C’est toujours un plaisir d’intervenir après notre collègue Cardoux…
J’imagine quand même qu’il n’y a pas, dans cet hémicycle, un seul sénateur ou une seule sénatrice qui pense que l’objet du projet de loi se limite à baisser de 1 % la consommation d’hydrocarbures en 2040 ? Tout le monde a bien compris que, par ce texte, nous cherchons à renforcer la position de la France dans les négociations européennes en vue de diminuer la consommation du charbon en Pologne et en Allemagne. Nous ne pouvons pas demander aux Polonais de rapidement baisser leur consommation de charbon et continuer de notre côté l’exploitation des hydrocarbures, alors que le charbon constitue pour eux un socle économique très important et que les hydrocarbures, pour l’économie française, c’est epsilon !
Nous parlons donc bien, ce me semble, de notre responsabilité collective, en tant que parlementaires : mettre la France en position de force pour participer aux négociations à venir, au moment où la COP23 vient de s’ouvrir, et faire en sorte que l’Europe – je ne parle même pas du reste du monde – puisse réduire ses émissions de gaz à effet de serre dans les prochaines années. Je le répète, nous n’obtiendrons pas des Polonais, des Allemands et d’autres qu’ils fassent un effort considérable si nous n’en faisons pas un petit. Pour l’économie française, en effet, ce que nous voulons représente un tout petit effort.
Je suis très surpris que certains abordent ce texte par le petit bout de la lorgnette. L’enjeu de notre discussion est bien la position de la France dans les négociations internationales. C’est à l’échelle du monde qu’il faut considérer le problème, et non pas par un prisme localo-localiste.
Néanmoins, ce qu’il y a de redoutable, c’est que certains territoires seront affectés par nos décisions, celui dont je suis l’élu en premier. Il y a une raffinerie, la centrale de Cordemais, dont j’étais hier avec le directeur pour discuter des moyens d’écrire l’histoire d’une centrale à charbon qui ne fonctionnera plus au charbon dans cinq ans… Oui, nous sommes affectés !
La défense de nos territoires respectifs est légitime, bien sûr, mais elle peut conduire à condamner Saint-Martin, par exemple. On peut reconstruire totalement cette île une fois après le passage d’un ouragan, mais pas trois. L’ensemble du tourisme des Antilles, secteur qui emploie des dizaines de milliers de personnes, peut disparaître dans les prochaines années ; certains territoires peuvent être submergés ; le modèle économique de notre agriculture peut ne pas survivre…
Nous devons assumer nos responsabilités et placer la France en position de force dans ces négociations internationales vitales. Ce n’est pas le cas, hélas ! avec la rédaction retenue par la commission, qui crée trop de trous dans la raquette.