Intervention de Nicole Belloubet

Réunion du 17 octobre 2017 à 14h30
Réforme du droit des contrats du régime général et de la preuve des obligations — Article 7

Nicole Belloubet, garde des sceaux :

Cet amendement a pour objet de revenir à la rédaction initiale de l’article 1166 du code civil, telle qu’issue de l’ordonnance du 10 février 2016. Ce texte permet de fixer le degré de qualité de la prestation attendue dans un contrat lorsqu’aucune clause ne la détermine ni ne permet de la déterminer. L’ordonnance s’inspire d’ailleurs sur ce point des projets européens d’harmonisation du droit, qui renvoient aux attentes légitimes des parties, c’est-à-dire de toutes les parties au contrat.

En effet, la qualité de la prestation doit être appréciée au regard non seulement de ce que le créancier pouvait espérer recevoir, mais également de ce que le débiteur s’attendait de son côté à devoir fournir.

La présentation qui a été faite par le rapport au Président de la République était destinée à illustrer l’intérêt de ce texte. Elle ne doit donc pas être interprétée comme limitative lorsqu’elle ne renvoie qu’à la qualité attendue par le créancier.

Les attentes du créancier ne constituent pas le seul élément d’appréciation de la qualité de la prestation, qui doit être effectivement recherchée dans la commune intention des parties au regard du type de contrat en cause, selon les circonstances de sa conclusion et les usages.

C’est à une mise en balance des attentes respectives des parties qu’invite à procéder le texte. D’ailleurs, en visant « les attentes légitimes des parties », l’article 1166 entendait se démarquer de l’ancien article 1246 du code civil, qui ne renvoyait, lui, qu’à la seule situation du débiteur.

En outre, le recours à la notion d’attentes légitimes des parties permet d’objectiver l’appréciation de la qualité de la prestation en l’absence de stipulations contractuelles sur ce point. Le contenu de cette notion d’attentes légitimes des parties sera notamment déterminé en considération de la nature de la prestation en cause, des usages dans le domaine considéré et de la contrepartie, c’est-à-dire, le plus souvent, du prix.

Il nous semble donc préférable, dans un souci d’équilibre, de ne pas s’attacher aux seules attentes du créancier.

Au bénéfice de ces explications, je vous demanderai, mesdames, messieurs les sénateurs, de bien vouloir rétablir le texte initial de l’ordonnance.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion