Intervention de David Assouline

Réunion du 18 juillet 2017 à 14h20
Sécurité intérieure et lutte contre le terrorisme — Article 3

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

La discussion sur cet article montre qu’il illustre ce qui est le plus contestable dans cette loi.

La volonté affichée dans ce texte est de nous donner tous les moyens pour faire face au terrorisme et à ses horreurs et pour ne pas baisser la garde.

Depuis deux ans et demi, tous les efforts – jusque dans le premier article de ce texte – tendaient à maintenir l’équilibre entre cette lutte impitoyable, ce refus d’une quelconque naïveté de la démocratie et la préservation des libertés.

Or, avec cet article 3, nous intégrons dans le droit commun, à mon sens, des mesures typiques de l’état d’urgence, c’est-à-dire des mesures exceptionnelles. On m’a répondu en relevant qu’il ne s’agissait plus d’assignation à résidence, mais d’obligation de résider dans le périmètre d’une commune ou, sous bracelet électronique, d’un département.

Monsieur Mercier, j’entends cet argument, mais cela ne change pas la nature de la disposition. Ce qui diffère d’une mesure d’état d’urgence classique, comme une assignation à résidence, c’est la gradation du dispositif, mais pas sa nature. Il s’agit bien de punir en limitant la liberté d’un individu. Au lieu d’être retenu chez lui, il peut se déplacer dans la commune, peut-être dans le département, mais, par nature, une décision aura été prise sans intervention du juge. C’est de cela qu’il s’agit.

Un autre argument a été avancé par le ministre d’État, qui concernait sa région, pour indiquer que la traçabilité était nécessaire. Maintenir quelqu’un dans sa commune permettrait d’éviter des drames. Il a ainsi donné l’exemple de ce terroriste qui a décapité son patron, en arguant que si l’on avait pu le suivre alors qu’il se trouvait dans un autre département et qu’il était repéré comme radicalisé, on aurait évité l’attaque.

Pas du tout ! Lorsqu’il a été repéré du côté de Besançon, si ma mémoire est bonne, il n’était pas considéré comme susceptible de passer à l’acte et donc comme relevant des mesures prévues dans cet article.

Le problème, c’est qu’il n’a pas été tracé, parce que la police n’a pas les moyens aujourd’hui de suivre le parcours, les déplacements et les changements de domicile de l’ensemble de ceux qui font l’objet d’une fiche S.

La question de l’efficacité rejoint donc celle des moyens, dont nous discutons peu. J’espère que nous en débattrons au moment de la loi de finances. Il s’agit de donner les moyens aux services antiterroristes et à la police de faire face à ce nouveau terrorisme complexe, plutôt que de croire que la loi, que les mesures de ce type permettent d’être efficace.

Inefficacité, atteinte aux libertés, cela impose, selon moi, le rejet de cet article.

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