Intervention de Gérard Rivière

Commission des affaires sociales — Réunion du 18 octobre 2017 à 9h30
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 — Audition de Mm. Gérard Rivière président du conseil d'administration et renaud villard directeur de la caisse nationale d'assurance vieillesse

Gérard Rivière, président du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse :

Merci, monsieur le président. Je dirai tout d'abord quelques mots sur les comptes de la Cnav, les projections financières, le Fonds de solidarité vieillesse, et sur la question d'un régime universel.

Depuis une douzaine d'années, le régime général était déficitaire. La réforme des retraites, le décret du 12 juillet 2012 et la loi du 20 janvier 2014 ont modifié l'âge légal de départ en retraite, allongé la durée de cotisation pour bénéficier d'une retraite à taux plein et apporté des cotisations nouvelles à la branche. Ces diverses mesures ont permis un retour à l'équilibre. La Cnav était excédentaire de 0,9 milliard d'euros en 2016 et de 1,1 milliard en 2017. Cet excédent aurait pu être supérieur s'il n'avait pas été décidé de retransférer le financement du minimum contributif à la branche vieillesse, lequel avait été transféré au Fonds de solidarité vieillesse en 2010 afin de diminuer le déficit facial de la Cnav. En 2016, la Cnav revenant à l'équilibre, on a fait le mouvement inverse car le Fonds de solidarité vieillesse est toujours lourdement déficitaire !

À partir de 2018, la Cnav sera en très léger déficit de 0,7 milliard d'euros. Le déficit atteindrait 3,06 milliards d'euros en 2020, soit 0,1 point de PIB.

La facilité, c'est de globaliser les comptes de la Cnav et du Fonds de solidarité vieillesse et de dire que le régime général est toujours lourdement déficitaire. Je rappelle que, en 1994, la décision du gouvernement de l'époque de créer un Fonds de solidarité vieillesse avait été unanimement approuvée. Il s'agissait de faire financer par la solidarité nationale toutes les périodes non contributives validées par nos régimes de retraite, essentiellement les périodes de chômage. Sans prise en charge de ces périodes, le niveau des retraites ne serait pas ce qu'il est aujourd'hui, notamment pour les salariés du privé, dont les fins de carrière sont particulièrement difficiles. Les périodes de maladie et les congés de maternité sont désormais financés respectivement par l'assurance maladie et par la Cnaf. Ces financements ont été clarifiés, ce dont tout le monde se réjouit.

Reste le problème du financement du Fonds de solidarité vieillesse. Ce fonds est en déficit de 3,8 milliards d'euros. Il sera à l'équilibre en 2020.

Sous l'effet de l'amélioration projetée de la situation de l'emploi, le FSV deviendrait ainsi excédentaire dans les années 2020. J'ai volontairement limité les projections de déficit de la branche vieillesse à 2020, même si le Conseil d'orientation des retraites a pris la mauvaise habitude de faire des prévisions à 2040, voire à 2070. En effet, d'ici à 2040, il y aura quatre élections présidentielles et autant d'élections législatives. Si toutes ces échéances démocratiques ne permettent pas de prendre les mesures susceptibles de redresser la situation, c'est à désespérer de tout...

En outre, comment projeter l'augmentation du PIB sur 55 ans ? Cela aboutit à un déficit projeté de 64,5 milliards en 2070, et ni vous ni moi ne serons plus là pour le vérifier. Une échéance fixée à 2030 permet de se projeter et de prendre les mesures nécessaires car le déficit de la Cnav représenterait tout de même 14,5 milliards d'euros, soit 0,5 % de PIB.

Des mesures doivent donc être prises car je ne me satisfais pas d'un déficit, fût-il léger. La sécurité sociale n'a en effet pas vocation à engranger des déficits année après année. L'amortissement de la dette sociale est en vue puisque, toutes choses égales par ailleurs, la Cades devrait avoir terminé le remboursement de la dette d'ici à 2024 ou à 2025. Je rappelle que 16,5 milliards d'euros sont consacrés chaque année au remboursement de la dette sociale, au travers principalement de la CSG et de la CRDS. L'année 2024 n'est pas demain mais c'est après-demain. Alors, ces 16,5 milliards d'euros seront disponibles pour financer d'autres besoins, pas forcément au sein de la branche vieillesse d'ailleurs.

Sur la réforme systémique, je n'ai pas plus de renseignements que vous. Comme électeur attentif et citoyen informé, je connais le souhait du candidat Macron, devenu Président de la République : faire en sorte qu'un euro de cotisation procure les mêmes droits à la retraite, quel que soit le statut de celui qui cotise. Dès lors, toutes les pistes d'atterrissage sont possibles. On peut considérer que trente-cinq régimes de base et complémentaires peuvent perdurer et s'organiser dans ce but mais on peut aussi considérer qu'une seule caisse de retraite de base et complémentaire unique et universelle est plus adaptée. Tout est possible.

Jean-Paul Delevoye, le Haut-Commissaire à la réforme des retraites, va entamer des concertations à ce sujet, je le rencontre la semaine prochaine. En modeste connaisseur du système de retraite, je pense que la piste d'atterrissage la plus probable devrait vraisemblablement se trouver au milieu, entre les deux extrêmes ; en tout cas, cela me semble souhaitable car le maintien de régimes de base et complémentaires par répartition me semble adapté au modèle social républicain français.

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