Intervention de Gérard Collomb

Réunion du 18 juillet 2017 à 14h20
Sécurité intérieure et lutte contre le terrorisme — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Gérard Collomb, ministre d'État :

Nous aurons à débattre également du mécanisme retenu pour autoriser la prorogation de la mesure que la commission propose de conditionner à l’intervention du juge des libertés et de la détention. Je pense que nous arriverons à trouver un accord sur ce point.

Nous considérons que l’intervention du juge judiciaire n’est pas nécessaire et qu’elle n’est d’ailleurs conforme ni au principe de séparation des pouvoirs ni à la tradition juridique française. Toutefois, le Gouvernement est sensible à la préoccupation exprimée par la commission. J’aurai donc l’occasion de défendre un amendement visant à prendre en compte l’impact que pourrait avoir le renouvellement des mesures de surveillance de la personne concernée.

Enfin, l’article 4 du projet de loi aborde la question des visites domiciliaires et des saisies. Dans le cadre de l’état d’urgence, il s’agissait de perquisitions pouvant être menées à la discrétion de l’autorité administrative pour prévenir tout trouble à l’ordre public.

Cet outil s’est révélé profondément utile, puisque je rappelais devant votre commission des lois que 600 armes, dont plus de 78 armes de guerre avaient ainsi pu être saisies. On me dira que cela valait dans la première période de l’état d’urgence, les terroristes étant alors sujets à un effet de sidération. Eh bien non !

Depuis le cinquième prolongement de l’état d’urgence, le 22 décembre 2016, ces perquisitions nous ont directement permis de prévenir deux préparations d’attentat, alors que les éléments en notre possession ne nous auraient pas permis de procéder à une perquisition judiciaire. Il serait donc peu responsable de se priver d’une telle disposition.

En même temps, nous avons conscience de ce qu’une visite au domicile d’un individu, avec la possibilité de retenir ce dernier durant un certain laps de temps, peut comporter d’atteintes aux libertés. C’est pourquoi le régime des visites domiciliaires et saisies sera lui aussi extrêmement ciblé.

Comme les mesures de surveillance, il ne pourra concerner qu’une personne dont le comportement constitue une menace d’une particulière gravité pour la sécurité et l’ordre public, et qui « soit entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme, soit soutient ou adhère à des thèses incitant à la commission d’actes de terrorisme en France ou à l’étranger ou faisant l’apologie de tels actes ».

Je rappelle que le régime de l’état d’urgence prévoyait que les perquisitions pouvaient être appliquées à tout individu constituant une menace pour la sécurité et l’ordre public. Nous avons souhaité restreindre cette mesure, qui était extrêmement large, à des actions en rapport avec le terrorisme.

C’est pourquoi, en raison de la violation du domicile qu’il autorise, nous avons souhaité que ce régime soit soumis à un double contrôle de l’autorité judiciaire : d’une part, celui du procureur de Paris, qui, du fait de sa spécialisation dans la lutte contre le terrorisme, se verra informé de toute visite effectuée sur le territoire national et pourra ainsi, s’il le juge nécessaire, judiciariser le renseignement et reprendre l’enquête à son compte ; d’autre part – il s’agit là de la principale innovation de ce texte –, celui du juge des libertés et de la détention près le tribunal de grande instance de Paris, qui devra autoriser la visite et contrôler l’exploitation faite du matériel saisi sous son autorisation.

La commission des lois a reconnu que, sous réserve d’une information du procureur territorialement compétent, cette rédaction permettait une meilleure coordination entre autorités administratives et autorités judiciaires, confortant cette dernière dans son rôle de gardienne de la liberté individuelle au sens de l’article 66 de la Constitution. Permettez-moi de remercier le rapporteur et le président de la commission de l’esprit constructif qu’ils ont ainsi manifesté.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion