réside au moment où la décision est prise. Je le répète, la notion de domicile pourrait faire obstacle à l’application de la mesure.
D’ailleurs, en règle générale, le domicile est aussi le lieu d’habitation. Pour notre part, nous souhaitons maintenir ces deux termes dans le présent projet de loi.
Pour répondre à la question tout à fait pertinente posée au travers de l’amendement de Mme Jouve, il faut garder à l’esprit que le domicile est une notion juridique. Il y a un lien de droit entre la personne et son lieu de domicile qui répond à des conditions légales.
Le terme « domicile » ouvrirait des possibilités d’annulation de la mesure lorsque la personne dont il s’agit de limiter les mouvements ne se trouve pas à son domicile juridique, mais dans un lieu d’habitation momentané qui est, par exemple, le résultat de ses contacts de réseau.
Cette mesure se fonde sur un souci d’efficacité et de prévention. À l’évidence, le terme d’habitation doit être privilégié, car il correspond à une réalité de fait : il désigne le lieu où la personne réside au moment où la décision est prise. Je le répète, la notion de domicile pourrait faire obstacle à l’application de la mesure.
L’amendement n° 46 rectifié est retiré.
L'amendement n° 66 rectifié bis, présenté par MM. Guérini, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Hue, Mmes Jouve et Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 12
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Toute personne visée par une telle décision peut former un recours sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative afin d’en obtenir la suspension. Sans délai, la juridiction administrative initialement saisie forme une question préjudicielle qu'elle transmet immédiatement au juge des libertés et de la détention près le tribunal de grande instance de Paris, qui se prononce sur l'opportunité des mesures prévues par la décision. Elle sursoit à statuer jusqu’à la décision sur la question préjudicielle qui intervient dans un délai de vingt-quatre heures. La juridiction administrative initialement saisie se prononce sur la proportionnalité de ces mesures, à la lumière de la solution proposée par le juge des libertés et de la détention, dans un délai de quarante-huit heures.
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
Dans tous nos débats relatifs à l’état d’urgence et à la lutte contre le terrorisme, il a été question de la répartition des compétences entre le juge administratif et le juge judiciaire.
Le fait de prendre des mesures administratives, donc susceptibles de recours devant le juge administratif, concurrentes à certaines procédures judiciaires existantes conduit à brouiller la répartition des compétences.
Au travers de cet amendement, nous proposons une solution médiane consistant, pour les mesures individuelles de surveillance initiale, à mettre en œuvre un dialogue entre le juge administratif et le juge judiciaire dans un temps imparti.
À ce titre, nous suggérons de contraindre le juge administratif saisi dans ces cas précis à poser une question préjudicielle au juge judiciaire, pour obtenir son avis sur l’opportunité des mesures en cause. À ce jour, il ne s’agit là que d’une faculté.
Éclairé, d’une part par l’avis du juge des libertés et de la détention, de l’autre par l’avis de l’administration à l’origine de la mesure, le juge administratif sera en pleine capacité de trancher.
Avec cet amendement, nous prônons donc un « dialogue des juges », selon l’expression consacrée de Bruno Genevois, afin de désamorcer une éventuelle « guerre des juges ».
L’amendement n° 46 rectifié est retiré.
L'amendement n° 66 rectifié bis, présenté par MM. Guérini, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Hue, Mmes Jouve et Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 12
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Toute personne visée par une telle décision peut former un recours sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative afin d’en obtenir la suspension. Sans délai, la juridiction administrative initialement saisie forme une question préjudicielle qu'elle transmet immédiatement au juge des libertés et de la détention près le tribunal de grande instance de Paris, qui se prononce sur l'opportunité des mesures prévues par la décision. Elle sursoit à statuer jusqu’à la décision sur la question préjudicielle qui intervient dans un délai de vingt-quatre heures. La juridiction administrative initialement saisie se prononce sur la proportionnalité de ces mesures, à la lumière de la solution proposée par le juge des libertés et de la détention, dans un délai de quarante-huit heures.
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
Le présent amendement vise à instituer une collaboration intéressante entre le juge administratif et le juge judiciaire.
Néanmoins, il faut faire un choix…
Dans tous nos débats relatifs à l’état d’urgence et à la lutte contre le terrorisme, il a été question de la répartition des compétences entre le juge administratif et le juge judiciaire.
Le fait de prendre des mesures administratives, donc susceptibles de recours devant le juge administratif, concurrentes à certaines procédures judiciaires existantes conduit à brouiller la répartition des compétences.
Au travers de cet amendement, nous proposons une solution médiane consistant, pour les mesures individuelles de surveillance initiale, à mettre en œuvre un dialogue entre le juge administratif et le juge judiciaire dans un temps imparti.
À ce titre, nous suggérons de contraindre le juge administratif saisi dans ces cas précis à poser une question préjudicielle au juge judiciaire, pour obtenir son avis sur l’opportunité des mesures en cause. À ce jour, il ne s’agit là que d’une faculté.
Éclairé, d’une part par l’avis du juge des libertés et de la détention, de l’autre par l’avis de l’administration à l’origine de la mesure, le juge administratif sera en pleine capacité de trancher.
Avec cet amendement, nous prônons donc un « dialogue des juges », selon l’expression consacrée de Bruno Genevois, afin de désamorcer une éventuelle « guerre des juges ».
M. Jean-Noël Guérini. Allez-y, monsieur le rapporteur ! Vous allez demander le retrait, comme d’habitude !
Sourires. – M. le rapporteur rit.
Le présent amendement vise à instituer une collaboration intéressante entre le juge administratif et le juge judiciaire.
Néanmoins, il faut faire un choix…
Cet amendement tend à instaurer un mécanisme un peu lourd. Saisi d’une demande d’annulation de la prorogation éventuelle par l’autorité administrative de la mesure d’obligation de demeurer dans la commune, le juge administratif devrait non statuer, mais répondre à une question préjudicielle. Il devrait envoyer sa réponse au juge des libertés et de la détention de Paris et attendre que celui-ci se prononce avant de reprendre l’affaire.
Si, pendant tout ce temps, il est décidé de ne plus appliquer l’obligation de résider dans la commune, on ne retrouvera jamais la personne initialement placée sous surveillance : elle ne va pas attendre la décision, elle va partir, et il n’y aura plus rien à faire !
Monsieur Guérini, je reconnais que vous avez fait un effort pour faire collaborer les deux juges. À cet égard, ces dispositions sont intéressantes. Néanmoins, comme l’a souligné Mme Lienemann voilà quelques instants, il faut aussi veiller à l’efficacité de l’action administrative contrôlée par le juge.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement. Sinon, j’émettrai un avis défavorable.
M. Jean-Noël Guérini. Allez-y, monsieur le rapporteur ! Vous allez demander le retrait, comme d’habitude !
Sourires. – M. le rapporteur rit.
Même avis que M. le rapporteur. La pensée de M. Guérini est toujours riche et complexe ; en l’occurrence, peut-être est-elle justement trop complexe.
J’émets un avis défavorable.
Cet amendement tend à instaurer un mécanisme un peu lourd. Saisi d’une demande d’annulation de la prorogation éventuelle par l’autorité administrative de la mesure d’obligation de demeurer dans la commune, le juge administratif devrait non statuer, mais répondre à une question préjudicielle. Il devrait envoyer sa réponse au juge des libertés et de la détention de Paris et attendre que celui-ci se prononce avant de reprendre l’affaire.
Si, pendant tout ce temps, il est décidé de ne plus appliquer l’obligation de résider dans la commune, on ne retrouvera jamais la personne initialement placée sous surveillance : elle ne va pas attendre la décision, elle va partir, et il n’y aura plus rien à faire !
Monsieur Guérini, je reconnais que vous avez fait un effort pour faire collaborer les deux juges. À cet égard, ces dispositions sont intéressantes. Néanmoins, comme l’a souligné Mme Lienemann voilà quelques instants, il faut aussi veiller à l’efficacité de l’action administrative contrôlée par le juge.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement. Sinon, j’émettrai un avis défavorable.
L’amendement n° 66 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 65 rectifié, présenté par Mme Costes et MM. Castelli et Vall, n'est pas soutenu.
L'amendement n° 77 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 13, deuxième, troisième et dernière phrases
Rédiger ainsi ces phrases :
Elles peuvent être renouvelées par décision motivée, pour une durée équivalente, lorsque les conditions prévues à l’article L. 228-1 continuent d’être réunies. Au-delà d’une durée cumulée de six mois, la décision renouvelant ces obligations doit être notifiée au plus tard cinq jours avant son entrée en vigueur. Si la personne concernée saisit le juge administratif d’une demande présentée sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision, celle-ci ne peut entrer en vigueur avant que le juge ait statué.
II. – Alinéa 21, deuxième, troisième et dernière phrases
Remplacer ces phrases par une phrase ainsi rédigée :
Elles peuvent être renouvelées, pour une durée équivalente, par décision motivée lorsque les conditions prévues à l’article L. 228-1 continuent d’être réunies.
La parole est à M. le ministre d'État.
Même avis que M. le rapporteur. La pensée de M. Guérini est toujours riche et complexe ; en l’occurrence, peut-être est-elle justement trop complexe.
J’émets un avis défavorable.
Dans un premier temps, la commission a proposé de faire appel au juge des libertés et de la détention. Nous avons eu, ensemble, une discussion intéressante. La position de la commission a évolué. Nous-mêmes avons accepté un certain nombre de changements modifiant l’esprit du présent texte en divers points. À mon sens, nous sommes aujourd’hui en train d’arriver à un équilibre à même de satisfaire les uns et les autres.
Peut-être quelques nuances subsistent-elles sur les questions de durée, que j’ai précédemment évoquées ; mais, une fois qu’elles seront réglées, tout sera parfait.
L’amendement n° 66 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 65 rectifié, présenté par Mme Costes et MM. Castelli et Vall, n'est pas soutenu.
L'amendement n° 77 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 13, deuxième, troisième et dernière phrases
Rédiger ainsi ces phrases :
Elles peuvent être renouvelées par décision motivée, pour une durée équivalente, lorsque les conditions prévues à l’article L. 228-1 continuent d’être réunies. Au-delà d’une durée cumulée de six mois, la décision renouvelant ces obligations doit être notifiée au plus tard cinq jours avant son entrée en vigueur. Si la personne concernée saisit le juge administratif d’une demande présentée sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision, celle-ci ne peut entrer en vigueur avant que le juge ait statué.
II. – Alinéa 21, deuxième, troisième et dernière phrases
Remplacer ces phrases par une phrase ainsi rédigée :
Elles peuvent être renouvelées, pour une durée équivalente, par décision motivée lorsque les conditions prévues à l’article L. 228-1 continuent d’être réunies.
La parole est à M. le ministre d'État.
Le sous-amendement n° 79, présenté par M. M. Mercier, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Amendement n° 77
I. – Alinéa 3
A. – Première phrase
1° Remplacer le mot :
équivalente
par les mots :
maximale de trois mois
2° Compléter cette phrase par les mots :
et sur la base d’éléments nouveaux ou complémentaires
B. – Après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Les mesures sont levées aussitôt que les conditions prévues à l’article L. 228–1 ne sont plus satisfaites.
C. – Deuxième phrase
1° Remplacer les mots :
Au-delà d’une durée cumulée de six mois, la décision renouvelant ces obligations
par les mots :
Toute décision de renouvellement des obligations prévues aux 1° à 3° du présent article
2° Après le mot :
notifiée
insérer les mots :
à la personne concernée
D. Troisième phase
1° Remplacer le mot :
quarante-huit
par le mot :
soixante-douze
2° Remplacer les mots :
celle-ci
par les mots :
la mesure
3° Remplacer les mots :
ait statué
par les mots :
n’ait statué sur la demande
II. – Après l’alinéa 3
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Après l’alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La personne soumise aux obligations prévues aux 1° à 3° du présent article peut, dans le délai d’un mois suivant la notification de la décision et suivant la notification de chaque renouvellement, demander au tribunal administratif l’annulation de cette décision. Le tribunal administratif statue dans un délai de deux mois à compter de sa saisine. Ces recours s’exercent sans préjudice des procédures prévues aux articles L. 521–1 et L. 521–2 du code de justice administrative.
III. – Alinéa 6
1° Remplacer le mot :
équivalente
par les mots :
maximale de six mois
2° Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigés:
et sur la base d’éléments nouveaux ou complémentaires. Les mesures doivent être levées aussitôt que les conditions prévues à l’article L. 228–1 ne sont plus satisfaites.
IV. – Compléter cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Après l’alinéa 21
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Toute décision de renouvellement doit être notifiée à la personne concernée au plus tard cinq jours avant son entrée en vigueur. Si la personne concernée saisit le juge administratif d’une demande présentée sur le fondement de l’article L. 521–2 du code de justice administrative dans un délai de soixante-douze heures à compter de la notification de la décision, la mesure ne peut entrer en vigueur avant que le juge n’ait statué sur la demande.
« La personne soumise aux obligations prévues aux 1° et 2° du présent article peut, dans le délai de deux mois suivant la notification de la décision et suivant la notification de chaque renouvellement, demander au tribunal administratif l’annulation de cette décision. Le tribunal administratif statue dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine. Ces recours s’exercent sans préjudice des procédures ouvertes aux articles L. 521–1 et L. 521–2 du code de justice administrative.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter le sous-amendement et donner l’avis de la commission sur l’amendement.
Dans un premier temps, la commission a proposé de faire appel au juge des libertés et de la détention. Nous avons eu, ensemble, une discussion intéressante. La position de la commission a évolué. Nous-mêmes avons accepté un certain nombre de changements modifiant l’esprit du présent texte en divers points. À mon sens, nous sommes aujourd’hui en train d’arriver à un équilibre à même de satisfaire les uns et les autres.
Peut-être quelques nuances subsistent-elles sur les questions de durée, que j’ai précédemment évoquées ; mais, une fois qu’elles seront réglées, tout sera parfait.
Après M. le ministre d’État, je tiens à saluer la qualité du dialogue que la commission a pu avoir avec le Gouvernement sur cette question.
Pour nous, il était essentiel que le renouvellement d’une mesure d’obligation de résider dans une commune ne puisse jamais être décidé sans l’intervention d’un juge.
À ce titre, nous avons pensé au juge des libertés et de la détention, puisqu’il est fait appel à lui à l’article 4 du présent texte. Mais il est vrai qu’à l’article 2 un système très intéressant a été retenu : ne pas exécuter la mesure de fermeture des lieux de culte pendant un délai suffisant pour que l’on saisisse un juge administratif, à savoir le juge des référés, sur la base d’un référé-liberté. Tant que le juge ne s’est pas prononcé, la mesure de fermeture des lieux de culte ne peut pas être exécutée.
En l’occurrence, nous proposons de reprendre le même schéma : lorsque l’autorité administrative envisage de proroger une mesure d’obligation de résider dans la commune, la personne en cause doit être avertie cinq jours à l’avance. Elle dispose alors d’un délai de soixante-douze heures pour saisir le juge des référés administratif, sur la base d’un référé-liberté. Tant que le juge n’a pas statué, on ne peut proroger ladite obligation.
C’est une sorte d’autorisation donnée à l’autorité administrative par le juge, bien entendu, si la personne concernée saisit le juge.
Monsieur le ministre d’État, vous avez fait allusion aux questions de durée. Je dois l’avouer, je ne vois pas bien où est le problème, car nous disons exactement la même chose. Dans l’amendement du Gouvernement, je lis que les obligations de résidence peuvent être renouvelées par décision motivée « pour une durée équivalente », c’est-à-dire pour trois mois. Pour notre part, nous proposons non de mentionner une « durée équivalente », mais une « durée de trois mois ». C’est exactement pareil : trois mois feront toujours trois mois.
Le sous-amendement n° 79, présenté par M. M. Mercier, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Amendement n° 77
I. – Alinéa 3
A. – Première phrase
1° Remplacer le mot :
équivalente
par les mots :
maximale de trois mois
2° Compléter cette phrase par les mots :
et sur la base d’éléments nouveaux ou complémentaires
B. – Après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Les mesures sont levées aussitôt que les conditions prévues à l’article L. 228–1 ne sont plus satisfaites.
C. – Deuxième phrase
1° Remplacer les mots :
Au-delà d’une durée cumulée de six mois, la décision renouvelant ces obligations
par les mots :
Toute décision de renouvellement des obligations prévues aux 1° à 3° du présent article
2° Après le mot :
notifiée
insérer les mots :
à la personne concernée
D. Troisième phase
1° Remplacer le mot :
quarante-huit
par le mot :
soixante-douze
2° Remplacer les mots :
celle-ci
par les mots :
la mesure
3° Remplacer les mots :
ait statué
par les mots :
n’ait statué sur la demande
II. – Après l’alinéa 3
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Après l’alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La personne soumise aux obligations prévues aux 1° à 3° du présent article peut, dans le délai d’un mois suivant la notification de la décision et suivant la notification de chaque renouvellement, demander au tribunal administratif l’annulation de cette décision. Le tribunal administratif statue dans un délai de deux mois à compter de sa saisine. Ces recours s’exercent sans préjudice des procédures prévues aux articles L. 521–1 et L. 521–2 du code de justice administrative.
III. – Alinéa 6
1° Remplacer le mot :
équivalente
par les mots :
maximale de six mois
2° Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigés:
et sur la base d’éléments nouveaux ou complémentaires. Les mesures doivent être levées aussitôt que les conditions prévues à l’article L. 228–1 ne sont plus satisfaites.
IV. – Compléter cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Après l’alinéa 21
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Toute décision de renouvellement doit être notifiée à la personne concernée au plus tard cinq jours avant son entrée en vigueur. Si la personne concernée saisit le juge administratif d’une demande présentée sur le fondement de l’article L. 521–2 du code de justice administrative dans un délai de soixante-douze heures à compter de la notification de la décision, la mesure ne peut entrer en vigueur avant que le juge n’ait statué sur la demande.
« La personne soumise aux obligations prévues aux 1° et 2° du présent article peut, dans le délai de deux mois suivant la notification de la décision et suivant la notification de chaque renouvellement, demander au tribunal administratif l’annulation de cette décision. Le tribunal administratif statue dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine. Ces recours s’exercent sans préjudice des procédures ouvertes aux articles L. 521–1 et L. 521–2 du code de justice administrative.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter le sous-amendement et donner l’avis de la commission sur l’amendement.
M. Michel Mercier, rapporteur. Toutefois, en signe de bonne volonté, je suis prêt à renoncer à la mention des « trois mois » et à laisser les termes de « durée équivalente ».
Après M. le ministre d’État, je tiens à saluer la qualité du dialogue que la commission a pu avoir avec le Gouvernement sur cette question.
Pour nous, il était essentiel que le renouvellement d’une mesure d’obligation de résider dans une commune ne puisse jamais être décidé sans l’intervention d’un juge.
À ce titre, nous avons pensé au juge des libertés et de la détention, puisqu’il est fait appel à lui à l’article 4 du présent texte. Mais il est vrai qu’à l’article 2 un système très intéressant a été retenu : ne pas exécuter la mesure de fermeture des lieux de culte pendant un délai suffisant pour que l’on saisisse un juge administratif, à savoir le juge des référés, sur la base d’un référé-liberté. Tant que le juge ne s’est pas prononcé, la mesure de fermeture des lieux de culte ne peut pas être exécutée.
En l’occurrence, nous proposons de reprendre le même schéma : lorsque l’autorité administrative envisage de proroger une mesure d’obligation de résider dans la commune, la personne en cause doit être avertie cinq jours à l’avance. Elle dispose alors d’un délai de soixante-douze heures pour saisir le juge des référés administratif, sur la base d’un référé-liberté. Tant que le juge n’a pas statué, on ne peut proroger ladite obligation.
C’est une sorte d’autorisation donnée à l’autorité administrative par le juge, bien entendu, si la personne concernée saisit le juge.
Monsieur le ministre d’État, vous avez fait allusion aux questions de durée. Je dois l’avouer, je ne vois pas bien où est le problème, car nous disons exactement la même chose. Dans l’amendement du Gouvernement, je lis que les obligations de résidence peuvent être renouvelées par décision motivée « pour une durée équivalente », c’est-à-dire pour trois mois. Pour notre part, nous proposons non de mentionner une « durée équivalente », mais une « durée de trois mois ». C’est exactement pareil : trois mois feront toujours trois mois.
MM. François Pillet et Jean-Noël Guérini rient.
M. Michel Mercier, rapporteur. Toutefois, en signe de bonne volonté, je suis prêt à renoncer à la mention des « trois mois » et à laisser les termes de « durée équivalente ».
Sourires.
MM. François Pillet et Jean-Noël Guérini rient.
M. Michel Mercier, rapporteur. J’attends que le Gouvernement nous propose une solution…
Nouveaux sourires.
Sourires.
M. Michel Mercier, rapporteur. J’attends que le Gouvernement nous propose une solution…
Monsieur le rapporteur, ce qui nous pose problème, ce n’est pas tant la disposition que vous avez citée, mais la mention des décisions de renouvellement « prévues au 1° ou au 3° du présent article ».
La difficulté est de concilier deux exigences.
Nouveaux sourires.
Voilà ! Il est assez compliqué d’apporter des éléments nouveaux, comme le demande le Conseil constitutionnel, dans un délai de trois mois. C’est pourquoi nous souhaitons faire intervenir cette disposition au terme du deuxième renouvellement, c’est-à-dire après six mois.
Si nous sommes d’accord sur ce point, nous pouvons conserver la rédaction élaborée par le Gouvernement.
Monsieur le rapporteur, ce qui nous pose problème, ce n’est pas tant la disposition que vous avez citée, mais la mention des décisions de renouvellement « prévues au 1° ou au 3° du présent article ».
La difficulté est de concilier deux exigences.
Tout à fait, monsieur le rapporteur. À ce stade, le Gouvernement émet toutefois un avis défavorable sur le sous-amendement n° 79.
Voilà ! Il est assez compliqué d’apporter des éléments nouveaux, comme le demande le Conseil constitutionnel, dans un délai de trois mois. C’est pourquoi nous souhaitons faire intervenir cette disposition au terme du deuxième renouvellement, c’est-à-dire après six mois.
Si nous sommes d’accord sur ce point, nous pouvons conserver la rédaction élaborée par le Gouvernement.
Pour notre part, nous maintenons notre sous-amendement, monsieur le président.
Tout à fait, monsieur le rapporteur. À ce stade, le Gouvernement émet toutefois un avis défavorable sur le sous-amendement n° 79.
Le sous-amendement est adopté.
Pour notre part, nous maintenons notre sous-amendement, monsieur le président.
Le sous-amendement est adopté.
L'amendement n° 49 rectifié, présenté par Mme Costes, MM. Guérini, Barbier, Castelli, Collin, Collombat, Esnol et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
En cas d’accord de la personne concernée, le procureur de la République de Paris saisit le juge des libertés et de la détention près le tribunal de grande instance de Paris pour qu’il se prononce sur l’opportunité d’ordonner ce placement sous surveillance électronique mobile.
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
Cet amendement vise à permettre au juge des libertés et de la détention de se prononcer sur l’opportunité de placer une personne sous bracelet électronique, comme solution alternative à l’assignation à une zone géographique.
En la matière, le raisonnement suivi est le même qu’au titre de l’amendement n° 45 rectifié. Néanmoins, par cohérence…
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 49 rectifié, présenté par Mme Costes, MM. Guérini, Barbier, Castelli, Collin, Collombat, Esnol et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
En cas d’accord de la personne concernée, le procureur de la République de Paris saisit le juge des libertés et de la détention près le tribunal de grande instance de Paris pour qu’il se prononce sur l’opportunité d’ordonner ce placement sous surveillance électronique mobile.
La parole est à M. Jean-Noël Guérini.
M. Jean-Noël Guérini. Vous me devancez, monsieur le rapporteur, vous êtes extraordinaire !
Cet amendement vise à permettre au juge des libertés et de la détention de se prononcer sur l’opportunité de placer une personne sous bracelet électronique, comme solution alternative à l’assignation à une zone géographique.
En la matière, le raisonnement suivi est le même qu’au titre de l’amendement n° 45 rectifié. Néanmoins, par cohérence…
Sourires.
M. Jean-Noël Guérini. Vous me devancez, monsieur le rapporteur, vous êtes extraordinaire !
L’amendement n° 49 rectifié est retiré.
L'amendement n° 17, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :
Alinéa 17, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
Sourires.
Cet amendement vise à supprimer la phrase indiquant qu’un décret en Conseil d’État « peut déterminer les conditions dans lesquelles la mise en œuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance prévu au troisième alinéa, pour lequel peut être mis en œuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel, peut être confiée à une personne de droit privé habilitée ».
Voilà quelques instants, Alain Richard nous a expliqué que, dans le cadre de mesures de prévention, il y avait un rôle exclusif de l’État.
L’amendement n° 49 rectifié est retiré.
L'amendement n° 17, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :
Alinéa 17, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
Cher collègue, compte tenu de ce qu’impliquent ces mesures, à savoir la privation de liberté et de surveillance d’individus qui ne sont pas soumis à un contrôle judiciaire, ce rôle, si l’on vous entend bien, ne peut pas être confié à une personne privée. Il n’est pas acceptable de lui confier un tel rôle.
Cet amendement vise à supprimer la phrase indiquant qu’un décret en Conseil d’État « peut déterminer les conditions dans lesquelles la mise en œuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance prévu au troisième alinéa, pour lequel peut être mis en œuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel, peut être confiée à une personne de droit privé habilitée ».
Voilà quelques instants, Alain Richard nous a expliqué que, dans le cadre de mesures de prévention, il y avait un rôle exclusif de l’État.
Au travers de cet amendement, M. Leconte veut supprimer la possibilité de conclure un marché public pour l’obtention de bracelets électroniques.
Mon cher collègue, l’État ne peut pas produire les bracelets électroniques lui-même. Le ministère de la justice a déjà passé un marché public avec une société qui fabrique ces équipements et, surtout, les appareils permettant de suivre les personnes à qui ils sont appliqués. Cette procédure est indispensable.
Vous êtes sûrement favorable au bracelet électronique, mais la suppression que vous proposez empêcherait l’État d’en disposer. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable.
Cher collègue, compte tenu de ce qu’impliquent ces mesures, à savoir la privation de liberté et de surveillance d’individus qui ne sont pas soumis à un contrôle judiciaire, ce rôle, si l’on vous entend bien, ne peut pas être confié à une personne privée. Il n’est pas acceptable de lui confier un tel rôle.
Avis défavorable, pour les mêmes raisons. En la matière, la procédure du marché public est déjà appliquée par la justice.
Au travers de cet amendement, M. Leconte veut supprimer la possibilité de conclure un marché public pour l’obtention de bracelets électroniques.
Mon cher collègue, l’État ne peut pas produire les bracelets électroniques lui-même. Le ministère de la justice a déjà passé un marché public avec une société qui fabrique ces équipements et, surtout, les appareils permettant de suivre les personnes à qui ils sont appliqués. Cette procédure est indispensable.
Vous êtes sûrement favorable au bracelet électronique, mais la suppression que vous proposez empêcherait l’État d’en disposer. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable.
Je suis prêt à retirer mon amendement si cet alinéa porte bien sur le marché public des bracelets électroniques, et non sur le suivi des personnes. Je souhaite que la commission et le Gouvernement m’en donnent l’assurance.
Avis défavorable, pour les mêmes raisons. En la matière, la procédure du marché public est déjà appliquée par la justice.
Monsieur Leconte, il s’agit bien uniquement de la pose des bracelets, lesquels permettent d’alerter les policiers et les gendarmes.
Je suis prêt à retirer mon amendement si cet alinéa porte bien sur le marché public des bracelets électroniques, et non sur le suivi des personnes. Je souhaite que la commission et le Gouvernement m’en donnent l’assurance.
Monsieur Leconte, il s’agit bien uniquement de la pose des bracelets, lesquels permettent d’alerter les policiers et les gendarmes.
L’amendement n° 17 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 69 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 22
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 228 -5. – Le ministre de l’intérieur peut, après en avoir informé le procureur de la République de Paris et le procureur de la République territorialement compétent, faire obligation à toute personne mentionnée à l’article L. 228-1, y compris lorsqu’il est fait application des articles L. 228-2 à L. 228-4, de :
« 1° Déclarer les numéros d’abonnement et identifiants techniques de tout moyen de communication électronique dont elle dispose ou qu’elle utilise, ainsi que tout changement de ces numéros d’abonnement et identifiants ; ces déclarations ne portent pas sur les mots de passe ;
« 2° Ne pas se trouver en relation directe ou indirecte avec certaines personnes, nommément désignées, dont il existe des raisons sérieuses de penser que leur comportement constitue une menace pour la sécurité publique. »
II. – Alinéa 23
1° Première phrase
Remplacer les mots :
L’obligation mentionnée au premier alinéa est prononcée
par les mots :
Les obligations mentionnées au 1° et au 2° sont prononcées
2° Deuxième, troisième et dernière phrases
Elles peuvent être renouvelées, pour une durée équivalente, par décision motivée lorsque les conditions prévues à l’article L. 228-1 continuent d’être réunies.
La parole est à M. le ministre d'État.
Il s’agit, au travers de cet amendement, de rétablir la possibilité d’obliger une personne à communiquer ses numéros d’abonnement et ses identifiants. Je précise que cette mesure ne concerne pas les codes secrets. Nous n’avons pas l’intention d’écouter les conversations privées : il s’agit uniquement des identifiants.
Parallèlement, nous proposons de rétablir le texte initial quant aux interdictions d’entrer en relation. La rédaction issue des travaux de la commission limite les interlocuteurs concernés à ceux pour lesquels il existe « des raisons sérieuses » de penser que leur comportement est lié à des activités terroristes.
Le Gouvernement considère que cette qualification est trop restrictive compte tenu de la porosité entre les activités terroristes et la délinquance ou la criminalité organisée. C’est la raison pour laquelle nous préférons la référence à un « comportement constituant une menace pour la sécurité publique ».
L'amendement n° 64 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 22
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 228–5.- Le ministre de l’intérieur informe sans délai le procureur de la République de Paris, et le procureur territorialement compétent, de la mesure d’interdiction qu’il veut prendre à l’encontre d’une personne mentionnée à l’article L. 228–1 de se trouver en relation directe ou indirecte avec une autre personne mentionnée au même article. Le procureur de la République de Paris saisit le juge des libertés et de la détention près le tribunal de grande instance de Paris pour qu’il se prononce sur l’opportunité d’ordonner une telle mesure.
La parole est à Mme Mireille Jouve.
L’amendement n° 17 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 69 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 22
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 228 -5. – Le ministre de l’intérieur peut, après en avoir informé le procureur de la République de Paris et le procureur de la République territorialement compétent, faire obligation à toute personne mentionnée à l’article L. 228-1, y compris lorsqu’il est fait application des articles L. 228-2 à L. 228-4, de :
« 1° Déclarer les numéros d’abonnement et identifiants techniques de tout moyen de communication électronique dont elle dispose ou qu’elle utilise, ainsi que tout changement de ces numéros d’abonnement et identifiants ; ces déclarations ne portent pas sur les mots de passe ;
« 2° Ne pas se trouver en relation directe ou indirecte avec certaines personnes, nommément désignées, dont il existe des raisons sérieuses de penser que leur comportement constitue une menace pour la sécurité publique. »
II. – Alinéa 23
1° Première phrase
Remplacer les mots :
L’obligation mentionnée au premier alinéa est prononcée
par les mots :
Les obligations mentionnées au 1° et au 2° sont prononcées
2° Deuxième, troisième et dernière phrases
Elles peuvent être renouvelées, pour une durée équivalente, par décision motivée lorsque les conditions prévues à l’article L. 228-1 continuent d’être réunies.
La parole est à M. le ministre d'État.
Comme nos amendements précédents, cet amendement vise à permettre au juge des libertés et de la détention de se prononcer sur l’opportunité de prononcer les autres mesures individuelles prévues au présent article.
Il s’agit, au travers de cet amendement, de rétablir la possibilité d’obliger une personne à communiquer ses numéros d’abonnement et ses identifiants. Je précise que cette mesure ne concerne pas les codes secrets. Nous n’avons pas l’intention d’écouter les conversations privées : il s’agit uniquement des identifiants.
Parallèlement, nous proposons de rétablir le texte initial quant aux interdictions d’entrer en relation. La rédaction issue des travaux de la commission limite les interlocuteurs concernés à ceux pour lesquels il existe « des raisons sérieuses » de penser que leur comportement est lié à des activités terroristes.
Le Gouvernement considère que cette qualification est trop restrictive compte tenu de la porosité entre les activités terroristes et la délinquance ou la criminalité organisée. C’est la raison pour laquelle nous préférons la référence à un « comportement constituant une menace pour la sécurité publique ».
L'amendement n° 78, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 23, deuxième, troisième et dernière phrases
Remplacer ces phrases par une phrase ainsi rédigée :
Elle peut être renouvelée, pour une durée équivalente, par décision motivée lorsque les conditions prévues à l’article L. 228-1 continuent d’être réunies.
La parole est à M. le ministre d'État.
L'amendement n° 64 rectifié, présenté par MM. Guérini, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 22
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 228–5.- Le ministre de l’intérieur informe sans délai le procureur de la République de Paris, et le procureur territorialement compétent, de la mesure d’interdiction qu’il veut prendre à l’encontre d’une personne mentionnée à l’article L. 228–1 de se trouver en relation directe ou indirecte avec une autre personne mentionnée au même article. Le procureur de la République de Paris saisit le juge des libertés et de la détention près le tribunal de grande instance de Paris pour qu’il se prononce sur l’opportunité d’ordonner une telle mesure.
La parole est à Mme Mireille Jouve.
Il s’agit d’un amendement de coordination avec l’amendement n° 77 rectifié.
Comme nos amendements précédents, cet amendement vise à permettre au juge des libertés et de la détention de se prononcer sur l’opportunité de prononcer les autres mesures individuelles prévues au présent article.
Le sous-amendement n° 82, présenté par M. M. Mercier, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Amendement n° 78
I. – Alinéa 3
1° Remplacer le mot :
équivalente
par les mots :
maximale de six mois
2° Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigés :
et sur la base d’éléments nouveaux ou complémentaires. L’obligation doit être levée aussitôt que les conditions prévues à l’article L. 228-1 ne sont plus satisfaites.
II. – Compléter cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Après l’alinéa 23
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Toute décision de renouvellement doit être notifiée à la personne concernée au plus tard cinq jours avant son entrée en vigueur. Si la personne concernée saisit le juge administratif d’une demande présentée sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative dans un délai de soixante-douze heures à compter de la notification de la décision, la mesure ne peut entrer en vigueur avant que le juge n’ait statué sur la demande.
« La personne soumise à l’obligation mentionnée au premier alinéa peut, dans le délai de deux mois suivant la notification de la décision et suivant la notification de chaque renouvellement, demander au tribunal administratif l’annulation de cette décision. Le tribunal administratif statue dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine. Ces recours s’exercent sans préjudice des procédures ouvertes aux articles L. 521-1 et L. 521-2 du code de justice administrative.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ce sous-amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements n° 69 rectifié, 64 rectifié et 78.
L'amendement n° 78, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 23, deuxième, troisième et dernière phrases
Remplacer ces phrases par une phrase ainsi rédigée :
Elle peut être renouvelée, pour une durée équivalente, par décision motivée lorsque les conditions prévues à l’article L. 228-1 continuent d’être réunies.
La parole est à M. le ministre d'État.
Le sous-amendement n° 82 est un sous-amendement de coordination.
Monsieur le ministre d’État, il faut bien qu’il y ait, sur ce texte, un point de désaccord entre le Gouvernement et la commission ! §Et, au titre de l’amendement n° 69 rectifié, on constate un vrai point de désaccord.
Au travers de cet amendement, le Gouvernement propose deux dispositions. La première ne soulève pas de problème insurmontable, mais elle est inutile. La seconde est également inutile, mais le Gouvernement a choisi de lui donner un relief particulier. Pour aller dans son sens, je vais donner un relief particulier à ma réponse !
Il s’agit d’un amendement de coordination avec l’amendement n° 77 rectifié.
Sourires.
Le sous-amendement n° 82, présenté par M. M. Mercier, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Amendement n° 78
I. – Alinéa 3
1° Remplacer le mot :
équivalente
par les mots :
maximale de six mois
2° Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigés :
et sur la base d’éléments nouveaux ou complémentaires. L’obligation doit être levée aussitôt que les conditions prévues à l’article L. 228-1 ne sont plus satisfaites.
II. – Compléter cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Après l’alinéa 23
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« Toute décision de renouvellement doit être notifiée à la personne concernée au plus tard cinq jours avant son entrée en vigueur. Si la personne concernée saisit le juge administratif d’une demande présentée sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative dans un délai de soixante-douze heures à compter de la notification de la décision, la mesure ne peut entrer en vigueur avant que le juge n’ait statué sur la demande.
« La personne soumise à l’obligation mentionnée au premier alinéa peut, dans le délai de deux mois suivant la notification de la décision et suivant la notification de chaque renouvellement, demander au tribunal administratif l’annulation de cette décision. Le tribunal administratif statue dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine. Ces recours s’exercent sans préjudice des procédures ouvertes aux articles L. 521-1 et L. 521-2 du code de justice administrative.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ce sous-amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements n° 69 rectifié, 64 rectifié et 78.
Comme lors de l’examen du projet de loi visant à renforcer la lutte contre la criminalité organisée – la loi du 3 juin 2016 – durant lequel le Parlement avait rejeté cette mesure, la commission s’est opposée à cette mesure pour quatre raisons.
Première raison : aucun cadre juridique n’est prévu pour encadrer la conservation et de l’utilisation de ces données. Il est prévu que ces données soient communiquées aux services de renseignement pour qu’ils puissent, notamment, mettre en place des interceptions. Or aucune durée limite de conservation n’est précisée. Le projet de loi n’encadre ni les finalités, ni les conditions d’utilisation de ces données, ni les personnes qui y ont accès. Aucune voie de recours n’est organisée pour permettre à la personne de contester cette conservation.
La Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, a formulé les plus vives réserves sur cette disposition. Elle considère également que le champ des identifiants de communication – téléphonie fixe ou mobile, transmission vocale par internet, SMS, courriels, messageries instantanées, réseaux sociaux – susceptibles d’être concernés par la mesure n’est ni précisé ni limité par le projet de loi.
Dans sa décision du 2 décembre 2016 en réponse à une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a rappelé la nécessité, pour le législateur, de prévoir, concernant la conservation des données, des garanties légales propres à assurer une conciliation équilibrée entre le droit au respect de la vie privée et l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public. Cette première raison serait suffisante, à elle seule, à rejeter la mesure. Nous en avons pourtant trois autres.
Deuxième raison : cette obligation serait sanctionnée pénalement et porte donc atteinte aux droits de la défense en obligeant la personne concernée à faciliter sa propre incrimination.
Or depuis la décision du Conseil constitutionnel du 4 novembre 2016, « le principe selon lequel nul n’est tenu de s’accuser, dont découle le droit de se taire » a valeur constitutionnelle sur le fondement de l’article IX de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
Cette mesure paraît également contraire à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, telle qu’elle ressort de l’arrêt du 22 juin 2017 dans l’affaire Aycaguer c. France.
Troisième raison qui nous conduit à être défavorables à cette mesure et à laquelle je demande au Gouvernement d’être particulièrement attentif : cette obligation n’était pas exigée pendant l’état d’urgence. Il serait paradoxal d’imposer des obligations plus grandes dans le droit commun que durant l’état d’urgence.
Quatrième raison qui me semble résumer toutes les autres : cette demande est complètement inutile. La mesure proposée par le Gouvernement est, certes, de nature à faciliter la mise sous surveillance de la personne, en l’obligeant à livrer elle-même des informations qu’en temps normal les services de renseignement doivent collecter par l’utilisation de toutes les techniques de renseignement que nous leur avons fournies dans les lois précédentes.
Je suis sûr pourtant, monsieur le ministre d’État, que pour prendre la décision d’obliger une personne à demeurer dans une commune, vous avez obtenu quelques informations, fournies par les services de renseignement. S’ils ont pu considérer qu’il fallait contraindre cette personne à rester dans sa commune, ils avaient certainement trouvé ses identifiants électroniques.
La commission ne s’oppose pas à ce que toutes les personnes visées à l’article 3 fassent l’objet de mesures de surveillance, de mise sur écoute et, notamment, de géolocalisation. L’intégralité du droit commun du renseignement doit cependant s’appliquer : il appartient aux services de renseignement d’utiliser les procédures issues de la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement afin de pouvoir récupérer les identifiants de connexion.
Il me vient une pensée mauvaise, en fin de compte. La seule justification de cette mesure se trouverait-elle dans votre souhait d’échapper aux dispositions de cette loi de 2015 ? Rassurez-vous, j’efface immédiatement de mes pensées ce soupçon, et je suis certain que vous accepterez de renoncer à cette mesure inutile, sans effet sur l’efficacité de l’administration, mais qui risque de poser de lourds problèmes de contentieux.
Le sous-amendement n° 82 est un sous-amendement de coordination.
Monsieur le ministre d’État, il faut bien qu’il y ait, sur ce texte, un point de désaccord entre le Gouvernement et la commission ! §Et, au titre de l’amendement n° 69 rectifié, on constate un vrai point de désaccord.
Au travers de cet amendement, le Gouvernement propose deux dispositions. La première ne soulève pas de problème insurmontable, mais elle est inutile. La seconde est également inutile, mais le Gouvernement a choisi de lui donner un relief particulier. Pour aller dans son sens, je vais donner un relief particulier à ma réponse !
Sourires.
Vous proposez également de supprimer une précision de la commission, qui a souhaité qualifier les personnes avec lesquelles les individus assignés n’auraient pas le droit d’entrer en relation, en raison de l’existence d’un risque ou d’une menace terroriste.
Le texte de la commission est innocent en ce qu’il se borne à reprendre la rédaction utilisée dans la loi du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme, c’est-à-dire l’interdiction de se trouver en relation avec certaines personnes « nommément désignées dont le comportement est lié à des activités à caractère terroriste ». Nous avions voté cette loi ensemble, il n’y a pas lieu de renoncer à l’appliquer.
L’amendement n° 64 rectifié est contraire à la position de la commission, qui a donc émis un avis défavorable.
La commission est favorable à l’amendement n° 78, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 82 qu’elle propose.
Notre position est donc cohérente avec celle que nous défendions précédemment, nous y reviendrons au cours de la navette.
Comme lors de l’examen du projet de loi visant à renforcer la lutte contre la criminalité organisée – la loi du 3 juin 2016 – durant lequel le Parlement avait rejeté cette mesure, la commission s’est opposée à cette mesure pour quatre raisons.
Première raison : aucun cadre juridique n’est prévu pour encadrer la conservation et de l’utilisation de ces données. Il est prévu que ces données soient communiquées aux services de renseignement pour qu’ils puissent, notamment, mettre en place des interceptions. Or aucune durée limite de conservation n’est précisée. Le projet de loi n’encadre ni les finalités, ni les conditions d’utilisation de ces données, ni les personnes qui y ont accès. Aucune voie de recours n’est organisée pour permettre à la personne de contester cette conservation.
La Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, a formulé les plus vives réserves sur cette disposition. Elle considère également que le champ des identifiants de communication – téléphonie fixe ou mobile, transmission vocale par internet, SMS, courriels, messageries instantanées, réseaux sociaux – susceptibles d’être concernés par la mesure n’est ni précisé ni limité par le projet de loi.
Dans sa décision du 2 décembre 2016 en réponse à une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a rappelé la nécessité, pour le législateur, de prévoir, concernant la conservation des données, des garanties légales propres à assurer une conciliation équilibrée entre le droit au respect de la vie privée et l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public. Cette première raison serait suffisante, à elle seule, à rejeter la mesure. Nous en avons pourtant trois autres.
Deuxième raison : cette obligation serait sanctionnée pénalement et porte donc atteinte aux droits de la défense en obligeant la personne concernée à faciliter sa propre incrimination.
Or depuis la décision du Conseil constitutionnel du 4 novembre 2016, « le principe selon lequel nul n’est tenu de s’accuser, dont découle le droit de se taire » a valeur constitutionnelle sur le fondement de l’article IX de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
Cette mesure paraît également contraire à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, telle qu’elle ressort de l’arrêt du 22 juin 2017 dans l’affaire Aycaguer c. France.
Troisième raison qui nous conduit à être défavorables à cette mesure et à laquelle je demande au Gouvernement d’être particulièrement attentif : cette obligation n’était pas exigée pendant l’état d’urgence. Il serait paradoxal d’imposer des obligations plus grandes dans le droit commun que durant l’état d’urgence.
Quatrième raison qui me semble résumer toutes les autres : cette demande est complètement inutile. La mesure proposée par le Gouvernement est, certes, de nature à faciliter la mise sous surveillance de la personne, en l’obligeant à livrer elle-même des informations qu’en temps normal les services de renseignement doivent collecter par l’utilisation de toutes les techniques de renseignement que nous leur avons fournies dans les lois précédentes.
Je suis sûr pourtant, monsieur le ministre d’État, que pour prendre la décision d’obliger une personne à demeurer dans une commune, vous avez obtenu quelques informations, fournies par les services de renseignement. S’ils ont pu considérer qu’il fallait contraindre cette personne à rester dans sa commune, ils avaient certainement trouvé ses identifiants électroniques.
La commission ne s’oppose pas à ce que toutes les personnes visées à l’article 3 fassent l’objet de mesures de surveillance, de mise sur écoute et, notamment, de géolocalisation. L’intégralité du droit commun du renseignement doit cependant s’appliquer : il appartient aux services de renseignement d’utiliser les procédures issues de la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement afin de pouvoir récupérer les identifiants de connexion.
Il me vient une pensée mauvaise, en fin de compte. La seule justification de cette mesure se trouverait-elle dans votre souhait d’échapper aux dispositions de cette loi de 2015 ? Rassurez-vous, j’efface immédiatement de mes pensées ce soupçon, et je suis certain que vous accepterez de renoncer à cette mesure inutile, sans effet sur l’efficacité de l’administration, mais qui risque de poser de lourds problèmes de contentieux.
Sourires.
Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 64 rectifié, comme au sous-amendement n° 82.
Je souhaite répondre à M. le rapporteur, qui rappelle que la mesure proposée ne faisait pas partie du dispositif de l’état d’urgence. C’est tout à fait vrai.
Cependant, sous l’état d’urgence, la personne incriminée devait pointer trois fois par jour et se trouver à son domicile douze heures par jour. Il y avait donc moins de risque qu’elle échappe à la surveillance que dans les mesures que nous proposons ici.
La mémoire du Sénat est vaste ! J’ai souvenir que la commission des lois, lors de l’examen de 2016, avait peur que le numéro de code fasse l’objet de cette disposition, et donc que les conversations soient écoutées. C’est donc pour suivre votre raisonnement de l’époque que le Gouvernement a précisément indiqué que le mot de passe ne serait pas utilisé.
Pourquoi défendons-nous cette mesure ? Parce que si la personne surveillée achetait demain un nouveau téléphone sans le déclarer, ce qui arrive souvent, elle serait alors passible de trois ans de prison, ce qui est quelque peu dissuasif !
Vous proposez également de supprimer une précision de la commission, qui a souhaité qualifier les personnes avec lesquelles les individus assignés n’auraient pas le droit d’entrer en relation, en raison de l’existence d’un risque ou d’une menace terroriste.
Le texte de la commission est innocent en ce qu’il se borne à reprendre la rédaction utilisée dans la loi du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme, c’est-à-dire l’interdiction de se trouver en relation avec certaines personnes « nommément désignées dont le comportement est lié à des activités à caractère terroriste ». Nous avions voté cette loi ensemble, il n’y a pas lieu de renoncer à l’appliquer.
L’amendement n° 64 rectifié est contraire à la position de la commission, qui a donc émis un avis défavorable.
La commission est favorable à l’amendement n° 78, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 82 qu’elle propose.
Notre position est donc cohérente avec celle que nous défendions précédemment, nous y reviendrons au cours de la navette.
L’amendement n’est pas adopté.
Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 64 rectifié, comme au sous-amendement n° 82.
Je souhaite répondre à M. le rapporteur, qui rappelle que la mesure proposée ne faisait pas partie du dispositif de l’état d’urgence. C’est tout à fait vrai.
Cependant, sous l’état d’urgence, la personne incriminée devait pointer trois fois par jour et se trouver à son domicile douze heures par jour. Il y avait donc moins de risque qu’elle échappe à la surveillance que dans les mesures que nous proposons ici.
La mémoire du Sénat est vaste ! J’ai souvenir que la commission des lois, lors de l’examen de 2016, avait peur que le numéro de code fasse l’objet de cette disposition, et donc que les conversations soient écoutées. C’est donc pour suivre votre raisonnement de l’époque que le Gouvernement a précisément indiqué que le mot de passe ne serait pas utilisé.
Pourquoi défendons-nous cette mesure ? Parce que si la personne surveillée achetait demain un nouveau téléphone sans le déclarer, ce qui arrive souvent, elle serait alors passible de trois ans de prison, ce qui est quelque peu dissuasif !
L’amendement n’est pas adopté.
Le sous-amendement est adopté.
Le sous-amendement est adopté.
L’amendement n° 20 rectifié, présenté par MM. Grand et Cambon, Mme Garriaud-Maylam, MM. Calvet, Joyandet, Huré et Vasselle, Mmes Imbert et Deromedi, MM. Chasseing, P. Leroy, G. Bailly et J.P. Fournier, Mmes Duchêne et de Rose, MM. Laménie, Dassault et Maurey, Mme Duranton, MM. Lefèvre, Cuypers et Bonhomme, Mme Giudicelli et MM. Revet et Chaize, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 24
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les décisions du ministre de l’intérieur prises en application des articles L. 228-2 à L. 228-5 sont communiquées au maire de la commune d’habitation.
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
Le maire est l’autorité de police administrative au nom de la commune. Il possède des pouvoirs de police générale lui permettant de mener des missions de sécurité, de tranquillité et de salubrité publiques. Il possède la qualité d’officier de police judiciaire.
Il est donc proposé que les maires soient tenus informés des mesures individuelles de surveillance prises à l’encontre de leurs administrés. Il en est toujours allé ainsi, je ne vois pas pourquoi cela changerait aujourd’hui.
L’amendement est adopté.
L’amendement n° 20 rectifié, présenté par MM. Grand et Cambon, Mme Garriaud-Maylam, MM. Calvet, Joyandet, Huré et Vasselle, Mmes Imbert et Deromedi, MM. Chasseing, P. Leroy, G. Bailly et J.P. Fournier, Mmes Duchêne et de Rose, MM. Laménie, Dassault et Maurey, Mme Duranton, MM. Lefèvre, Cuypers et Bonhomme, Mme Giudicelli et MM. Revet et Chaize, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 24
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les décisions du ministre de l’intérieur prises en application des articles L. 228-2 à L. 228-5 sont communiquées au maire de la commune d’habitation.
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
M. Michel Mercier, rapporteur. Cette proposition me semble disproportionnée et je suggère à M. Grand de retirer cet amendement. Il s’y attendait, parce qu’il a déjà déposé un tel amendement plusieurs fois !
Le maire est l’autorité de police administrative au nom de la commune. Il possède des pouvoirs de police générale lui permettant de mener des missions de sécurité, de tranquillité et de salubrité publiques. Il possède la qualité d’officier de police judiciaire.
Il est donc proposé que les maires soient tenus informés des mesures individuelles de surveillance prises à l’encontre de leurs administrés. Il en est toujours allé ainsi, je ne vois pas pourquoi cela changerait aujourd’hui.
Sourires.
Je comprends sa démarche, mais il ne m’apparaît pas qu’il faut communiquer toutes ces données aux maires. Ils sont 36 000 à être potentiellement concernés, on ne peut pas diffuser ainsi ces informations. Nous avons débattu de plusieurs amendements de ce type. Ce matin, nous avons accepté, dans certains cas, que le maire reçoive une information. En l’occurrence, on ne peut pas le faire.
L’efficacité même de l’action administrative nécessite que M. Grand accepte de retirer cet amendement, et je l’en remercie par avance.
M. Michel Mercier, rapporteur. Cette proposition me semble disproportionnée et je suggère à M. Grand de retirer cet amendement. Il s’y attendait, parce qu’il a déjà déposé un tel amendement plusieurs fois !
Sourires.
Je n’avais pas eu l’occasion d’entendre précédemment les propositions de M. Grand, mais je partage l’avis du rapporteur. Ces mesures s’inscrivent dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, laquelle relève de la compétence de l’État.
L’information à ce sujet exige la discrétion. M. le rapporteur en a indiqué les raisons. Si nous partagions des informations avec l’ensemble des maires, il y aurait quelques chances qu’elles se diffusent un peu !
Je comprends sa démarche, mais il ne m’apparaît pas qu’il faut communiquer toutes ces données aux maires. Ils sont 36 000 à être potentiellement concernés, on ne peut pas diffuser ainsi ces informations. Nous avons débattu de plusieurs amendements de ce type. Ce matin, nous avons accepté, dans certains cas, que le maire reçoive une information. En l’occurrence, on ne peut pas le faire.
L’efficacité même de l’action administrative nécessite que M. Grand accepte de retirer cet amendement, et je l’en remercie par avance.
Non, je vais le retirer, monsieur le président.
Monsieur le ministre d’État, je veux toutefois vous faire part d’un cas récent. Nous avons fait embaucher une personne, jeune, laquelle, quelques semaines après, a été mise hors circuit et est aujourd’hui en prison.
Peut-être pourrions-nous trouver un juste milieu avec les maires. Nous embauchons, notamment l’été, sur des contrats courts, des jeunes gens et des jeunes filles. Il ne me semblerait pas inconvenant, si certains d’entre eux étaient suivis par les forces de l’ordre, que nous en soyons informés.
Je retire l’amendement.
Je n’avais pas eu l’occasion d’entendre précédemment les propositions de M. Grand, mais je partage l’avis du rapporteur. Ces mesures s’inscrivent dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, laquelle relève de la compétence de l’État.
L’information à ce sujet exige la discrétion. M. le rapporteur en a indiqué les raisons. Si nous partagions des informations avec l’ensemble des maires, il y aurait quelques chances qu’elles se diffusent un peu !
L’amendement n° 20 rectifié est retiré.
La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote sur l’article 3.
La discussion sur cet article montre qu’il illustre ce qui est le plus contestable dans cette loi.
La volonté affichée dans ce texte est de nous donner tous les moyens pour faire face au terrorisme et à ses horreurs et pour ne pas baisser la garde.
Depuis deux ans et demi, tous les efforts – jusque dans le premier article de ce texte – tendaient à maintenir l’équilibre entre cette lutte impitoyable, ce refus d’une quelconque naïveté de la démocratie et la préservation des libertés.
Or, avec cet article 3, nous intégrons dans le droit commun, à mon sens, des mesures typiques de l’état d’urgence, c’est-à-dire des mesures exceptionnelles. On m’a répondu en relevant qu’il ne s’agissait plus d’assignation à résidence, mais d’obligation de résider dans le périmètre d’une commune ou, sous bracelet électronique, d’un département.
Monsieur Mercier, j’entends cet argument, mais cela ne change pas la nature de la disposition. Ce qui diffère d’une mesure d’état d’urgence classique, comme une assignation à résidence, c’est la gradation du dispositif, mais pas sa nature. Il s’agit bien de punir en limitant la liberté d’un individu. Au lieu d’être retenu chez lui, il peut se déplacer dans la commune, peut-être dans le département, mais, par nature, une décision aura été prise sans intervention du juge. C’est de cela qu’il s’agit.
Un autre argument a été avancé par le ministre d’État, qui concernait sa région, pour indiquer que la traçabilité était nécessaire. Maintenir quelqu’un dans sa commune permettrait d’éviter des drames. Il a ainsi donné l’exemple de ce terroriste qui a décapité son patron, en arguant que si l’on avait pu le suivre alors qu’il se trouvait dans un autre département et qu’il était repéré comme radicalisé, on aurait évité l’attaque.
Pas du tout ! Lorsqu’il a été repéré du côté de Besançon, si ma mémoire est bonne, il n’était pas considéré comme susceptible de passer à l’acte et donc comme relevant des mesures prévues dans cet article.
Le problème, c’est qu’il n’a pas été tracé, parce que la police n’a pas les moyens aujourd’hui de suivre le parcours, les déplacements et les changements de domicile de l’ensemble de ceux qui font l’objet d’une fiche S.
La question de l’efficacité rejoint donc celle des moyens, dont nous discutons peu. J’espère que nous en débattrons au moment de la loi de finances. Il s’agit de donner les moyens aux services antiterroristes et à la police de faire face à ce nouveau terrorisme complexe, plutôt que de croire que la loi, que les mesures de ce type permettent d’être efficace.
Inefficacité, atteinte aux libertés, cela impose, selon moi, le rejet de cet article.
Non, je vais le retirer, monsieur le président.
Monsieur le ministre d’État, je veux toutefois vous faire part d’un cas récent. Nous avons fait embaucher une personne, jeune, laquelle, quelques semaines après, a été mise hors circuit et est aujourd’hui en prison.
Peut-être pourrions-nous trouver un juste milieu avec les maires. Nous embauchons, notamment l’été, sur des contrats courts, des jeunes gens et des jeunes filles. Il ne me semblerait pas inconvenant, si certains d’entre eux étaient suivis par les forces de l’ordre, que nous en soyons informés.
Je retire l’amendement.
L’amendement n° 20 rectifié est retiré.
La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote sur l’article 3.
L’article 3 est adopté.
La discussion sur cet article montre qu’il illustre ce qui est le plus contestable dans cette loi.
La volonté affichée dans ce texte est de nous donner tous les moyens pour faire face au terrorisme et à ses horreurs et pour ne pas baisser la garde.
Depuis deux ans et demi, tous les efforts – jusque dans le premier article de ce texte – tendaient à maintenir l’équilibre entre cette lutte impitoyable, ce refus d’une quelconque naïveté de la démocratie et la préservation des libertés.
Or, avec cet article 3, nous intégrons dans le droit commun, à mon sens, des mesures typiques de l’état d’urgence, c’est-à-dire des mesures exceptionnelles. On m’a répondu en relevant qu’il ne s’agissait plus d’assignation à résidence, mais d’obligation de résider dans le périmètre d’une commune ou, sous bracelet électronique, d’un département.
Monsieur Mercier, j’entends cet argument, mais cela ne change pas la nature de la disposition. Ce qui diffère d’une mesure d’état d’urgence classique, comme une assignation à résidence, c’est la gradation du dispositif, mais pas sa nature. Il s’agit bien de punir en limitant la liberté d’un individu. Au lieu d’être retenu chez lui, il peut se déplacer dans la commune, peut-être dans le département, mais, par nature, une décision aura été prise sans intervention du juge. C’est de cela qu’il s’agit.
Un autre argument a été avancé par le ministre d’État, qui concernait sa région, pour indiquer que la traçabilité était nécessaire. Maintenir quelqu’un dans sa commune permettrait d’éviter des drames. Il a ainsi donné l’exemple de ce terroriste qui a décapité son patron, en arguant que si l’on avait pu le suivre alors qu’il se trouvait dans un autre département et qu’il était repéré comme radicalisé, on aurait évité l’attaque.
Pas du tout ! Lorsqu’il a été repéré du côté de Besançon, si ma mémoire est bonne, il n’était pas considéré comme susceptible de passer à l’acte et donc comme relevant des mesures prévues dans cet article.
Le problème, c’est qu’il n’a pas été tracé, parce que la police n’a pas les moyens aujourd’hui de suivre le parcours, les déplacements et les changements de domicile de l’ensemble de ceux qui font l’objet d’une fiche S.
La question de l’efficacité rejoint donc celle des moyens, dont nous discutons peu. J’espère que nous en débattrons au moment de la loi de finances. Il s’agit de donner les moyens aux services antiterroristes et à la police de faire face à ce nouveau terrorisme complexe, plutôt que de croire que la loi, que les mesures de ce type permettent d’être efficace.
Inefficacité, atteinte aux libertés, cela impose, selon moi, le rejet de cet article.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
La séance, s uspendue à vingt heures quinze, est reprise à vingt-et-une heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Claude Bérit-Débat.
L’article 3 est adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
La séance, s uspendue à vingt heures quinze, est reprise à vingt-et-une heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Claude Bérit-Débat.