Intervention de Alain Milon

Réunion du 20 juillet 2017 à 15h00
Orientation des finances publiques et règlement du budget et approbation des comptes de l'année 2016 — Suite d'un débat puis adoption définitive d'un projet de loi

Photo de Alain MilonAlain Milon, président de la commission des affaires sociales :

Dans ce débat sur l’orientation des finances publiques, je serai bref s’agissant du bilan de la gestion passée, que je résumerai en trois points : un choc fiscal sans précédent, un changement de pied aux effets tardifs et des déficits persistants.

Le Gouvernement a donné l’écho nécessaire à une situation désormais bien connue de tous et, plus encore, du Sénat.

Dans ce débat, la question est plutôt celle de l’après. En matière de finances sociales, le Gouvernement a annoncé une hausse de la contribution sociale généralisée, la CSG, pour un montant de 22 milliards d’euros, hausse à propos de laquelle je voudrais tenter, comme c’est l’usage en matière de médicament, une analyse bénéfice-risque.

Le bénéfice attendu est une augmentation du pouvoir d’achat des salariés, par la suppression des cotisations salariales d’assurance maladie et d’assurance chômage, pour un montant total de 17 milliards d’euros par an.

Les risques, quant à eux, sont nombreux. Rappelons que la CSG porte à 70 % sur les revenus d’activité. C’est donc bien un prélèvement assis très majoritairement sur le travail. Il y a bien sûr une assiette sur les revenus du capital, mais le Gouvernement a annoncé qu’ils feraient l’objet d’un prélèvement forfaitaire de 30 %. Quelle sera donc la place de la CSG dans le cadre de ce forfait ?

Le taux de la CSG est élevé. Il est supérieur à l’ancienne première tranche de l’impôt sur le revenu, supprimée par le précédent gouvernement, qui était de 5 %. Une flat tax de 7, 5 %, n’est-ce pas déjà beaucoup ?

Augmenter le taux de la CSG, c’est prendre le risque d’un processus de mitage comparable à celui qu’a connu l’impôt sur le revenu, dont le produit, qui atteint 72 milliards d’euros, est aujourd’hui inférieur de 26 milliards d’euros à celui de la CSG et se concentre sur les derniers déciles de rémunération.

D’ores et déjà, le débat se porte sur les compensations. Il s’étendra bientôt, à n’en pas douter, aux dérogations.

Que faire pour les travailleurs indépendants, lesquels ne paient pas de cotisations d’assurance chômage et pour qui la CSG porte sur le revenu majoré des cotisations sociales ?

Que faire pour les fonctionnaires, qui n’acquittent ni cotisation maladie ni cotisation chômage, alors qu’il est par ailleurs indispensable de maîtriser la masse salariale publique ?

Que faire pour les retraités, qui bénéficient d’un taux réduit de CSG et ne paient pas de cotisations salariales ?

Très récemment, les praticiens et auxiliaires médicaux se sont avisés que leurs cotisations étaient prises en charge par l’assurance maladie. Faudra-t-il inventer pour eux un système spécifique de compensation ?

Le Gouvernement a annoncé, en guise de compensation pour les retraités, la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des contribuables. L’expérience de la suppression de la demi-part des veuves nous enseigne que les compensations indirectes ne touchent jamais exactement les mêmes cibles.

Il a également annoncé un élargissement du champ des bénéficiaires de l’assurance chômage, dont le régime aura accumulé une dette de 40 milliards d’euros à l’horizon 2020 et qui serait également, bien qu’il s’agisse d’un risque contributif, financé par une affectation de CSG.

Messieurs les ministres, le financement de la protection sociale est loin d’être un jardin à la française avec des prélèvements simples, clairs et compréhensibles par tous.

Dans un paysage fiscal d’une rare complexité où impôts et cotisations se confondent dans leurs modalités et leurs objectifs, les prélèvements ne seront légitimes et acceptés que s’ils sont compris. Les impôts financent la solidarité ; les cotisations financent les risques contributifs. La transformation annoncée du CICE offre l’occasion de mettre en œuvre ce principe par la suppression des cotisations familiales, qui pèsent encore sur les salaires.

La CSG, dont le produit devrait être de 98 milliards d’euros cette année, répond aux critères de la recette idéale en tant qu’impôt de la sécurité sociale : produit stable, assiette large, niches fiscales encore limitées et objectif clair. Portée à 9, 2 % ou à 9, 7 % avec la CRDS, avec des affectataires multiples, elle ne répondrait plus à ces critères.

Vous l’aurez compris, messieurs les ministres, pour une diversification des ressources de la protection sociale, notre préférence va à une taxation de la consommation, dont l’assiette s’est toujours maintenue pendant la crise, qui assure un prélèvement progressif grâce aux taux réduits de TVA et permet de taxer les produits importés, au moment où l’offre de notre économie peine à répondre à la demande des consommateurs.

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