Intervention de Jean Bizet

Commission des affaires européennes — Réunion du 26 octobre 2017 à 9h00
Institutions européennes — Audition de Mme Nathalie Loiseau ministre auprès du ministre de l'europe et des affaires étrangères chargée des affaires européennes sur le conseil européen des 19 et 20 octobre

Photo de Jean BizetJean Bizet, président :

Nous sommes heureux d'accueillir Mme Nathalie Loiseau, ministre en charge des Affaires européennes, pour la première fois depuis le renouvellement de notre commission, le 5 octobre dernier. Cette réunion post-Conseil européen est un rendez-vous auquel nous sommes très attachés. Elle est l'occasion d'un échange sur les principaux résultats de la réunion des chefs d'État et de gouvernement et nous permet, au-delà, d'aborder les différents sujets qui font l'actualité européenne, très riche ces derniers temps et souvent même préoccupante.

Le Brexit reste dans tous les esprits. Nous reconstituerons dans les prochains jours notre groupe de suivi avec la commission des affaires étrangères. Nous appuyons pleinement la position de l'Union européenne : pas de passage à la seconde phase sur les relations futures avant le règlement des trois sujets-clés que constituent, en premier lieu, la situation des citoyens européens installés au Royaume-Uni - les premières réponses ne sont guère satisfaisantes, mais je ne désespère pas que nos amis anglais finissent par considérer la pertinence des décisions de la Cour de justice de l'Union européenne -, en deuxième lieu, le règlement financier - s'il est sans doute prématuré de se focaliser sur un chiffre, peut-être pourrait-on, du moins connaître les grandes lignes présidant à son calcul -, en troisième lieu la question de l'Irlande, qui reste très problématique, la reconstitution possible d'une frontière physique étant de nature à poser un grave problème à nos amis irlandais. On a le sentiment d'un blocage, faute d'avancées de la part de nos interlocuteurs britanniques. Quelles peuvent être les perspectives d'ici au Conseil européen de décembre ? Un passage à la seconde phase peut-il être raisonnablement envisagé à cette date ?

Le président Donald Tusk a par ailleurs présenté un agenda des principaux sujets qu'il a l'intention d'inscrire à l'ordre du jour d'ici à juin 2019 en vue d'un renforcement de l'Union européenne. Quelle appréciation peut-on porter ?

Nous entendrons avec intérêt vos explications sur les échanges relatifs aux négociations commerciales. Au Sénat, nous plaidons pour une Europe moins naïve, qui sache défendre ses intérêts tout en restant ouverte sur le monde. La Commission européenne semble néanmoins très allante pour poursuivre la conclusion de nouveaux accords commerciaux. Les propos du président Juncker sur les négociations avec le Mercosur qui seraient conclues avant la fin de l'année ont, en particulier, retenu notre attention. Notre collègue Simon Sutour nous avait alertés sur les difficultés que cet accord pouvait soulever pour nos produits agricoles sensibles. Notre commission créera également un groupe de travail sur les négociations commerciales avec les commissions des affaires économiques et des affaires étrangères. Nous le soulignons depuis des années : plus on prendra le temps en amont de définir un cahier des charges, plus on en gagnera en aval, en évitant des situations ubuesques telles que celle où a été entraînée la Wallonie, il y a quelques mois.

Le Conseil européen a également fait un point sur les questions migratoires en confirmant son approche globale. Si l'on en croit les conclusions adoptées, les flux migratoires diminueraient de manière sensible et le nombre de décès en mer aurait baissé. Les partenariats avec les pays d'origine, de transit et de départ, constituent un enjeu majeur. Quel bilan peut-on en faire ? Quelles sont les perspectives ? Les conclusions évoquent aussi une « nette intensification des retours ». Quels moyens pourraient être mis en oeuvre à l'échelle européenne, notamment à travers Frontex ? Que peut-on réellement attendre d'une coopération - évoquée dans les conclusions - avec les autorités libyennes et tous les voisins de la Libye ? Il faut, par ailleurs, s'attaquer aux causes profondes des migrations en offrant des perspectives économiques et sociales dans les pays de transit et d'origine. Quelles actions seront conduites par l'Union à cette fin ? Nous avons sur ce sujet mis en place un groupe de travail qu'anime André Reichardt.

L'Europe numérique était aussi à l'ordre du jour de ce Conseil européen, qui a notamment insisté sur l'enjeu de disposer d'une infrastructure et d'un réseau de communication de premier ordre. Comme vous le savez, nos territoires sont particulièrement sensibles à cette question, essentielle pour leur développement. Quelles sont les perspectives ? J'insiste également sur la question de la cybersécurité, défi majeur pour la protection de nos concitoyens et de nos entreprises. Notre commission y est très attentive, comme elle le sera à une approche européenne de l'intelligence artificielle. Sur cette dernière question, nous avons constitué un groupe de travail, qui sera animé par André Gattolin.

Le Conseil européen a par ailleurs salué les progrès notables réalisés par les États membres en vue d'une coopération structurée permanente en matière de défense, s'accompagnant d'une liste commune d'engagements. Il encourage les États membres à mettre au point des mécanismes de financement souples et solides dans le cadre du Fonds européen de défense. Nous entendrons avec intérêt vos éclairages sur ces questions essentielles pour la sécurité européenne. Gisèle Jourda y a beaucoup travaillé au sein de notre commission.

Enfin, les relations avec la Turquie ont été débattues. Les conclusions restent cependant assez elliptiques sur le sujet. Nous sommes préoccupés des mesures prises dans ce pays, qui l'éloignent des valeurs qui fondent l'Union européenne. Jean-Yves Leconte et André Reichardt nous avaient présenté, début juillet, un rapport circonstancié à l'issue d'un déplacement sur place. Que peut-on retirer de ce débat au Conseil européen ? Nous recevrons bientôt le nouvel ambassadeur de Turquie à Paris qui répondra, je l'espère, aux interrogations de certains de nos collègues, contrariés de n'avoir pu se rendre, lors de leur déplacement, dans l'est.

Vous nous direz également ce qu'il faut penser du compromis trouvé au Conseil, lundi dernier, sur le dossier extrêmement sensible des travailleurs détachés. Je dois dire que nous sommes assez satisfaits des orientations prises, qui rejoignent, sur deux points importants, celles que préconisait le Sénat. Nos collègues Fabienne Keller et Didier Marie sont nos rapporteurs sur ce sujet.

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