Intervention de Josiane Mathon-Poinat

Réunion du 5 mars 2009 à 9h45
Loi pénitentiaire — Articles additionnels avant l'article 15

Photo de Josiane Mathon-PoinatJosiane Mathon-Poinat :

Notre amendement reprend la règle pénitentiaire européenne 24.1, qui pose le principe du droit reconnu au détenu de maintenir des liens familiaux avec toute autre personne.

Or, chacun sait que les liens avec la famille ou les proches sont particulièrement difficiles à entretenir et souvent rompus dès l’arrivée en détention.

Certes, les détenus disposent déjà d’un droit à recevoir des visites. Mais son application est tout de même laissée à l’appréciation de l’administration pénitentiaire, qui peut le refuser pour des motifs liés au maintien de la sécurité ou au bon ordre de l’administration.

De ce fait, il arrive que des parloirs soient refusés à la dernière minute, sans que la famille ait évidemment pu être prévenue. Il arrive également que des proches, après avoir parcouru des kilomètres, voire des centaines de kilomètres, se voient refuser l’accès au parloir pour quelques minutes de retard.

De surcroît, la fréquence et la durée des séances de parloir sont souvent trop espacées pour la première et trop courte pour la seconde. Ces difficultés sont affrontées par les détenus, mais aussi par les familles. Comme l’a très habilement montré le film « À côté » de Stéphane Mercurio, que je vous conseille de regarder, le maintien des liens avec un conjoint ou un fils détenu constitue souvent un parcours plus qu’ardu.

Le maintien des liens avec les familles dépend également du lieu de l’incarcération. L’administration pénitentiaire ne tient nul compte de la distance entre le détenu, sa famille ou ses connaissances.

Ainsi, des milliers de détenus se retrouvent coupés de toutes relations familiales ou amicales et sont plongés dans un grand isolement affectif, pour ne pas dire dans une véritable misère affective, qui aggrave l’isolement carcéral.

En 1998, une étude publiée par les Cahiers de démographie pénitentiaire et qui, d’ailleurs, n’a pas été rééditée depuis, démontrait que 47 % des personnes incarcérées n’avaient pas été appelées à un seul parloir durant leur détention.

Depuis 2003, l’administration a ouvert des unités de vie familiale dans quelques établissements pour peine, ainsi que des parloirs familiaux dans certaines maisons centrales. Enfin, un petit progrès est accompli !

Toutefois, ces deux aménagements sont loin d’être généralisés et ne concernent que des condamnés à de longues peines.

L’absence de liens familiaux a des répercussions sur l’état de santé physique et mentale des détenus. Alors que le nombre de suicides a explosé depuis janvier dernier, il est urgent de les renforcer. Il doit donc être reconnu formellement dans la loi que les détenus ont droit au maintien de leurs liens avec leur famille ou toute autre personne.

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