C’est une erreur parce que l’investissement local sera désormais encore plus contraint, au détriment de l’emploi local.
Deuxièmement, je parlais à l’instant de la France périphérique, de ces territoires qui sont souvent en désespérance, qui considèrent que Paris n’a d’yeux que pour l’intérieur du périphérique et que, au-delà, la France n’existe pas. Eh bien, ces territoires disposeront de moins de moyens pour assumer la charge des services publics, de l’investissement public qu’ils doivent à leur population.
Troisièmement, j’en viens à une erreur majeure selon moi. Être maire, être élu local dans des territoires difficiles, dans de petites communes, c’est malaisé, vous le savez, madame le garde des sceaux. Ces élus sont tiraillés entre des injonctions parfaitement contradictoires de leurs administrés, qui veulent payer de moins en moins d’impôts, tout en disposant de services publics toujours plus importants. Mais ils sont soumis par le haut à des injonctions contradictoires de l’État, qui veut que les collectivités dépensent moins tout en se défaussant sur elles. Le plus bel exemple de ces transferts est celui des rythmes scolaires : l’État décide, Paris décide, et ce sont les élus locaux, en bas, qui supportent les problèmes.
Il est difficile d’exercer ces charges et souvent les élus sont découragés. Or cette mesure va les décourager encore davantage, cependant que retombe sur leurs épaules tout ce que l’État central ne résout pas. Ce sont eux qui sont en première ligne, qui expriment la République du quotidien, la démocratie de proximité ; ce sont eux qui, vis-à-vis de leurs concitoyens, ont la charge, si j’ose m’exprimer ainsi, de réparer les vivants, comme pourrait le dire Tchekhov.
Voilà ce que nous voulions vous dire, madame la ministre. Supprimer la réserve parlementaire n’ajoutera rien à la confiance que peuvent avoir nos concitoyens envers les élus, mais pourra contribuer à créer un sentiment profond de découragement chez les 500 000 élus locaux, qui sont la trame de la République et grâce auxquels la France, même lorsqu’elle traverse des crises, tient debout.