Intervention de Jean Bizet

Commission des affaires européennes — Réunion du 26 octobre 2017 à 9h00
Institutions européennes — Audition de Mme Nathalie Loiseau ministre auprès du ministre de l'europe et des affaires étrangères chargée des affaires européennes sur le conseil européen des 19 et 20 octobre

Photo de Jean BizetJean Bizet, président :

Merci, madame la ministre. Le Sénat aime les réponses claires et précises. Permettez-moi d'ajouter quelques réflexions qui n'appellent pas de réponse immédiate.

En ce qui concerne les travailleurs détachés, vous nous avez apporté des précisions utiles sur le transport routier, car elles ne nous étaient pas apparues aussi claires.

Sans déflorer le travail de nos collègues sur le numérique et la taxation des GAFA - expression qui me paraît péjorative -, nous regardons avec attention les propositions de l'OCDE, qui sont suivies par la France. Cette approche permettra de sortir par le haut et d'éviter un dumping fiscal du type de celui pratiqué par l'Irlande. Alimenter l'agence européenne pour l'innovation de rupture par une taxe prélevée sur les GAFA me semble extrêmement cohérent.

En ce qui concerne la refondation de l'Union, j'aimerais que vous entendiez le message que va diffuser le Sénat au fil des mois, dans le cadre du groupe de suivi commun entre la commission des affaires étrangères et la commission des affaires européennes. J'ai bien noté que 13 sommets européens y seraient consacrés d'ici juin 2019. Nous serons très attentifs aux propositions contenues dans le « paquet Tusk », qui apportaient beaucoup de réponses aux propositions de M. Cameron. Le Brexit a exprimé une attente, qui est aussi celle d'autres peuples européens, et nous aurions tort de négliger les propositions de M. Tusk. J'espère que nous aurons un dialogue constructif.

J'ai noté que vous aviez souligné la pertinence des coopérations renforcées. Comme vous le savez, nous ne sommes pas étrangers à l'émergence, par le biais des coopérations renforcées, du brevet communautaire et nous pensons que cet outil a été insuffisamment utilisé.

Vous avez rappelé, concernant l'extraterritorialité des lois américaines, que des propositions étaient sur la table dès 1996. Elles méritent d'être toilettées, mais il ne faut pas oublier que nos amis allemands, à l'époque, refusaient ces propositions. Aujourd'hui, Mme Merkel y voit un peu plus clair car l'attitude de M. Trump est plus lisible, mais il ne faut pas être naïf.

Enfin, j'en viens aux accords de libre-échange de troisième génération. Pascal Lamy explique très bien que nous sommes arrivés au terme d'une génération d'accords fondés sur des critères tarifaires et qu'il faut passer à une approche par les préférences collectives, plus difficile à expliquer à l'opinion publique. Les problématiques extratarifaires représentent 15 % d'une transaction et sont donc loin d'être neutres.

Face à la démagogie des opposants aux accords commerciaux, il faut être attentif à ce que l'Europe soit protectrice, mais pas protectionniste. Au Sénat, nous avons laissé prospérer un certain nombre de propositions de résolution, notamment de notre ancien collègue Michel Billout, que nous aurions pu écarter pour des considérations de pure politique. Si le Sénat est très constructif dans ce domaine, c'est parce que nous avons pris le temps de bien définir le cahier des charges de toute négociation commerciale internationale en amont. L'Union européenne serait bien inspirée de rappeler ces fondamentaux, parce qu'il n'y a rien de plus désagréable pour nos partenaires que de tout remettre en cause dans la dernière ligne droite : quand il y a quelque chose à dire, il faut le dire au début, et bien définir le mandat.

Merci encore, madame la ministre, pour le temps que vous avez pris à nous répondre.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion