Tout d'abord, je félicite M. Milon de son élection à la tête de notre commission et souhaite la bienvenue à nos nouveaux collègues.
La loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016 a habilité le Gouvernement - bien souvent contre l'avis de notre commission - à prendre par voie d'ordonnance des mesures relevant du domaine de la loi sur de nombreux sujets : au total, 33 ordonnances ont été publiées au titre de cette loi, et seulement deux d'entre elles ont à ce jour été ratifiées. Les ordonnances entrent en vigueur dès leur publication au Journal officiel ; mais elles doivent faire l'objet du dépôt d'un projet de loi de ratification déposé dans les délais prévus pour ne pas devenir caduques. Tant qu'elles n'ont pas été ratifiées par une loi, elles conservent une valeur réglementaire ; de ce fait, leur régularité peut être contestée devant le juge administratif.
Notre commission est aujourd'hui saisie de trois projets de loi ratifiant quatre ordonnances prises sur le fondement de la loi « santé » de janvier 2016 : l'ordonnance n° 2017-31 du 12 janvier 2017 de mise en cohérence des textes au regard des dispositions de ladite loi ; l'ordonnance n° 2017-48 du 19 janvier 2017 relative à la profession de physicien médical ; l'ordonnance n° 2017-50 du 19 janvier 2017 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé ; enfin, l'ordonnance n° 2017-644 du 27 avril 2017 relative à l'adaptation des dispositions législatives relatives au fonctionnement des ordres des professions de santé.
Ces projets de loi ont été adoptés en première lecture à l'Assemblée nationale le 19 juillet dernier. Seul celui ratifiant l'ordonnance relative aux ordres a été modifié par l'ajout d'articles additionnels.
Le premier projet de loi tend à ratifier une ordonnance procédant à diverses coordinations avec les dispositions de la loi « santé ». Ces modifications, essentiellement techniques et rédactionnelles, n'appellent pas d'observation particulière. Je vous propose une adoption sans modification.
Le deuxième projet de loi tend à ratifier deux ordonnances publiées le même jour mais portant sur des sujets distincts.
La première, relative à la profession de physicien médical, ne soulève pas de difficulté majeure ; elle répond à une attente forte intéressés et fait l'objet d'un consensus parmi les professionnels de santé que j'ai entendus. Le physicien médical intervient au sein d'une équipe pluridisciplinaire en radiothérapie, en médecine nucléaire et en imagerie médicale. Dans la radiothérapie, son rôle est de s'assurer, aux côtés du radiothérapeute, du caractère approprié des modalités du traitement (type de rayons, dosage, répartition par séance) et du bon fonctionnement des équipements. L'exercice de cette profession exige un niveau d'études supérieures de niveau Master et une formation diplômante délivrée par l'Institut national des sciences et techniques nucléaires (INSTN). Il s'agit d'une profession jeune, en forte croissance au cours de la décennie écoulée, les autorités sanitaires ayant augmenté le nombre d'étudiants admis dans cette filière afin de couvrir les besoins importants.
Aujourd'hui, la majorité des 650 physiciens médicaux exercent en cabinet libéral, en milieu hospitalier et dans les centres de lutte contre le cancer (CLCC). Pourtant, le cadre juridique est longtemps resté quasi-exclusivement réglementaire et peu étoffé alors qu'il est fondamental pour la sécurité et la qualité de la prise en charge des patients. Nous avons tous en tête les incidents survenus à Épinal en 2005 ou à Toulouse en 2007 du fait d'une surexposition de patients à des rayonnements ionisants.
La nécessité de renforcer les dispositions relatives aux physiciens médicaux a été soulignée tant par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) que par l'Institut national du cancer (INCa) dont l'un des objectifs, dans le cadre du Plan cancer 2014-2019, est d'aboutir à une meilleure définition des responsabilités et des missions propres au physicien médical au sein d'une équipe pluridisciplinaire.
L'ordonnance intègre par conséquent la profession de la physique médicale dans le code de la santé publique, aux côtés des pharmaciens. Elle consacre une définition de la profession au niveau législatif et prévoit ses conditions d'exercice. Il est en particulier précisé que le physicien médical « s'assure notamment que les équipements, les données et procédés de calcul utilisés pour déterminer et délivrer les doses et les activités des substances radioactives administrées au patient sont appropriés et permettent de concourir à une optimisation de l'exposition aux rayonnements ionisants. » Les mesures d'application de ces dispositions sont renvoyées à un décret en Conseil d'État pris après avis de l'Académie nationale de médecine. Le dispositif se conforme à une directive européenne de 2013 qui impose une reconnaissance, par chaque État membre, des experts en physique médicale. Je vous propose d'approuver la ratification de cette ordonnance qui répond à un besoin et à des exigences réels.
J'en viens maintenant à la plus sensible des questions qui nous sont posées dans le cadre de la ratification de ces ordonnances, celle de l'accès partiel aux professions médicales et paramédicales, également portée par le second projet de loi soumis à notre examen.
Il s'agit d'un sujet certes extrêmement technique, mais qui mérite de faire l'objet d'un examen attentif de notre commission, compte tenu des conséquences importantes qu'il pourrait entraîner pour l'organisation et la cohérence de notre système de santé.
· De quoi s'agit-il ?
Nous ne sommes pas sans savoir qu'il existe déjà, dans l'ensemble des pays de l'Union européenne, une procédure de reconnaissance automatique permettant à certaines professions, dont les exigences minimales de formation ont été harmonisées au niveau communautaire, d'exercer dans un autre pays que celui dans lequel elles ont été formées. La liste des diplômes concernés est fixée par la directive 2005/36/CE : il s'agit notamment des professions de médecin, d'infirmier, de dentiste, de sage-femme ou encore de pharmacien.
Pour certains professionnels ne pouvant bénéficier ni de cette procédure de reconnaissance automatique, ni de la procédure de reconnaissance de droit commun, mais souhaitant effectuer une mobilité dans un autre État membre, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a estimé que l'État d'accueil devait tout de même les autoriser à exercer, en limitant cet exercice aux tâches pour lesquelles ils ont compétence. Une interdiction d'exercer prononcée à l'encontre de professionnels se trouvant dans une telle situation constituerait, selon les instances communautaires, une entrave à la liberté d'établissement.
Cette situation s'explique par le fait que les différents États membres de l'Union européenne ont effectué des choix divers en matière d'organisation de leurs systèmes de santé respectifs, articulés autour de professions dont les contours ne se recoupent pas nécessairement d'un pays à l'autre. Il s'agissait, dans ce cas précis, d'un masseur-balnéothérapeute formé en Allemagne, dont la CJUE a estimé qu'il devait pouvoir bénéficier d'un accès partiel à la profession de kinésithérapeute en Grèce, pour les seuls actes auxquels il avait été formé.
Cette jurisprudence a été traduite dans la directive communautaire du 20 novembre 2013 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles, qui devait être transposée en droit national au plus tard le 18 janvier 2016.
Notre pays se trouve donc déjà en retard sur ses obligations communautaires, et s'expose à ce titre à des procédures de sanction en l'absence de ratification rapide de l'ordonnance relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé.
Voilà donc, résumés à grands traits, le contexte et la genèse de cette mesure, à laquelle - je le dis sans plus de suspense - je suis tout à fait opposée.
J'entends bien les arguments avancés par le Gouvernement à l'appui de ce projet de loi, et je dois d'ailleurs reconnaître que la direction générale de l'organisation des soins (DGOS) du ministère de la santé fait preuve d'une écoute attentive et d'une grande pédagogie à l'appui de la position gouvernementale.
Au terme des auditions que j'ai conduites, je suis d'ailleurs bien évidemment sensible à la menace des sanctions pesant sur la France en cas de non transposition de cette mesure. Je prends également acte des analyses juridiques successivement conduites par le Conseil d'État et par la direction des affaires juridiques (DAJ) du ministère de l'économie, qui ont semble-t-il conclu de manière concordante à l'impossibilité d'exclure a priori les professions de santé du champ de la transposition de la directive de 2013.
Je relève enfin que l'ordonnance qu'il s'agit de ratifier comporte également des mesures allant dans le bon sens, qu'il s'agisse de la mise en place d'une carte professionnelle européenne ou de l'instauration d'un mécanisme d'alerte à l'échelle communautaire, qui assure la bonne information des États membres lorsqu'un professionnel de santé a été frappé d'une interdiction d'exercer, et contribue ainsi à garantir la sécurité des patients.
Surtout, je relève que le principe de l'accès partiel est entouré, dans la directive de 2013 comme dans l'ordonnance, d'importantes garanties ; il ne s'agirait pas d'autoriser du jour au lendemain l'ensemble des professionnels européens qui le souhaitent à venir exercer en France. Trois conditions sont nécessaires pour pouvoir bénéficier d'un accès partiel, parmi lesquelles l'obligation d'une pleine qualification du professionnel pour exercer dans son pays d'origine l'activité pour laquelle il sollicite un accès partiel, ainsi que le caractère « objectivement séparable » de l'activité sollicitée en accès partiel des autres activités relevant de la profession correspondante en France. À titre d'exemple, les activités de pédicurie seraient objectivement séparables de celles de podologie pour la profession de pédicure-podologue, et un accès partiel pourrait sans doute être demandé pour l'une ou l'autre de ces activités.
En outre, contrairement à la procédure de reconnaissance automatique, qui s'applique à des professions, celle de l'accès partiel concerne des professionnels : en d'autres termes, l'autorisation d'exercer serait soumise dans ce cadre à un examen au cas par cas des demandes présentées auprès de l'État d'accueil.
Selon les informations transmises par le Gouvernement, qui travaille actuellement à un projet de décret assurant la mise en oeuvre de ce dispositif, cet examen individuel des demandes nécessiterait notamment un avis de l'ordre dont relèverait la profession concernée. Il sera alors toujours possible de refuser l'exercice en accès partiel pour des raisons d'intérêt général tenant à la protection de la santé publique.
En dépit de ces précisions, il ne me paraît cependant pas souhaitable d'entériner sans plus de discussion ni de délai la mise en place d'une telle procédure d'accès partiel, pour au moins quatre raisons.
Je suis en premier lieu frappée par le degré d'impréparation qui entoure la mise en place d'une évolution aussi fondamentale pour l'exercice professionnel dans notre pays.
À l'heure où il nous est demandé de ratifier cette ordonnance de transposition, et donc d'apporter la touche finale au mouvement de reconnaissance de l'accès partiel depuis son apparition dans la jurisprudence européenne il y a maintenant plusieurs années, on ne dispose d'aucun d'élément d'évaluation concernant non seulement le nombre de professionnels qui seraient susceptibles de formuler une demande en France, mais également sur la nature même des professions qui pourraient être concernées. La ministre a certes indiqué, lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale, qu'une cartographie des différentes professions de santé existant dans les États membre de l'UE avait été demandée aux instances communautaires ; il me semble cependant que cette demande intervient bien tard. Comment, sans même connaître les professions en jeu, le Gouvernement peut-il prétendre préparer un texte d'application garantissant la sécurité de l'ensemble des situations ? Il me semble que l'on avance ici à l'aveugle, et, si vous me pardonnez l'expression, que l'on mettrait la charrue avant les boeufs en autorisant un dispositif dont nous ne connaissons pas même la réelle portée concrète.
En second lieu, cette mesure me semble de nature à désorganiser en profondeur l'organisation actuelle de notre système de santé - qui n'est certes pas parfaite, mais qui a au moins le mérite de garantir généralement la qualité et la sécurité des soins dispensés aux patients.
Il ne s'agit pas ici de faire un procès d'intention aux professionnels formés dans d'autres pays, dont je ne remets pas en cause la compétence : c'est la compatibilité de l'accès partiel avec l'organisation et l'efficacité de notre système de santé que j'interroge ici. La reconnaissance d'un accès partiel ne pourra en effet qu'aboutir à une fragmentation des professions, dont on peine encore à mesurer toutes les conséquences. Je me demande ainsi comment les services hospitaliers pourraient fonctionner avec des équipes réunissant des professionnels n'ayant pas tous le même champ de compétence, ou comment il pourrait être possible de contrôler qu'un professionnel exerçant en accès partiel dans la sphère libérale n'outrepasse pas le champ de ses compétences. Qui plus est, je vous avoue ma perplexité quant à cette évolution à l'heure où le débat semble plutôt porter sur une élévation de la qualification des professionnels médicaux et paramédicaux dans le cadre européen LMD, et où l'enjeu crucial pour l'avenir de notre système de santé paraît plutôt résider dans le développement des coopérations interprofessionnelles et la généralisation d'un fonctionnement en réseau. La création de « sous-professions » -et j'utilise cette expression au sens organique, sans jugement de valeur aucun- ne pourra qu'aller à l'encontre de cette évolution, et plus généralement qu'apporter une complexité supplémentaire à l'organisation de nos professions de santé.
Alors que l'on dénonce depuis longtemps l'existence d'une médecine à deux vitesses dans notre pays, comment ne pas craindre qu'une telle évolution ne débouche sur un système de soins à multiplicité de vitesses ?
D'autant que, et c'est ma troisième observation, on ne peut que redouter que les problèmes de qualité des soins et de sécurité sanitaire qui pourraient être entraînés par la reconnaissance d'un accès partiel ne frappent d'abord les patients les moins informés, qui recouvrent bien souvent les populations les plus fragiles.
Il me semble d'ailleurs que l'on peut raisonnablement craindre, sans céder sur ce point à une trop forte méfiance, que ces professionnels puissent être recrutés par des établissements de santé en pénurie de personnels, ou encore par des collectivités territoriales frappés par la désertification médicale, ce qui ne pourrait qu'aboutir à renforcer les inégalités territoriales.
En quatrième lieu, je me contenterai de recenser rapidement les principales difficultés pratiques pointées par les différents acteurs auditionnés.
On peut ainsi s'interroger sur le surcoût qui pourrait être engendré pour la sécurité sociale si des patients se trouvent contraints de consulter deux professionnels au lieu d'un, compte tenu de la limitation des compétences du premier ; sur l'effet d'aubaine que cette mesure pourrait représenter pour les professionnels et surtout pour les formateurs étrangers, alors que la formation des personnels médicaux et paramédicaux fait déjà l'objet d'un marché très disputé dans certains pays de l'UE ; sur la sécurité réellement garantie au patient, alors que des difficultés importantes sont d'ores et déjà constatées dans le cadre de la procédure de reconnaissance automatique, s'agissant notamment de la compétence linguistique des professionnels ou de leur niveau réel de formation (selon l'ordre des chirurgiens-dentistes, 10 % des nouveaux diplômés de cette spécialité en UE n'ont jamais effectué d'examen clinique et n'ont reçu qu'une simple formation théorique).
Les inquiétudes sur ce dernier point sont d'autant plus fortes que le projet de décret d'application prévoit un simple avis consultatif des ordres des professionnels concernés par l'accès partiel, qui ne pourront donc s'opposer de manière contraignante à une autorisation d'exercice dans ce cadre.
L'ensemble de ces observations me semble largement, sinon unanimement partagé par les acteurs du monde de la santé. C'est bien sûr le cas des professionnels de santé, qui regrettent unanimement l'absence de concertation effectuée par le gouvernement précédent sur cette mesure, et se prononcent d'une seule voix (ce qui est assez rare pour être souligné !) en faveur de son retrait. La ministre elle-même a indiqué devant l'Assemblée nationale connaître, mais aussi comprendre les inquiétudes suscitées par ce texte. Il est d'ailleurs révélateur que les raisons invoquées par le Gouvernement à l'appui de la ratification de cette ordonnance ne résultent que des obligations communautaires, et ne portent pas sur l'intérêt intrinsèque de la procédure d'accès partiel.
Il me paraît dès lors invraisemblable de sacrifier, contre l'avis de tous les acteurs de la santé, l'organisation et la qualité de notre système de santé à des considérations essentiellement juridiques, quand la discussion devrait être avant tout technique et politique. L'Allemagne a quant à elle fait un autre choix de transposition, en n'ouvrant pas l'accès partiel à l'ensemble des professions de santé ; même si, selon le Gouvernement, elle se trouverait dès lors exposée à des sanctions européennes, cela montre qu'une autre solution est toujours possible, et que le Gouvernement devrait avant tout oeuvrer à trouver une solution acceptable par tous au niveau européen.
Pour l'ensemble de ces raisons, je vous propose de ratifier ce projet de loi pour la seule partie de l'ordonnance ne portant pas sur l'accès partiel, et de supprimer en revanche les dispositions mettant en place cette procédure.
Le troisième et dernier projet de loi prévoit enfin de ratifier l'ordonnance du 27 avril 2017 relative au fonctionnement des ordres des professions de santé, prise sur le fondement de l'article 212 de la loi santé de janvier 2016. Notre commission s'était opposée à cette habilitation, introduite au cours des débats, compte tenu du caractère sensible du sujet. Deux ordonnances ont été publiées : l'une le 16 février 2017, modifiant à titre principal la composition des conseils ordinaux, de manière à favoriser la parité ou à l'adapter à la réforme territoriale ; l'autre, publiée deux mois plus tard, est la seule visée par le projet de loi de ratification. L'enchevêtrement de ces deux textes pose pourtant quelques problèmes de lisibilité. Sur le fond, on peut s'interroger sur la décision du Gouvernement de ne pas les présenter ensemble à la ratification. D'après la réponse des services du ministère de la santé, une ratification rapide de ce second texte, qui comporte des mesures sensibles, contestées par les ordres y compris par la voie de contentieux, a été privilégiée pour des raisons de sécurité juridique.
Nombre des mesures contenues dans ce texte traduisent des recommandations formulées par le Conseil d'Etat, l'Igas ou la Cour des comptes en réponse à des pratiques contestables relevées à l'occasion de contrôles ou missions d'inspection ; récemment encore, dans son rapport annuel de février 2017, la Cour a pointé des dysfonctionnements au sein de l'ordre des chirurgiens-dentistes.
De nature et de portée diverses, les dispositions de l'ordonnance sont articulées autour de deux principaux objectifs : améliorer la transparence dans le fonctionnement interne des ordres et mettre leurs instances disciplinaires en conformité avec les exigences d'indépendance et d'impartialité. Il s'agit notamment d'appliquer aux conseils nationaux les principes et procédures des marchés publics, sous réserve d'adaptations à prévoir par décret ; de renforcer l'échelon national, via l'édiction d'un règlement intérieur, la publication d'un rapport d'activité, la certification de comptes combinés au niveau national ou encore la responsabilité du suivi de la politique immobilière ; de renforcer le régime des incompatibilités, entre les fonctions ordinales et syndicales d'une part, entre les fonctions ordinales et disciplinaires d'autre part, et d'encadrer les modes de désignation et d'indemnisation des membres des instances disciplinaires.
Les représentants des sept ordres professionnels, que j'ai reçus lors d'une audition conjointe, ont regretté le manque de concertation, notamment pour prendre en compte les spécificités de chacun. Ils contestent plusieurs dispositions, jugées inadaptées. Les soumettre aux règles des marchés publics entraînera des charges lourdes, ou des incompatibilités jugées restrictives pour trouver des « forces vives ». Plusieurs d'entre eux, dont l'ordre des médecins, ont déposé des recours devant le juge administratif. Je vous proposerai des amendements visant à revenir sur plusieurs dispositions dont l'utilité ou la pertinence posent question.
D'autres mesures plus ciblées sont contestées par la profession, par exemple la possibilité pour un pharmacien d'officine d'être remplacé, en cas d'empêchement, dans la limite de trois ans au lieu des deux ans déjà prévus dans la loi santé de 2016 : les motifs invoqués - des « circonstances exceptionnelles » - sont jugés trop flous. Je vous proposerai de revenir à la situation antérieure.
L'Assemblée nationale a complété le projet de loi par cinq articles, à l'initiative du rapporteur et du Gouvernement. L'article 2 prévoit que l'arrêté ministériel fixant le montant des indemnités versées aux présidents de chambres disciplinaires sera pris « après consultation » des ordres, ce qui apparaît fondé dans la mesure où ces indemnités sont à leur charge. L'article 3 procède à des coordinations rédactionnelles. Mais l'enchevêtrement entre les dispositions introduites par l'ordonnance de février et celle d'avril impose d'améliorer la cohérence.
L'article 3 bis fixe l'âge limite des magistrats administratifs nommés à la présidence de chambres disciplinaires en référence à l'âge en fin de mandat et non à l'âge au moment de la nomination, pour laisser plus de souplesse au Conseil d'État dans les désignations. En revanche, la notion d'âge « révolu » qui s'applique également aux candidats aux élections ordinales doit être clarifiée en raison des divergences d'interprétation qu'elle a suscitée. J'interpellerai la ministre sur ce point.
L'article 4 modifie les conditions d'entrée en vigueur du régime des incompatibilités : celles-ci s'appliqueraient non plus de manière uniforme à compter du 1er janvier 2018, mais au fur et à mesure du renouvellement des instances, pour les membres élus. Ce, pour éviter d'imposer de nouvelles élections en cours de mandat.
Enfin, l'article 5 reporte d'un an, 2020 au lieu de 2019, l'entrée en vigueur de dispositions relatives à la certification des comptes combinés et aux marchés publics, pour laisser le temps aux ordres de s'adapter à ces évolutions lourdes. Je vous proposerai d'aller plus loin en revenant sur le principe même de l'application aux ordres des procédures de marché publics.
Si nombre de mesures contenues dans l'ordonnance vont dans le sens d'une plus grande transparence dans le fonctionnement des instances ordinales, de nature à conforter la confiance des professionnels de santé à leur égard, des ajustements et améliorations me semblent encore nécessaires. Aussi, sous réserve des amendements que je vous présenterai, je vous propose d'adopter également ce projet de loi.