Intervention de François Marc

Réunion du 20 juillet 2017 à 15h00
Orientation des finances publiques et règlement du budget et approbation des comptes de l'année 2016 — Suite d'un débat puis adoption définitive d'un projet de loi

Photo de François MarcFrançois Marc, en remplacement de Mme Michèle André, présidente de la commission des finances :

Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, je prends la place, à sa demande, de Mme André, qui, en effet, ne peut malheureusement assister à nos travaux.

Un débat conjoint sur la loi de règlement et les orientations des finances publiques est une bonne idée, car c’est à la lumière de l’expérience des exercices passés qu’il faut analyser les orientations pour l’avenir.

Notre débat est bref, mais les travaux du Sénat, qu’ils soient législatifs ou de contrôle, ne se limitent pas aux débats en séance publique.

Nous consacrerons moins d’une heure à la convention fiscale avec le Portugal que nous examinerons ensuite. Elle a pourtant donné lieu à énormément de travaux préparatoires de la commission et, surtout, du rapporteur. Mme André vous renvoie à cet égard à son rapport.

L’examen de la loi de règlement exige un lourd travail du rapporteur général de la commission des finances, mais aussi de tous les rapporteurs spéciaux. Mme la présidente de la commission des finances vous invite donc à vous reporter au recueil de leurs observations, qui sont autant de recommandations adressées au Gouvernement en vue de la budgétisation pour 2018.

Au terme de ces trois années à la présidence de la commission des finances, Michèle André pense que le Gouvernement a raison d’évoquer dans son rapport la question de la procédure d’examen des lois de finances au Parlement, car nous examinons les textes – la loi de finances, mais aussi le collectif de fin d’année – dans des conditions d’urgence déraisonnables, alors même que, contrairement à ce qu’on entend ces dernières semaines, la loi de finances est non pas une prévision, mais l’autorisation donnée par le Parlement au Gouvernement de lever les impôts et de dépenser l’argent public.

La législation fiscale comme l’examen des propositions du Gouvernement en matière de répartition des dépenses entre politiques publiques nécessitent un examen serein et approfondi, dont la première condition est la disponibilité des ministres et de leurs administrations pour répondre aux interrogations des parlementaires et transmettre tous les documents utiles.

Le débat politique porte aujourd’hui sur la stratégie budgétaire du nouveau gouvernement et, à cet égard, il est utile d’examiner l’exécution de 2016. On peut la résumer à grand trait, en constatant que le déficit public a continué de diminuer, de 0, 2 point de PIB.

S’agissant de l’impact des mesures décidées par le Gouvernement indépendamment de la conjoncture – ce que l’on appelle l’effort structurel –, on relève que les prélèvements obligatoires ont diminué de 0, 1 point de PIB, soit 2, 2 milliards d’euros, et que des économies de dépenses ont été réalisées à hauteur de 0, 4 point de PIB, tout en dégageant par ailleurs de nouveaux moyens pour la sécurité, la justice, des créations de postes dans l’éducation ou encore le service civique.

Certes, on peut penser que, une dizaine de milliards d’euros d’économies, ce n’est pas assez. Pour sa part, Mme la présidente de la commission des finances estime que la politique budgétaire a été bien dosée, avec suffisamment d’économies pour permettre une réduction du déficit, mais pas trop de coupes dans les dépenses pour ne pas casser la reprise de la croissance.

Pour ce qui concerne les orientations pour 2018 et les années suivantes, Mme André souhaite attirer votre attention, messieurs les ministres, sur la préservation des intérêts patrimoniaux de l’État. Vous voulez céder 10 milliards d’euros de participations pour financer l’innovation. C’est louable, mais faites vos calculs ! Pour l’État, céder des participations plutôt que de s’endetter revient, dans le contexte actuel, à abandonner un rendement annuel de près de 4 % sous la forme de dividendes pour s’épargner le versement, chaque année, d’un taux d’intérêt proche de zéro. Est-ce totalement rationnel ?

S’agissant de la trajectoire des finances publiques, Michèle André observe que le Gouvernement se fixe l’objectif d’évolution des dépenses le plus ambitieux de l’histoire de nos finances publiques : 0 % d’augmentation en volume pour l’ensemble des administrations publiques, alors même que les précédentes cibles, moins ambitieuses, n’ont jamais été atteintes.

Il ne vous sera pas reproché d’être ambitieux, mais Mme André voudrait des précisions sur la durée d’une telle trajectoire, ainsi que sur le montant annuel d’économies lié à cet objectif. Quel serait, à court terme, l’impact sur la croissance de la réalisation de ce programme d’économies ?

Mme la présidente de la commission des finances insiste sur la nécessité de bien calibrer l’arbitrage entre réduction du déficit et préservation de la croissance, car il faut avoir une approche économique et non pas comptable des finances publiques. L’objectif principal, dans le respect de nos engagements européens, ce sont la croissance et, surtout, l’emploi.

Monsieur le ministre de l’action et des comptes publics, vous qui êtes le gardien de l’unité du budget de l’État, la construction d’un budget qui ne soit pas uniquement une addition de sanctuaires sera d’autant plus ardue que vous avez insisté, en commission, sur la notion de sincérité. Vous avez indiqué ne plus vouloir recourir à ce que la Cour des comptes appelle les « biais de construction », notamment les sous-budgétisations et les recettes surévaluées. Quels sont les autres « biais » auxquels vous avez décidé de ne plus avoir recours ?

Par exemple, allez-vous vous interdire de reporter des dépenses sur l’exercice suivant pour piloter la fin de gestion, de mobiliser des crédits extrabudgétaires comme ceux du PIA, le programme d’investissement d’avenir, pour compléter le financement budgétaire d’un projet, d’inscrire des autorisations d’engagement sans prévoir les crédits de paiement, de décaler des dates d’indexation pour gagner un peu de trésorerie ? Allez-vous toujours rattacher les fonds de concours suffisamment tôt pour qu’ils soient consommés dans l’année ?

Plus fondamentalement et au-delà des arrangements budgétaires qui permettent de tenir le déficit, allez-vous toujours distinguer dans vos annonces les économies de constatation et celles qui résultent de vos efforts ? Et allez-vous toujours expliciter le référentiel en fonction duquel vous calculerez vos économies ?

Au travers de ces deux dernières questions, Mme André veut vous inviter à tenir vos engagements sur la méthode et à ne pas avoir peur de la transparence s’agissant des choix que vous proposerez aux Français. Ce sont les conditions de leur adhésion, de la vitalité du débat démocratique et, pour le coup, de la confiance dans l’action publique

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