Intervention de François Pillet

Réunion du 17 octobre 2017 à 14h30
Réforme du droit des contrats du régime général et de la preuve des obligations — Article 7, amendement 10

Photo de François PilletFrançois Pillet, rapporteur :

L’amendement n° 10 rectifié, qui vise à rétablir la notion de cause dans le droit des contrats, relève en quelque sorte d’une « séquence nostalgie »… §

Les représentants de certains systèmes juridiques étrangers très inspirés par notre code civil, notamment en Amérique latine ou au Liban, déplorent eux aussi cette suppression.

Toutefois, la doctrine a, majoritairement me semble-t-il, validé cette évolution, que certains qualifieront de modernisation.

Surtout, si la notion de cause a disparu, il me semble que les éléments constitutifs en sont toujours présents. L’article 1128 du code civil prévoit ainsi que le contrat doit avoir un contenu licite et certain pour être valide et, aux termes de l’article 1162 du même code, il ne peut pas déroger à l’ordre public par son but. Le contenu et le but renvoient aux fonctions de la cause, de sorte que la jurisprudence ne se trouvera pas bouleversée. Pour reprendre l’image, peut-être un peu légère, que j’ai utilisée ce matin en commission, si la cause est sortie côté jardin, elle est rentrée côté cour ! Cela ne mérite peut-être pas que l’on modifie l’ordonnance sur ce point.

Je rappelle la ligne générale de la commission : si le Sénat était hostile à la mise en œuvre par ordonnance d’une aussi importante réforme de notre droit civil, nous devons faire preuve de responsabilité maintenant que cette réforme est en vigueur depuis plus d’un an et ne pas en remettre en cause les grandes options, en l’espèce la suppression de la notion de cause. Les praticiens ne le comprendraient pas.

J’espère, madame Mélot, vous avoir au moins rassurée sur le fait que, dans l’ombre, la cause existe encore, et je vous invite en conséquence à retirer l’amendement n° 10 rectifié.

En ce qui concerne l’amendement n° 9 rectifié, on peut comprendre la critique émise par ses auteurs, d’autant que le mécanisme n’a pas vocation à s’appliquer dans les champs déjà couverts par des dispositifs comparables en droit de la consommation et en droit des relations commerciales. L’exemple du droit allemand peut légitimement nourrir cette critique. On peut aussi critiquer ce dispositif au motif que le droit commun des contrats postule l’égalité entre les parties, les déséquilibres structurels étant traités par les droits spéciaux.

Toutefois, là encore, par esprit de responsabilité, la commission n’a pas remis en cause le choix du Gouvernement, qui semble admis – certes sans grand enthousiasme – par les milieux économiques dans le périmètre circonscrit des contrats d’adhésion, dont la commission a revu la définition à l’article 1111.

Je vous suggère de retirer cet amendement, madame Mélot, tout en reconnaissant la réalité et le sérieux de sa motivation.

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