Intervention de Rachida Dati

Réunion du 5 mars 2009 à 15h00
Loi pénitentiaire — Articles additionnels après l'article 20, amendement 197

Rachida Dati, garde des sceaux :

Sur le fond, le Gouvernement n’est pas opposé à l’amendement n° 197 rectifié bis. Il souhaite cependant attirer votre attention, mesdames, messieurs les sénateurs, sur les conséquences de son éventuelle adoption.

Nous avons connu les plus grandes difficultés pour faire travailler ensemble milieu médical et milieu pénitentiaire, notamment pour assurer la sécurité des personnes détenues. Je prendrai un exemple. La responsabilité de l’affectation d’un détenu dans une cellule incombe au chef d’établissement, qui, pour pouvoir prendre sa décision, doit disposer d’une information dénuée de lien avec l’acte de soins. Pourtant, il est impératif que les médecins donnent leur avis si l’on veut pouvoir éviter qu’un drame ne frappe un détenu ou un membre du personnel pénitentiaire !

Je comprends bien l’esprit de l’amendement n° 197 rectifié bis. Néanmoins, s’il est adopté dans sa rédaction actuelle, demain, les médecins ne seront plus obligés de participer aux commissions pluridisciplinaires que nous avons eu la plus grande difficulté à mettre en place dans les établissements pénitentiaires et qui contribuent à la réinsertion des personnes détenues en donnant un avis au magistrat, notamment au juge de l’application des peines, lorsqu’un aménagement de peine est envisagé ou en éclairant les conseillers d’insertion et de probation ainsi que les associations.

Je crains, eu égard à la rédaction actuelle de l’amendement n° 197 rectifié, que les médecins ne participent plus à rien au motif que leur consultation ne correspond pas à un acte médical ou à un soin. Or ces commissions pluridisciplinaires, mises en place au terme de longues années, ont permis des améliorations majeures des droits des personnes détenues.

Pour ce qui concerne l’amendement n° 206, le Gouvernement s’en remettra à la sagesse du Sénat. Il considère cependant que l’adoption de l’amendement n° 197 rectifié bis marquerait une régression pour les détenus et pour leur réinsertion.

Je le répète, ne serait-ce que pour apprécier le comportement des détenus, le juge de l’application des peines ou la commission d’application des peines ont besoin d’informations, transmises notamment par les médecins, qui ne sont d’ailleurs pas forcément des renseignements de nature médicale.

Après une consultation, les médecins doivent pouvoir attirer l’attention de l’administration pénitentiaire et lui demander de ne pas confier telle ou telle activité à un détenu ou de ne pas autoriser un placement extérieur, ou même une permission de sortie. Or, si cet amendement est adopté dans sa rédaction actuelle, plus aucun médecin ne s’associera au travail du juge ni ne donnera d’information !

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous mets en garde : l’adoption de cet amendement serait une véritable régression pour les personnes détenues. J’émets donc un avis résolument défavorable.

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