Intervention de Françoise Nyssen

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 19 juillet 2017 à 16h30
Audition de Mme Françoise Nyssen ministre de la culture

Françoise Nyssen, ministre de la culture :

Merci à tous. Toutes vos questions constituent des éléments de réflexion nécessaires. Je suis ministre de la culture depuis seulement deux mois et ne suis pas issue d'une longue carrière dans cette branche, mais plutôt du terrain.

Le budget est un sujet très important. Je ne rappellerai pas la légende du colibri. Pour 2017, je fais ma part de l'effort. Il s'agit surtout de décalages d'engagements qui ne toucheront en rien la création ou l'accompagnement des artistes.

Pour 2018, je mettrai la création, le soutien aux artistes, le patrimoine et l'éducation artistique et culturelle au coeur de ma politique. Ce sera ma boussole budgétaire. Les arbitrages seront connus d'ici la rentrée.

La culture et l'éducation figurent au coeur des priorités du quinquennat. Le Président de la République et le Premier ministre le réaffirment tous les jours. J'ai bon espoir de maintenir, voire d'amplifier le budget de la culture. J'ai fourni au ministre de l'action et des comptes publics le discours de 1848 de Victor Hugo.

Je ne répéterai pas qu'impossible n'est pas français. Dans une vie antérieure, j'ai travaillé sur l'idée du possible. L'école que nous avons créée s'appelle l'école du domaine du possible. Rappelez-vous le film Demain : si l'on regarde ce qui est possible, on avance.

Le possible, c'est avec les collectivités territoriales. Il est urgent que je prenne la mesure de ce qui peut être fait, évidemment par la contractualisation. J'ai bien entendu votre demande d'un allongement des délais. La visibilité sur une année crée trop d'angoisse.

J'ai réuni de façon non officielle le CCTDC la semaine dernière. Nous avons évoqué la mise en place des commissions culture des CTAP. Je vais essayer de casser les silos et de m'appuyer sur ceux qui ont une connaissance des actions locales, notamment les DRAC.

Vous m'avez interrogée sur l'audiovisuel, en particulier Canal+. Je me suis exprimée autoritairement pour dire que les auteurs ne peuvent pas servir de variable d'ajustement. Cette situation n'est pas acceptable.

Le droit d'auteur et le partage de la valeur sont traités à l'échelon européen. Il faut absolument les défendre. Nous sommes le pays de Beaumarchais et du droit d'auteur, ne l'oublions pas. C'est un élément de soft power, dont nous sommes le leader mondial. Nous devons porter ce message dans un souci d'équilibre. La question de la contribution des GAFA ou des GAFAN, si j'y ajoute Netflix, est importante. Il faudra aussi retravailler la chronologie des médias, qui est compliquée et peut même favoriser une forme de piratage.

J'ai rencontré l'ensemble des acteurs de l'audiovisuel public, auquel nous sommes très attachés. Vous évoquez des pistes de réflexion qu'il faudra aborder pour financer au mieux ce modèle dont nous pouvons être fiers. Je vous signale à cet égard que France 24 lance sa diffusion en Espagne et en Amérique Latine. Cette chaîne défend le modèle français et favorise la langue française, qui doit aussi être soutenue par un travail sur les traductions.

Des inquiétudes se sont manifestées au Festival d'Avignon. Il est évident qu'elles ne peuvent être levées que par la poursuite d'un dialogue nourri et apaisé. Je rassemblerai les différents intervenants à la faveur des 70 ans des centres dramatiques nationaux.

Un artiste est une source de richesse inattendue. Il peut enrichir notre réflexion, dire notre société. Il n'y a peut-être pas assez d'artistes. J'en viens à l'éducation, puisqu'ils fournissent un énorme travail d'éducation artistique et culturel.

Je ne connais pas encore le rapport Doucet. Mais je le trouverai. Il alimentera notre réflexion. Nous n'allons pas réinventer l'eau chaude mais nous appuyer sur l'existant.

Je reviens un instant sur la question du budget : à plusieurs reprises, le Président de la République a dit qu'il valait parfois mieux investir pour trouver ensuite les bonnes économies. Il faut travailler sur l'impact et la signification et non de manière comptable, en recensant le nombre de spectateurs, par exemple.

Enfin, l'éducation artistique et culturelle doit tenir une place centrale. Sur toutes ces questions, le Gouvernement se veut transparent et cohérent. L'autorisation du retour à la semaine de quatre jours pour les communes est désormais officielle et concernera près d'un tiers des écoles.

Les actions d'éducation artistique et culturelle pourront toujours être menées sur le temps périscolaire, y compris avec la semaine de quatre jours. Mais elles ne sont pas un supplément d'âme ; elles sont constitutives de l'éducation et doivent l'irriguer en permanence, grâce à l'intervention de tous les acteurs culturels sur le terrain, les relations avec les médiathèques, les bibliothèques, le cinéma ou les musées. Les grands établissements nationaux ont développé une politique numérique extrêmement intéressante, des mallettes ont été diffusées. Les CMA que j'ai rencontrées à Avignon sont également intervenues. Nous devons inventer.

Lorsque nous avons proposé « la rentrée en musique », nous ne voulions pas imposer un modèle unique pour tous. L'important est de développer la fraternité, qui sera source d'égalité et de liberté. L'éducation artistique et culturelle est indispensable pour que nos enfants aient l'envie d'être des citoyens responsables, libres et désireux d'agir. Je vais m'y atteler avec Jean-Michel Blanquer, qui partage cette envie. Il faut aussi que les institutions suivent le mouvement. C'est à cette fin que nous avons réuni l'ensemble des DRAC et des recteurs. M. Blanquer a parlé des silos et des blocages et ? lors de chacune de nos réunions de travail, nous enfonçons le clou.

En conclusion, nous avons une volonté forte d'aller de l'avant. Mon enthousiasme est intact en la matière. J'ai essayé d'effectuer un survol de tous les sujets abordés, mais nous répondrons surtout par écrit à vos questions pour n'en oublier aucune. Il y aurait tant à dire sur le cinéma, les intermittents, dont le maintien du modèle représente l'un des engagements forts du Gouvernement. L'enseignement supérieur doit faire l'objet d'une réflexion avec Mme Vidal. Chaque ministre doit éviter de rester dans son coin, car ce gouvernement n'est pas celui des prérogatives. Il doit favoriser les transversalités et la transparence - c'est parfois un peu difficile. Nous sommes tous mobilisés pour que nos concitoyens, partout sur le territoire, aient envie d'avancer.

Mesdames, messieurs les sénateurs, j'apprécie la façon dont vous avez travaillé sur ces sujets. Vos réflexions nourriront nos futurs travaux.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion