Intervention de Marie-Noëlle Lienemann

Réunion du 18 juillet 2017 à 14h20
Sécurité intérieure et lutte contre le terrorisme — Article 3

Photo de Marie-Noëlle LienemannMarie-Noëlle Lienemann :

Quand on veut bâtir le nouveau monde, il faut faire ce qu’on a annoncé que l’on ferait.

En tout cas, je suis d’accord avec ce qu’il disait à cette époque : « Nous ne pouvons pas vivre en permanence dans un régime d’exception. Il faut donc revenir au droit commun tel qu’il a été renforcé par le législateur et agir avec les bons instruments. Nous avons tout l’appareil législatif permettant de répondre dans la durée à la situation qui est la nôtre. »

Mes chers collègues, chacun d’entre nous s’accorde sur la nécessité pour la Nation d’être ferme et de se défendre âprement contre la menace terroriste. La question centrale, c’est l’efficacité au regard des principes. Ce qu’a dit le Président de la République à Versailles est exact : on ne peut pas combattre les ennemis de la liberté en étant soi-même porteur d’un recul des libertés. Cela étant dit, existe-t-il une autre méthode pour être plus efficace ? Il n’est jamais répondu à cette question !

À titre d’exemple, on va assigner non pas à résidence mais dans la commune une personne que l’on suspecte, sans preuve, de vouloir commettre un attentat. Or cette personne peut très bien trucider quelqu’un dans la commune ! De mémoire, le prêtre de Saint-Étienne-du-Rouvray a été tué par quelqu’un qui habitait la commune ou non loin. Les personnes assignées dans leur commune peuvent rencontrer plein de gens et commettre des actes terroristes. On le voit bien, cette méthode n’est donc pas la plus efficace.

En revanche, il faudrait renforcer l’efficacité des services et des personnes sur le terrain, celle des filatures, et instaurer des évaluations pluralistes de la dangerosité potentielle des personnes fichées S. On le voit, certaines de ces personnes basculent alors qu’on n’imaginait pas qu’elles le feraient, et inversement. Un travail d’investigation, de suivi, de renseignement est indispensable, mais on n’en parle jamais, et ce pour une raison simple : cela coûte cher !

Il est plus simple d’imaginer des mécanismes de restriction de liberté, qui, au bout du compte, du fait de leur caractère durable et répétitif, deviennent des mécanismes de privation de liberté. Permettez-moi de vous dire que nous reculons sur les principes. Nous ne gagnons pas en efficacité et nous mettons le doigt dans un engrenage. Vous allez voir qu’à chaque nouvel attentat, on va nous faire le coup d’une énième loi terroriste pour durcir encore plus la législation. Nous n’en serons pas pour autant plus puissants pour faire reculer ce fléau qui nécessite la mobilisation de toute la Nation et de grands moyens.

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