Intervention de Serge Dassault

Réunion du 20 juillet 2017 à 15h00
Orientation des finances publiques et règlement du budget et approbation des comptes de l'année 2016 — Suite d'un débat puis adoption définitive d'un projet de loi

Photo de Serge DassaultSerge Dassault :

Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, il y a deux façons de réaliser un budget : soit on le construit pour l’intérêt général de la France – cela me paraît normal ! –, soit on privilégie « l’État-providence ».

Nos précédents Présidents de la République ont privilégié l’État-providence, multipliant les dépenses de protection sociale sans prévoir leur financement. Ils ont oublié le risque grandissant menaçant l’ensemble de notre système financier, qui risque de s’effondrer lorsque les taux d’intérêt augmenteront.

La France est le pays européen le plus dépensier. Il est temps de changer de méthode, de limiter l’intervention de l’État dans l’économie et de laisser davantage de pouvoir d’achat aux ménages pour qu’ils investissent et favorisent la croissance.

Les Français doivent savoir qu’une épée de Damoclès est suspendue au-dessus de nos têtes. Elle est détenue par les investisseurs, qui nous font – encore… – confiance, en nous prêtant chaque année 200 milliards d’euros à des taux qui restent bas.

À défaut, la France sombrerait dans une faillite retentissante. Une hausse de 5 % de nos taux d’intérêt, soit un niveau équivalent à celui des taux grecs, représenterait un surcoût de 50 milliards d’euros au bout de cinq ans, c’est-à-dire une charge de la dette impossible à financer. Tout le système social que nous connaissons s’écroulerait !

La France ne peut se résoudre à faire faillite. Le Gouvernement ne doit pas négliger le risque d’une méfiance accrue de nos investisseurs, dont les stratégies sont avant tout opportunistes. Or les avertissements se succèdent, sans réaction : en mai dernier, Bruxelles a décidé de maintenir la procédure de déficit excessif à l’encontre de la France.

La Cour des comptes, quant à elle, se sera rarement montrée autant critique sur les résultats d’une année budgétaire, parlant d’une « occasion manquée » pour 2016. Elle évoque également un risque majeur pour 2017.

Dans ce contexte explosif, le Premier ministre a lui-même qualifié la situation budgétaire de « volcan ». Cela aurait dû se traduire par une volonté forte de réduire nos déficits. Or tel n’a pas été le cas.

Les économies sont encore floues. Les annonces de dépenses nouvelles non financées se multiplient, comme d’ailleurs les annonces de suppression de recettes.

Ainsi, 450 millions d’euros supplémentaires vont être alloués aux contrats aidés, qui coûtent déjà 2, 5 milliards d’euros par an. Mais à quoi servent ces contrats ? Ce ne sont pas eux qui permettront de réduire le chômage !

De même, 4 milliards d’euros sont déjà consacrés à la prime d’activité, que vous souhaitez doubler. C’est de la folie ! Cela ne sert à rien et ne facilitera sûrement pas l’embauche.

Je pense encore au crédit d’impôt pour la compétitivité et pour l’emploi, le CICE, financé par 15 milliards d’euros d’emprunt chaque année. Pour quoi faire ?

Que dire des 8, 5 milliards d’euros non financés résultant de la suppression de la taxe d’habitation pour les communes ? C’est très bien de parler d’égalité, mais comment les communes vont-elles survivre, sans cette recette ? L’État va-t-il devoir emprunter pour venir à leur aide, ce qui va encore aggraver notre déficit budgétaire ?

Je pense enfin aux 3 milliards d’euros pour le rétablissement de l’exonération sur les heures supplémentaires. C’est très gentil pour ceux qui vont en bénéficier, mais ces 3 milliards vont manquer à l’État.

Comment trouver les recettes nécessaires pour financer ces nouvelles dépenses ? Le déficit budgétaire va se creuser dangereusement.

Prenons l’exemple du chômage : il ne se réduira pas tant que nous n’aurons pas mis en place la flexibilité de l’emploi, ce qui est difficile à faire comprendre à un certain nombre de personnes, notamment aux syndicats.

Je rappelle que l’Allemagne a créé 2, 5 millions d’emplois en dix ans, sans aucun coût pour l’État. La recette d’un tel succès est connue : flexibilité pour les entreprises, sécurité pour les salariés.

C’est la solution. J’espère que le texte définitif sur le dialogue social l’aura retenue. Cela ne coûtera rien à l’État et permettra de nombreuses économies.

Inspirons-nous aussi de l’Allemagne pour baisser le coût du travail en réduisant le périmètre de l’État-providence en développant, par exemple, un système par capitalisation de la sécurité sociale, et non par répartition, en incitant les salariés à prendre des assurances personnelles pour financer retraite, santé ou chômage. C’est ce qui se passe dans tous les pays : cela ne coûte rien à l’État et fonctionne très bien. On pourrait ainsi réduire d’autant les charges sur les salaires et le coût du travail.

L’apprentissage tel qu’il existe en Allemagne permet aussi de réaliser des économies. Le collège unique, que nous subissons en France depuis quinze ans, grâce à René Haby, et qui enseigne le même programme à tous les enfants, sans aucune formation professionnelle, produit en réalité 150 000 chômeurs chaque année. Tout le monde s’en fiche, et aucun ministre de l’éducation nationale, en tout cas pas la dernière, ne s’y est intéressé. Ces jeunes sortent de l’école sans diplôme et sans perspective d’emploi.

En Allemagne, comme c’était auparavant le cas ici, deux collèges coexistent : l’un professionnel, l’autre général, avec une sélection des enfants, vers douze ou quatorze ans, selon leur motivation. Le rétablissement du certificat d’études permettrait de réaliser une telle sélection en France.

Mes chers collègues, la vraie égalité n’est pas de donner la même formation à tous les jeunes, les forçant à passer un bachot qui ne sert à rien d’autre qu’à accéder aux études supérieures, ce qui ne leur permettra pas de trouver un emploi.

Une autre erreur est de considérer les collectivités territoriales comme des variables d’ajustement budgétaire.

Vous voulez réduire les dotations des communes et des départements, ce qui va les mettre en déficit. Privés de leurs dotations, ils seront incapables d’assurer leurs missions de service public : entretien des routes, gestion des écoles et des collèges…

Prenons l’exemple de l’Essonne : la dotation de l’État sera passée de 151 millions d’euros en 2013 à 17 millions d’euros en 2021. Si l’on ajoute à cela les charges qu’entraîne le RSA, dont ils n’ont que faire, car ce dispositif est d’origine purement gouvernementale, les départements sont en faillite ! Les maires et les présidents de départements sont inquiets : la gestion sans ressources est un exercice impossible !

Enfin, permettez-moi de vous soumettre une proposition que je considère comme très importante, mais qui n’a jamais été écoutée.

En France, les taux d’imposition progressifs sur le revenu suppriment toute possibilité d’enrichissement pour les contribuables : plus leurs revenus augmentent, plus leurs impôts augmentent aussi, …

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